AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Critiques de Edward Carey (244)
Classer par:   Titre   Date   Les plus appréciées


Les Ferrailleurs, tome 2 : Le faubourg

Deuxième tome de l’épopée des Ferrailleurs et je me régale toujours autant ! Nous voici en train d’arpenter les rues du Faubourg et de prendre conscience de l’étendu du tallent d’Edward Carey !

Nous retrouvons cette ambiance aux allures gothiques teintée de streampunk. L’auteur prend le temps de poser le décor jusqu’à le rendre palpable. C’est crasseux, étouffant, sombre, poisseux jusqu’à devenir irrespirable. Le lecteur croule sous les ordures et le désespoir.



Loin de la vie confortable du château nous découvrons une population qui vit dans la peur et la misère. Les Ferrayor ne sont pas étranger à tout cela et la famille apparaît désormais bien plus menaçante que ce que j’avais imaginé. Ce tome est riche en sombres découvertes et en surprises. D’ailleurs de petits nouveaux très intéressants et surprenants font leur apparition.



Pour ce qui est de nos 2 héros, le moins qu’on puisse dire c’est qu’ils se révèlent. Clod prend de l’envergure et fait preuve d’une détermination et d’un courage surprenants. Son humanité se découvre petit à petit de même que certaines capacités… De son côté Lucy n’est pas en reste. Loin d’être un petit être sans défense c’est en fait une vraie guerrière. Un conseil ne restez pas sur son chemin sous peine de vous faire botter les fesses !



Le parallèle avec le monde réel devient évident. Le fonctionnement de nos sociétés moderne est joyeusement égratigné de même que l’exercice du pouvoir et ses dérives. On peut y voir aussi pas mal de références historiques, qui donnent un côté universel au récit. Il y a aussi un côté lutte des classes et une ambiance de révolte qui plane sur ces pages et qui explose en feu d’artifice. Ce qui explique sans doute que certains aient pensé à Dickens . Moi j’ai plutôt pensé à Zola pour son amour des ambiances sombres, des crèves la faim et des quartiers miséreux, saupoudré tout de même d’une touche de fantastique.
Commenter  J’apprécie          4319
Petite

S'instruire en se faisant plaisir, voilà ce qui arrive en lisant ""Petite". J'ai appris un tas de choses même si l'auteur précise à la fin qu'il apris quelques libertés pour combler certains flous dans l'histoire des personnes.

Ce roman est raconté par Marie Grosholz alias Petite et future Madame Tussaud, ce qui nous donne une impression d'être sa confidente mais aussi nous la rend particulièrement sympathique.

Nous traversons avec elle son enfance, son adolescence et sa vie de femme mais nous traversons également la vie parisienne et son Histoire. N'oublions pas que Marie est née en 1761 et décédée en 1850. L'Histoire est donc très riche ! L'auteur Edward Carey nous en fait profiter avec beaucoup d'habileté. Les dessins qui jalonnent le roman agrémentent la lecture qui est déjà passionnante.

C'est un livre prenant sur un petit bout de femme qui a su montrer son talent par sa force, son courage, sa détermination et sa persévérance. Je suis admirative devant tant de force et d'abnégation. Il me reste maintenant à aller voir un de ses musées, celui de Londres me tente particulièrement .
Commenter  J’apprécie          421
Petite

Madame Tussaud est née Anne-Marie Grosholz en 1761. Avant de connaître le succès à Londres, elle vécut dans la France pré-révolutionnaire, et c’est cette partie-là de l’histoire qui intéresse Edward Carey. Carey est romancier, scénographe, dramaturge et dessinateur ; Anne-Marie Grosholtz fut orpheline, servante, assistante d’un médecin organolâtre, créatrice de mannequins de cire, amie d’Elisabeth (sœur du roi) et, seul point raisonnablement fixe de son existence mouvementée, petite.

Carey et Grosholtz sont donc deux créateurs multiformes, un pied dans l’art, un autre dans l’artisanat, qui tous deux jouent avec l’apparence, à la recherche d’une vérité insaisissable.

Carey s’inspire des Mémoires de Madame Tussaud en les respectant scrupuleusement tout en imaginant de quoi remplir les interstices de l’histoire. Mais les Mémoires elles-mêmes étaient sans doute largement romancées et la vie de Petite emprunte à l’histoire, à la fiction, au Grand Guignol, au roman picaresque et au conte horrifique.

D’ailleurs, est-il un conte qui ne soit pas horrifique ? Petite a les attributs de Poucette et du petit Poucet: l’intelligence et la débrouillardise, d’autant plus nécessaires que les parents sont défaillants. Petite n’est pas abandonnée dans les bois par ses parents, mais tout comme. Elle ne rencontre pas Pinocchio, mais peu s’en faut. La marâtre est odieuse, le prince charmant peu dégourdi et la bonne fée ne l’emmène dans son palais que pour la cacher dans un placard.

La bonne idée de ce roman, c’est que le conte de fée est percuté par l’Histoire avec sa grande hache. Quand le cabinet du docteur Curtius fabrique des corps pour la plus grande joie des badauds, la Terreur de Robespierre en déconstruit d’autres pour l’immense plaisir des mêmes.

En transformant les corps en objets à contempler, en starifiant des meurtriers devenus pièces de collection, les inventeurs du musée de cire n’ont-ils pas permis à la fureur populaire d’éclater en toute inhumanité ?

L’histoire de Marie Grosholtz me fait terriblement penser aux médias modernes avec leurs vitrines pleines d’individus ripolinés qu’on adore ou qu’on hait, réceptacles de la colère qui vient.

Mais, comme Marie dépassée par ses créatures, Carey est un poil trop petit pour son sujet. Le lecteur est amusé, intéressé, parfois inquiet ou désolé, mais rarement empoigné. Marie et ses Mémoires ne resteront pas dans la mienne

Commenter  J’apprécie          420
L'observatoire

Muni de ses gants de coton blanc toujours immaculés, Francis exerce la curieuse profession de statue vivante.



Nous suivons au gré de ses pérégrinations, son histoire, celle de sa famille et de sa demeure : une ancienne propriété luxueuse, devenue par la force des choses un immeuble d'appartements loués.



Au cours de ce récit, nous faisons la connaissance de personnages improbables aux destinées tragicomiques.



