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EAN : 9782070379057
192 pages
Gallimard (05/01/1988)
3.83/5   63 notes
Résumé :
Trois nouvelles composent ce recueil. La première se déroule dans l'Irlande déchirée par la guerre : Mary de Cork arme la main de son fils et l'engage, pour raison politique, à commettre un parricide. La deuxième se passe en Russie : on prête à Nestor Ivanovitch Makhno toutes les audaces, toutes les cruautés, mais, un jour, une jeune fille juive lui tient tête. Dans le dernier récit, nous sommes à Paris, l'hiver : Sogoub a froid, il entre chez des émigrés russes - c... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
En décembre 1920, Lloyd George et Churchill, contraint pas les événements, proposèrent une partition de l'Irlande qui aboutit un an plus tard à la création de l'Etat libre d'Irlande (catholique au sud) et de l'Ulster (loyaliste au nord).

Cette indépendance relative, avec statut de dominion, divisa les irlandais. Michaël Collins fut assassiné par les troupes d'Eamon de Valera et l'écrivain Erskine Childers, auteur de « L'énigme des sables », fusillé pour trahison.

Joseph Kessel et Henri Béraud suivirent, comme envoyés spéciaux, ce drame irlandais et « Mary de Cork » est la première, et la meilleure, histoire du recueil « Les coeurs purs ». Unité d'action, de lieu et de temps, la rencontre de Mary et de son époux Art, noue une tragédie de quarante pages que leur fils achève dans un des sommets de l'oeuvre de Kessel.

La dédicace « A mon cher Henri Béraud, en souvenir de Dublin et de Cork, cette histoire irlandaise » rappelle que Kessel, âgé de 22 ans, était l'envoyé du quotidien conservateur « La liberté » alors que Béraud, âgé de 35 ans, enquêtait pour le journal radical « L'oeuvre ». La révolte irlandaise fut à l'origine d'une amitié de quinze ans, forgée alors sur une commune anglophobie, et les articles de Kessel furent accusés de fragiliser nos relations diplomatiques avec le Royaume Uni.

En 1925, quand Kessel écrit « Les coeurs purs », Béraud publie « Ce que l'ai vu à Moscou » dédié à Kessel « Cher compagnon, je t'offre ce livre en souvenir des jours d'Irlande où nous luttions ensemble de tout notre coeur pour aider les plus hardis et les plus pauvres révolutionnaires de monde à conquérir la liberté ». Kessel et Béraud se rejoignent alors au « Journal » puis en 1928 participent au lancement de « Gringoire » dont Kessel prend la Direction littéraire et les deux amis créent le Prix Albert Londres en 1932, précise Yves Courrière, le biographe de Kessel.

L'affaire Salengro et le Front Populaire menèrent à la rupture entre les deux hommes en décembre 1936, Kessel reprochant à Béraud son antisémitisme qui répondait « je ne suis pas antisémite, je suis anti-parasite ». Kessel créa « Le chant des partisans » et Béraud fut condamné à mort à la libération.

« Makhno et sa juive », la deuxième histoire, semble aussi improbable que l'amitié entre Kessel et Béraud, et parait invraisemblable dans notre époque traumatisée par la Shoah.

« Le thé du Capitaine Sogoub » qui conclut ce recueil, permet à Joseph Kessel de revenir sur une rencontre survenue chez ses parents.

« Les coeurs purs » sont ainsi de la même pureté qu'un poison et associent un parricide, un égorgeur et un expatrié douteux dans l'entre deux guerres, un contexte qui rend finalement éternel ce recueil.
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Trois nouvelles, toutes situées dans les années 20, composent "Les coeurs purs". Kessel indique dans sa préface s'être inspiré de véritables rencontres pour la première "Mary de Cork" qui se déroule dans l'Irlande en guerre de 1920 et pour la troisième "Le thé du capitaine Sogoub" puisqu'il a réellement rencontré le capitaine Sogoub. le matériau de la deuxième nouvelle "Makhno et sa juive" lui a été fourni par une revue historique russe.

