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Pierre Barillet (Autre)
EAN : 9782915543810
282 pages
Editions du 81 (17/06/2022)
4.5/5   2 notes
Résumé :
En 1937, Prison sans barreaux de Léonide Moguy, révèle une jeune actrice de seize ans, blonde, racée, à la forte personnalité. Pendant trois ans, Corinne Luchaire, parfois comparée à Greta Garbo, enchaîne plusieurs films, dont Conflit et Le Dernier Tournant, première adaptation du Facteur sonne toujours deux fois. Atteinte de tuberculose, éloignée de l’écran pendant la Seconde Guerre mondiale, elle mène alors une « drôle de vie » (le titre de son autobiographie) de ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Du Capitole à la Roche Tarpéenne, cet adage s'applique parfaitement à Corinne Luchaire qui, de 1937 à 1950, connut la gloire sous les feux des projecteurs puis l'infâmie et la mort due à la tuberculose à 28 ans.

Caroll Wrona nous relate cette brève existence avec grand talent. Cette biographie est très détaillée, tant au niveau de son personnage que du contexte historique.
Corinne Luchaire, lumineuse et inconséquente, est âgée de 19 ans en juin 1940 au début de l'Occupation. Elle est à la fois attachante et exaspérante pour son manque de prise en compte des réalités de l'Occupation.
Mariée avec un escroc, très courtisée, notamment par Charles Trenet, elle eût une enfance et une jeunesse privilégiée.

Fille de Jean Luchaire, patron de la presse sous l'Occupation. Brillant, humaniste, homme de gauche avant guerre...mais avide de plaisirs, ce fils et petit-fils de célèbres historiens de la fin du XIXème et du début du XXème siècles se fourvoya tragiquement...au nom de la paix. Un puissant courant pacifiste se manifesta en France, à la fin des années trente, ayant pour logique "Plutôt nazi que mort" Il sera fusillé en 1946.
Sa fille Corinne, qui le vénérait, hérita de son goût pour la fête.
Ne dénonçant personne, aidant des Juifs à éviter la déportation, notamment la future actrice Simone Signoret qu'il protégea.
Il faut insister sur ce point. Contrairement à Brasillach, Céline et Rebatet, aucune haine, aucune manifestation d'antisémitisme...dans une France occupée où pleuvaient les dénonciations et les écrits infâmants par leur virulence raciste.
Pour preuve, Jean Luchaire était détesté par le trio infernal des intellectuels collabos : Brasillach, Céline et Rebatet. Rebatet qui allait jusqu'à le qualifier "d'enjuivé".

Oui, Corinne Luchaire a bien mangé, bien vécu sous l'Occupation de 19 à 23 ans dans un pays affamé, transi de froid et violenté par la barbarie nazie...Oui, elle a suivi son père dans la pitoyable fuite des collabos à Sigmaringen à l'été 1944...Oui, son comportement est moralement infâme.
Mais n'y a t il pas différents degrés dans l'abjection ?
Céline dans "Bagatelles pour un massacre", Rebatet dans "Les décombres" 'affichent une haine raciste sans limite et Brasillach applaudissant les meurtres de masse nazis ont atteint des sommets d'ignominie.
Si Brasillach est fusillé en 1945, Rebatet poursuivit sa carrière d'homme de lettres et Céline bénéficie, à notre époque, d'une bienveillance assez surprenante dans les milieux intellectuels...

Même ignominie pour les industriels français qui se sont gavés en travaillant pour l'occupant, pour les notaires français qui ont avalisé les spoliations de biens des déportés (et qui ont pu continuer à exercer pendant des décennies après guerre), pour les sociétés françaises spécialisées dans le transport d'oeuvres d'art qui ont copieusement aidé Hitler, Goering er compagnie dans le pillages des trésors artistiques des musées et collections particulières françaises...

Sans parler des politiciens : Georges Albertini, sous l'Occupation adjoint de Marcel Déat à la direction du Rassemblement National Populaire et qui fut, après-guerre une éminence grise de différents gouvernements jusqu'à celui de Georges Pompidou et des membres du personnel politique de Vichy recyclés après guerre...
Impossible de ne pas évoquer René Bousquet, le "talentueux" et serviable organisateur de la Rafle du Vel d'Hiv qui conduisit des milliers d'hommes, femmes et enfants à la mort. Il vécut paisiblement des décennies après 1945 en occupant un poste important à la Banque d'Indochine. Mais, il fut abattu en 1993 (finalement il y a peut-être une justice parfois...). Notons à son sujet qu'il fut un ami très proche de François Mitterrand avant guerre...comme après guerre.
Souvenons nous que dans les tribunaux de l'Epuration siégeaient dans une grande proportion des magistrats ayant prêté serment à Pétain...

