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EAN : 9782738157232
240 pages
Odile Jacob (05/01/2022)
3.98/5   41 notes
Résumé :
Et si nous nous étions fourvoyés sur ce que fut l’homme de Néandertal ?
Dans un véritable récit de voyage, Ludovic Slimak retrace son parcours de chercheur et nous entraîne dans une étonnante enquête archéologique. Pendant trente ans, il a inlassablement traqué ce qu’il appelle la créature. Créature, comme l’un de ces êtres qu’on apercevrait de loin, dans les brumes, sans vraiment savoir ce qu’il est, sans vraiment savoir le qualifier.
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Critiques, Analyses et Avis (12) Voir plus Ajouter une critique
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De l'Atlantique à l'Altaï. L'extinction

Rappel des faits. Néandertal a vécu pendant plusieurs centaines de milliers d'années en Europe avant de disparaitre brutalement il y environ quarante mille ans, laissant la place à l'homme moderne, Homo Sapiens, venu du Levant. Ce remplacement a fait l'objet de nombreuses hypothèses sans qu'aucune n'ait jamais pu être démontrée.

Nous sommes tous des Sapiens et les dernières avancées de la paléogénétique ont montré que nous avons quelques pourcents de gènes de Neandertal dans notre ADN. Pourtant Néandertal est une autre forme d'humanité, différente de la nôtre, à laquelle Ludovic Slimak a consacré toute sa vie de chercheur.

Dans cet ouvrage passionnant, très abordable et d'une actualité brulante, Ludovic Slimak nous emmène dans toute l'Europe à la rencontre de Neandertal et des très rares traces qu'il y a laissées. Il nous apprend à mieux connaitre qui était Neandertal, bien loin des idées reçues, et nous explique en quoi ses travaux à la grotte Mandrin, en France, dans le couloir rhodanien, ont permis d'éclairer sous un jour nouveau cette autre humanité qu'était Neandertal.

Actualité brulante car la publication par l'auteur d'une récente découverte dans cette grotte (une dent d'enfant Sapiens), publication postérieure à cet ouvrage qui date de janvier 2022, révolutionne la chronologie de l'arrivée de Sapiens en Europe et permet de conforter la thèse de Ludovic Slimak.

Je ne vous en dis pas plus pour ne pas déflorer le sujet et vous renvoie aux podcasts de l'excellente émission de France Culture consacrée à l'archéologie, Carbone 14: celle du 15 janvier 2022 consacré à cet ouvrage et celle du 19 février consacré à cette découverte majeure.
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Qui était vraiment Néandertal ?
Une brute épaisse, un lointain cousin disparu il y a 42 000 ans ?
Un humain, un pré-humain, une bête?
Ludovic Slimak prend d'infinies précaution sur les 35 premières pages pour éviter les idées préconçues, les préjugés et les idées arrêtées. En les lisant, je me suis dis qu'il en faisait un peu trop.
Puis l'exploration démarre et nous voyageons avec lui sur les traces de Néandertal. Un long épisode se passe dans le cercle polaire au nord-est de la Russie. Malheureusement, aucune carte, aucune photo n'illustre ces pages. J'ai éprouvé le besoin de m'aider avec l'Atlas historique de la Terre de Christian Grataloup . Cela m'a permis de comprendre les précautions oratoires de Slimak . Méfions-nous de nos repésentations faciles et immédiates.

Slimak écrit : « Notre lointain Néandertal, humanité éteinte, n'échappe
pas plus que nous-mêmes à ces structures du vivant. Il nous revient, à nous chercheurs, d'en prendre pleine conscience et de ne pas, de ne plus, limiter nos regards à des approches positivistes, mécanistes, statistiques, quantifiées, rationnelles, qui représentent une négation même de la nature humaine. Une déviance scientiste de nos regards sur le monde. Ce positivisme-là, qui n'analyse chez l'humain que ses structures superficielles mathématiquement perceptibles, est une dérive, un échec, un écueil de la pensée. Ce positivisme porte, en lui, une forme de négationnisme et de la nature humaine, et des logiques animales enracinées en l'homme. Il se cache derrière des graphes, des mesures, des tableaux, pour ne pas avoir à regarder de trop près, droit dans les yeux, le fond de la nature humaine. Elle est rigueur, certes. Mais cette rigueur a la pertinence du statisticien comptant le nombre de gouttes d'eau contenues dans l'océan. Elle est prudence, aussi. Mais cette prudence est celle de la pudeur. Cachez cet homme que je ne saurais voir...
En limitant l'homme à sa rationalité quantifiable, en vérité, ce positivisme s'espère science. »

Il a parcouru le monde pendant 30 ans rassemblant le matériel existant, s'interrogeant sans-cesse sur les moyens d'approfondir notre connaissance mais aussi sur la nature de cet être disparu il ya 42 000 ans. Pourquoi a-t-il disparu? Y a-t-il un lien entre sa disparition et l'arrivée de Sapiens? Quel est la véritable nature de Néandertal?