Résolument original, "L'observatoire" est une réussite, même si pour ma part, j'ai trouvé que les dernières lignes laissent une impression amère de tristesse, sentiment qui sous-tend déjà la majeure partie du livre.

Commenter  J’apprécie          424
Les Ferrailleurs, tome 3 : La ville

Si vous ne connaissez pas encore Edward Carey, cet auteur a un talent fou pour faire voyager ses lecteurs dans des univers fantasmagoriques complètement décalés qui rappellent ceux de Mervyn Peake ou de Tim Burton.



Avec « le Château » qui marque l'entrée dans la trilogie des Ferrayor, l'auteur nous invitait à faire la connaissance des Ferrayor, une famille extravagante et inquiétante qui s'est enrichie au fil des générations, grâce à la collecte des déchets de tout Londres.

Sa suite, « le Faubourg », déplaçait l'intrigue en dehors de la propriété des Ferrayor et dévoilait quelques mystères entourant leur ascension et leur pouvoir.

Le troisième chapitre, "la ville", qui clôt cette superbe saga dystopique, offre un dernier voyage dans la noirceur et le macabre.



*

Nos deux héros ont été, à nouveau, séparés à la fin du second tome . Clod et les membres de sa famille se sont disséminés dans les rues de Londres. Pourchassés, traqués, ils se terrent en attendant de se venger.



Mais après leur arrivée, des évènements anormaux et incompréhensibles se produisent : Londres est envahie par un inhabituel brouillard qui se glisse partout, absorbe la lumière du jour et plonge la ville dans une nuit opaque et fantasmagorique ; de nombreuses disparitions plongent la population dans la suspicion et l'angoisse ; des objets du quotidien sont retrouvés sur les lieux des disparitions et à l'intérieur des maisons, des objets ont commencé à bouger.

Des bruits circulent, faisant état d'une maladie terriblement contagieuse.



Mais je n'en dis pas plus sur l'intrigue qui gagne en complexité par quelques ellipses, je vous laisse le plaisir de découvrir par vous-même cette très sympathique trilogie.



« Cette famille, autrefois une grande famille, se tient debout sur la plus mince des pellicules de glace. Un faux pas et nous pouvons tous être noyés. Qui veillerait alors sur les ordures ? Aujourd'hui nous marquons la ville de notre empreinte, aujourd'hui Londremor saignera, et toutes les cloches de cette île souveraine sonneront le glas. »



*

La plus grande force de cette histoire est son univers original, ourlé d'obscurité et de malveillance. Avec quelle facilité, quelle force, quelle maîtrise de la narration, Edward Carey installe ses décors, ses personnages et son intrigue !



Le monde imaginé par l'auteur ressemble au notre, mais sans l'être non plus. L'auteur nous emmène en effet en Grande-Bretagne à la fin du XIXème siècle. Nous sommes à Londres, mais l'auteur a revêtu la capitale d'un étrange costume, très différent de celui de l'ère victorienne, perlé de fantastique et d'opacité. L'ambiance de ce Londres, mélange de gothique et de décharge à ciel ouvert, est très réussie : visuelle et immersive, poétique et âpre.



« C'était une grande maison, d'un certain point de vue, je pense, mais vraiment petite comparée au Château où l'on pouvait facilement cheminer dans le dédale de ses galeries et de ses escaliers intérieurs, et découvrir chaque fois un nouvel endroit à visiter. Qui plus est, depuis le Château, on pouvait voir l'océan de détritus onduler dans le coucher de soleil. Observer l'astre du jour se lever et se coucher sur cette mer d'ordures pouvait être d'une grande beauté, c'était comme la respiration d'un géant endormi. Ainsi j'avais la nostalgie de ce lieu, et le vague à l'âme au souvenir de Tummis agitant les bras dans la décharge pour appeler les mouettes. Ici il n'y avait pas la moindre lumière, pas davantage dehors, jour et nuit tout n'était que ténèbres depuis que Fetidborough avait été anéanti et que les Ferrayor étaient arrivés à Londres. Pour vivre. En secret. Parmi vous, les Londoniens. »



J'ai été emportée dans ce monde sombre et grisâtre, glauque et nauséabond, envahi par des montagnes d'immondices. Edward Carey est un magicien qui de sa plume, dessine un monde obscur, sordide, envoûtant et grisant.

Vous pourriez froncer le nez, comprenant dans quel univers je vous emmène, mais voilà, j'ai adoré me plonger dans cet univers sale et repoussant.



*

C'est aussi un roman porté par ses deux héros, Clod Ferrayor et Lucy Pennant. Là encore, leur caractérisation est très réussie.



Dans le tome précédent, le récit alternait leur deux voix. Celle de Clod, né avec le don de pouvoir parler avec les objets de naissance, de les déplacer ou les commander par la pensée. Celle de Lucy, une jeune servante du château des Ferrailleurs. Courageuse, intrépide, coriace, déterminée, elle donne beaucoup de dynamisme à l'intrigue.



Ici, dans ce dernier volet, l'histoire est racontée de plusieurs points de vue, pas uniquement ceux de Clod et de Lucy. Cette multiplicité des regards est intéressante car elle permet de se déplacer dans tous les coins de Londres, des taudis des quartiers malfamés jusqu'au palais de Westminster, de saisir l'ambiance de la ville comme les sentiments, les ambitions ou la noirceur des personnages.

Plus on se rapproche de l'épilogue et plus les voix des différents narrateurs se bousculent pour un final explosif surprenant et inattendu.



*

Dans ce Londres décadent, d'étranges personnages parcourent les ruelles étroites et miséreuses : une femme qui déverse de sa bouche grande ouverte un nuage d'un noir absolu ; un homme qui attire à lui, comme un aimant, toutes les immondices à sa portée ; des personnages qui se métamorphosent ; un monstre qui se repaît d'objets.

Et puis des centaines de rats qui se déversent dans la ville et se glissent partout.



*

L'histoire est très bien écrite, fluide et agréable à lire, avec une petite touche d'humour qui rend ce roman plus léger qu'on ne le pense à première vue à la lecture de ce billet. Toutes ces qualités servent une intrigue bien menée, prenante, riche en surprises.



Mais, si ce monde est ancré dans le fantastique et dans un passé historique, des analogies avec le monde d'aujourd'hui sont évidentes. L'auteur nous projette dans un monde singulier mais très réel, asphyxié par la surconsommation liée à notre mode de vie. Il nous amène aussi à réfléchir aux dérives de nos sociétés individualistes qui creusent les inégalités et fragilisent les liens sociaux.



