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EAN : 9782373050417
250 pages
Aux forges de Vulcain (04/05/2018)
3.69/5   13 notes
Résumé :
Dans ce recueil de nouvelles, Charles Yu, romancier reconnu, auteur de la série TV WestWorld, montre comment, en passant par des lieux communs de la culture geek, reposer des questions qui hantent l'Amérique : l'obligation de réussir, le sentiment d échec, l'incapacité à dire ce que l'on ressent, le miroir aux alouettes du capitalisme, la difficulté d'être mère.
Empruntant à la fois à Kafka, pour cette impression d'étrange familiarité, et à la culture popula... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (9) Voir plus Ajouter une critique
Un style qui n'est pas fait pour moi.
Un style froid, volontairement désincarné. Quelque-chose qui me dépasse. Pas d'émotion. Pas de sentiment. Des personnages vides, sans âmes, qui évoluent dans des paysages figés. Pas de quoi sauter au plafond.
C'est un catalogue d'historiettes dépassionnées, absurdes, décalées, pointant l'impossibilité absolue pour l'Homme d'atteindre ses rêves. On va toujours le retrouver noyé dans ses propres insuffisances, ses doutes. Dans ce monde du paraître qui est le nôtre, le pauvre trouvera toujours quelqu'un de plus fort, de plus doué qui l'humiliera, l'abaissera un peu plus, lui fera sentir plus fort son échec. Un Homme qui vit dans une solitude abyssale, presque dérangeante.
Allons ! j'ai quand même aimé la première nouvelle qui a donné le titre au livre. Son côté cartoon m'a fait sourire. Un tout petit peu. C'est l'histoire d'un super-héros avec cape et combinaison incapable de voler et de sauver son prochain. le comble pour un super-héros. C'est une sorte de super-héros métro boulot dodo obligé de vivre avec ses ambitions refoulées. Quand enfin il a l'occasion inespérée de combattre les méchants, l'imbécile n'est pas foutu de décrocher la ceinture de sécurité de son bolide. Qui n'a pas été entravé dans ses espoirs fous par les aléas et les petits tracas de la vie quotidienne ?
Dans ce livre, on est en plein dans la culture Geek, dixit le résumé de l'éditeur. Je ne sais pas ce que c'est la culture Geek, moi ! Enfin si, un peu quand même ! mais je n'ai pas trop envie d'approfondir, et encore moins après cette lecture éprouvante.
En résumé, une bien mauvaise pioche.
Un petit merci à Masse Critique et aux éditions « Aux forges de Vulcain » pour ce livre au titre pourtant prometteur.
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Il me semble que ce livre devrait être acheté en plusieurs exemplaires par moi et être offert de façon arbitraire selon un certain algorythme, mais assez souvent ,afin comme de pêcher parmis ceux que je croise les perles rares qui m'en donneraient un son de cloches en écho .
Je m'amuse grâce à Babelio, par les editions « aux forges de Vulcain » (qui croient « en la bienveillance mutuelle des artisans »)à découvrir Charles YU qui a trouvé à me faire réfléchir par paraboles , images m'interessants à me faire me creuser la cervelle ,et à cause de la boullie qui en résulte à m'amener à ce que je recherche encore plus qu'avant à méditer ! Si dans ses univers surréalistes son délire consiste à installer une explication par des termes nouveaux, ré-actualiser des idées anciennes mais devenues parfois illisibles en explorant par exemple comme dans le titre : « Super-héros de troisième division »quelque-chose de l'ordre de la hierarchie, de l'autorité , de l'ethique son style net et concis n'est jamais confus bien que le fond soit ce que je perçois comme un laboratoire nous entrainant dans des délices de versions en language (visions) des inextricables, notions humaines oû sont intriquées la volonté de clarifier par procédures, procédés, codages, et qui elles , peuvent aussi ça et là se muer en ensembles de collisions de sens pour la plus grande joie créative , récréative .
La notion d'éthique est abordée dans la première nouvelle (qui donne son titre au livre qui en compte 11 pour env.160 pages). Je crois que la très ancienne dénonciation d'ascension sociale ou de reconnaissance sociale qui se font au détriment d'autrui prend ici une dimension ubuesque puisque il y a une puérilisation du concept de l'altruisme…, ou par une intention -pure mais colorée- et donc qui ne tient plus debout, au moment même oû elle prend son envol si je peux dire puisque le but est d'acquerir le pouvoir de voler, mais ... .
Je ne sais pas comment exprimer mon admiration pour Charles Yu malgré le caractère totalement écoeurant de la 2eme nouvelle.  « Une sorte de meilleur des mondes »nous angoisse et nous berce en même temps de sa poesie hypnotique ,lêchée, prévisant , prévenant comme une mise à distance dans un moment devant la TV.L'issue m'a agréablement surpris comme enfin :une queue de poisson ! un espoir de raton-laveur de Prévert là oû tout est artificiel.
