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EAN : 9782246832300
198 pages
Grasset (11/01/2023)
3.84/5   221 notes
Résumé :
Résumé
« Qu’importe l’éternité de la damnation à qui a trouvé dans une seconde l’infini de la jouissance. » (Baudelaire)

Tel serait l’esprit de cette saga lapidaire – un siècle de fureur et de sang que va traverser Valdas Bataeff en affrontant, tout jeune, les événements tragiques de son époque.
Au plus fort de la tempête, il parvient à s’arracher à la cruauté du monde : un amour clandestin dans une parenthèse enchantée, entre l’anci... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (61) Voir plus Ajouter une critique
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Mais comment fait Andreï Makine pour raconter en si peu de pages toute une vie d'homme en traversant presque tout un siècle? Je crois que la réponse réside dans le talent d'un auteur exceptionnel, si rare parmi les contemporains, qui sait allier la concision de son propos avec la densité d'une histoire tout en appuyant savamment sur les détails qui le méritent.

Ainsi, dès les premières pages, le lecteur est emporté dans le tumulte de la vie du héros, Valdas, depuis l'adolescent des derniers temps du tsarisme jusqu'au vieil homme de la déstalinisation.

Makine explore tous les détails de cette vie, avec d'abord ces émois sous la cape d'une femme protectrice, finalement à peine plus âgée que l'adolescent qu'il est alors. L'ambiance est déjà celle du risque parmi les contrebandiers, sous la falaise, face aux vagues de la mer.

Le risque sera ainsi présent tout au long de la vie de Valdas qui sera partie prenante d'une révolution et de deux guerres qui vont broyer ses espérances et ses amours. Makine a doté son héros d'un altruisme sans pareil qui le place toujours en situation de vouloir le bien pour les autres, même lorsque celui-ci va lui faire si mal.

Il en va ainsi de ses différentes rencontres, inopinées, prévisibles quelquefois, avec des hommes, des femmes et, à travers elles, des amours, dont un seul le marquera à vie, avec cette évocation magnifique du "champ des derniers épis", ceux qui produiront la dernière galette et seront les témoins des derniers instants de bonheur de deux amants, Valdas et Taïa.

Eblouissante et trop brève lecture, chargée d'histoire, de passions, de trahisons, de sacrifice, des pires laideurs de l'âme humaine et de ses plus grandes beautés, la belle âme de Valdas.
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«Je ne m'habituerai jamais à ce nouveau calendrier ! »

Avant la révolution d'octobre, le calendrier Julien était en vigueur en Russie comme dans la plupart des pays orthodoxes, mais en 1918 le calendrier Grégorien fut adopté et le lendemain du mercredi 31 janvier fut le jeudi 14 février 1918, pour renouer avec « le temps dans lequel vivaient les pays civilisés », selon Lénine. Ce temps « civilisé», pensait Valdas, n'avait pas empêché tous ces beaux pays, fiers de leur culture, de s'entre-tuer pendant cinq interminables années...

Valdas Bataeff nait dans une famille aisée et partage son enfance entre Saint Petersbourg et la Crimée où il croise Taïa qui vit de la contrebande du tabac. La guerre puis la révolution bolchévique renversent l'empire tsariste et balaient Valdas vers la Crimée où il vit deux semaines d'amour avec Taïa dans une grotte où ils tentent d'échapper à la folie meurtrière ; Taïa meurt en le protégeant.

Débute alors l'exode, via la Serbie, vers Paris où l'exilé devient chauffeur de taxi puis dessinateur dans un cabinet d'architecture. Diverses idylles ensoleillent brièvement son existence que bouleversent l'occupation allemande puis la libération, mais le souvenir des deux semaines avec Taïa ne s'efface jamais « sa part la plus précieuse appartenait à Taïa. Dans leur ancien calendrier, elle l'attendrait tant qu'il aurait la force de vivre, avec le souvenir du champ des derniers épis. »

