C'est à l'époque mouvementé du Front populaire de Léon Blum en France, des Mussolini et Hitler chez nos voisins et de la guerre civile en Espagne, que le dimanche de Pentecôte, 16 mai 1937, à 18 h 30, Laetitia Toureaux est poignardée dans le métro à la station Porte-de-Charenton, Boulevard Poniatowski à 75012 Paris.
Laetitia Toureaux est une jeune veuve de 29 ans, née Yolanda Nourrissat le 11 septembre 1907 au hameau Oyace en Vallée d'Aoste en Italie. La dernière-née d'une famille pauvre qui a émigré en 1919 en France, où elle a épousé en 1930 Jules Toureaux, mort de tuberculose, 2 ans avant son propre décès.
Laetitia travaille comme simple ouvrière à Saint-Ouen-sur-Seine dans une usine, où elle emballe des boîtes de cirage Lion Noir. Simultanément, elle accomplit certaines missions clandestines pour un ex-officier de police à la solde de l'ambassade d'Italie à Paris.
Ces missions secrètes constituent un premier facteur qui pourrait être à l'origine de ce meurtre jamais élucidé et que l'écrivain, journaliste et scénariste
Léon Treich a qualifié dans "Historia" en 1957 de "crime parfait".
L'autre facteur susceptible d'être la cause de son assassinat est lié à la personne de la victime elle-même. Il se trouve que Laetitia Toureaux était une jeune femme de grande beauté et au charme indéniable qui a eu des amants et toute une série d'admirateurs, d'autant plus qu'elle s'occupait le soir du vestiaire d'une boîte de nuit à la mode. Sans être pour autant une allumeuse ou une traînée, il est certain qu'elle ne passait pas inaperçue.
Patiemment, dans son ouvrage, l'auteur suit ces deux pistes de bien avant l'événement tragique, particulièrement au cours des mois de mars, avril et début mai 1937 et dans une seconde partie, dans la suite réservée à ce crime et l'enquête policière qui n'a jamais abouti.
Je veux bien comprendre qu'en haut lieu, on ne voulait à cette époque surtout pas un incident diplomatique avec l'Italie fasciste de Mussolini et que dès lors les commissaires de police chargés de l'enquête n'ont évidemment pas fait preuve d'excès de zèle pour arrêter un suspect, pouvant avoir un lien avec les opposants du "Duce" en France. Il s'agit cependant d'une hypothèse qui, quoique vraisemblable, n'explique pas tout.
J'ignore comment interpréter les rencontres entre la séduisante Laetitia et le non moins séduisant comte
Galeazzo Ciano (1903-1944), ministre des Affaires étrangères et gendre de Mussolini, l'époux de sa fille Edda ? Est-ce que ces deux se sont réellement rencontrés comme décrit dans le livre ou s'agit-il d'une liberté poétique de l'auteur ?
Personnellement, rien que par la façon dont le crime a été commis, un couteau de cuisine enfoncé brutalement dans le cou de la victime, je pencherai plutôt pour un crime commis par un amoureux éconduit qu'une liquidation politique par un professionnel, qui se serait probablement plutôt servi d'une autre arme.
Malheureusement, nous ne saurons donc jamais la vérité.
Christian di Scipio a écrit un roman policier instructif, qui est peut-être un peu long dans sa première partie, mais nous plonge dans une France, où à côté des excès de la Cagoule d'Eugène Deloncle (1890-1944) et Jean Filiol (1909- ?), il y avait aussi au cinéma "La Grande Illusion" de
Jean Renoir avec
Jean Gabin et ”
Regain" de
Marcel Pagnol avec Fernandel, et au théâtre "Jeux dangereux" d'
Henri Decoin avec la belle
Danielle Darrieux (1917-2017), à qui, paraît-il, Laetitia Toureaux ressemblait physiquement.