Ex-fan des sixties
On peut dire de
Baptiste Vignol qu'il est fidèle à ses amours artistiques, nombreuses. Dès ses études, il choisit comme sujet de mémoire « L'avenir de la chanson francophone dans la perspective européenne », ce qui annonce la couleur. Après avoir été le collaborateur de
Pascal Sevran dans La chance aux chansons, il publie avec
Cette chanson que la télé assassine un ouvrage qui démonte le système médiatique et ses relations avec la variété française. Il va ensuite enchaîner des livres sur son sujet favori, la chanson française, associant son nom avec celui de personnalités diverses telles que
Renaud,
Philippe Delerm ou
Gilles Verlant. Ses sujets de prédilections montrent une palette de goûts large, qui passent par Barbara,
Téléphone,
Alain Delon ou
Johnny Hallyday. Avec
Jane Birkin, album par album, il parcourt la discographie de la plus française des Britanniques, racontant la biographie de la chanteuse au travers de ses oeuvres.
Le début
Un matin de la mi-décembre, en 1946, naît à Londres Jane, la fille de la comédienne
Judy Campbell et de David Birkin, officier de la Royal Navy. La première est notamment l'égérie de
Noël Coward au théâtre, le second a effectué de nombreuses missions durant la Seconde guerre mondiale. de leur mariage, qui fut diffusé au cinéma durant les actualités, un fils Andrew était né en 1945, et Jane aura par la suite une petite soeur, Linda. Tandis que l'aîné est envoyé en pension, les deux filles font leurs études primaires dans une école de Kensigton. Judy tourne régulièrement des films de famille, et Andrew fait ses gammes de metteur en scène et de photographe en prenant souvent pour interprète sa soeur. Quand elle a douze ans, Jane est envoyée en internat à sa demande sur l'île de Wight, ce qui ne lui laissera pas un souvenir très heureux. L'ambiance stricte de l'établissement et les moqueries de ses camarades lui pèsent, tandis qu'elle tombe amoureuse d'une de ses camarades.
Analyse
L'angle qu'a choisi
Baptiste Vignol pour
Jane Birkin, album par album est atypique et ne manque pas d'intérêt. Comme son nom l'indique, l'ouvrage évoque le parcours de la chanteuse par l'angle de sa discographie. Au fil du temps, l'auteur détaille la biographie de Birkin mais se concentre plus particulièrement sur les dates clés de sa carrière. Pour établir les faits biographiques, il s'inspire de plusieurs sources, et en particulier les carnets personnels que
Jane Birkin a récemment publiés, Munkey Diaries et Post-scriptum. La vie de l'artiste née en Angleterre a été souvent chroniquée, le couple qu'elle a formé avec
Serge Gainsbourg, puis avec
Jacques Doillon, n'a que peu de secrets désormais, et ce n'est pas ce qui intéresse l'auteur. L'objet de son ouvrage est plutôt de relater les circonstances durant lesquelles les albums de la chanteuse ont été créés, et comment cette part de sa carrière s'imbrique avec son statut d'actrice, de compagne, de mère.
Ainsi chacune des oeuvres musicales de l'artiste a sa place dans
Jane Birkin, album par album. de leur album commun où trône Je t'aime moi non plus à Oh ! Pardon tu dormais…, coécrit avec Étienne Daho, le lecteur suit les étapes de la fabrication de tous les succès de l'interprète. Pour chacun des albums, l'ensemble des chansons est détaillé avec quelques commentaires expliquant la genèse ou l'importance qu'elle a pu avoir. Ainsi dans son premier album solo, di doo dah, le titre qui donne le nom à l'oeuvre est-il inspiré par les complexes que Birkin avait développés à l'adolescence, ce qui n'est une surprise pour personne. On apprend combien pouvait être exigeant
Serge Gainsbourg lors de l'enregistrement de Ex-fan des sixties, ou combien
Jane Birkin avait peur d'évoquer la mémoire de son ancien amour quand Zazie lui a proposé C'est comme ça, dans À la légère. Ce parcours discographique est plaisant, rappelle des souvenirs, et permet de rendre hommage à la carrière de la chanteuse.
Ainsi
Jane Birkin, album par album est-il un petit bonheur renouvelé à chacun des chapitres pour les amateurs de l'interprète de Baby alone in Babylone. Qui a suivi le parcours intime et l'oeuvre de
Jane Birkin n'apprend pas grand-chose dans l'ouvrage, qui pâtit par ailleurs de quelques coquilles maladroites, la faute peut-être à quelques ratés dans la rédaction en chef du livre. Mais qu'importe, on ne peut que saluer la beauté de l'objet en lui-même, où chaque page est émaillée de photos, toutes belles et pertinentes, et qui apportent de la richesse à un très bel ouvrage. On peut le feuilleter ou le lire d'une traite, se rappeler au fil de la lecture des moments où l'on a découvert tel ou tel album, où l'on a assisté à tel ou tel concert. de plus,
Baptiste Vignol ne rentre jamais dans le voyeurisme quand il étoffe ses propos d'anecdotes plus ou moins heureuses de la vie de
Jane Birkin. On sent le travail d'un fan, respectueux et élégant, à l'image de la discrète chanteuse à la carrière pléthorique.