Cette anthologie du fantastique des campagnes japonaises continue de me séduire par sa force tranquille et son ambiance douce-amère entêtante. Les histoires passent, l'émotion reste.
Avec un tome à la couverture très hivernale, de saison donc pour moi qui le lit en janvier, l'autrice nous invite à plonger dans des histoires très aqueuses cette fois, où l'eau sous toutes ses formes jouera un rôle clé dans les malédictions pesant sur les êtres qu'on rencontre. Avec poésie, elle va nous conter les destins souvent un peu tragique mais toujours fort beau et émouvant dont Ginko est spectateur et parfois soignant. Toujours pas de fil rouge, juste la vie, des rencontres.
Cela devait être un pur bonheur pour les lecteurs japonais de retrouver périodiquement les chapitres de Mushishi lors de leur prépublication tant le format des histoires s'y prête. Nous, à lire par volume, on y perd un peu, alors j'essaie d'étaler au maximum ma lecture en n'enchaînant pas les tomes, mais ce n'est pas pareil. Mushishi ça se savoure une fois de temps en temps, pour prendre plaisir à revenir dans cet univers, à se laisser couvrir de cette ambiance et bercer par les destins tragiques croisés.
Dans ce tome, je me répète, mais c'est 5 chapitres, 5 nouvelles histoires. Pas de fil rouge ou de développement de l'univers cette fois, juste des rencontres au gré du voyage de Ginko et un chapitre le concernant. Il s'agit de croiser avec émotion une petite famille qui vit dans l'abondance grâce au travail incessant du père dans les terres avoisinantes, mais cela est grâce à une terrible malédiction qui m'a serrée le coeur. Il y a également cette enfant, orpheline de mère, trop attachée à sa nourrice qui ne parvient pas à couper le lien et navigue sur des canaux métaphoriques pour la retrouver sans cesse. C'était touchant et mignon. Plus triste, l'histoire de cette femme amenant partout la pluie où qu'elle passe et n'osant s'installer nulle part car ça cause plus de désagrément qu'autre chose, elle le sait, elle l'a vécue. Enfin, assez rude, il y a le mystère autour de cet homme touché différemment des autres villageois par une malédiction de la montagne d'à côté. Il a fait quelque chose de terrible pour mériter cela.
L'autrice joue sur les émotions et varie les histoires, les ambiances, les rencontres. Elle s'offre même une petite pause le temps d'un chapitre où son héros se perd dans le temps et une montagne enneigée. C'est juste beau. C'est simple, sans fioriture. On peut avoir l'impression qu'il ne passe pas grand chose, mais il y a toujours une nouvelle créature, de nouveaux êtres à croiser, de nouveaux sentiments qui s'animent et débordent et c'est juste beau. Les dessins de
Yuki Urushibara sont superbes, oniriques, doux, entêtant. C'est vraiment un gros regret que de ne pas avoir les versions en couleur quand ça devrait être le cas, car on sent la poésie de leur aquarelle. Si seulement…
Emotion et poésie sont encore et toujours au rendez-vous de ces nouvelles rencontres dans un tome très porté sur l'eau. Des histoires tantôt douces, tantôt poignantes, tantôt plus rudes, mais toujours une belle et riche atmosphère qui nous saisit et ne nous lâche plus. Avis aux amateurs de fantastique simple mais onirique. Petites préférences pour l'histoire de la malédiction familiale et de la fille porteuse de pluie. Plus prix de l'audace pour la terrible dernière histoire et sa morale.
Lien :
https://lesblablasdetachan.w..