La 3eme nouvelle est aussi étonnante malgré la torture que je ressens à en extraire un résumé (idem pour la 5eme dans la quelle je me suis engagé au moment oû j'écris ceci). On y entre dans l'envers du décor, dans les coulisses de la psychologie encore une fois par des biais que je trouve novateurs .Le lecteur visite et revisite les apparences et le confort-arbres-qui- cachent-forêts-insondables. L'ego de l'homme « arrivé » cache l'enfant qui ne rattrapera jamais ce en quoi son coeur éperdu d'amour s'incarne en lui .Ce retard sur l'incommensurable c'est une faille et un diamant si intense qu'il en est intolérable et d'autant plus censuré. Ici la richesse du récit qui décrit à merveille parce-que de façon imagée ce que je comprends qu'un schisme est dans la maladie mentale (en réalité :un mot qui indique une souffrance , mais Yu semble libéré du labyrinthe ).
Me voici dans le brouillard le plus total, maintenant que j'ai fini de lire ce recueil de nouvelles, comme quand la nuit efface les rêves ,pensées si bien organisées en incompréhensible cohérence plus vaste. Ai pris des notes ,sachant que ce serait difficile .La confusion y est si proche de moments de clarté ou du moins l'écriture de l'auteur bouillonne tant qu'on a du mal à en douter. Brouillage et décryptage ou bien théories dont, sans des études approfondies on ne saura jamais rien. Je crois que ce déboussollage est le jeu, la farce, le bal masqué, le style littéraire à la fois valorisant et dévalorisant d'un auteur qui semble si bien se moquer de lui-même aussi par ricochet, dans un tel contexte ou la vision qu'il offre semble incohérente, mais je dois le dire : prenante à mon corps défendant. Il y a là une littérature d'un genre que j'appelerais : «témoignage de raisons défaillantes »ou « perception de l'homme face à sa débacle ».Le décallage est une valeure centrale dans ces nouvelles : Il y a comme des grilles de lectures, des analogies, des métaphores, des systèmes qui seraient là pour structurer une narration mais qui au même moment pervertissant tel un virus , un procédure inadaptée . Et l'arrivée ,l'humain en tirerait volontiers une morale , par exemple cet extrait , page 112 : "(...) Mais à quoi bon ? Et s'il était impossible de trouver un sens à sa vie avant sa mort ? La rupture. L'explication. le code d'accès permettant de comprendre l'allégorie inexacte et maladroite de sa condition .(...)"
Il y a une sorte de démysthification qui est à l'oeuvre mais elle fonctionne par démysthification d'elle-même qui en font une mécanique littéraire efficace aux accents de vérité. J'ai beaucoup ri et beaucoup ressenti des vertiges me sentant trop naïf pour pouvoir discriminer entre fantaisie et philosophie ou science exacte comme dans la nouvelle intitulée « 32,05864991% ».Il y est question de comptabilité , d'analyse ,qui en filigrane ,vont monstrueusement complexifier à outrance une histoire « à l'eau de rose ». Qui finie par combler un lecteur qui serait désireux de connaitre le frisson d'intellection destructurant les repères habituels . Dans cette histoire comme dans d'autres j'ai l'impression que le thème de la procrastination est observé sous plusieurs angles.Comme dans « Florence » par exemple, avec son côté désopilant en plus.
Je ne peux pas finir cette critique sans mentionner le courage d'exposer de manières totalement incongrues mais tellement expressives , le thème du rapport mère -fils( lors que l'on est plongé dans les affres du doute et questions métaphysiques qui s'installent pour des questions qui tournent autour de notions de fin de vie ).
Ici AdamPK , s'essayant avec "masse critique" de Babelio à critiquer cette forme à travers laquelle s'exprime Charles Yu : les nouvelles recueillies dans ce livre.Mais me voici d'ores et déjà spectateur impuissant d'un ideal de sur-puissance qui voudrait prétendre tout comprendre afin de ne se pas tromper dans ce job.Celui-ci pardon pour ce blasphème écrit: " carnet de bord du capitaine Keurk, espace-temps.4. Livré à une errance dans ce monde de YuCharles, me suis trompé de paradigme. Monsieur Spohck ne peut rien pour moi et me voici obligé de reconsiderer ma vie en terme d'épisodes d'une suite sérielle (sans suite trop-trop, logique) que nous appelerons Star Trial par exemple,qui se situerait dans un flux continu de format global et non relatif afin de mieux exister pour tenter de comprendre ChYU qui règne en maitre dans sa créativité exprimée sous forme litteraire. Dans ce site oû l'on peut communiquer : Babelio, de façon un peu unilatérale mais pas trop je me démène pour essayer de comprendre qui je suis, question à laquelle je crains de ne pas vraiment savoir trouver la réponse écrite .Le livre pré-mentionné offrirait des pistes spectaculaires mais aussi invraisemblables que moi
".