Retraité au bord de la Méditerranée, Valdas y retrouve l'atmosphère de la mer Noire et un pasteur qu'il a connu dans la résistance :  
« Ce que tu as vécu... je parle de ces journées au bord de la mer Noire, c'était... le sens même de la vie.
Cet amour à l'écart du temps, c'est ce que nous devrions tous espérer !
Le seul qui nous est véritablement offert par Dieu.
Mais nous sommes rarement capables de le recevoir. »
(…)
« Cette chance est donnée à chacun de nous, à tout âge, mais nous avons peur d'y croire, cet amour paraît trop fragile à notre soif d'exister.
Nous l'abandonnons au profit d'attachements qui ont l'air plus solides.
Et la suite, tu la connais : toujours cette envie de rattraper un retard, le désir de désirer et, à la fin, le sentiment d un très grand vide.
Et pourtant, nous avons tous notre champ des derniers épis... »

C'est ce don de Dieu que nous transmet Andreï Makine en gravant dans le marbre :
« Ne dites jamais, avec reproche : ce n'est plus !
Mais dites toujours, avec gratitude : ce fut. »

PS : une femme aimée :
Lien : https://www.babelio.com/livr..
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Le titre poétique du dernier roman d'Andreï Makine, « L'ancien calendrier d'un amour », fait référence au passage du calendrier julien au calendrier grégorien décidé par les bolcheviques en janvier 1918.

Un décret signé par Lénine a établi que juste après le 31 janvier 1918, la Russie passerait directement au 14 février, effaçant pour toujours deux semaines de l'histoire du pays. Pour justifier ce changement, le nouveau régime communiste évoqua la nécessité « d'établir en Russie un système de décompte du temps similaire à presque tous les peuples culturels ».

La référence à l'ancien calendrier est devenue une forme de métaphore désignant la Russie d'antan. Elle prend tout son sens dans le roman, où le héros vit une histoire d'amour clandestine quelques mois après le passage du calendrier de la Russie impériale à la nouvelle chronologie imposée par les « constructeurs de l'avenir radieux ».

« L'ancien calendrier d'un amour » est une prouesse de concision. Dans ce court roman, Andreï Makine dessine une fresque qui englobe la révolution russe, la première guerre mondiale, l'entre-deux-guerres, ainsi que la seconde guerre, au travers de la destinée improbable de Valdas Bataeff. L'ouvrage mêle avec bonheur l'Histoire avec un grand H avec l'histoire de Valdas, né à la fin du XIXème siècle, dont le destin se fracassera, comme celui de tant d'hommes de sa génération, sur la violence inouïe du siècle le plus tragique de l'Histoire.

Le récit débute en août 1913. Agé de quinze ans, Valdas a grandi dans une famille bourgeoise, choyé par son père avocat, et sa jeune belle-mère Léra. La famille aisée passe ses vacances sur le littoral de la Crimée.

« Dans la belle villa Alizé, le père oubliait ses plaidoiries et la jeune Léra concoctait de savants panachés d'invités, mêlant les vieux birbes, parmi la clientèle de son mari, et les artistes, prudemment rebelles ».

Le jeune adolescent commence à saisir l'hypocrisie de la comédie humaine que joue cette haute société russe inconsciente du déferlement de violence qui menace. Au cours d'une promenade nocturne longeant la mer, il rencontre pour la première fois Taïa, une jeune femme de quelques années son aînée qui s'adonne au trafic de tabac de contrebande.

Valdas ne le sait pas encore, mais ses premiers émois sont aussi ses derniers moments d'insouciance. La douceur de cette fin d'été 1913 marque la fin d'une époque. le bruit et la fureur de la première guerre et de la révolution emportent tout sur leur passage. le héros découvre l'horreur absolue de la guerre civile en s'engageant auprès des Russes blancs, dans l'armée contre-révolutionnaire qui sera laminée par les bolcheviques.

Avant de devoir quitter sa mère patrie pour rejoindre la France, il vit à l'automne 1918 une brève histoire d'amour avec la belle Taïa. Au cours de ce moment « hors du temps », où Valdas se croit parfois encore dans « l'ancien calendrier », il vit un amour absolu, qui hantera à jamais ses nuits, et découvre un bonheur traversé par une lumière qui ne cessera d'éclairer une destinée foudroyée par l'Histoire.

« L'ancien calendrier d'un amour » n'est pas seulement une fresque historique qui revisite avec talent un siècle sanglant en confrontant son héros au coeur pur au tragique de l'Histoire. L'auteur nous propose dans ce très beau roman une forme de méditation sur le rôle de révélateur de l'âme humaine que jouent ces moments de tempêtes, les guerres comme les révolutions, qui voient surgir la cruauté, la couardise et la trahison mais aussi le sens de l'honneur, le courage et le sacrifice.

