La lecture de nos jours d'une vingtaine d'histoires étranges et singulières écrites au XIXe siècle par un ami de Mallarmé est une aventure... insolite. On y trouve une fraîcheur étonnante accompagnée d'un décalage prémonitoire, le tout recouvert par une fine couche de poussière déposée par un siècle d'oubli. Ainsi, les hommes vont-ils "au gré d'une Raison désespérée, à travers les hasards et les phénomènes, en payant chaque 'découverte' d'un endurcissement plus sourd du coeur".
Précurseur du surréalisme, Villiers aime les situations étonnantes, les cas particuliers, les émotions inattendues. Il prétend, "au train dont vont les explosifs" qu'inévitablement une découverte extraordinaire pourra réaliser les souhaits des anarchistes. Il dénigre souvent le modernisme en utilisant un ton sombre et burlesque. Il pressent la prochaine influence sur l'homme de l'expansion à venir des sciences et techniques.
le style et le vocabulaire
De Villiers me font penser à Huysmans (qui devint un de ses amis) ; ainsi les porphyrogénètes maubénins côtoient ceux qui font trémuler et trémoler le bourgeois et menacent de le faire exploder.
le recueil est savamment préfacé par
Jacques Noiray (né en 1942, professeur émérite à Sorbonne Université) et complété par un dossier présentant des repères biographiques et d'abondantes notes qui éclairent le lecteur sur des expressions dont l'usage a disparu et sur des références qui ne nous sont pas familières. Dans une de ces notes on découvre qu'au XIXe siècle le verbe "exploser" ne se trouvait pas dans les dictionnaires et que l'Académie française ne l'a adopté qu'en 1932.
Ne craignez pas de vous ennuyer au cours de cette lecture : il y a des histoires qui vous feront sourire, d'autre franchement rire et toutes, je l'espère, progresser dans la connaissance de l'humain.