« C'était donc la vie de Londres, c'était donc la grande machine de l'Empire, je pouvais la sentir et elle sentait l'humain logé à l'étroit, elle sentait le café et le tabac, le vin, l'encre et la suie, et la sueur, aussi. Entraînée avec le troupeau, je ne pouvais pas m'arrêter. J'étais ballottée sur cette vague telle une épave au sommet de la grande décharge. »



D'autres thématiques sont également abordées dans cette série : l'identité, la famille, la mort et la résilience.



*

Pour finir, c'est avec beaucoup de plaisir que j'ai retrouvé l'atmosphère lourde et colorée de gris des Ferrayor, mais je dois bien avouer que c'est avec un petit pincement au coeur que je quitte le monde d'Edward Carey.

A découvrir bien entendu pour son originalité, son cadre si singulier, son ambiance si fascinante, et ses personnages atypiques particulièrement attachants.
Commenter  J’apprécie          4025
L'observatoire

Impossible de dire pourquoi j’ai dévoré ce livre qui m’a conquise. Est-ce son histoire ? Son style ?Francis, le narrateur, vit dans cette résidence délabrée qu’on appelle L’observatoire avec ses parents immobiles et lui, qui par son métier est immobile aussi puisqu’il est statue dans un musée. Il possède plusieurs particularités. Je nomme les trois principales. Il collectionne des objets qu’il numérote dans son musée personnel qu’il vole parfois et ne quitte jamais ses gants blancs. Les autres locataires ne sont pas mal non plus. On est loin des clichés de la beauté ici. L’angoisse des locataires est à son comble quand ils apprennent l’arrivée d’une nouvelle voisine. Après son arrivée rien ne sera plus pareil... ⭐️ ⭐️ ⭐️ ⭐️
Commenter  J’apprécie          390
Les Ferrailleurs, tome 3 : La ville

Pauvres lecteurs ! Vous pensiez être déjà au cœur de la noirceur ; il n’en est rien.Ce dernier opus est de loin le plus sombre. C’est une plongée dans les ténèbres qui vous attend ! Préparez vous à errer dans les rues de Londres ou plutôt devrais-je dire « Londremor ». La ville de Big Ben est bouleversée par la famille Ferrayor au grand complet. Elle va révéler son vrai visage rendant l’ambiance anxiogène et oppressante à souhait ! L’étau se resserre autour du lecteur qui, plongé dans un brouillard infernal, n’arrive plus à percevoir la moindre lueur d’espoir.

Clod est abreuvé de tristesse, de colère et de haine. Il semble complètement perdu et vulnérable, à la merci de sa terrible famille, laquelle est pleine de ressources. Edward CAREY abat ses cartes et il a pensé à tout. Ce dernier tome tient ses promesses et regorge de révélations et de surprises. L’intrigue se tord et se dénoue en même temps que mon estomac. Mais quelle angoisse !



Toutes les frontières explosent et je ne sais plus qui sont les gentils et qui sont les méchants, ni qui est l’agresseur et l’agressé. C’est chacun pour soi. Pourquoi certaines vies vaudraient plus que d’autres ? Qui décide la place que chacun occupe dans la société ? Qui décide qui a le droit de vivre ou non ? Chacun défend son droit à l’existence mais est-on obligé pour ça de contester celui des autres !? Les métaphores sont nombreuses et les allusions aussi rendant la critique acerbe. Chacun comprendra ce qu’il veut, la réflexion est ouverte.



Pour autant, le rythme loin d’être plombé par tout ceci, est soutenu. D’ailleurs plus on approche de la fin plus les interventions de chacun se font courtes et alternent entre les différents personnages, créant ainsi une tension palpable. Toutes les pièces s’assemblent et le lecteur n’a plus qu’une envie : SAVOIR ! Et là encore aucune déception, la fin va au-delà des espérances. Cerise sur le gâteau : les dessins sans lesquels cette aventure n’aurait pas été la même pour moi. Ils ont nourri mon imagination et m’ont accompagné au fil des pages et de cette histoire en noir et blanc. Une histoire qui ne se lit pas, mais qui se vit !
Commenter  J’apprécie          3712
Petite

« La nouvelle s’était répandue que nous avions reproduit les têtes de Flesselles et de Launay. Lorsque, à présent, quelque individu subissait le même sort qu’eux, à savoir qu’on les découpait en proportions inégales, on s’adressait à nous pour en obtenir une réplique valable, afin que, par la suite, une fois les passions apaisées et le soleil levé, l’on pût apprécier les faits d’un œil plus rationnel. »



Et reproduire en cire diverses parties du corps humain, en privilégiant tout de même les têtes plutôt que les bas morceaux, Petite sait faire. Née Marie Grosholtz, à Strasbourg, en 1761, la future Madame Tussaud part à l’âge de six ans avec sa mère à Berne. Celle-ci a trouvé un emploi de bonne à tout faire qui leur permettra de fuir la misère qui les a toujours accompagnées.



Leur employeur est une figure étrange, un certain Docteur Curtius, qui vit des moulages de diverses pièces et organes du corps humain qu’il réalise pour un hôpital bernois. Il vit seul, est quelque peu maniaque et ne communique guère avec qui que ce soit jusqu’à leur arrivée. Bien vite la mère de Petite disparaît du tableau de ce théâtre de marionnettes qu’est la vie. Curtius prend Petite sous son aile. Elle a alors seulement six ou sept ans. Elle devient son employée et il lui apprend beaucoup de ce qu’il sait de son métier particulier. Curtius décide de partir pour Paris. Il l’emmène avec lui.



Ce sont leurs aventures, souvent cruelles et légèrement horrifiques, que nous conte Edward Carey dans ce roman savoureux, qui a pour scène principale le Paris (et Versailles) de la fin du règne de Louis XVI à la Terreur. Puis du Premier Empire.



Beaucoup de références viennent en mémoire à la lecture de ce roman très réussi : Sterne pour l’humour pince-sans-rire, Dickens pour l’étrangeté de certains de ses personnages. Celui de Marie est évidemment au centre puis qu’elle en est la narratrice. Pour avoir ensuite cherché des éléments biographiques de la vraie Madame Tussaud, je peux dire que, même si on a parfois du mal à le croire, Edward Carey en a presque toujours respecté les grandes lignes. Mais bien sûr, beaucoup de scènes étranges et grandguignolesques sont uniquement le fruit de son imagination !