J'ai préféré la première nouvelle "Mary de Cork", remarquable de concision et de puissance émotionnelle. Mary est une femme à l'âme droite et flamboyante, déchirée entre deux amours qu'elle ne peut réunir : celui pour son pays, l'Irlande qu'elle veut libre, et son amour pour Art, qui, pour leur plus grand malheur, n'a pas choisi le camp de la résistance comme elle, mais celui du compromis avec l'ennemi anglais. Entre sa conviction inébranlable qu'il faut tenir face aux anglais, qu'aucune concession n'est possible et sa fidélité envers son homme, Mary doit faire le plus cruel des choix et utiliser leur fils comme messager de mort. Comme dans une tragédie grecque où tout est déjà joué d'avance, on suit avec angoisse Mary et Art qui s'avancent inexorablement vers leur destin, la trahison pour l'un, la mort pour l'autre.

La 2ème nouvelle relate la vie mouvementée de Nestor Ivanovitch Makhno (1888-1934) en Russie, bagnard, révolutionnaire qui a combattu les armées blanches puis l'Armée Rouge et s'est exilé à Paris en 1925 où il a fini sa vie. D'une écriture enfiévrée et très exaltée, Kessel le dépeint comme un tyran sans pitié, qui sème l'horreur avec son armée et massacre les juifs dans tous les villages qu'il traverse. Mais un jour, Makhno est confronté à Sonia, une jeune fille juive, qui, semblable à Blandine au milieu des lions, va désarmer la cruauté du tyran par sa pureté et son innocence. L'apparente fascination de Kessel pour Makhno et cette opposition de personnages violemment contrastés en font un récit peu vraisemblable qui souffre d'outrances et d'un certain manichéisme. Reste de cette nouvelle l'aspect historique, d'ailleurs assez controversé par les historiens qui ont blanchi Makhno de ces accusations de pogroms et d'antisémitisme.

Pour la 3ème nouvelle "Le thé du capitaine Sogoub", Kessel s'est assagi et sa plume se fait plus tendre, plus intimiste pour nous livrer un beau portrait de femme. En effet, le capitaine Sogoub n'est qu'un prétexte pour brosser le portrait de Marie Lvovna, épouse aimante et attentionnée de son mari malade. Toux deux ont fui la révolution russe de 1905 et se sont installés à Paris, ruinés et sans amis. Il y exerce son métier de médecin tandis qu'elle veille sur sa santé. Mais un jour, un ancien capitaine russe sans ressources, vient troubler la quiétude du foyer pour y chercher un peu de chaleur humaine. Maria Lvovna l'accueille, avec la même douceur et générosité dont elle fait preuve envers tous les miséreux qui frappent à sa porte pour y trouver le secours d'une pièce de monnaie, ou de quelques paroles de réconfort. Sans juger ses actes ni son passé, elle écoute le capitaine Sogoub, indulgente et miséricordieuse. Une très jolie nouvelle.
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Les coeurs purs contient trois nouvelles qui décrivent trois personnages purs non par leurs vies, mais purs de par l'entièreté de leurs sentiments et par l'adéquation de leurs actes avec ces sentiments. Intéressant prémisse, qui correspond bien à ce que j'imagine du tempérament de Kessel. Hélas, j'ai finalement été assez déçue par l'ensemble, en particulier par la violence de la seconde nouvelle, qui m'a écoeurée sans que je comprenne l'intention de l'auteur.
Il faut véritablement être un inconditionnel de Kessel pour trouver un intérêt à ce livre, me semble-t-il. Sinon, mieux vaut passer son chemin et s'attarder sur d'autres oeuvres qui me paraissent meilleures. Parmi ses nouvelles, notamment, je me souviens des très courts Contes et de la Steppe Rouge, qui m'avaient bien plus plus et qui rendent meilleure justice au conteur Kessel.
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Ce petit livre rassemble 3 courtes nouvelles. Si le "Thé du capitaine Sogoub" est plein d'un poésie douloureuse (le couple vieillissant qui l'accueille est décrit avec un réalisme attendrissant), si Makhno, présenté comme un révolutionnaire cruel, antisémite et sans pitié, faiblira face à une jeune juive, c'est "Mary de Cork" qui représente le véritable morceau de bravoure de ce recueil. En un court récit, Kessel nous fait vivre le dilemme d'un couple que les engagements politiques séparent: l'une est pour l'Irlande libre, l'autre pour les arrangements avec L'Angleterre. L'amour est bien là dans ce couple, mais le devoir, la fidélité à ses camarades de lutte et à son idéal politique auront le dessus, jusqu'au drame assumé. On est bouleversé par ce drame intimiste, et porté par le style parfait de l'auteur, on a du mal à comprendre comment, avec si peu de moyens - 40 pages ! - .Kessel a été capable de nous imposer ses deux personnages et leur malheur obligé, avec la même force qu'ailleurs, il a fallu aux meilleurs romanciers 4 ou 600 pages, ou parfois beaucoup plus, pour laisser un pareil souvenir.
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Joseph Kessel est internationalement connu pour son best seller le lion mais toute son oeuvre merite d'etre relue et connue.Ce livre ne fait pas exception,l'histoire est plaisante a decouvrir et le style rend la lecture agreable,ce livre sans etre un classique reste une tres belle oeuvre.
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Citations et extraits (22) Voir plus Ajouter une citation
Il était déjà dans l'antichambre. Comme Marie Lvovna l'accompagnait, il s'inclina vers sa main, mais elle était d'une génération qui, par soif de simplicité, n'admettait point ce geste et recula un peu.
Le capitaine Sogoub murmura, et jamais prière ne fut plus ardente.
– Laissez, laissez ! C'est tout ce qui me reste !
La porte claqua. Marie Lvovna demeura immobile. Ensuite, de son pas égal et silencieux, elle alla desservir la table.

