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François-Marie Banier (Illustrateur)Danièle Valin (Traducteur)Martin d' Orgeval (Éditeur scientifique)
EAN : 9782070782888
96 pages
Gallimard (16/11/2006)
3.86/5   7 notes
Résumé :

Irrévérencieux envers les autorités mais humbles face aux gens, l'écrivain italien Erri De Luca et le photographe français François-Marie Banier partagent dans ce livre un regard libre et salvateur sur leurs contemporains et une foi dans l'irrépressible individualité de chacun face à toute sorte d'ordre moralisateur et abusif. Depuis des années, Banier accumule dans ses photographies un vocabulaire de gest... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
"Le visage d'une personne saisi dans la rue devient une page de roman. le photographe est un -cantastorie- muet. (p. 51)

En parcourant le catalogue de la médiathèque j'ai découvert avec
curiosité ce texte d'Erri de Luca, accompagné de clichés noir et blanc de François-Marie Banier...Ouvrage surprenant,insolite où Erri de Luca rend un hommage au regard original du photographe, Banier, à Vélasquez, à la désobéissance vitale, indispensable... à la naissance précoce de son besoin absolu d'ECRIRE ...
"A la maison, je fis écouter ma dissertation. On fut surpris de mon élan plus que de mon écrit. J'avais appris ce jour-là avec certitude que l'écriture était un champ ouvert, une voie d'issue. Elle pouvait me faire courir là où il n'y a pas un mètre pour les pieds (...) Je suis quelqu'un qui, de ce jour-là, s'est mis à écrire pour forcer les fermetures qui l'entouraient." (p. 16)

Digressions passionnantes sur la photographie, l'écriture, la peinture [dont une littérale vénération pour Vélasquez]. Seul bémol (juste très personnel), j'ai été assez imperméable à ses observations, analyses concernant la Bible...

Touchée par les remarques irrévérencieuses de Erri de Luca, cette mise en avant de son ami photographe, François-Marie Banier...sans oublier des clins d'oeil malicieux, ironiques et lucides sur l'art, la vie, le monde...

"Dans un marché en plein air, l'été en Finlande, j'ai vu sur un panier de pommes de terre un écriteau portant le nom de la variété : Van Gogh. Ces pommes de terre portaient son nom. Parce qu'il peignit le plus émouvant hommage à cette nourriture héroïque et solitaire dans le tableau : "Les mangeurs de pommes de terre".
Quel honneur, son propre nom sur l'éventaire d'un maraîcher. Les noms illustres finissent d'habitude dans des listes de rues, sur la porte d'une école, sur un timbre-poste :ils finissent dans un somptueux rebut. Mais quelqu'un dont le nom retentit sur les places de marché, là où l'espèce humaine se dispute, sourit, se salue, celui-là a reçu le plus grand des prix à la mémoire.
Je rêve moi aussi d'être un jour associé à un légume, j'aimerais que quelqu'un demande un céleri "De Luca". Aussi je souhaite à Banier la chance qu'on se souvienne de lui dans les marchés, plus que dans les musées. "(p. 81)

"Aparté ":....Méconnaissant le travail photographique de François-Marie Banier... j'ai été surprise de la variété de ses clichés , de ses portraits qu'ils soient de célébrités ou des plus humbles... dans les rues... Dans ce volume avec Erri de Luca,Les clichés n'offrent que des portraits des gens des rues, des humbles, des personnes différentes physiquement...des anonymes !
Erri de Luca est en admiration face à l'oeuvre multiforme de François-Marie Banier, dans laquelle il voit "les archives d'un Balzac "....

Intriguée aussi par ses photos mélangeant image et écrits...
Mais ce texte d'Erri de Luca m'a donné l'envie de faire connaissance avec l'oeuvre photographique de l'écrivain... et j'ai eu la très heureuse surprise de découvrir une publication de François-Marie Banier, exclusivement consacré à Beckett !!!
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Les auteurs sont deux habitués de Gallimard, quoi de plus normal de les y retrouver associés à l'occasion d'un hommage de Erri de Luca au photographe qu'est aussi François-Marie Banier, dont quelques photos (32 exactement) figurent dans le livre. Elles montrent des personnes «différentes» saisies en rue, clichés spontanés, non celles plus connues de personnalités publiques.