Je remercie les éditions du Cherche-Midi et NetGalley pour m’avoir donné accès à l’édition numérique de ce livre.

#Petite #NetGalleyFrance

Commenter  J’apprécie          370
L'observatoire

Vous aimez les romans inclassables ?

Vous voulez du bizarre, de l’étrange, de l’absurde avec une belle pointe de mystère et de poésie ?

L’Observatoire est fait pour vous !

C’est un roman au style original avec une intrigue prenante, qui oscille sans cesse entre l’univers de Tim Burton et celui de Wes Anderson.

Nous découvrons le quotidien des habitants d’un étrange manoir à l’abandon, quelque part en Angleterre.

Chaque habitant y a ses particularités, ses failles, sa douleur ou sa faute, et l’histoire est un mélange de mélancolie, d’espoir, de tristesse et de joie mélangées, de surprises, de découvertes aussi incroyables que poétiques, on passe par le désespoir le plus profond, le plus lourd, le plus sombre à la joie la plus pure, la plus lumineuse, on croit lire un roman léger et on tombe sur des révélations « coup de poing », on pense être au coeur d’un roman noir et soudain, une lueur irradie et donne au récit une douceur et une tendresse fantastique.

Un roman merveilleusement écrit qui vous emmène dans un univers à part, fait de folie, de compassion, de chagrin, mais aussi d’amour et d’humanité, qui vous fait rencontrer des personnages que vous ne pourrez pas oublier même après avoir refermé le livre, qui vous émeut et vous donne envie de sourire et de partager de bons moments avec la terre entière.
Commenter  J’apprécie          366
Les Ferrailleurs, tome 2 : Le faubourg

Les romans d'Edward Carey sont incroyables : totalement décalés, excentriques, originaux, sombres, ils rappellent à la fois l'univers gothique et sombre de Tim Burton, la trilogie de Gormenghast de Mervyn Peake, ainsi que les personnages de Charles Dickens.



Après avoir aimé « L'observatoire », je me suis intéressée à la trilogie atypique des Ferrailleurs qui projette les lecteurs en Grande-Bretagne, dans les années 1800, sous le règne de la reine Victoria.

Si ce monde est ancré dans l'ère victorienne, l'auteur incorpore des éléments fantastiques surprenants : chaque membre de la famille des Ferrayor est très fortement lié à un objet fétiche qu'il reçoit à sa naissance, un objet d'une puissance telle qu'il repousse « la Fièvre », maladie qui métamorphose les personnes en objets.



Même s'il s'agit d'un roman fantastique plein de charme dans un style Steampunk. J'ai eu l'impression que le monde fantaisiste et débridé d'Edward Carey était tangible. Je me suis sentie étrangement bien, de plus en plus harponnée au fur et à mesure que j'avançais dans ma lecture.



*

Si le premier tome, se déroulait à l'intérieur de l'énigmatique château des Ferrailleurs, une famille puissante et bizarre ayant le monopole de tous les déchets de Londres, ce second volume se déplace à la périphérie de la capitale anglaise, devenue une immense poubelle à ciel ouvert. Nous sommes en 1876 dans « le Faubourg » de Forlichingham.



L'auteur nous offre une suite assez différente du premier tome dans lequel se dégageait une ambiance plutôt mystérieuse, encombrée de secrets, de non-dits, et de personnages fantasques et équivoques.

Dans ce second tome, la découverte de cet univers laisse la place à plus d'actions, de rebondissements et d'aventure. Les deux jeunes héros ont été séparés dans les dernières pages du premier tome de la saga, et le lecteur les suit alternativement, Lucy Pennant abandonnée dans la grande mer de déchets, Clod, le petit-fils de la famille Ferrayor, à l'intérieur du faubourg.



Je n'irai pas plus loin dans l'intrigue de ce tome pour laisser toute la découverte du très beau premier volume.



*

Edward Carey a un véritable talent pour rendre réel un univers qui mixe l'époque victorienne et un monde fictif plutôt futuriste et dégoûtant dans lequel les hommes seraient submergés par leurs déchets.



Ce décor atypique fait d'objets du quotidien, usés, cassés, vieux, négligés, abandonnés, égarés, est un personnage à part entière. S'étant accumulés au fil du temps, ils forment une mer d'ordures sur le point de déborder. Je dois dire que cet océan me fascinait énormément dans le premier volume et j'avais donc vraiment envie d'en savoir plus.

Ici, c'est comme si l'auteur m'avait entendue et répondait à mes attentes en zoomant sur cette zone lugubre entre le château des Ferrailleurs et Londres. le Grand Dépotoir de la capitale, comme une fange immonde se mouvant, ondulant, se déchainant comme un océan en furie, se fracassant sur les murs d'enceinte du faubourg, m'apparait avoir une vie propre.



« L'endroit était saturé de bruits : ruissellements, gargouillements, et dans le tumulte des eaux des objets déferlaient, entraînés dans les sombres flots. On se serait cru à l'intérieur d'une baleine géante, en train de nager dans son côlon. »



Lucy s'y retrouve enfermée, désorientée, esseulée, déterminée à retrouver Clod. Elle tente de retrouver son chemin dans cette affreuse montagne d'immondices en mouvement. Cette jeune femme a un vrai rôle, elle n'est pas une potiche. Astucieuse, réfléchie, maline, c'est un personnage qui met de l'énergie dans le récit, je l'ai beaucoup aimé.

Mais dans ses profondeurs nauséabondes se cache une créature aussi effarante que singulière, Benordur. L'auteur laisse à son sujet quelques interrogations en suspens qui, j'espère, trouveront une réponse dans le dernier volume.



Pendant ce temps, Clod, loin de la sécurité toute relative du château qu'il n'a jamais quittée, tente de comprendre les mystères qui entourent sa famille. Avec lui, le lecteur découvre la banlieue de Londres, le faubourg surnommé la cité immonde, lieu crasseux, nauséabond, lugubre, insalubre et particulièrement dangereux. L'auteur instaure un sentiment d'oppression, d'étouffement et on se sent vite écraser, broyer entre deux monstres qui n'ont que faire des petites gens.