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Cette année, le lauréat du prix Pulitzer n'est autre que Richard Powers pour son roman L'Arbre-Monde.
Fun fact : ce même Richard Powers désignait en 2006 l'américain d'origine taïwanaise Charles Yu comme l'écrivain de moins de 35 ans le plus prometteur du moment.
En France pourtant, Charles Yu reste (trop) peu connu malgré son rôle de scénariste sur la série Westworld de la chaîne HBO. Heureusement, les courageuses éditions Aux Forges de Vulcain — auxquelles on doit déjà la découverte de Thomas Spok et son Uter Pandragon — ont entrepris de le traduire dans la langue de Molière avec Guide de survie pour le voyageur du temps amateur et, en ce qui nous concerne aujourd'hui, son premier recueil de nouvelles Super-héros de Troisième Division.
Surprise, Charles Yu ne va jamais là où on l'attend.

Super-héros ordinaire
Commençons donc par nous intéresser à la première nouvelle de l'ouvrage qui lui donne également son titre : Super-héros de Troisième Division.
Une nouvelle cruciale puisqu'elle doit agripper le lecteur en 28 pages et mettre en avant les particularités de son auteur afin de donner l'envie au lecteur de poursuivre l'aventure.
Dans Super-héros de Troisième Division, Charles Yu imagine un monde où le super-héros est un fait banal du quotidien et où il existe des écoles pour gravir les échelons du super-héroïsme. Problème cependant, tout le monde ne peut pas être un super-héros car malgré ce que voudrait nous faire croire une certaine déclaration célèbre, les hommes ne naissent pas vraiment égaux.
Humidito peut vous le confirmer. Comme son nom l'indique, ce jeune homme ne peut ni voler ni déplacer les objets à distance ni même lire dans les pensées. Non. Humidito peut au mieux condenser l'humidité ambiante pour rafraîchir ses coéquipiers. Ce qui, franchement, n'est pas d'une grande utilité au quotidien il faut l'avouer.
Cela n'empêche pourtant pas Humidito d'avoir sa carte de Gentil et d'aspirer à entrer en Première Division, le top du top en matière de super-héros. Un rêve inaccessible…ou presque.
Charles Yu, non content de prendre son sujet avec humour, redessine en fait notre propre monde grâce à un décalque super-héroïque. Humidito n'est qu'un monsieur tout le monde qui rêve d'être extraordinaire comme la plupart des êtres humains aspirent à devenir remarquables. Super-héros de Troisième Division utilise ce prétexte pour mélanger presque à part égal humour et tristesse à propos de l'échec d'un homme devant la grandeur de ses rêves. Plus fort encore, il nous parle de réussite sociale et du conditionnement de notre entourage par rapport à cette réussite.
Comment sommes-nous perçus par nos proches lorsque l'on n'a aucun talent pour soi ? C'est un constat sur la médiocrité ordinaire écrit avec tendresse, où tous ces super-héros (à la Hero Corp) qui ne seront jamais en tête d'affiche vendraient leur âmes pour parvenir au sommet.
Voilà une mise en bouche des plus excitantes pour la suite.

