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EAN : 9782354800857
360 pages
Editions Amsterdam (16/04/2011)
4/5   3 notes
Résumé :
Chicago, 1965. Le souvenir de la Grande Dépression et de la seconde guerre mondiale n'est pas loin. Celui de la crise de Cuba encore moins. Le Vietnam est un désastre. Le mouvement pour les droits civiques obtient ses plus grandes victoires au prix de luttes acharnées. Chicago, ville gangrénée par la corruption, la mafia et les inégalités sociales, est bouleversée par les plus grands réaménagements urbains de son histoire. Ceci n'est pas un polar, mais le premier li... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Stud Terkels est un journaliste radiophonique, célèbre pour ses histoires orales retraçant la vie et la mémoire de l'Amérique. Je le découvre donc, ici ce soir, dans Division Streets, l'histoire orale de Chicago et de ses habitants. Là un mot t'interpelle d'entrée : « oral » pour un livre. Muni de son enregistreur audio, Stud parcourt les rues de Chicago, à la rencontre des gens, petit peuple ou bourgeois. Il les interroge sur eux, sur ce qu'ils pensent de la ville, de leur pays, du monde et de leurs voisins. Il retranscrit par la suite ces paroles, avec ses mots, pour nous donner ainsi un instantané d'une époque, d'un peuple, d'une ville. C'était Chicago en 1965. Blancs et noirs, retraités et femmes de ménages, chefs d'entreprise et putains.

Et en 1965, à le lire ou les écouter, je perçois cette peur, que je devrais accordée au pluriel, tant elles sont nombreuses. La bombe, le Vietnam, le chômage mais surtout les Noirs. Il y a tant de sujets qui prêtent à débat et qui interrogent, interpellent, effraient. Chacun a ses propres peurs, ses raisons et ses prédispositions. Chacun tente de vivre ou survivre dans cette ville trop cosmopolite, trop changeante. Et chaque quartier a ses humeurs, ses inquiétudes, ses joies et ses peines. Certains retiennent de petits bonheurs, d'autres gardent en mémoire leur injustice, et puis il y a ceux que tout effraie, l'autre, le monde, la folie humaine, l'inconnu.

L'autre fait peur, parce qu'il est noir ou blanc. Surtout parce qu'il est noir et que de fait il est inconnu, pas comme soi. C'est ça qui effraie le plus. Bien sûr dans ce lot isolé de tel quartier, il y a ceux qui comprennent l'autre, ceux qui ont peur de l'autre, ceux qui sont humains, ceux qui sont racistes. Des âmes pures, des âmes moribondes, des âmes effrayées.

Les livres de Stud Terkels ne sont pas des romans, pourtant ils se lisent aussi facilement. Ils sont un formidable témoignage et chaque personne n'hésite pas à parler, sans mesurer ses mots pour parler directement de ses émotions et de son coeur. C'est pour cette raison que Stud s'est interdit d'interroger politiciens, écrivains ou journalistes, trop habitués à manier une langue de bois si peu propice à la vérité d'une société. Et si ce roman parle ouvertement de racisme, nombre d'entre eux ont peur de leur voisin qui n'ont pas la même couleur de peau qu'eux, il offre aussi un formidable défouloir pour ces habitants qui pour une fois – et contrairement aux institutions politiques – se sentent écouter. Stud les écoute, sans juger. D'ailleurs moi aussi, je me passerai bien de jugement prenant juste acte de leur peur.

Qu'en est-il de Chicago de nos jours. Stud étant passé, il ne peut plus revenir sur ces dires, mais qu'il serait intéressant de redécouvrir cette ville en 2016. Aurait-elle changée ? Nul doute que oui, car Chicago bouge, change, se déstructure, comme toutes les grandes villes. Mais les peurs restent. le désespoir aussi. Les notes d'espoir me sembleraient moins nombreuses. Les motifs de peur auraient quelque peu changé mais leur nombre aurait encore plus clivé les habitants de cette ville – ou de tout autre grande ville des Etats-Unis ou d'Europe. le Noir continue de faire peur au blanc. le blanc n'aime toujours pas le Noir et maintenant le moins noir. La bombe ne fait plus peur, mais cette peur a été remplacée par le terrorisme. le Vietnam a été – et sera – remplacée par d'autres guerres. Mais la ville continuera toujours de bouger, d'être détruite pour être reconstruite. Et au milieu de cette ville, de ces quartiers en perpétuelles destruction-construction, il y aura toujours des gens à interroger pour initier de nouvelles genèses orales de l'histoire contemporaine des Etats-Unis d'Amérique.
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C'est un exercice difficile de commenter ce livre. Les interventions de Studs Terkel sont en effet très limitées, le livre se "contentant" de recueillir précisément la parole de nombreux habitants de Chicago en 1965.