Slimak répond ainsi : « Il existe pourtant bien des cultures néandertaliennes très marquées. Nous autres, Homo sapiens citadensis, sommes absolument normés par notre société. Il suffit simplement de se balader dans la rue quelques instants pour constater que l'expression de la diversité se réduit peu ou prou à la coque que l'on va poser sur son smartphone ou bien à la couleur de voiture que l'on choisit. En réalité, nos sociétés ne tolèrent aucune expression réelle de pluralité. Tout est dans la coque. Si dans notre société occidentale les femmes peuvent porter aujourd'hui les cheveux longs ou courts, un pantalon ou une jupe, se maquiller ou non, la réciproque est bien plus problématique pour un homme. Nous nous inscrivons au sein d'une société surnormative, sclérosante, mais c'est au fond le propre de toutes les sociétés sapiens, actuelles, subactuelles et aussi, de toute évidence, passées. Dans toutes les sociétés de notre espèce, et en tout temps, la différence est très mal perçue et n'est tolérée que dans ses marges les plus superficielles. Il s'agit déjà là, probablement, d'éthologie, d'un phénomène enraciné profondément dans nos gènes et non d'un simple fait culturel. Nous vivons engoncés au sein de représentations très normées. Pour l'habillement, par exemple, nous parlons de codes vestimentaires. Grâce à ces codes sociaux, nous reconnaissons notre groupe et nous dissocions des autres, l'Autre étant par définition suspect de beaucoup de choses, de toutes choses répréhensibles d'ailleurs, puisqu'il n'est pas comme nous. Nous rentrons tout, toujours, de manière contrainte, dans une case, dans une catégorie. Ces codes culturels peuvent avoir été transmis sur plusieurs dizaines de générations par le passé, sans avoir fondamentalement été transgressés. »

Mieux connaître Néandertal, c'est inconstestablement mieux nous connaître.
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Ludovik Slimak est un être rare. Il sait à la fois vulgariser les connaissances archéologiques, développer un discours philosophiques et écrire merveilleusement bien.

Il nous emmène à la rencontre de la Créature Néandertal, cette autre intelligence, cette autre humanité que l'on traque dans L Univers alors qu'elle est s'est éteinte, il y a plusieurs milliers d'années, sur notre propre planète.
Et il l'aime cette créature, bien qu'il lui échappe. Il la poursuit, il la devine à travers ce qu'elle lui a laissé au sein de grottes sombres et de territoires lointains. Il cherche à la comprendre, à la définir, et surtout à connaître les causes de son extinction.

La ferveur de son discours le rend passionnant, la réflexion profonde sur l'humanité Sapiens est vertigineuse.

Grâce à lui, nous comprenons, que étudier Néandertal, c'est revenir aux sources de nombreux domaines scientifiques et remettre en question certaines hypothèses soulevées par ceux-ci : archéologie, histoire, ethnologie, ethologie, climat, philosophie, mais aussi économie, politique, psychologique. de près ou de loin, Néandertal intrigue car il nous interroge sur nous-même. C'est notre miroir déformant, qui n'affirme aucunement que nous sommes les plus beaux. C'est, un nouveau coup apporté au narcissisme de Sapiens : Après l'Héliocentrisme ou la théorie de l'Evolution, Ludovic Slimak nous rappelle que nous ne sommes pas la seule Humanité consciente, créative et intelligente que cette planète ait portée.