Caméléon de la forme explorant les possibles
La suite d'ailleurs confirme toutes les bonnes choses entrevues dans cette première nouvelle. Charles Yu explore les possibilités de ses univers avec une intelligence sidérante en y mêlant humour, tristesse, mélancolie et cynisme.
Dans Plan-épargne Retraite, le lecteur évolue dans un monde étrangement Orwellien où tous les noms semblent devenus des produits ou des slogans, où le narrateur se doit de partir en séjour d'Expériences Authentiques avec option Véritable Mise en Danger pour se libérer du quotidien où l'on rêve de Berline-Cinq-Portes et de Relativement Belle Vie. L'asphyxie règne et plus personne ne semble libre, coincé entre médiocrité et banal, avec une bonne rasade d'humour noir.
Cette vision absurdement réaliste de la vie moderne se retrouve également dans L'Homme qui devint lui-même où, comme son nom l'indique, un homme redevient ce qu'il a toujours été (mais sans s'en apercevoir) dans un délire ouvertement Kafkaïen, ou dans Mes Derniers Jours en tant que Moi avec laquelle Charles Yu redéfinit la cellule familiale à l'aune d'une perpétuelle sitcom à la fois angoissante et émouvante.
Dans cette dernière, l'écrivain utilise la forme de son texte pour donner du poids au fond de son histoire. La narrateur, Moi, doit survivre à l'évolution de sa famille, Ma Mère et Mon Frère, selon un script télévisé où les émotions apparaissent en italique et entre crochets comme si la chose était trop pudique pour être écrit en gras comme elle le mériterait.
Ici, Charles Yu entame également sa réflexion sur la mélancolie et sur le non-événement, mais surtout, sur la difficile relation entre une mère et son fils (un angle qui n'est pas sans rappeler Ken Liu dans La Ménagerie de Papier).
La mère constitue d'ailleurs le sujet central de plusieurs autres textes.
Réalisme explique comment un fils s'avère incapable de s'aligner sur un livre lu par sa mère pour rapporter leur histoire commune, une réflexion qui sera poussée à son paroxysme dans la sublime et poignante Matière autobiographique brute qui ne saurait être exploitée pour créer une fiction où le narrateur (un double à peine voilé de Charles Yu) raconte son immense tristesse devant l'impossibilité de raconter l'histoire la plus importante de sa vie : celle de sa mère. Terriblement beau et intelligent dans sa forme avec son accumulation de fragments textuels comme autant de cailloux au bord du chemin de l'existence, la nouvelle clôt ce recueil avec brio.

Amours mathématiques
Entretemps, Charles Yu a continué ses expérimentations avec la remarquable Problème sur l'étude de soi-même où l'amour d'un mathématicien pour une femme ordinaire nous est présenté sous la forme d'un problème scientifique sans cesse complexifié, ou encore avec 32,05864991 % où l'auteur s'amuse avec la vieille rengaine « L'homme vient de Mars et la femme de Vénus » pour livrer un texte sur l'espoir fané et les blessures enfouies à partir d'une blague archi-connue. Un petit tour de force à la puissance émotionnelle épatante.
L'émotion figure d'ailleurs toujours entre les lignes pour Florence avec cet étrange immortel vivant seul sur une planète et qui attend God…Tina en restant incapable de voir l'amour d'autres personnes ou même de prendre de vraies décisions pour changer son état de mélancolie avancée. Les années glissent sur lui comme des secondes et l'univers s'essouffle sans possibilité(s) de retour. Toujours audacieux, Charles Yu expérimente dans la forme comme dans le fond, mélange styles et genres tout en restant fidèle à son principe fondamental : l'humain.