Bien sûr, on s'y perd un peu dans les quartiers ou les références américaines des années 1960 (même si les notes de bas de page sont très bien faites). On lit avec peu d'attention certains passages. Mais le résultat est quand même très intéressant parce qu'il permet de confronter des points de vues contradictoires ; l'absence de commentaires nous oblige à construire par nous même des fils conducteurs (le livre est découpé en chapitres thématiques, mais certains chapitres m'ont semblé un peu décousu) et à donner du sens à ce qui interpelle. Je suis vraiment d'accord avec AnneNY quand elle écrit qu'il y a des ressemblances frappantes entre de nombreux propos piochés dans le livre avec ce que l'on pourrait entendre aujourd'hui.

J'ai particulièrement apprécié les passages sur l'automatisation du monde ouvrier, le chapitre sur la jeunesse et le témoignage d'un jeune homme happé par les nazis avant de s'en éloigner, mais je suppose que chacun y trouvera son bonheur...

J'aurais peut-être aimé que les entretiens soient parfois un peu plus long. J'ai souvenir du film le joli mai de Chris Marker (tourné en mai 1962, on est pas si loin) qui prenait vraiment le temps de faire parler certaines personnes (un prêtre-ouvrier incroyable, notamment), ce qui permettait d'aller très loin dans la compréhension de ce que pensaient et vivaient les Parisiens à cette époque. Là, tout va parfois un peu trop vite.

Dernière chose, il faut vraiment souligner que l'on ressent l'attention et la bienveillance de Studs Terkel vis-à-vis de chaque personne interviewée dans chacune des lignes du livre.
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Division Street de Studs Terkel, n'est pas un essai c'est un livre de portraits, un livre de témoignages d'hommes et de femmes tout simplement.
Ce livre est authentique, Studs Terkel ne juge pas, il écoute, il retranscrit un héritage en toute honnêteté.

Nous sommes à Chicago dans les années 60, on pourrait penser que les propos qui y sont évoqués sont un peu vieillots, d'un autre temps : la guerre froide, la bombe, les droits civiques, le Viet Nam…. Mais en lisant ces chroniques nous nous apercevons, que les peurs, les angoisses, les interrogations, les déceptions, les opinions de chacun restent plus ou moins les mêmes. Malgré un contexte « différent » nous pourrions facilement transposer le contenu de ce livre à notre époque.

Que nous soyons en 1960 aux Etats-Unis ou en 2016 en Europe, que nous soyons noirs, blancs, riches, pauvres, faisant partie de la classe moyenne….. Les schémas se répètent invariablement : politique, corruption, justice, guerre, vie quotidienne, religion, pauvreté, urbanisation, gentrification des quartiers, conditions de travail, immigration, préjugés …..

Je ne suis pas d'une nature optimiste, on dit que la folie c'est refaire sans arrêt la même chose en espérant obtenir un résultat différent, alors l'Homme est complétement fou.

On a beau espérer, imaginer un monde meilleur, l'Homme est un Abruti qui ne change pas. Mais malgré tout, dans certains témoignages on peut espérer un certain élan, une certaine confiance dans l'avenir. Même si nous savons aujourd'hui que les choses n'ont pas réellement changé, nous aimons croire en cet espoir un bref instant.

Il faut vraiment lire ce livre. Ces histoires sont émouvantes. Il vous arrivera de ressentir de la colère, de l'empathie, de la compassion, de la résignation .... C'est à vous de piocher.

Merci à Babelio pour ce livre.