Au sortir de lecture, j'étais ravi par le texte, une trentaine de pages dédiées à Banier et à la photographie en général. Au moment de rédiger ce billet, à la recherche de l'identité de Martin d'Orgeval, qui a édité (financé ?) le livre – dans la «Blanche» de Gallimard s'il vous plaît – l'affaire Bettencourt me saute à la figure. Puis je découvre le site de Banier, ses derniers travaux picturaux, ce n'est pas tout à fait ce que décrit De Luca... D'orgeval et Banier, amants condamnés lourdement, la grâce s'envole et la médiatisation de cette histoire que j'avais (délibérément) ignorée jusque-là, les publications judiciaires, etc.. achèvent mes illusions.

Les mots de De Luca (une trentaine de pages) restent, même si on sent le travail de commande. Car c'est parfois décousu, il s'agit de paragraphes inspirés par la photographie – par celle de Banier aussi, bonne quand même – qui paraissent écrits par bribes, sans continuité. Mais ils brillent par moments de si beaux feux que je m'en serais voulu de ne pas en faire l'éloge.

De façon inattendue, De Luca est inspiré par des références bibliques et par l'Hébreu pour décrire l'instantané (dé-clic, deux temps): "La photo me l'a appris : un mécanisme de la modernité m'a expliqué un détail de l'ancien hébreu, l'avènement de l'attà, maintenant". Ou encore: "Quel plaisir de ressentir la surprise d'une première fois. le passé contient des primeurs. C'est une émotion recommandée dans le livre d'Isaïe : «Et il écoutera en arrière.» (42,43)"

Puis il recourt à un maître De La Renaissance, Velásquez, pour étendre son propos et définir la photographie par son contraire : "Le peintre, contrairement au photographe ne restreint pas le champ. [...]. Devant une toile de Vélásquez, le passant ne demande jamais ce qu'il pourrait y avoir en dehors du champ. Comme dans une bonne histoire, ce qui n'est pas écrit n'existe pas."

En fin connaisseur du job derrière l'objectif, l'écrivain appelle la métaphore du cheval et de la charrette : "Au bon moment, le photographe doit être la charrette, non pas le porteur, mais celui qui est porté. [...]. Il y a un moment où il n'y a pas de photo sans la capitulation du photographe." Conseil pour tous ceux qui s'y exercent : quand l'instant de grâce est là, l'oeil le reconnaît et peut s'incliner.

De Banier, il loue surtout les photos d'ouvriers, ce qui ne surprend pas de la part du poète altermondialiste. Avis discutable: il préfère Banier à Cartier-Bresson qui l'agace parce qu'il donne envie de voir ce qu'il y a hors champ. Il loue aussi ses portraits de femmes "...intouchables, pensives, ce sont des animaux sacrés. Banier est fils de femme comme Velasquez." Une longue digression, biblique encore, rappelle le rôle de Marie, "Miriám/Marie est à l'épicentre des secousses qui se propagent encore dans le monde.", "...la nativité est oeuvre totale d'elle seule". L'auteur considère "...qu'il y a chez Banier une dette réglée avec sa mère".

Je ne sais si l'origine transalpine de la mère de François-Marie Banier justifie l'intérêt de l'écrivain pour le photographe, lequel, en dépit de ses multiples compétences artistiques, s'apparie périlleusement au nom de l'humaniste napolitain. Dans ce cas-ci, la sphère privée ne saurait être maintenue à l'écart de l'art. Je n'ai lu aucun livre signé Banier pour juger sa valeur littéraire; d'autres articles, orientés certes, m'inclinent peu à voir chez lui plus qu'un créateur mineur.