« Une fumée noire que je n'avais jamais vue à Filching envahissait le ciel. Elle faisait corps avec lui, d'une couleur immuable, comme si l'hiver et la nuit régnaient en permanence. Était-ce l'effet de mon imagination ? Les murs suintaient. L'air était moite. Oui, toute la cité exsudait, bien qu'il ne plût pas. Les rues étaient couvertes de boue et de déchets… »



D'autres nouveaux personnages apparaissent dans toute leur étrangeté pour parfaire cette atmosphère étranglée et sinistre : l'inquiétant Tailleur qui manie comme personne une paire de ciseaux, le sournois Mr Rawling, le maléfique Rippit Ferrayor.



*

L'écriture, agréable, très visuelle, offre un magnifique contraste entre l'univers fascinant des objets et le monde lugubre, malpropre du Grand Dépotoir et du faubourg.

Edward Carey a cette capacité de jouer avec les nuances, alternant fantaisie et humour, mélancolie et laideur, oppression et assujettissement. Il aime à entrer dans les pensées et les sentiments de ses personnages aussi attachants que patibulaires et on se sent emporter dans le flux de l'intrigue.



« Je n'avais jamais pu désobéir à Grand-Maman, jamais de ma courte vie. Je me sentis alors dégringoler, tomber la tête la première dans mon enfance, dans un lieu que je préférerais de loin ne pas revoir. Je fis quelques pas. Comment faire autrement. Je me penchai et embrassai la joue arachnéenne de Grand-Maman. Je me sentis piégé dans une toile d'araignée, j'eus l'impression que les cheveux gris de ma grand-mère, ces poils, ces duvets de mouche, de papillon crépusculaire, ces cheveux d'araignée s'enroulaient autour de moi et m'enserraient dans de terrifiants noeuds de famille, d'amour, de corruption et de culpabilité, des noeuds à vous faire perdre votre âme. »



*

Mais l'auteur a d'autres cordes à son arc pour nous faire pénétrer cette ambiance mystérieuse et glauque. En effet, l'auteur illustre son récit de très beaux dessins en noir et blanc, offrant ainsi un miroir visuel à son récit.



*

Si l'auteur a un talent fou pour surprendre ses lecteurs et les guider dans un univers étrange, sordide tout en étant foncièrement fascinant, il nous nous amène à réfléchir aux conséquences environnementales de nos modes de consommation, de production et de notre culture du jetable.



J'aime les histoires qui font un pas de côté, cachant dans des récits imaginaires des messages importants. Dans cette histoire, l'auteur ajoute une dimension plus politique et sociale, sur l'injustice et à l'oppression, l'ignorance et la misère, l'intolérance et l'exclusion.

L'auteur nous fait également réfléchir à notre condition humaine, à notre pouvoir de nuisance des hommes, mais aussi au courage, à notre capacité à relever des défis par la voix collective.



*

Pour conclure, magnifiquement écrit et pensé, l'auteur anglais su déployer tout son talent d'écrivain et de dessinateur pour nous proposer une lecture addictive et plaisante qui révèle beaucoup de secrets sur le monde des Ferrailleurs, mais laisse toutefois quelques questions en suspens, sûrement pour relancer l'intérêt du lecteur et l'inciter à lire sans tarder le troisième et dernier volume de cette belle saga.

Un très bon roman de transition.
Commenter  J’apprécie          3426
Les Ferrailleurs, tome 3 : La ville

Ce que j’ai ressenti:



***Petites lumières d’espoir…



A faire tourner les têtes et les objets, à faire naître la petite lueur au milieu des immondices, Clod Ferrayor l’original de la famille, et sa flamboyante Lucy Pennant, détraqueront leurs petits mondes en transition, à coups de poings et à voix étranges! Les objets vivent, se rebellent, les liens de famille grincent, les insignifiants se font entendre: c’est la débandade! Nos deux adolescents chouchous sont lancés à l’assaut de leurs espérances, entamant une grande bataille enflammée, une guerre pour ne pas perdre ce « petit quelque chose », un territoire à conquérir après l’anéantissement du leur, mais surtout se retrouver envers et contre tous…Et tout du long, l’amour à dénicher, dans les yeux et sous les ruines du chaos…Quelle épopée!



« Quand cesse-t-on d’être une personne, me demandais-je, et quand commence t-on à être autre chose qu’un être humain? »



***Au sein des ténèbres…



A voir les détritus s’allier, à voir disparaître les gens dans la pire insignifiance, à sentir un Londres mort à petit feu et un Londremor vivant de poésie étincelante, Edward Carey, nous ouvre les portes d’un imaginaire riche où, j’ai adoré me perdre. Les transformations s’accélèrent, le mystère s’épaissit et tout par à va-l’eau , ou plutôt à va-l’ordure…Et le géant se soulève tandis que la Reine s’incline…La grisaille envahit la ville, et les êtres lugubres hantent les lieux. C’est l’ultime affrontement et on sent une tension incroyablement sombre s’emparer de tous les habitants. Et quelle atmosphère!!!!



« Nous avons tous respiré la nuit, nous l’avons tous fait entrer en nous. »



***Et dans la ferraille, trouver un coup de coeur
Lien : https://fairystelphique.word..
Commenter  J’apprécie          320
Les Ferrailleurs, tome 1 : Le château

J'ai l'honneur de vous présenter mon 1er coup de coeur 2016 ! Je dirais même plus : Les Ferrailleurs vient d'entrer dans mon top 10 de tous les temps.



Commençons par l'objet-livre : un très beau poche agrémenté des illustrations de l'auteur lui-même. Des illustrations que Tim Burton ne renierait pas : à l'encre noire, gothiques à souhait, à l'image de ce très surprenant récit. Deux illustrations double-page, l'une en tout début de roman et l'autre en toute fin, permettent au lecteur de se situer un peu dans le château labyrinthique des Ferrayor.



Le récit se construit autour de chapitres, de longueurs inégales. A chaque début de chapitre un portait de l'un des personnages dont il sera question dans les pages suivantes. Un titre qui correspond toujours à un objet dont il sera question également par la suite. Le titre est toujours suivi d'un sous-titre qui explique un peu plus de quoi il va être question mais tout en restant très mystérieux.



