Offert par une amie à sa parution en décembre 1991- Librairie Epigramme- rue de la Roquette- Paris
*Gros, gros coup de coeur !
(***..un peu enragée...venant de rédiger une chronique de ce livre, elle a brutalement dispa
ru, avec une coupure brutale de connexion !! Je dois la recomposer une seconde fois..)
Je débute cette chronique avec les mots de l'écrivain concernant ce texte, qui aurait pu ne pas arriver jusqu'à nous; et cela aurait été franchement dommageable !
"Cher lecteur,
Je ne sais en quels termes te présenter ce livre, même après le remaniement qu' il a subi. Écrit d'une seule traite il y a plus de quarante ans, à l'âge où les audaces tiennent lieu d'arguments, en lui j'ai laissé à nu la fantaisie échevelée et la maladresse d'expression dont impunément dispose la jeunesse.Mais je me suis vu tellement embarrassé, lorsqu'à l'âge mur je l'ai relu, que j'ai fait mon possible pour l'oublier et qu'on l'oublie.Aujourd'hui, pourtant, sur ce versant de la vie où l'on regarde avec lucidité et bienveillance les verdeurs du jeune âge, j'ai résolu de le reprendre. Patiemment, je l'ai nettoyé de ses principales scories, j'ai retouché les situations les plus insensées, tenté enfin de le rendre visible.Je l'ai fait pour lui et pour moi.Pour lui,car, malgré tout, il raconte une histoire vraisemblable pour nous Portugais, qui sommes les errants du monde, capables ici et là du meilleur et du pire."
Poursuivant tris et rangements de ma bibliothèque qui ne cesse de s'étendre, je donne, offre et fait voyager mes livres, pour le plaisir, certes , et dans un même temps, la nécessité de gagner un peu d'espace pour les nouveaux arrivés !
Je me désole toutefois que ce roman picaresque de
Torga soit resté, de façon bien inexplicable, aussi longtemps en attente et délaissé, sur mes rayonnages ; d'autant plus que cet écrivain-nouvelliste- diariste- médecin se trouve dans le " peloton de tête " avec
Albert Camus, de mon petit Panthéon personnel !
"
Senhor Ventura, dit aussi l'homme de Penedono ou l' Alentejano"(...) est un mélange de " picaro" et de Don Quichotte, mais à la portugaise, c'est-à-dire dans la migration et l'écartèlement : aventurier en Orient et redresseur de torts à Penedono, sensuel et sentimental, trafiquant et honnête homme, cupide et généreux, solitaire et solidaire (...)" ( ***Introduction)
Senhor Ventura décide de quitter sa terre natale de
l' Alentejo , ainsi que ses parents, gens de la terre, pour aller courir le monde...Ce qu'il va faire sans réserve: de Macao à la Chine, en passant par la Sibérie....Escroc patenté, marchand d'armes en Chine,responsable d'un restaurant avec son meilleur ami et compagnon de fortune, Pereira, fabricant d' héroïne, directeur d' une société de taxis, puis de réseau de machines à sous, etc. Et la liste n'est pas exhaustive.!!...
Notre
Senhor Ventura nous reste, en dépit de ses erreurs, magouilles et escroqueries multiples, sympathique à plus d'un titre: son amitié fidèle pour Pereira, compagnon loyal, trop vite disparu, son amour malheureux pour Tatiana, l'aventurière russe...son adoration pour son fils unique, Sergio, son enracinement mental à sa terre portugaise, en dépit de sa bougeotte incessante, son projet généreux et désintéressé, cette fois, pour ses compatriotes agriculteurs et journaliers, etc.
On s'attache inévitablement à ce personnage complexe et torturé, aventurier, escroc, et homme aussi au grand coeur, n'ayant jamais guéri d'avoir perdu son unique ami, Pereira, cuisinier talentueux, et compagnon bien précieux de bon nombre des premières pérégrinations de notre Homme de Penedono, dit l'Alentejano...
Torga , peu content de ce texte finit par le reprendre et le remanier quarante ans après sa " première bouture", très heureusement , car cette fiction- fable interroge sur l'universelle condition humaine : la quête de sens, la curiosité, la volonté de " dévorer " et de parcourir le monde , la condition de " l'Émigré ", du " Nomade perpétuel ", le goût insatiable de " L' Ailleurs",etc.
Une pépite que ce texte picaresque...où certaines opinions libertaires de
Senhor Ventura doivent être en écho avec celles de l'écrivain dont cet éloge du Déserteur... ...
"C'était avec la même tendresse que depuis vingt ans il dessinait ce substantif où il avait mis tous les rêves de sa jeunesse." Déserteur ", lisait-il à la fin, avec à la bouche le goût d'un péché pour lequel il valait le coup de mourir. "