C'est indéniable, Charles Yu est (et sera) un auteur incontournable. Brisant les barrières de la science-fiction et du fantastique pour s'abreuver aux émotions bruts de ses personnages, l'américain joue les apprenti-sorciers à travers des textes aussi protéiformes que denses qui regorgent d'intelligence et de bonnes idées. Et cela sans jamais oublié la chaleur et l'humain, la mélancolie et l'humour. Incontournable en somme.
Lien : https://justaword.fr/super-h..
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Le recueil de nouvelles de Charles Yu s'ouvre sur "Super-héros de troisième division", un texte qui a gagné le Sherwood Anderson Fiction Award en 2004. Comme début de recueil, on peut difficilement rêver mieux. La nouvelle est caustique, drôle, prêtant à la réflexion sur notre société. Il y est question d'un super-héros loser, qui vient encore de rater son examen d'accession au statut de super-héros, justement. Il faut bien avouer que son super pouvoir est assez idiot et limité. Extraire des litres d'eau à partir de l'atmosphère... cela ne sert pas à grand-chose. Son nom: Humidito... et là aussi, on nage dans le comique et le décalé.

Les nouvelles suivantes sont de moins bonne qualité à mon avis, sauf les deux ou trois dernières. Charles Yu est un orfèvre du style. Dans la dernière nouvelle, il questionne avec beaucoup de talent le processus d'écriture. Il se met dans la peau d'un écrivain voulant écrire sur sa mère, et listant tout ce qu'il ne pourra pas dire ni écrire, en disant sa frustration de lire mieux chez les autres, de devoir détruire ses notes, etc. Au final, il parle de sa mère, bien sûr et dévoile le processus d'écriture. Une autre très bonne nouvelle est basée sur un "peut-être" lâché par une femme invitée à boire un verre. Ce peut-être vaut un "non" pour elle, mais l'homme qui l'invite y voir un "oui". Yu va alors développer les probabilités et les destins parallèles à partir de ce moment, en retraçant l'ensemble des possibles. La nouvelle s'appelle d'ailleurs 32,05864991%. Très chouette.

Plus globalement, Charles Yu va travailler son style (aucune nouvelle n'a la même structure) et y intégrer de la science, du non-sense, des éléments perturbateurs qui ne devraient pas être là... Son écriture est technique, moderne, il approche les grands thèmes de société dont le vivre ensemble, les rapports humains... C'est parfois très efficace, souvent intriguant et toujours déroutant. Il y a une aisance de style chez Charles Yu.
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Être naturel ou être surnaturel, l'essentiel reste d'être

Parler d'un recueil de nouvelles n'est pas chose aisée si on ne veut pas vite sombrer dans le catalogue de mini-chroniques… Il est parfois aussi vain de tenter de trouver un fil conducteur. Heureusement, Charles Yu ne mange pas de ce pain-là et a bel et bien un fil rouge pour relier entre elles la dizaine de nouvelles qui compose ce livre.

Tout au long de ses histoires, Charles Yu crée comme un décalage entre être et paraître pour mieux parler de l'incompatibilité des êtres humains à être en symbiose avec leur propre réalité. Il est souvent question au fil des pages de la notion de temps, de choix, de regrets, d'espoir, de personnalité, de chimère.

La première nouvelle, celle qui donne au livre son titre, parle de super-héros et de super-pouvoirs et se place sur le plan du fantastique mais si vous enlevez ces aspects-là, vous obtiendrez une nouvelle on ne peut plus réaliste qui aborde avec une certaine férocité la médiocrité d'un être, surdoué ou pas, surclassé par ses collègues, dépassé par les événements et prêt à tout pour exister au milieu de ses pairs au risque de ne plus être lui-même.

Courir après une chimère est aussi le destin du personnage de la seconde nouvelle qui, à force de ne pas prendre de risque, à force de tout sécuriser, passe complètement à côté de sa propre vie, de son propre destin.

Mais être soi comporte aussi des risques : tomber dans le culte de sa propre personnalité au point de provoquer un dédoublement de personnalité. Ce dédoublement autorise toutes les folies et notamment celle de se libérer de ses chaînes et des codes de la sphère professionnelle jusqu'à faire de l'anormalité un nouveau référentiel dans lequel la première personnalité s'efface petit à petit au profit de la seconde. Ainsi, le personnage de la troisième nouvelle finit-il par parler à la troisième personne « il » pour évoquer sa première personnalité quand son prénom ne sert plus qu'à évoquer la seconde personnalité.

La rationalisation de la vie sous forme de problèmes de mathématiques auquel procède la quatrième nouvelle est-elle la solution ? Encore faudrait-il pouvoir mathématiser les notions de choix, d'options et des conséquences !

