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EAN : SIE27248_9820
(30/11/-1)
3.84/5   64 notes
Résumé :
Les soins de la famille sont-ils l'unique vocation des femmes, la seule occupation qui leur soit permise ? On le croirait à entendre le père d'Alexandra quand il ironise sur la passion qu'elle et sa mère Eléonore ont pour la musique et la lecture. Si Eléonore a renoncé à son ambition de devenir une pianiste de concert, pour courir les leçons de piano dans Rome, n'est-ce pas parce qu'ils ont besoin de cet argent pour vivre ?
Pourtant son mari accepte cet argen... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (11) Voir plus Ajouter une critique
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Je ne m'attendais pas en ouvrant ce livre à y découvrir une véritable pépite de plus de six cents pages.

Alessandra naît dans les années trente à Rome et sa mère regrette déjà qu'elle soit une fille. Son père s'en détournera sur le champ. Élevée par une mère exaltée et passionnée, Alessandra grandira en écoutant les hirondelles, en regardant le bonheur des heures durant à la fenêtre. Elle fera surtout de l'amour vrai son étendard. Sa mère Eléonora souffrira de longues années de la monotonie de son couple. À l'époque, les femmes n'étaient considérées que pour leur utilité: procréer et faire le ménage. Si courtiser laisse entrevoir un peu de romantisme, passé le mariage, le mari se détourne de sa femme. Beaucoup s'en accommodant, Eléonora en pâtira longtemps espérant que sa fille Alessandra s'endurcisse et rentre dans le moule d'une vie sans éclat.

Véritable fresque intime au coeur de la condition féminine en Italie, à l'aube du fascisme, ce livre se lit avec douceur, concentration et moult respect. Ce n'est pas un livre qu'on ouvre pour lire dix pages entre deux occupations. Il faut lui accorder du temps afin de capter toute l'essence puissante qui émane tant de l'histoire que de cette atmosphère si feutrée aux contours magnétiques.

On accompagne Alessandra dans sa résistance, dans sa rébellion, dans cette farouche obstination d'être aimée comme elle l'a toujours rêvé, en lisant Shakespeare ou en écoutant sa mère au piano.

Si aujourd'hui les hommes sont plus enclins à s'amouracher d'une femme libérée et exaltée, si aujourd'hui la passion amoureuse attire davantage les foules, début du 20eme siècle, une femme exaltée était considérée comme folle, détraquée, volage. Il est bon de se rappeler que la condition féminine a bien évolué.

Pour conclure, je reprends cette critique très juste de le phare Dimanche :
« C'est la plainte déchirante de la condition féminine. Qu'on ajoute la grâce et la nuance, la justesse et la discrétion, l'exceptionnelle et souple densité du récit : Elles est un très grand livre. »
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Ce roman est sorti en 1949 et a été publié au Seuil en 56.
On ne peut que se réjouir de l'heureuse initiative de Gallimard d'avoir réédité pour la France "Elles" car nous avons ici entre les mains, un grand roman sur l' Amour, sur les femmes, sur le rapport entre les femmes et les hommes mais aussi sur la lutte contre le fascisme et la recherche de la liberté.
C'est un livre d'une grande richesse écrit avec une plume moderne, féministe et intelligente.
Résumer plus de 600 pages m'est tout simplement impossible mais je peux dire sans risque que c'est un roman passionnant mêlant la petite histoire dans la grande avec force et énormément d'émotions.

Je terminerai sur un passage de la préface écrite par l'autrice elle-même en 1994
" Ce livre est aussi le résultat d'une prise de conscience autour de l'enthousiasme qui m'avait naïvement guidée dans ce combat pour la liberté et de la certitude de pouvoir vivre l'amour comme une aventure sans limites et sans ambiguïtés."
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Paru pour la première fois en 1949 en Italie puis en 1956 pour la traduction, ce livre semble connaître un regain d'intérêt, aussi bien en Italie qu'en France, avec cette nouvelle parution chez Gallimard l'an dernier.

Une jeune femme, Alessandra, rédige le récit de sa vie, nous n'apprendrons qu'à la toute fin de roman dans quelles circonstances dramatiques elle le fait. Elle nous raconte d'abord son enfance, marquée par la relation très forte, presque fusionnelle, avec sa mère. Une mère qui ne s'épanouit pas dans sa relation conjugale, elle ne semble pas avoir grand-chose en commun avec son mari. Elle a renoncé à une carrière de pianiste, et s'épuise à donner des leçons de piano, pour soutenir les finances familiales, tout en gérant le quotidien. Mais un jour, dans une famille où elle intervient, elle fait la rencontre d'un homme, dont elle tombe amoureuse. Elle ne pourra vivre cet amour, et sera détruite. Alessandra, après un séjour à la campagne, dans la famille paternelle, lui proposant un autre possible, va tenter de reprendre ses études, et va faire la rencontre d'un professeur de philosophie anti-fasciste, qu'elle va épouser. Ils traverseront ensemble la fin de la deuxième guerre, mais malgré tout l'amour qu'Alessandra éprouve pour Francesco, elle ne trouvera pas son compte dans cette relation.