Il me faut maintenant vous expliquer un tant soit peu le récit, car toute l'originalité du livre vient de là. Clod Ferrayor, quinze ans, a une sorte de don très particulier : celui d'entendre les objets parler. Ceux-ci se contentent habituellement de répéter leur nom à l'envi. Clod fait partie de la famille, réputée et crainte, des Ferrayor. Toute la famille vit dans un château immense fait de bric et de broc, construit au beau milieu de la décharge, du Grand Dépotoir, une mer immense de déchets abandonnés. Pour les servir, tout une tripotée de Ferrayor inférieurs, qui n'ont pas le sang pur et sont relégués en bas du château et ne sortent que la nuit pour nettoyer le haut. Chaque membre de la famille Ferrayor possède, dès sa naissance, un objet qu'il se doit de garder toujours sur lui. Mais un jour, la poignée de porte de Tante Rosamud disparaît... Et ce jour coïncide avec l'arrivée de la servante Lucy Pennant.



Vous m'excuserez d'avoir été un peu longue mais l'univers est si unique et particulier qu'une explication s'imposait. La plume de l'auteur, extrêmement imagée et savoureuse, complètement délurée par moment, se met au servir d'un univers très noir. Elle rend beau le laid, le sale, le puant dans un lyrisme à peine voilé. Mais surtout elle questionne le lecteur sur divers sujets de société : la lutte des classes et la servitude, la société de consommation et le poids des traditions... Il y a aussi un fameux mystère à résoudre et une idylle à suivre (d'ailleurs je vous préviens : il s'agit du 1er tome d'une trilogie alors ne vous attendez pas à tout voir résolu dans ce tome-ci).



Je vais m'arrêter là car je pourrais porter ce livre aux nues jusqu'à la fin des temps. Un univers gothique unique, une imagination débridée, une écriture imagée, percutante et savoureuse : jetez-vous dessus sans tarder ! Et je remercie les éditions du Livre de Poche et Masse Critique pour cette découverte marquante.



Challenge Multi défis 2016
Commenter  J’apprécie          302
Petite



Ce livre est carrément génial!

Edward Carey, l’auteur, britannique, est romancier, dramaturge et illustrateur.

Nick Hornby a parfaitement résumé ce livre : «Petite est le roman que Dickens aurait sans doute écrit s’il avait vu les films de Tim Burton ».



Ce passionnant conte gothique retrace la vie de la française Marie Grosholtz (future Mme Tussaud) et nous fait traverser l’histoire, le temps et les pays.

Elle rencontre à Berne son maître, le docteur Philippe Curtius, un sculpteur sur cire, qu’elle suivra jusqu’à Paris, où elle fréquentera la cour de Louis XVI.

Elle traversera la Manche, où elle fondera un musée de cire en 1835, le célèbre musée Tussaud.



L’auteur réussit à nous captiver dès les premières pages, le récit est palpitant.

Les dessins de l’auteur agrémentent magnifiquement le récit.

J’ai adoré cet univers à la Dickens.



Un immense coup de ♥

Commenter  J’apprécie          291
Les Ferrailleurs, tome 1 : Le château

Quelle étrange maisonnée que ce château des Ferrailleurs! La riche famille Ferrayor y vit au milieu d'un gigantesque dépotoir dont elle vit depuis des générations. Ses membres paraissent d'emblée très bizarres et les domestiques le sont tout autant.



L'histoire nous est d'abord racontée par Clod Ferrayor, quinze ans et demi, malingre et qui possède une capacité qui lui vaut bien des soucis avec ses congénères : il entend les objets prononcer leur nom. Pas commun, non? Comme les autres Ferrayor, Clod a reçu à sa naissance un objet dont il doit prendre le plus grand soin toute sa vie et dont il ne doit pas se séparer, en l'occurrence une bonde de métal munie de sa chaînette. Pas terrible à première vue mais comme d'autres ont reçu un extincteur, un manteau de cheminée en marbre ou un poêlon, il ne s'en sort pas si mal.



Ses chapitres alternent avec ceux de Lucy Tennant, orpheline amenée au château pour travailler comme domestique. Forcément, on se dit que les deux narrateurs vont converger.



Le premier tome de la trilogie des Ferrailleurs, Le Château, est un ouvrage à l'image de ses personnages. Edward Carey illustre lui-même son récit et le moinsquon puisse dire, c'est que ça ne respire pas la joie de vivre. En même temps, vivre au milieu de kilomètres carrés d'immondices et de rebuts, avec les risques qu'ils finissent par engloutir la demeure, ça ne prête pas forcément à la grande rigolade. Pas plus que d'être astreint à des coutumes familiales bizarres et confrontés à des oncles et cousins particulièrement tordus et mauvais pour certains.



Avec son univers singulier, Edward Carey signe un roman original et assez déroutant au départ. Mais je me suis laissée emportée non par les détritus mais par la poésie gothique et morbide des péripéties de Clod et de Lucy. J'y ai retrouvé un côté Tim Burton dans les personnages aux yeux cernés, au teint blafard et mélancolique.



De plus, alors que la lutte contre le gaspillage et les affreuses conséquences du plastique sur continents et océans sont plus que jamais à l'ordre du jour, Les Ferrailleurs posent la question du rapport que l'on a avec les objets. Les montagnes de déchets dont la famille Ferrayor prospère indiquent bien la propension à jeter tout et n'importe quoi dès que c'est abîmé, plus à la mode ou parce qu'on s'en est lassé. De quoi réfléchir à travers ce récit fantastique à l'ambiance victorienne à nos comportements de consommateurs contemporains.



Enfin, il s'en passe de drôles au château, d'époustouflantes révélations défilent au gré des chapitres et la conclusion de ce premier tome incite vivement à lire la suite.
Commenter  J’apprécie          260
Les Ferrailleurs, tome 1 : Le château

Ce que j’ai ressenti:…Un univers incroyablement fascinant!…



Dès les premières pages, j’ai été envoûtée par cette ambiance sombre et originale…Tous ses mystères autour de ses objets qui parlent, ses deux adolescents qui se racontent, tour à tour, au sein de cette décharge, la puissance de l’imagination de l’auteur…Bienvenue dans une nouvelle saga : les Ferrailleurs! En plein dans un Londres revisité et très empreint de dangers grisâtres, on explore un lieu atypique fait de bric et broc. Totalement dépaysant et surprenant, on se perd avec un certain plaisir dans cette avalanche d’immondices, de montagnes de noms, de destins parlants qui régissent les Ferrayor.