Le titre de l'un des plus beaux romans de Blaise Cendrars, « L'homme foudroyé », nous offre une formule lapidaire qui résume la destinée de Valdas Bataeff. Et pourtant. le dernier ouvrage d'Andreï Makine tente d'offrir une forme de rédemption à son héros, de donner un sens à une vie ballotée par la fureur d'un siècle terrifiant. Malgré sa brièveté, la pureté de l'histoire d'amour avec Taïa, ce moment touché par la grâce et délaissé par la pesanteur, « sauve » peut-être le destin improbable de son héros. le roman pose ici une question quasi métaphysique. En accédant, même un instant, à une forme d'infini amoureux, le héros « arrête » le temps, et entrevoit le bonheur serein que lui aurait offert une vie vécue au sein de « l'ancien calendrier ».
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En 1582, le pape Grégoire XIII promulguait le passage du calendrier julien au calendrier grégorien, occasionnant un rattrapage de dix jours sur le retard pris, au rythme d'un jour par siècle, sur l'heure solaire. Les pays récusant l'autorité papale ignorèrent longtemps cette réforme. En Russie, le changement n'intervint qu'après la révolution de 1917, supprimant alors d'un coup treize jours du calendrier : en 1918, on sauta directement du 31 janvier au 14 février.


C'est également pendant une dizaine de jours, comme sortis de l'écoulement habituel du temps, en une courte suspension entre le passé et l'avenir à l'image de cet écart entre l'ancien et le nouveau calendrier, que Valdas Bataeff a vécu l'aussi bref qu'éternel amour de sa vie, une parenthèse enchantée aussitôt refermée par la violence de l'Histoire, mais qui, maintenant qu'au soir de son existence il ne se nourrit plus guère que de nostalgie, lui apparaît clairement comme le seul moment où il a été « véritablement vivant ».


Le narrateur fait par hasard sa connaissance en 1991, alors que, se promenant dans un cimetière suspendu entre ciel et mer sur les hauteurs de Nice, il se prend à lier conversation avec le vieil homme, nimbé de la brume de ses souvenirs en même temps que des effluves de son cigare. Nous voilà plongés dans la mémoire de ce Russe blanc, né au tournant du XXe siècle dans une famille aristocratique de Saint-Pétersbourg. Alors qu'à quinze ans, découvrant les mensonges et les trahisons de sa jeune belle-mère adultère, il prend conscience des forces qui, comme dans les pièces de théâtre dont les siens sont férus, font tourner le monde - « l'attirance des corps, le pouvoir de l'argent » -, il entrevoit aussi, au travers de la belle et obsédante Taïa, serveuse de bar de cinq ans son aînée subrepticement croisée lors d'un été sur les bords de la mer Noire où elle se prête aventureusement à la contrebande de tabac, une autre forme de vie, « affranchie des lois de ce monde ».


Ce n'est pourtant que bien plus tard, comme dans un aparté volé à la tourmente de l'Histoire et coïncidant symboliquement à cette brève fenêtre de temps égarée entre les deux calendriers, que « l'éveil sensuel » provoqué par Taïa chez Valdas finit par éclore en véritable passion amoureuse. La Grande Guerre, puis la Révolution ont mis la Russie à feu et à sang. Blessé et de retour en Crimée dans un uniforme de l'armée blanche en déroute, le jeune homme ne vivra que quelques jours d'un amour partagé, fou et inoubliable, auprès de cette femme tant fantasmée et miraculeusement retrouvée. Une poignée de jours que la mort et l'exil ne pourront effacer, et qui, à jamais hors du temps, suffiront à illuminer sa vie entière : « Ne dites jamais, avec reproche : ce n'est plus ! Mais dites toujours, avec gratitude : ce fut. »


Andreï Makine nous livre un texte bref et intense, à l'écriture ciselée, mélancolique et émouvante, où, au vacarme d'un monde occupé à ses guerres et à ses cruautés, répondent les confidences chuchotées d'un vieil homme tout entier habité par l'essentiel et fragile instant d'un amour inoubliable, joliment symbolisé par cette curieuse inclusion hors du temps, perdue entre deux calendriers. Coup de coeur.