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Ce petit ouvrage est d'une grande richesse dans le contenu . Son auteur ,fort d'une expertise reconnue et d'une expérience de trente années , nous fait parcourir tous les étages de ses recherches sur Néandertal : depuis la rude réalité physique de la quête d'indices archéologiques partout dans le monde jusqu'aux réflexions philosophiques que ces découvertes peuvent susciter . Il ne s'agit rien moins que de questionner notre propre nature d'homo sapiens ( si peu apte à accepter la différence) face à Néandertal que nous avons supplanté et peut être éradiqué (ce Grand remplacement de la nuit des temps est au coeur de sa réflexion) . Ce livre , qui est aussi un livre de combat , est passionnant : je ne peux personnellement juger de la validité de ces thèses mais Ludovic Slimak les défend avec talent et verve , avec des touches d'humour issues de la culture populaire , égayant ainsi une matière un tantinet aride.
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S'il vous est possible de prendre le temps de vous installer en vous débarrassant des scories de l'illusion bénéfique de l'urgence vous pourrez finir ce livre en n'étant plus préoccupé par le vernis qu'il y aurait chez d'insignifiants voisins.
C'est ce genre de livre avec une approche douce et lente pour introduire à saisir la dimension d'un trésor caché, un préambule qui annonce une minutie soulevant beaucoup de coins de tapis et communiquant aussi sur toute la poussière qu'avale un archéologue acharné, décharné et ne lâchant pas son os.
J'avoue que j'ai été trop vite à lire, l'impatience ne cadrant pas avec cet hymne au travail à long terme qui permet de relativiser nos priorités et nous invite à ne plus courir sur des tapis roulants pour gagner du temps superflu.
Ici il y a comme une preuve qu'il n'est pas toujours fou de regarder le doigt qui montre la lune parce que souvent un chercheur comme Ludovic SLIMAC sait bien utiliser le temps des fouilles pour éviter que ses pensées sortent bredouilles de l'berdouille.
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Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
En 2006, je me décidai à partir pour la Sibérie occidentale afin d'y présenter mes recherches sur les dernières sociétés néandertaliennes au Congrès archéologique nordique. Cette aventure allait finalement me mener durant quelques années sur les flancs occidentaux et sibériens de l'Oural polaire, sur les traces des tout premiers peuplements boréaux. On y croise aujourd'hui, perdus dans des immensités sauvages, datchas, taïga polaire et anciens goulags où s'est réfugiée, plus qu'ailleurs peut-être, une certaine mélancolie de l'âme slave, enchâssée dans des barres de béton, échouée dans d'immenses vestiges industriels, cadavres rouillés des idéaux soviétiques. Ces carcasses de fer et de pierre ne m'enchantaient guère, mais il y séjourne une profonde humanité, touchante, troublante. Je voulais la vivre, aussi. Et puis... les espaces boréaux m'avaient toujours attiré. Néandertal était-il, ou pas, une créature polaire? N'avait il pas passé l'essentiel de son existence sous les affres de la dernière glaciation? Mais que venaient faire les anciennes sociétés du Paléolithique en zone polaire durant les phases climatiques les plus rigoureuses alors enregistrées sur terre en un million d'années?
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Il existe pourtant bien des cultures néandertaliennes très marquées. Nous autres, Homo sapiens citadensis, sommes absolument normés par notre société. Il suffit simplement de se balader dans la rue quelques instants pour constater que l'expression de la diversité se réduit peu ou prou à la coque que l'on va poser sur son smartphone ou bien à la couleur de voiture que l'on choisit. En réalité, nos sociétés ne tolèrent aucune expression réelle de pluralité. Tout est dans la coque. Si dans notre société occidentale les femmes peuvent porter aujourd'hui les cheveux longs ou courts, un pantalon ou une jupe, se maquiller ou non, la réciproque est bien plus problématique pour un homme. Nous nous inscrivons au sein d'une société surnormative, sclérosante, mais c'est au fond le propre de toutes les sociétés sapiens, actuelles, subactuelles et aussi, de toute évidence, passées. Dans toutes les sociétés de notre espèce, et en tout temps, la différence est très mal perçue et n'est tolérée que dans ses marges les plus superficielles. Il s'agit déjà là, probablement, d'éthologie, d'un phénomène enraciné profondément dans nos gènes et non d'un simple fait culturel. Nous vivons engoncés au sein de représentations très normées. Pour l'habillement, par exemple, nous parlons de codes vestimentaires. Grâce à ces codes sociaux, nous reconnaissons notre groupe et nous dissocions des autres, l'Autre étant par définition suspect de beaucoup de choses, de toutes choses répréhensibles d'ailleurs, puisqu'il n'est pas comme nous. Nous rentrons tout, toujours, de manière contrainte, dans une case, dans une catégorie. Ces codes culturels peuvent avoir été transmis sur plusieurs dizaines de générations par le passé, sans avoir fondamentalement été transgressés.
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Notre lointain Néandertal, humanité éteinte, n'échappe
pas plus que nous-mêmes à ces structures du vivant. Il nous revient, à nous chercheurs, d'en prendre pleine conscience et de ne pas, de ne plus, limiter nos regards à des approches positivistes, mécanistes, statistiques, quantifiées, rationnelles, qui représentent une négation même de la nature humaine. Une déviance scientiste de nos regards sur le monde. Ce positivisme-là, qui n'analyse chez l'humain que ses structures superficielles mathématiquement perceptibles, est une dérive, un échec, un écueil de la pensée. Ce positivisme porte, en lui, une forme de négationnisme et de la nature humaine, et des logiques animales enracinées en l'homme. Il se cache derrière des graphes, des mesures, des tableaux, pour ne pas avoir à regarder de trop près, droit dans les yeux, le fond de la nature humaine. Elle est rigueur, certes. Mais cette rigueur a la pertinence du statisticien comptant le nombre de gouttes d'eau contenues dans l'océan. Elle est prudence, aussi. Mais cette prudence est celle de la pudeur. Cachez cet homme que je ne saurais voir...
En limitant l'homme à sa rationalité quantifiable, en vérité, ce positivisme s'espère science.
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Si ces réalités sociologiques n'étaient pas noires ou blanches, strictement symboliques ou strictement utilitaires, mais présentaient une multitude de réalités subtiles dans lesquelles les activités humaines ne pourraient être classifiées dans des catégories binaires et caricaturales, alors l'ensemble de ce débat sur l'origine improbable d'un symbolisme humain devrait être considéré comme purement superficiel.
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Finalement le cannibalisme ne se limite pas à la préparation d'un steak de grand-mère sauce tartare ,mais nous parle des structures de nos émotions ,de notre rapport à l'amour et de l'acceptation delamort ,sous condition d'une forme de survie en soi.
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