« Nous étions comme des puces, des abeilles, des moucherons ou des scarabées bourdonnant, des cancrelats, des fourmis-scarabées, des phalènes cornues, qui tous vivent peu de temps, battent des ailes, s’affolent, rampent, mangent, vivent, aiment puis meurent, un petit tour et puis s’en vont, tout ce petit monde périt, et il n’en reste qu’une salissure. »



J’ai lu ce livre en plein mois de décembre, autant dire que j’étais dans l’ambiance de noël, et voir une bonde ou encore un sofa murmurer, ça force la magie…Il y avait ce qu’il faut de gothique et de féerie pour que je sois emportée dans cette tempête bien particulière, que je veuille découvrir tous les recoins sombres du Château, et que je m’émeuve devant la naïveté touchante de Lucy et Clod. Clairement, il y a des rendez-vous réussi, et cette lecture en périodes de fêtes, c’était le bon timing…



"As-tu jamais désiré jouer le rôle principal dans ta propre histoire?"



Je suis d’ors et déjà impatiente de poursuivre les aventures de ces lieux lugubres, et de ressentir les envolées lumineuses de nos deux héros maladroits et voir s’épanouir les paraboles de Edward Carey. J’ai été très touchée par la sensibilité que l’auteur met dans cet océan de vies et de déchets, enchantée par l’étincelle qu’il peut faire jaillir pour ses vies effacées, troublée par la douceur candide de cet amour naissant.



"Mais elle, c’est une pensée, la plus belle des pensées. Les meilleures pensées que j’aie jamais eues sont mes pensées pour Lucy Pennant."



Le petit Plus: Les illustrations de l’auteur en début de chapitres.





Ma note Plaisir de Lecture 9/10
Lien : https://fairystelphique.word..
Commenter  J’apprécie          260
Les Ferrailleurs, tome 1 : Le château

Les ferrailleurs, la librairie le propose pour prendre le relai après l’inclassable Les saisons de Maurice Pons (a-do-ré)



Dans la veine pas du tout, loupé!, mais on est plongé dans un monde magico-gothico-fabuleux très attachant. C’est pas du tout mes attraits habituels mais plus j’y goute plus j’en veux (Murakami, Martinez, Marques, Pons) J’adore! Quel bon moment, quel délice de s’entourer de ces univers hors normes. On ne sait pas ce qui nous attend, c’est inclassable, ça frétille.

Edward Carey c’ est du Tim Burton en barre, un enfant qui entend parler les objets, pas la peine dans savoir plus pour succomber. Tout l’univers et les intrigues autour collent parfaitement à l’enchantement de son écriture. Les dialogues sont vivants, les jeux de mots très fins et habiles, l’humour très anglais pour ce que j’en imagine, les personnages bien à leurs places et costumés comme l’architecture du décor : sérieux, loufoque et de guingois. L’empire prend l’eau mais sauve qui peut les apparences de cette noblesse pauvre et misérable. Les parallèles sociétales sont nombreux et suffisamment imagés pour en faire de multiples lectures alors on rit, on prend ça avec légèreté mais la satyre est bien en place, le flot d’aventure continuel est intarissable. Evidemment que les deux prochains tomes sont avidement attendus, on va pas laisser les gentils se perdent dans la nature hostile….
Commenter  J’apprécie          2413
Les Ferrailleurs, tome 2 : Le faubourg

Ce que j’ai ressenti: ...Changement de décor, mais toujours autant de charme obscur…





Quand j’ouvre ce deuxième tome de la trilogie, je retrouve immédiatement cette ambiance sombre et délicate, ce style inimitable de Edward Carey…Et la magie fonctionne encore, parce qu’il a cette grâce de savoir créer un vrai monde à part, avec ses règles et ses étrangetés. Avec Le Faubourg, il nous ouvre encore un peu plus son univers, lui conférant un autre aspect que la vie de Château, étend notre regard sur d’autres horizons encore moins reluisant de ce Londres revisité. Et quelle fantaisie grisâtre dans ces rues qui se balade encore allègrement! C’est étourdissant d’immondices et de rencontres insalubres…



« Vivace est la beauté, elle ne se laissera jamais enterrer. »



Lucy Pennant et Clod Ferrayor ne sont pas au bout de leurs peines, pour tenter de comprendre et d’infléchir la volonté du maître des lieux…A coups de tentatives infructueuses et de rencontres chanceuses, ils se découvrent plus enhardis, moins insignifiants, et nous lecteurs, de les suivre dans leurs folles aventures, on découvre deux adolescents étranges et attachants avec leurs doutes, leurs failles et leurs tracas. Leur passage à l’âge adulte se fait dans la lutte pour les autres dans une obscure farandole d’objets doués de paroles, et ils en sortent grandis, et plus proche que jamais, tout en étant à chaque fois séparés…Chapitre après chapitre, leur histoire d’amour s’inscrit dans cette intention de faire bouger les choses… Heu, les objets… Heu pardon, les gens…*Veuillez m’excuser, je suis encore dans les brumes d’un rêve…Pourquoi ai-je un demi-souverain dans la poche?!*



"Les hommes dans les guerres perdent leur âme, elle est foulée aux pieds, je l’ai vu, il n’y a plus d’individus, rien qu’une masse, une grande masse qui court à son anéantissement."



Je craque carrément pour cette plume poétique et gothique, et ces moments de lectures me sont précieux car cette plongée dans un imaginaire si prégnant, devient un délice de découverte. On ne sait jamais à quoi s’attendre, puisque c’est totalement loufoque, plein de folie douce, délicieusement inventif…Et puis, ces jeux de mots, cette qualité de métaphores, c’est juste fantastique! Vous l’aurez sans doute compris, j’ai plus que hâte de lire La Ville, tome 3 de cette trilogie pleine de surprises….



« Je suis sujette à des rêves incroyables. Nanny me dit que je ne devrais pas lire autant de livres, que si je continue à ce rythme, ils finiront par me tuer. »







Ma note Plaisir de Lecture 9/10
Lien : https://fairystelphique.word..
Commenter  J’apprécie          210
Les Ferrailleurs, tome 3 : La ville

Après Tristan et Iseult, après Roméo et Juliette, voici Lucy et Clod, Lucy aux cheveux rouge comme les flammes et Clod, un jeune homme maladif aux pouvoirs bien particuliers.