Et surtout je suis ravie d'avoir découvert Studs Terkel. Sacré bonhomme !!
Je vais essayer de compléter la collection au fur et à mesure avec :
- Working : Histoires orales du travail aux Etats-Unis
- La Bonne guerre : Histoires orales de la Seconde Guerre Mondiale
- Hard Times : Histoires orales de la Grande Dépression
- Race : Histoires orales d'une obsession américaine

Et petite parenthèse, je vous invite à Poadcaster l'émission Villes-Mondes de France Culture sur Chicago. Je trouve que ça se complète plutôt bien avec la lecture de ce livre.
Lien : http://le-club-des-incorrigi..
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Louis Studs Turkel est un spécialiste de l'histoire orale des Etats-Unis et il est allé à la rencontre de tous les citoyens. Les éditions Amsterdam éditent son recueil d'entretiens qu'il a effectué dans les années 60 à Chicago, sous le titre : "Division Street : Genèse d'une histoire orale des Etats-Unis". Voyageons dans le temps...

Les éditions Amsterdam ont décidé de publier le premier livre de Studs Terkel sortit en 1967, Division Street : Genèse d'une histoire orale des Etats-Unis. Il a écumé les rues de Chicago pour aller à la rencontre des habitants qui font les Amériques. Pendant des heures et des années, il a écouté les gens leur parler de leurs vies, de leur vision sur la crise, la question raciale, la lutte pour l'égalité des noirs, le travail avec le développement de l'automatisation, la guerre du Vietnam, la bombe atomique... Chacun se prête au jeux en toute confiance en lui ouvrant son coeur.

Une lecture agréable à la rencontre d'une multitude de gens très différents avec des idées complémentaires et totalement opposés. Les interviews sont toutes agréables à lire incitant ainsi à les lire les unes après les autres. Ce qui est un peu dommage c'est le niveau de langue qui est identique à toutes les personnes malgré les grandes différences sociales. Je ne vois pas en quoi cela aurait été nuisible d'avoir les vrais mots, les vraies expressions qui donnent plus d'authenticité. Et l'autre petite chose qui est dommage, se sont les fautes de frappes et les fautes d'orthographe dans le livre. le contenu est très intéressant en proposant une immersion dans les Etats-Unis des années 60.

Un beau voyage en Amérique à la rencontre des gens qui font ce pays avec leurs peurs, leurs rêves et leurs espoirs. Quand la sociologie devient une aventure, il serait dommage de passer à côté.
Lien : https://22h05ruedesdames.wor..
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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
Et vous, avez-vous peur de quelque chose ?