Pour le reste, on sait ce que je pense de De Luca (voir mon article sur Les poissons ne ferment pas les yeux). Merci à lui pour ce bon moment de lecture.
Lien : http://christianwery.blogspo..
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Je ne vais pas ici critiquer le texte, mais les images. Les réflexions d'Erri de Luca ne manquent pas d'intérêt, mais j'ai découvert ici le travail photographique de François-Marie Banier. Ce sont des portraits de gens ordinaires, saisis dans la rue. Cette jeune femme rondelette qui se penche sur son chien afin sans doute de le gronder, on ne voit pas son visage, seulement le regard doux et contrit de l'animal. Ce jeune à l'air sans âge coincé dans son fauteuil roulant et qui nous gratifie d'un grand éclat de rire. Cette vieille dame que l'on devine encore coquette, dont on peut explorer la peau ridée. Beaucoup de personnages infirmes, cassés par la vie. Et pourtant très dignes. On pense à Diane Arbus, mais Banier a choisi des cadrages plus serrés. Rien à ajouter, rien à enlever...
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Citations et extraits (8) Voir plus Ajouter une citation
Dans un marché en plein air, l'été en Finlande, j'ai vu sur un panier de pommes de terre un écriteau portant le nom de la variété : Van Gogh. Ces pommes de terre portaient son nom. Parce qu'il peignit le plus émouvant hommage à cette nourriture héroïque et solitaire dans le tableau : "Les mangeurs de pommes de terre".
Quel honneur, son propre nom sur l'éventaire d'un maraîcher. Les noms illustres finissent d'habitude dans des listes de rues, sur la porte d'une école, sur un timbre-poste : ils finissent dans un somptueux rebut. Mais quelqu'un dont le nom retentit sur les places de marché, là où l'espèce humaine se dispute, sourit, se salue, celui-là a reçu le plus grand des prix à la mémoire.
Je rêve moi aussi d'être un jour associé à un légume, j'aimerais que quelqu'un demande un céleri "De Luca". Aussi je souhaite à Banier la chance qu'on se souvienne de lui dans les marchés, plus que dans les musées. (p. 81)
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Le blanc et noir aide à séparer. Bien des mammifères voient ainsi et s'ils ignorent notre étonnement devant un arc-en-ciel, ils savent mieux que nous pénétrer les gris des ombres. J'aime les couleurs, mais encore plus la livrée du pingouin qui est celle de l'encre et du papier. C'est un oiseau qui a renoncé au vol, le contraire parfait de nous, bipèdes tentés par les ailes. Son «garde-à-vous», le torse bombé face au vent, sait se tenir sur la terre mieux que moi.
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La langue embaumée faisait partie d'une soumission générale au pouvoir adulte. A la récréation, nous nous défoulions avec le dialecte, une voie de fuite. Nous nous rincions la bouche avec le napolitain. (p. 13)
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A la maison, je fis écouter ma dissertation. On fut surpris de mon élan plus que de mon écrit. J'avais appris ce jour-là avec certitude que l'écriture était un champ ouvert, une voie d'issue. Elle pouvait me faire courir là où il n'y a pas un mètre pour les pieds (...) Je suis quelqu'un qui, de ce jour-là, s'est mis à écrire pour forcer les fermetures qui l'entouraient. (p. 16)
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Il faut aller à l'école de l'exil pour connaître la joie de perdre ses propres papiers. (p. 83)
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Videos de Erri De Luca (86) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Erri De Luca
Rencontre animée par Olivia Gesbert
De la bibliothèque paternelle à l'ombre de laquelle il a grandi jusqu'aux chantiers où il a été ouvrier, Erri de Luca a noué avec la lecture, puis avec l'écriture un rapport particulier pour bâtir une oeuvre double, celle d'une fiction romanesque aux forts accents autobiographiques et celle d'une réflexion sur l'Écriture. Depuis trente ans, c'est une oeuvre foisonnante et protéiforme qu'il bâtit, caractérisée par un style limpide, poétique, épuré. Ponctués de pensées, de métaphores, d'aphorismes, ses récits endossent souvent la forme d'une fable, d'une parabole empreinte d'une touche de merveilleux, dans une langue unique. Pour cette édition Quarto, ont été retenus une dizaine de textes publiés auxquels s'adjoignent cinq textes inédits, qui portent en eux la puissance de l'écriture d'Erri de Luca dans des genres littéraires variés, sa réflexion sur l'appartenance et l'identité, le poids du passé et l'importance de l'histoire, sur la fragilité et l'importance des relations humaines.
« Nous apprenons des alphabets et nous ne savons pas lire les arbres. Les chênes sont des romans, les pins des grammaires, les vignes sont des psaumes, les plantes grimpantes des proverbes, les sapins sont des plaidoiries, les cyprès des accusations, le romarin est une chanson, le laurier une prophétie. » Trois chevaux, Erri de Luca
À lire – Erri de Luca, Itinéraires, Gallimard, coll. « Quarto », 2023.
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