Le Thé du capitaine Sogoub
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Le capitaine se retourna d'un bloc, voulut essuyer deux larmes arrêtées aux coins de sa bouche pâle, comprit qu'il n'était plus temps.
Sa main mutilée s'arrêta à la hauteur de la gorge, et, machinalement, se mit à frotter le col de la vareuse militaire. Il voulut parler, trouver une plaisanterie, mais soudain, un si triste regard le baigna qu'il n'éprouva plus ni honte, ni regret d'avoir été vu pleurant. Une douceur profonde lui vint au contraire, une douceur enfantine qui s'enivrait de sa propre faiblesse et de son impuissance.
Ce fut une voix d'enfant blessé qu'il dit :
– Vous comprenez, n'est-ce pas ? Cette gaîté, ce dimanche, ces gens qui se reposent… Pourquoi, pourquoi ?

Le Thé du capitaine Sogoub
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Le docteur avait peur d'affronter la misère qui l'attendait au salon. Ce n'était pas par manque de bonté. Un pauvre ordinaire, il savait comment le traiter. Mais celui-là, plus que son dénûment, souffrait d'humiliation, et le docteur avait l'esprit trop éveillé, la sensibilité trop critique pour ne point partager une gêne qui le paralysait. Il mesura une fois de plus combien, pour les actes de foi, de charité, de dévouement, l'intelligence était encombrante.

Le Thé du capitaine Sogoub
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Ce n'était pas les traits réguliers et fins de son visage qui en faisaient surtout la beauté. C'était son teint d'un rose mat, puéril et chaud en même temps, qui lui donnait une sorte d'ingénuité ardente, de passion qui s'ignorait elle-même.
Et puis ses yeux d'un gris profond et tendre comme du velours. Il y avait en eux une telle amitié pour l'univers que moi-même en fus ému. Et je ne sais pourquoi je n'osai obéir à mon premier mouvement qui avait été de la souiller.

Makhno et sa juive
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– Pourquoi priez-vous ?
Une voix s'éleva, si connue qu'il en fut tout bouleversé de tendresse et que de nouveau sa force déserta son corps.
- Pour que notre séparation prenne fin, dit-elle.
La main de Beckett palpita, affermit son étreinte ; il allait attirer Mary contre lui, lorsqu'elle ajouta :
– Et je demande à Dieu qu'il vous fasse connaître enfin votre vrai devoir d'Irlandais.
Alors il retrouva dans la douceur enfantine de ce timbre l'accent implacable, la funeste volonté et sa courte béatitude fondit en une détresse sans limites. Mary ne revenait pas repentante, mais armée pour le même combat qui les avait si mortellement déchirés. Dès les premières paroles apparaissait, opiniâtre et fatale, l'image de leur discorde. – Mon devoir… commença-t-il.

Mary de Cork
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Jusqu'où peut nous entrainer l'amitié avec un animal ? Surtout quand cet animal est farouche : ici, il s'agit du roi des animaux. le lion.
« le Lion », de Joseph Kessel, c'est à lire et à relire en poche chez Folio.
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Avec son neveu, il est l'auteur des paroles d'un hymne à la révolte et à la résistance écrit à Londres dans les années 40 :

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