A peine se rencontrent-ils une nuit, devant une cheminée éteinte que la vie les sépare déjà…mais ils feront tout pour se retrouver, malgré des obstacles dignes d’un conte de fées.

Il faut dire que l’auteur nous transporte dans un univers étrange et envoutant, avec cette trilogie dense (3 romans de 500 pages chacun) pour le moins originale qui se déroule en 1875 dans un Londres sombre, crasseux, suintant, malodorant, une ville écrasée sous les détritus.

Car il faut dire que dans cette histoire qui ressemble fort à un conte gothique, ce sont les ordures qui ont le premier rôle.

Oui, vous avez bien lu, ce sont les objets abandonnés et cassés, les résidus gras, les détritus puants, les déchets, les épluchures, les rebuts, la pourriture, la saleté, les cochonneries et la moisissure qui sont au cœur de cette histoire.

Car ici, ce qui se joue, c’est une sorte d’Histoire de la Décharge, avec sa création, ses membres, sa légitimité, son pouvoir, son règne et sa chute.

Et tous ceux qui se trouvent sur son chemin risquent d’être effroyablement écrasés, compressés, écrabouillés, réduits en poussière et pulvérisés en fluide visqueux car la décharge est une Reine, et elle ne tolère ni remise en question, ni coup d’Etat.

Alors si vous n’avez pas peur de salir vos beaux vêtements, de mettre les mains dans la fange, de respirer des miasmes de mort, venez faire la connaissance de Lucy la servante aux cheveux rouges et de Clod, issu de la puissante lignée des Ferrayor.

Venez affronter des montagnes de détritus, venez plonger au cœur de la plus immonde décharge que nous n’ayez jamais vue et peut-être que vous aussi, vous serez happés par la magie qui émane de ces pages et que vous succomberez de plaisir, vautrés dans la suie et le purin, baignés par des odeurs pestilentielles, dans une ambiance glauque digne d’un Tim Burton qui serait tombé amoureux et aurait envie de montrer au monde entier que tout ce qui est rejeté, cassé, détruit et hors service peut encore avoir une vie et des sentiments.

Et pour encore plus de plaisir, l'auteur a dessiné lui-même les protagonistes de cette histoire, vous pouvez découvrir ses illustrations dans les trois volumes.

Commenter  J’apprécie          200
Petite

Une Petite Menteuse !



L'auteur, Edward Carey a travaillé 15 ans sur cet ouvrage. La période du XVIIIe siècle est bien restituée depuis 1761.



Ce roman historique raconte la vie de Marie Grosholtz épouse Tussaud, sculptrice de visages en cire.



Comme ses mémoires, cette histoire est emplie d'invraisemblances et de mensonges !



Orpheline jeune, elle est au service d'un médecin, sculpteur sur cire qui lui apprend le métier. En 1769, ils arrivent tous deux à Paris, sur les conseils de Louis-Sébastien Mercier (le célèbre romancier ami d'Olympe de Gouges).



Elle vivra huit ans au château de Versailles au service de Madame Elisabeth en tant que professeur de dessin et de sculpture.



Chassée du château, elle retournera vivre auprès de son maître et connaîtra tous les évènements jusqu'en 1850, année de sa mort à Londres.



Elle fera la connaissance de nombreuses personnalités, la famille royale, le peintre Jean-Louis David (qui dans ses mémoires la sauve de la guillotine…) et effectuera les moulages de nombreuses personnes (Louis XVI, Marie-Antoinette, Marat, Robespierre, Joséphine de Beauharnais, Bonaparte...)



Elle partira à Londres pour continuer sa carrière. Cette épopée n'est pas développée dans le roman c'est dommage.



Ce roman, bien que très bien documenté, m'a laissée froide, comme son style ; les personnages, les sentiments, les bâtiments sont décrits succinctement, d'un style assez neutre avec des phrases courtes, entrecoupées par des listes immenses ! Un style très original mais lassant, un peu enfantin visant à restituer une ambiance…

Les personnages sont tous étranges, à la limite de la folie ou du théâtre ! Un médecin gentil, doué, mais insignifiant, une veuve méchante, un fils invisible, du personnel atypique ou violent…

Aucun sentiment ne transpire de cette biographie : un simple amoncellement d'anecdotes ! Je n'ai pas lu les souvenirs de Mme TUSSAUD, peut-être sont-ils rédigés de la même manière ?!



Des dessins de l'auteur sont insérés à travers l'histoire.



Ecrit à la première personne du singulier, c'est une autobiographie fictive.



Un livre original sur un personnage énigmatique.
Commenter  J’apprécie          190
Les Ferrailleurs, tome 1 : Le château

Un ovni. Et encore une trilogie.

Je suis partagé entre le rejet - lourdeur la narration, originalité d'un univers à double tranchant - et l'enthousiasme : une saga résolument moderne dans sa quête amoureuse, son rapport entre les objets et les hommes, la place à faire à leur surabondance, entre fétichisme et oubli.

Chez les Ferraileurs, dynastie digne de la famille Adams, chaque membre se voit attribuer un objet à sa naissance qui le suivra toute sa vie durant.

Ils vivent dans une immense demeure plantée sur une décharge éloignée de la ville de Londres (qui fait l'objet d'un T3) par deux murs d'enceinte (au milieu duquel on trouve le Faubourg, dépeint dans le T2), décharge qui assure leur subsistance grâce au recyclage des déchets. Ce véritable océan d'immondices peut prendre vie tel un golem monstrueux.

On assiste à des transformations d'individus en objets. Ce qui m'amène à penser que l'homme n'est pas à l'abri du drame de l'utilité... cf la Bible... les vignes... produire de bons fruits...

Le héros, c'est Clod. Son objet, une bonde. À l'image de sa personnalité (ou de son absence), pareille à un barrage qui amoncelle amoncelle avant de sauter avec perte et fracas. Mais chut !



Les Ferrailleurs c'est noir, glauque, c'est froid. La famille est haïssable, violente, implacable et infernale. Mais c'est aussi une éloge de la révolte à sa manière.

Les dessins de l'auteur, en noir et blanc, reflétent à merveille cet univers décidément gothique et crépusculaire...
Commenter  J’apprécie          1811




Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Edward Carey (942)Voir plus


{* *}