Nous parlons depuis les ténèbres est une anthologie dirigée par Estelle Faye et Floriane Soulas, parue aux éditions Goater. Je me suis procuré ce recueil à Ouest Hurlant; c’était, un des bouquins sans lequels je ne voulais pas quitter le festival. J’avais assisté à la table ronde dédiée à l’anthologie, qui m’avait mis encore plus l’eau à la bouche. Malheureusement, je peux dire que la rencontre est loupée.
Je ne vais pas passer en revue les différentes nouvelles ici. Si vous le souhaitez, je vous invite à lire la chronique complète sur le blog, je mets le lien en-dessous.
En revanche, je vais plutôt livrer mon ressenti global et quelques remarques d'ensemble.
La déception vient d'abord de mes attentes, en fait. Cette anthologie promettait du lourd et du sombre. J’attendais un dépassement de l’imagination, des textes sans limites, des prises de risques. Mais finalement, je n’ai rien eu de tout cela.
D'abord, « aucune limite », avait dit Estelle aux autrices. Malheureusement, c’est la sensation que j’ai eue en lisant Nous parlons depuis les ténèbres. Certains textes ne sont pas suffisamment aboutis, d’autres se révèlent assez timides. J’ai senti de la retenue à plonger franchement dans les ténèbres, comme si les autrices avaient souhaité rester sur le seuil. Et j’ai même ressenti une sorte de froideur, de réticence à parler depuis les ténèbres. Comme un manque d’entrain, ou un texte écrit parce qu’il le fallait. Je n’ai pas ressenti le plaisir qu’ont eu les autrices à écrire ces nouvelles.
Ensuite, je n’ai pas vibré dans ces pages. Je n’ai pas frémi, je n’ai pas eu de frissons, rien ne m’a vraiment bousculée, dérangée ou mise mal à l’aise durablement. Et c’est surtout ça que je reproche au recueil. D’être mollasson, de manquer de punch, de volonté, de cœur à l’ouvrage, de fougue, de saut à pieds joints dans la noirceur collante des ténèbres. Il y a quand même la nouvelle de Morgane Stankiewiez, qui se détache très clairement des autres textes. Mais ça ne suffit pas; les nouvelles ne sont pas mauvaises, d'ailleurs j'ai bien aimé quelques textes (celui de Louise Le Bars avec sa prose poétique, celle de Cécile Guillot, très mélancolique...). Mais en termes de coup de poing dans la tronche, le compte n'y est pas. Et ça, c’est vraiment, vraiment dommage.
Est-ce parce que notre conception française de l'horreur est beaucoup plus restrictive que celle anglo-saxonne ? Peut-être, mais dans ce cas, il me semble que le recueil ne se positionne pas très bien, tant dans son projet littéraire que vers son lectorat. Il aurait peut-être fallu, dans la préface, réancrer l'anthologie dans un héritage plus marqué afin que les attentes soient en concordance avec les textes proposés. C'est juste une hypothèse, que je développe davantage dans mon billet, mais je me suis posé la question, en tout cas.
Enfin, quelques remarques sur la forme. J'ai trouvé dommage qu'il n'y ait pas davantage de liens entre les nouvelles. J'ai plus eu la sensation de lire une addition de textes qu'un ensemble harmonieux tissé de bout en bout, avec échos et clins d'œil. Je regrette aussi que la forme finale n'ait pas été plus soignée, avec une relecture performante éliminant les coquilles, oublis de ponctuation et maladresses de langage dans une nouvelle. Ce beau projet aurait mérité à mon avis de mûrir davantage.
Alors voilà, j'espérais un feu d'artifice, un océan de malaise, de frissons et de vertiges, un puits de noirceur sans fin, mais ma lecture a davantage ressemblé à un pétard, une promesse de nuits tranquilles et des nuances de gris. Je suis un peu déçue, il faut bien le dire...
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