Au-delà de ce catalogue de thématiques auquel je mets ici fin, la forme de certaines nouvelles est très intéressant. Charles Yu joue avec les codes avec un brio indéniable. Dans la cinquième nouvelle, Charles Yu raconte l'histoire d'un acteur de série télé type novela qui finit évincé de la série dont il est le héros. Si Charles Yu joue sur les sentiments, il le fait doublement en mettant les sentiments éprouvés ou joués par ses personnages en italique et entre crochets comme sil s'agissait d'indications scéniques à destination des personnages pour mieux montrer que les sentiments qu'il prête à ses personnages sont joués, ne sont pas naturels.

Dans la neuvième nouvelle, un homme s'interroge sur lui-même mais plutôt que de trouver les réponses en lui-même, c'est sa femme qui lui répond et lui apporte les réponses !

La dernière nouvelle clôt en beauté ce recueil en mettant en avant toute l'ambiguïté du voulu par opposition au voulant, du prononcé face à l'entendu et à l'interprété, de la compréhension et de l'incompréhension… de la relativité du langage. Quand on sait que le langage est ce qui nous définit le mieux et ce qui nous permet d'être à l'aise dans nos relations à autrui, tout est dit.
Lien : https://wp.me/p2X8E2-YJ
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critiques presse (1)
Actualitte
22 juin 2018
Se préoccupe-t-on suffisamment du bonheur des super héros ? Leurs états d’âme, leurs déshérences, leurs doutes… Charles Yu signe Super-héros de troisième division, un recueil de nouvelles qui n’est pas enchanteur. Non, certes : mais si intrigant qu’on ne saurait passer à côté.
Lire la critique sur le site : Actualitte
Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
La lettre est arrivée aujourd'hui, et c'est raté : je ne suis toujours pas un super-héros.
" Cher candidat - ça commence mal - malgré les qualités de votre candidature, bla bla, nous avons le regret de vous informer que bla."
Je passe en revue la liste des admis. La plupart étaient à l'université avec moi. C'est le mélange habituel de gens beaux et forts. Une bonne moitié de pyromanciens. Quelques maitres de la glace. Une demi-douzaine de télépathes. Deux barbares, un métamorphe, l'occasionnel génie des sciences.
Leur seul point commun est que tous sans exception savent voler.
Moi, je ne sais pas voler. D'ailleurs, je ne sais pas faire grand-chose. Pour ma défense, ce n'est pas comme si j'en demandais beaucoup. Je ne tiens pas à être la tête d'affiche. Tout ce dont j'ai besoin, c'est un costume, une cape, une mission de temps en temps, de quoi payer le loyer et les courses. Mais ce ne sera pas pour cette année.
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Mon pouvoir, si on peut appeler ça comme ça, ce dont je doute, est que je suis capable d’extraire jusqu’à sept litres d’eau de l’humidité ambiante pour la renvoyer en jet, en brouillard ou en une boule. C’est pratique en cas de batailles d’eau, je vous l’accorde, mais lorsqu’il s’agit d’empêcher Carnage et Chaos de braquer une banque, c’est moins efficace.
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Les choses vont vite. Les décennies passent sans qu’on s’en aperçoive. La situation peut nous échapper en un rien de temps. Bien plus vite que je ne le croyais. Les erreurs sont définitives. Acheter des choses dont on n’a pas vraiment envie pour se sentir plus proche de ce qu’on ne peut pas s’offrir.
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Seuls deux types de personnes vivent dans la métropole : les super-héros ratés et les vieux messieurs qui vivent dans l’appartement du dessus.
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Toutes les histoires échouent.
Toutes les vraies histoires sont des histoires qui ont échoué à devenir l’histoire idéale.
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Videos de Charles Yu (8) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Charles Yu
Le 24 novembre 2020, Gorian Delpâture, dans le cadre de l'émission Entrez Sans Frapper (RTBF) nous présente CHINATOWN, INTERIEUR" de Charles Yu, traduit par Aurélie Thiria-Meulemans aux éditions Aux forges de Vulcain, et lauréat du National Book Award 2020.
"De l'humour, de l'intelligence, qui méritait bien le National Book Award!"
Pour en savoir plus sur ce livre : https://www.auxforgesdevulcain.fr/collections/fiction/chinatown-interieur/
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