L'auteure, dans une préface écrite postérieurement, insiste sur l'importance de l'amour pour les femmes, elle précise que son livre s'oppose à l'idée que l'amour est une illusion. Pourtant, c'est le sentiment que me laisse le roman. L'homme qu'aime Alessandra, qui est un homme avec énormément de qualités et d'ouverture d'esprit, ne comprend tout simplement pas ce qu'elle attend de lui et finalement n'accorde aucune importance à ses attentes. Elle devrait se plier à ce que lui attend d'elle, et qui lui paraît tout à fait légitime. L'auteure met parfaitement en évidence la condition subalterne que la société assigne aux femmes, et cela d'une manière insidieuse. Francesco ne considère jamais Alessandra comme une véritable personne, avec qui il pourrait partager sa vie, dans un vrai échange, elle doit se contenter d'une place très secondaire, chacun vivant dans une sphère bien spécifique, avec des frontières bien délimitées. Alessandra, avec son extrême sensibilité ne peut le supporter. Ce qui rend les choses compliquées, c'est l'impossibilité de dire les choses, son ressenti n'existe tout simplement pas pour les autres. Tout le monde considère qu'elle devrait être satisfaite de son sort, que ce à quoi elle aspire est incompréhensible.

C'est un beau livre, très sensible et touchant. Tous les personnages sont très bien caractérisés, il y a la descriptions de différents lieux, ambiances, sensations. C'est très romanesque, avec beaucoup d'événements, de rencontres, un tableau de l'Italie dans la deuxième guerre mondiale. le récit n'a rien de prévisible ni de simpliste, il est très bien mené. C'est une auteure qui mérite incontestablement d'être mieux connue et que je suis heureuse d'avoir découvert à l'occasion de cette réédition que est très bienvenue.
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❤Je n'avais jamais entendu parler de cette autrice italienne avant la réédition chez @gallimard de son principal roman. Pourtant, c'est un texte féministe fondamental dans le paysage littéraire du XXeme siècle.

« Elles », ce sont les femmes qui habitent les pages de ce roman de leurs passions, de leurs voix étouffées, de leurs velléités d'indépendance, de leur complicité salvatrice, de leurs morts libératrices. C'est de l'intérieur, de leur point de vue, celui qui compte si peu dans l'Italie fasciste qui sert de toile de fond au roman, que nous est racontée cette histoire, celle d'Alessandra la narratrice, depuis son enfance à la fin de la guerre.

Roman de formation, histoire d'amours déçues, récit de la Résistance italienne, il y a tout cela dans ces pages d'une absolue justesse, mais il y a surtout une grande richesse psychologique dans la description des personnages féminins, des réflexions d'une contemporanéité déstabilisante, sur le mariage et la domination patriarcale, sur l'amour, idéalisé et pur, sur le vide et le désespoir qui s'emparent de ces femmes qu'on relègue constamment au second plan.

Des images marquantes me restent de ce récit : la mère d'Alessandra, élégante et tragique, le dos de Francesco, le mari d'Alessandra, ce mur de silence qui consume la jeune femme, mais aussi cette scène merveilleuse d'intimité entre Alessandra et son amie, ou encore la découverte des Abruzzes de la grand-mère maternelle.
J'ai tout aimé dans ce roman, et suis encore ébahie par la beauté et la pertinence stupéfiante des mots que pose l'autrice sur l'intériorité des femmes.

Même les événements historiques, le Fascisme, la Seconde Guerre Mondiale, la Résistance, nous parviennent de manière étouffée, des intérieurs de celles qu'on exclut de l'histoire.
C'est passionnant et tragique, et la confession de cette femme sensible, qui veut croire au véritable amour, qui veut être l'égal de son mari, étudier, travailler et se battre aux côtés des Résistants, est d'une force saisissante.

Un livre indispensable et militant qui méritait bien une réédition. A découvrir de toute urgence !
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"Pas un seul être n'est libre. Personne n'est libre. Notre liberté prend fin très peu de temps après notre naissance, dès qu'on nous impose un nom, dès qu'on nous greffe sur une famille. A partir de ce moment, impossible de nous enfuir, de nous dégager, d'être vraiment libres, en somme. Notre prison, c'est l'état civil."

Ces mots, prononcés par sa mère, Alessandra espérera longtemps qu'ils pourraient être dépassés et même démentis. Mais lorsqu'on est une fille puis une femme dans l'Italie des années 30 et sa société patriarcale, machiste et fasciste, cela sonne plutôt comme une malédiction. C'est toute l'essence de ce roman fleuve qui donne voix à Alessandra, une voix puissante, celle d'une femme déterminée à croire à la réalité de l'amour malgré tout. Elle revient sur son enfance, sur le fantôme de son petit frère Alessandro mort accidentellement et dont elle hérite du prénom, sur les aspirations romantiques de sa mère qui veut croire elle aussi qu'une autre vie est possible et pas seulement dans les romans qu'elle dévore. Nos vies sont-elles déjà déterminées à la naissance par notre genre et notre condition ? La conjugalité détruit-elle forcément la beauté du lien et des désirs qui y ont conduit ? Ce que raconte Alessandra des humiliations que son père lui fait subir au prétexte qu'elle est une fille est un avant-goût de ce que lui réserve plus tard la société. Mais la jeune femme est déterminée. A lire. A étudier. A travailler. A se marier par amour. Et surtout à trouver le moyen d'exister pour son mari en tant qu'amante, partenaire, amie et non pas seulement cuisinière ou femme de ménage. Les années de guerre à partir de 1939 et l'engagement anti fasciste de son mari lui en donneront l'occasion autant que les désillusions.