Lien : https://leslecturesdecanneti..
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La première fois que j'ai lu Andreï Makine, c'était en 1990 avec: La fille d'un héros de l'union soviétique, j'avais été fascinée par ces thèmes et son écriture.
Depuis, je l'ai suivi pas à pas et peu de titres m'ont échappé. D'ailleurs, le titre qui m'a le plus touchée c'est: Requiem pour l'est. Un roman à ne pas rater.
Avec L'ancien calendrier d'un amour, Andreï Makine, une fois de plus parvient avec bonheur à parler de l'amour, de L'Histoire et de l'homme.
Subtilement, le livre s'ouvre sur la rencontre d'un homme russe avec un autre dans un cimetière à Nice, un des grands lieux d'exil des Russes blancs.
Il est vrai que Nice renvoie immédiatement à la Crimée, sur les bords de la mer Noire.
C'est là que Valdas, notre héros commencera à découvrir les balbutiements et les premiers émois amoureux. Quelle rencontre romanesque et fantasque dans ces dunes, sur la grève, dans une ambiance de contrebande avec Taïa qui somme toute deviendra l'amour de sa vie.
Valdas va vivre les tourments de l'histoire, d'abord la première guerre mondiale puis cette guerre civile de son propre pays qui met à bas toute sa vie.
Magnifiquement décrit ce déchirement des rouges et des blancs, de ces tueries aveugles qui aboutiront à la fin de la Russie.
Valdas devient un exilé, son pays ne tardera plus à disparaître, il vit alors à Paris comme chauffeur de taxi, comme beaucoup de ces compatriotes exilés.
L'amour, il le cherchera toujours mais il ne le trouvera que morcelé dans des femmes qui sont elles-mêmes meurtries par la vie.
"Un jour, Valdas devinait enfin ce qui lui manquait dans ces gros volumes herbeux : un simple lieu, bien plus modeste que les décors fastueux de ces romans. Une plaine abîmée par la guerre et dont le soleil d'automne faisait apparaître la beauté originelle, ce champ où Taïa ramassait les derniers épis et à travers lequel elle venait vers lui"
Ce passage est lumineux, doux au regard et tendre au coeur.
Naturellement, je conseille cette lecture aux inconditionnelles de Makine mais j'espère une formidable découverte pour ceux dont le nom d'Andreï Makine est encore inconnu.
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critiques presse (6)
LeJournaldeQuebec
20 juin 2023
Avec L’ancien calendrier d’un amour, l’écrivain français d’origine russe Andreï Makine nous offre encore une fois un magnifique roman.
Lire la critique sur le site : LeJournaldeQuebec
LeDevoir
09 mai 2023
Des rives de la mer Noire en 1913 jusqu’aux allées d’un cimetière de Nice en 1991, Valdas, fils d’un aristocrate russe, a tenté de résister mollement à l’oubli sans trop céder à « l’indifférente logique de la mort ».
Lire la critique sur le site : LeDevoir
LaLibreBelgique
20 mars 2023
Français par l’écriture et par choix de vie, Andreï Makine n’a cessé au long de ses nombreux romans de laisser libre cours à sa nostalgie pour l’âme profonde de son pays natal : la Russie où il est né en Sibérie l’année 1957.
Lire la critique sur le site : LaLibreBelgique
Actualitte
10 février 2023
L’écriture est sereine, tranquillement littéraire, précise. Le romantique Valdas est revenu de tout. Une vie trop vite remplie. L’Histoire à hauteur d’homme, et la même profession de foi et de tempérament qui parcourt toute l’œuvre de l’écrivain sous pseudonyme : s’oublier dans autrui, pour autrui.
Lire la critique sur le site : Actualitte
LeMonde
23 janvier 2023
Dans une ­langue ciselée, le plus sibérien des académiciens français y suit le parcours chaotique d’un vieux Russe marqué à jamais par la première femme qu’il a serrée dans ses bras. Un beau roman slave à l’ancienne, mélancolique à souhait, doublé d’une plongée dans les turbulences du XXe siècle et d’un jeu subtil sur le temps.
Lire la critique sur le site : LeMonde
LeFigaro
06 janvier 2023
L'écrivain raconte la vie extraordinaire d'un homme ordinaire ayant traversé le tumultueux XXe siècle.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
Citations et extraits (81) Voir plus Ajouter une citation
De temps à autre, son métier routinier subissait les effets de l'actualité. Au printemps 32, en détectant son accent russe, un client l'injuria et ne voulut pas prendre place. Les passagers nocturnes, souvent éméchés, avaient habitué Valdas à leurs sautes d'humeur…

Le matin, en terminant son service, il apprit la nouvelle : un certain Pavel Gorgoulov (un émigré qu'il avait croisé, un soir, chez Sophia) venait de tuer le président Paul Doumer. L'assassin, visiblement dérangé, prétendait avoir été guidé par une énigmadque « troïka verte »... Il allait être guillotiné.