Face à ce catalogue d'ignominies, fallait il vraiment traiter l'inconséquence d'une jeune femme perdue par sa légèreté d'esprit comme un crime ? Condamnée à dix ans d'indignité nationale, elle fut ostracisée. On alla même jusqu'à effacer son nom du générique des films auxquels elle participa...

L'auteure fait précisément et honnêtement le parallèle entre la vie facile des Luchaire sous l'Occupation et ce que vécut la population, et ce sans concession. Mais elle met dans son livre toute sa sensibilité et ne s'égare pas dans des jugements à l'emporte pièce.

Un grand et beau travail de mise en lumière d'un personnage, certes léger, mais jeté dans une période horrible.


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C'est dans le cadre de l'opération Masse Critique non-fiction de Babelio que j'ai eu le plaisir de découvrir cette biographie très intéressante d'une talentueuse actrice fort méprisée et au tragique destin.

Corinne Luchaire, née Rosita Luchaire en 1921, morte à 28 ans de tuberculose seule dans le taxi qui la ramenait chez elle... Elle était la fille aînée de Jean Luchaire, patron de presse collabo sous l'Occupation et éphémère ministre de l'Information de Pétain à Sigmaringen... où il avait emmené sa fille malade. Mais revenons au début...

Cette très jolie jeune fille fait ses débuts au cinéma en 1938. Tout de suite remarquée pour sa beauté, son jeu très inhabituel et moderne, bien loin des jeunes ingénues nunuches à la mode, elle ne fera qu'une petite dizaine de films avant que la guerre ne stoppe sa carrière. Frivole, inconsciente, uniquement préoccupée de cinéma et de théâtre, elle vivra l'Occupation dans un tourbillon de fêtes, d'avant-premières et... d'abondance. Entourée par les amis peu recommandables de son père, ne se préoccupant pas de politique, aveugle aux souffrances des Français, elle se rendra compte trop tard de ce qui attend sa famille. de santé fragile et atteinte de tuberculose, sa vie "parisienne" entouré du gratin de l'époque, de Tino Rossi à Charles Trénet en passant par Arletty ou Giraudoux, cette vie donc lui causera à la Libération un tort considérable, la livrant aux pires rumeurs. Elle qui n'eut aucune activité politique, qui ne tint jamais de propos antisémites, se vit reprocher sa vie mondaine décomplexée en temps de guerre et surtout surtout d'être "fille de".

Fiancée à Charles Trénet (!) puis mariée brièvement à un aristocrate escroc, maîtresse comme Arletty d'un bel officier autrichien de la Wehrmacht (et non pas de hauts dignitaires nazis comme il fut raconté), entre prison à Fresnes et séjours en sanatorium, elle fut condamnée à 10 ans d'indignité nationale. Elle finira sa vie, seule avec sa fillette de 6 ans, dans la misère, juste épaulée par Pierre Barillet (de Barillet et Grédy, les auteurs de théâtre de boulevard) et par le jeune cinéaste Jean-Charles Tachella. Ni sa franchise totale lors des interrogatoires, ni le témoignage de Simone Signoret qu'elle a aidé des juifs à fuir, ne la sauveront. Calomniée, insultée, surveillée, la Garbo française ne survit aujourd'hui que dans les romans du nobélisé Patrick Modiano et les mémoires des cinéphiles avertis.

Une biographie très détaillée et complète qui brosse le portrait d'une inconsciente devenue star à 17 ans et proscrite à 24 ans... Un style de narration manquant parfois un peu de vie mais qui n'empêche pas de s'attacher à cette jeune femme. On a du mal à quitter ce livre sans l'avoir suivie jusqu'au bout de ce chemin parsemé de paillettes, puis chemin de croix. Même la lettre qui l'avertissait que sa peine était réduite à 5 ans ne lui parviendra jamais...

A réserver aux passionnés de cinéma, de cette période de notre Histoire et à ceux qui ne connaissent pas bien le Tout-Paris qui fit bombance de 1940 à 1944 de Fernandel et Mistinguett à Danièle Darrieux en passant par les sinistres Bony et Laffont. de quoi se faire une idée précise de la vie de la "Haute" à cette sombre période.

Une vie ruinée par l'inconséquence et la maladie alors que d'autres qui firent bien pire s'en sont sortis à moindre mal...
Lien : https://mgbooks33.blogspot.com
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