TROP BON, TROP...?
C'est en 1929 que paraîtra - dans un recueil regroupant d'ailleurs deux autres textes relatifs au vieillissement - ce court récit intitulé
La Nouvelle du Bon Vieux et de la Belle Enfant. Son créateur, le romancier italo-souabe
Italo Svevo venait de mourir l'année précédente à l'âge de soixante-cinq ans, tandis que la célébrité littéraire tant attendue plus jeune, rêve blessé et des années repoussé, est enfin là, depuis trois ans à peine.
Dans cette histoire ironiquement exemplaire, on suit le parcours d'un vieil homme bientôt parvenu au seuil de son existence et qui s'amourache d'une jeunesse aux yeux bleus, conductrice de tramway et néanmoins belle enfant de cette histoire. le vieux barbon va s'exhiber avec sa conquête inattendue, la couvrir de cadeaux, se penser revenu à ses vingt ans... Jusqu'à tomber sérieusement malade. Cependant, le temps de la convalescence aura suffit à la jeune fille pour oublier son naïf philanthrope et fricoter avec un homme de son âge. le géronte les croisera bientôt dans la rue et décide de reprendre cette idylle réchauffée mais cette relation ira de mal en pis et, désabusé, bientôt déçu, le vieil homme s'enfoncera à nouveau dans sa solitude mais décidera de faire de cette histoire un grand roman sur l'amour dont le titre sera "Des rapports entre la vieillesse et la jeunesse".
Histoire d'un vieil homme qui refuse d'accepter son âge, pire : qui se ment à lui même et qui, l'espace d'un moment, décide de ne plus rien savoir de ce que sa propre expérience passée a pu l'enrichir (mais la vie n'aura de cesse de le rattraper), cette nouvelle d'une ironie mordante, au style volontairement très distancié est aussi un monde en miroir dans lequel il n'est pas superflu de songer que le vieillard qui se met à rédiger une oeuvre explorant et prenant prétexte de cette mésaventure d'
une vieille ganache qui se refuse à regarder la vérité en face n'est autre que ce triestin d'Italo Sevo.
Comble du désespoir et de l'humour, sans aucun doute que le portrait de ce vieil aigrefin, mais d'une certaine manière, étonnant pied de nez à cette vie de labeur sans joie, tandis que la reconnaissance littéraire s'était refusée à lui, qui aura fini par sourire sur le tard à celui souvent considéré comme l'un des premiers modernes des lettres italiennes du XXème siècle.