Ce qui surtout fit de la peine à Valdas, c'est de savoir que Doumer, un vieil homme respectable, avait perdu quatre de ses cinq fils ! Non, la littérature n'était pas faite pour aborder, sans emphase, un chagrin pareil : un vieillard dont la guerre emportait les enfants l'un après l'autre.
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Quand la tourmente se calma, il crut comprendre le secret de l'existence prospère que lui offrait l'AIizé. Bien plus que l'appartenance à la classe des privilégiés, on y goûtait la complexité des sentiments, la délicatesse des manières, toute une grammaire de séduction, les gammes de vins, de parfums, mille nuances parlantes. Comme cette lenteur avec laquelle Léra et Tomine avançaient vers leur nuit d'amour. Et même les agrafes du bustier, malaisées à desserrer, devenaient nécessaires pour aiguiser la soif de la possession. Oui, un jeu théâtral, plus important que la réalité elle-même.
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Le père de Valdas, qui avait toujours prôné le soutien aux « classes défavorisées », fùlminait désormais contre les « Rouges », ces traîtres à la patrie.

D'autres « comédiens » avaient aussi changé de rôle. L'été précédent, en buvant du vin de Crimée, les poètes déploraient la « brutalité soldatesque du régime » qui ne tenait « qu'à la pointe des baïonnettes »...

Dès le début de la guerre, ils se mirent à célébrer les « chevaliers en armure de lumière » et le tsar, « terrassant l'hydre teutonne ». Les rimes étaient souvent bancales, le pathos se révélait poussif, mais la sainteté de l’empereur-soldat primait la métrique.
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Quand la tourmente se calma, il crut comprendre le secret de l'existence prospère que lui offrait l'Alizé. Bien plus que l'appartenance à la classe des privilégés, on y goûtait la complexité des sentiments, la délicatesse des manières, toute une grammaire de séduction, les gammes de vins, de parfums, mille nuances parlantes. Comme cette lenteur avec laquelle Léra et Tomine avançaient vers leur nuit d'amour. Et même les agrafes du bustier, malaisées à desserrer, devenaient nécessaires pour aiguiser la soif de la possession. Oui, un jeu théâtral, plus important que la réalité elle-même.
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A Berdiansk, un port de la mer d'Azov, un habitant lui indiqua l'endroit où les Rouges avaient fait couler une barge remplie d'officiers blancs ligotés. Valdas déclara qu'une fois le pouvoir rétabli, les auteurs de ces exactions allaient être jugés et fusillés. Mais, en vérité, qui était à la source de ce mal ? Les Allemands qui avaient payé Lénine et ses sbires ? Ou bien tous ces « libres penseurs » qui jouaient avec les explosifs révolutionnaires, tels des enfants s'amusant à craquer les alumettes ?
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Videos de Andreï Makine (48) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Andreï Makine
Augustin Trapenard reçoit Andreï Makine, écrivain, académicien, pour "L'Ancien Calendrier d'un amour", édité chez Grasset. Ce titre énigmatique fait référence à une "parenthèse enchantée" pendant laquelle Valdas et sa bien aimée peuvent vivre "en dehors de la comédie humaine" entre l'ancien calendrier de la Russie et le nouveau.  En effet, le livre raconte l'histoire d'un jeune aristocrate russe embarqué dans le tourbillon de la révolution de 1917 qui finira sa vie en France. L'homme fera l'expérience de l'amour et ne cessera jamais d'oublier celle qu'il a aimé. Son histoire c'est aussi l'histoire d'un exil, un exil qui rappelle celui connu par l'auteur. 

Retrouvez l'intégralité de l'interview ci-dessous : https://www.france.tv/france-5/la-grande-librairie/
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