Ce roman a initialement été publié dans les années 50 en Italie et je suis ravie d'avoir pu le découvrir à l'occasion de cette réédition. Il est d'une densité impressionnante qui mêle habilement l'intime et le politique pour dessiner le portrait d'une nation autant que celui d'une figure féminine en quête d'émancipation. Il y est question d'amour et de relation à l'autre, comme de l'éveil d'une conscience politique au coeur du chaos provoqué par les changements de régimes. Il y est question de rébellion, de combat contre l'assignation que fait peser la société sur les femmes. C'est passionnant et parfois saisissant, comme ces quelques pages qui décrivent l'état d'esprit d'Alessandra après sa nuit de noces et se révèleront clé pour la suite tragique de l'histoire. Un formidable roman, intelligent et puissant.
Lien : http://www.motspourmots.fr/2..
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critiques presse (3)
LeJournaldeQuebec
22 août 2022
Un roman marquant qui mérite qu’on lui fasse à nouveau une place.
Lire la critique sur le site : LeJournaldeQuebec
LesInrocks
27 juin 2022
Enfin réédité, le roman Elles permet de redécouvrir l'esprit d'une grande écrivaine italienne ayant eu à cœur de faire valoir le point de vue des femmes.
Lire la critique sur le site : LesInrocks
LaTribuneDeGeneve
27 juin 2022
Fine analyse de la psyché féminine et des rapports entre les sexes, c'est une merveille.
Lire la critique sur le site : LaTribuneDeGeneve
Citations et extraits (20) Voir plus Ajouter une citation
Il s'appelait Alexandre. Quand je naquis, quelques mois après sa mort, on me donna le nom d'Alexandra pour entretenir son souvenir et aussi dans l'espoir de voir se manifester en moi quelques uns des mérites en raison desquels sa mémoire était impérissable. Le lien m'unissant à ce petit frère pesa beaucoup sur les premières années de mon enfance.Je ne parvenais pas à m'en dégager. Quand on m'adressait des reproches , on me faisait remarquer qu'en dépit de mon nom je trahissais l'espoir qu'on avait mis en moi, et on ne manquait pas d'ajouter qu'Alexandre ne se fût jamais permis d'agir ainsi. Même si je méritais une bonne note à l'école ou faisais preuve d'application et de franchise, on m'enlevait la moitié de mon mérite en insinuant que c'était Alexandre qui s'exprimait par mon intermédiaire. Cette abolition de ma personnalité me rendit sauvage et taciturne. (p. 8)
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–C’est une chose qui m’a toujours laissée songeuse.
–Quoi ?
–Cet empressement qu’éprouvent les hommes à mettre les femmes à l’abri de deux choses exclusivement : la faim et la mort. Les femmes les redoutent, mais pas plus que la majeure partie des hommes. En revanche, vous ne pensez jamais à les mettre à l’abri de bien des choses beaucoup plus à craindre, qui sont autour d’elles et en elles. Je ne veux pas qu’on me mette à l’abri.
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J’ai été prise d’une pitié dévorante à l’égard des souffrances qu’on inflige au corps de toutes les femmes. Depuis l’affront effrayant qu’il subit à l’adolescence jusqu’à la violence des noces, depuis la déformation de son ventre blanc jusqu’au déchirement de la maternité, à l’épuisement de l’allaitement, aux humiliantes souffrances de l’âge où la jeunesse l’abandonne.
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Et, ce disant, elle me serrait contre elle. Elle ne s'en rendait certainement pas compte, mais chez elle aussi, cette façon de me serrer était désespérée. Je frissonnais: mon esprit s'égarait dans un brusque attendrissement sur ma condition de femme. Nous faisions partie, me semblait-il, d'une espèce noble et malheureuse. Emanant de ma mère, de la mère de ma mère, des héroïnes des tragédies et des romans, des femmes qui regardaient dans la cour comme au travers des barreaux d'une prison (...) je sentais peser sur moi une infélicité séculaire, une inconsolable solitude. (p. 57)
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Pas un seul être n'est libre. Personne n'est libre. Notre liberté prend fin très peu de temps après notre naissance, dès qu'on nous impose un nom, dès que qu'on nous greffe sur une famille. A partir de ce moment, impossible de nous enfuir, de nous dégager, d'être vraiment libres, en somme. Notre prison, c'est l'état civil. Nous sommes tous coincés dans ces registres, aplatis, broyés, même les jeunes femmes, même les petits enfants. Notre parcours est suivi, enregistré et contrôlé. Où que tu ailles, les hommes qui remplissent ces registres te poursuivrons.
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