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EAN : 9782020621564
Seuil (07/11/2003)
5/5   1 notes
Résumé :

Le XXIe siècle se présente déjà comme le siècle de l'unification du monde sous l'emprise de la globalisation des marchés financiers et économiques. Il pourrait aussi être celui de sa division et de son éclatement si se confirmait l'impuissance des organisations internationales à faire admettre et respecter un droit cosmopolitique. Mais inversement, loin de signer la fin du monde, l'accentuation des conflit... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Pensé comme une structure cohésive, l'Etat est pourtant perçu depuis l'Antiquité comme une entité détentrice de la violence légitime. Il peut exercer celle-ci vers l'extérieur (la guerre) ou vers l'intérieur (les peines pénales, les forces de sécurité). Dans les deux cas, l'objectif de l'Etat était la poursuite de la paix, qu'il mettait en oeuvre par le biais de la politique. Mais le monde a changé. Tandis que les Grecs se protégeaient de la guerre en instaurant l'agora, lieu public d'échange et de résolution des conflits internes, et que les Romains la maîtrisait en la menant au nom du Sénat pour réguler la vie des peuples qu'ils dominaient, l'autorité de notre monde n'est plus ni la délibération grecque, ni la tradition romaine, mais la violence. En effet, nos sociétés modernes, refusant la continuité, sont nées dans la Révolution avec l'autorité que leur donne la violence populaire. C'est encore celle-ci qui donne sa légitimité à l'Etat, lui conférant son propre potentiel explosif au travers de la souveraineté (issue de la volonté générale). Cette souveraineté issue du peuple contient en elle-même une violence faite à chacun : chaque citoyen est à la fois législateur et objet de l'exercice de la loi. Il doit, pour s'obéir à lui-même, se faire violence. La souveraineté est donc obéissance, pouvoir répressif et anti-libertaire. le seul moyen pour la souveraineté d'exercer sa liberté est de se tourner vers l'extérieur, en portant la guerre. de là, notre difficulté à abandonner l'idée de souveraineté : tendus par les efforts que nous faisons pour nous dominer nous-mêmes, nous ressentons comme la perte de notre liberté de ne plus pouvoir revendiquer notre aspiration à dominer les autres. Ajoutons que la naissance de l'Etat, début de tout, force à « faire », à accomplir, à se projeter vers l'avenir, à inventer, créer, se trouver une justification postérieure qui n'existe pas a priori.
Tout se passait ainsi jusqu'en 1914. Depuis, et de manière encore plus éclatante depuis la seconde guerre mondiale, l'Etat ne mène plus la guerre pour obtenir la paix, mais pour la destruction totale de l'ennemi (oppression des civils, bombardements, anéantissement de villes). Cet objectif est d'autant moins inévitable aujourd'hui du fait de l'existence de la bombe atomique. Quel peut être alors le rôle de la politique, si son ressort principal, l'affirmation de la souveraineté par la guerre disparaît ? Peut-elle devenir un outil d'organisation de la paix ? Pour cela, il lui faudrait vaincre un ennemi redoutable, la globalisation, née de notre aspiration illimitée à nous projeter sans fin dans l'avenir et à « faire ». En traduisant en biens de consommation toute chose, elle détruit non seulement notre monde, mais s'impose encore à ce qu'elle ne peut transformer en marchandises : les rapports humains et, partant, la politique. Se pose alors la question de condition des citoyens qui assistent à la fois à la destruction de leur monde physique (exploitation des ressources naturelles) et de leur monde "commun", celui qui fait que nous vivons dans une même communauté et qui tient justement à ces rapports humains et à leur pluralité que détruit la globalisation. le politique serait une possibilité de répondre aux enjeux du monde moderne. La condition serait que nous cessions de penser le politique comme détenant le monopole de la violence par le biais de la souveraineté, mais comme un acteur qui intégrerait le monde dans ses principes d'être, garantirait la pluralité des cultures, et sache devenir un acteur de résolution des conflits (qu'il est illusoire et même non souhaitable de réduire, les conflits étant l'expression de la pluralité). le politique doit donc devenir politique du monde ou cosmo-politique. le centre de son action doit être l'humain et la réalisation d'un monde commun, comme réseau de relations humaines d'où la puissance destructrice de la recherche de profits infinis serait sinon exclue, du moins maîtrisée. La solution serait la création d'espaces publiques, à l'image de l'agora athénienne, qui brise l'illusion de la démocratie de nos institutions et médias a-critiques et non discursifs. On voit là les bouleversements que cette perspective engage : ne plus penser notre naissance au monde sous la forme de la violence (la révolution), abandonner l'idée d'un Etat dominateur (la souveraineté), dompter notre volonté infinie de domination (le capitalisme), nous percevoir nous-mêmes comme citoyen du monde (cosmopolite), localiser la vie politique à l'échelle du citoyen (agora). Si nous n'engageons pas ces démarches, il y a tout lieu de penser que la mécanique de la globalisation nous emporte. Pourtant, si nous savions l'utiliser, peut-être l'Union européenne serait-elle un outil capable de nous mener à retrouver notre monde commun.
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Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
L'idée que le pouvoir est l'exercice d'une domination grâce laquelle s'affirme la souveraineté est tellement commun et semble tellement correspondre à l'expérience quotidienne que nous en faisons, qu'il faut opérer une véritable mutation mentale pour laisser s'exprimer une entente du pouvoir libre de ce préjugé.
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Il est indéniable qu'on peut voir dans l'Union européenne, comme le rappelle Habermas, le premier exemple d'une politique qui tâche d'honorer les exigences d'une légitimité démocratique en s'élevant à hauteur des conditions d'une économie globalisée. L'Union européenne ne change en effet rien aux modalités de la compétitivité économique et épouse le processus d'intégration par le marché (qui lui a donné naissance). Mais elle veut déployer dans le même temps le dispositif institutionnel d'une politique intérieure réglée par le principe de légitimité démocratique et soucieuse de réguler le jeu économique.
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"C'est toujours au nom de la paix qu'est menée la guerre la plus effroyable [...] et l'inhumanité la plus atroce au nom de l'humanité."

Carl Schmitt
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Telle est la fonction de la guerre, d'être une "machine de dispersion" opposée à la "machine d'unification" qu'est l'Etat.
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Le monde (cosmos) est l'horizon de l'agir politique [...] l'action politique a le monde pour condition et pour horizon.
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