Absolument de rien. Et pourtant la société est dangereuse. Les gens aiment se faire du mal. Pourquoi les gens vont aux courses de vitesse d'Indianapolis, deux ou trois centaines de milliers de personnes ? Pour voir des petits gars tourner en rond dans un bolide ? Bon Dieu, non. Ils y vont pour voir les gars se tuer. Si un cerveau humain peut mettre un avion dans le ciel, pourquoi un cerveau humain ne pourrait pas tuer aussi ? Et il le fait, partout dans la rue pour ça. Il y a des tueurs qui rôdent toute la journée, des tantouzes, des voyeurs, et les jeunes... Faut que j'y aille à la batte de base-ball sur ces gars-là, moi, qui suis du 43è Ward, ici, en plein coeur de Chicago. Nous, on ne contamine pas la morale. Ces gars-là, on les chasse.
On ne veut pas d'eux ici. S'ils viennent dans un restaurant où on est, qu'il commence à y avoir une sorte de réunions de pédés, on les fout dehors. On ne les aimes pas. Faut que je protège mes neveux et mes nièces. La loi ne le fait pas. La loi protège ces dilettantes dégénérés.
Si j'étais dictateur, moi, je ferais un génocide de tous ces dégénérés. Je les massacrerais. Regardez-moi ces gars qu'on fait des études. Vous croyez qu'ils savent ce qu'il faut faire ? Vous les mettez dans Lincoln Park et, au bout de trois quarts d'heure, il faut envoyer les boy-scouts pour les chercher. Ils ne savent même pas comment sortir. Comment survivre dans le système capitaliste ? Quoi, vous travaillez pendant vingt ans et, d'un coup, vous perdez votre place ? Qu'est-ce que vous allez faire ? Ma race peut survivre. Dieu nous protège, qu'il y ait le feu, la Bombe, une inondation, on survivra toujours.
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L'homme blanc n'aime pas le Noir et le Noir n'aime pas l'homme blanc. Et il y a plus de haine entre les hommes qu'entre les femmes. Les mâles, par nature, sont des bêtes sauvages. Oui, oui, des bêtes. Vous ne le saviez pas que le mâle était une bête ? Oui, une vraie bête. Il sort et il tue, il détruit, il assassine, il écrase les gens et les enfermes dans le coffre de la voiture, et les y abandonne. Qu'est-ce qu'il ne ferait pas ? Il tuerait sa mère. Il tuerait son enfant.
Ce ne sont pas les femmes qui font les guerres. C'est l'homme, la bête. Mettez-le hors du monde. Je dis : sortez les hommes du monde pendant dix ans et vous verrez la paix et l'amour régner. Il garde le monde et les nations le couteau sous la gorge. Depuis Johnson jusqu'au plus petit grouillot, tout homme n'a envie que d'une seule chose, se battre et se battre encore. Ils ne sont pas contents s'ils ne se battent pas d'une manière ou d'une autre. Et c'est pitié que ce soit eux qui mènent le monde. Si c'était les femmes...
Les femmes peuvent s'entendre entre elles oui, et parler. Les femmes peuvent s'entendre avec tout le monde : la Blanche avec l'homme de couleur et les femmes de couleur avec les Blancs.
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Vous croyez en Dieu ?

Non, vraiment pas. Je suis un fervent agnostique. Qui était Jésus-Christ ? Il était incroyable. Un roi de l'arnaque. Il avait appris l'hypnose en Inde. Mais quand Il a attaqué Israël, on a voulu Le descendre parce qu'Il provoquait des tas d'émeutes et de trucs pas normaux, alors Il a dit qu'Il était le Fils de Dieu. De nos jours, on ne Le tuerait pas. On Lui conseillerait de se faire soigner par des psychiatres, parce que, le pauvre, Il en avait bien besoin. Quand Il a nourri la foule avec ses poissons, Il avait hypnotisé une demi-douzaine de personnes. Ils ont répété l'histoire. Mais qui avait-Il nourri, en fait ? Personne. Qui a-t-Il guéri de la lèpre ? Il avait hypnotisé les gens. Alors, ils se levaient et marchaient. Et Il s'est fait tuer à trente-trois ans. Il ne pouvait pas fermer sa grande gueule.
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Je crois que, lorsque ses enfants sont jeunes, la place d’une femme est à la maison. Mais quand ils sont assez grands, je pense qu’il est idiot qu’une femme tourne en rond et ne fasse rien. Ca la rend malheureuse.
Je connais des femmes qui sont devenues des fanatiques du bridge, d’autres qui sont devenues alcooliques, ou encore qui travaillent pour des associations qui les ennuient. C’est qu’il faut bien qu’elles fassent quelque chose. Il y a des femmes qui jouent au bridge tous les après-midi. Et elles jouent aussi chaque soir. Leur vie entière, leur seul horizon, c’est le bridge. Et je crois que ces mêmes femmes, si elles n’avaient pas leur bridge, elles tâteraient sérieusement de la bouteille. D’ailleurs, je crois que beaucoup de ces soi-disant bridgeuses sont, avant tout, des grosses buveuses.
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Le monde est plein de péchés. Je crois que nous vivons les derniers jours du monde. Je crois pas que ça va être très long parce qu’il y a beaucoup de prophéties de la Bible qui s’accomplissent aujourd’hui. Je ne pense jamais à la Bombe. Parce que si elle vient, on la prendra en pleine poire. Alors à quoi ça sert de s’inquiéter à l’avance ? J’ai un fils en Corée en ce moment. Mais je suis une goutte dans l’océan. Je pense simplement que ça vaut pas le coup de s’inquiéter, vu que je peux rien y faire.
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