Ce n'est qu'un roman...je me répète cette phrase comme un mantra, tentant de m'extirper de ces sensations extrêmes et presque malsaines qu'il a pu m'insuffler. J'essaie de cautériser la plaie que cette lecture éprouvante a rouverte à coup de pansements à l'âme et de points de suture au cœur.
Ce n'est qu'un roman me dis-je... comme si la vacuité de mes propres actes ou de ma propre vie ne m'avait pas été jetée violemment à la figure, comme si Patrick Senécal n'avait pas, à coup de catapulte, brisé quelques fragiles défenses érigées avec soin depuis longtemps.
Ce n'est qu'un roman...mais il m'a tant secouée, tant fait resurgir quelques démons que je croyais trop vieux pour crocheter mes serrures que même refermé, il me nargue de ses messages.
Ce n'est qu'un roman... 800 pages lues presque d'une traite tant j'étais subjuguée, fascinée, presque envoûtée par ce récit.
Senécal choque, Senécal bouscule, Senécal franchit les limites même. Mais Senécal écrit sur la part sombre de l'être humain, celle que nous avons tous et qui est censée nous différencier de l'animal sans pour autant que nous puissions en retirer une quelconque fierté. Celle-là même qui en fait ralentir certains sur les lieux d'un accident ou qui en pousse d'autres à ignorer la misère humaine.
Le côté insoutenable de certains passages sont assenés de manière si violente que je les ai lus du bout des yeux, me questionnant sur la nécessité d'écrire de telles abominations mais à bien y réfléchir, le cheminement de certains personnages en devient plus compréhensif, voire presque évident.
Roman écrit en 2007 et choisi par Fleuve Noir pour faire enfin connaître Patrick Senécal en France, « Le vide » est bien plus qu'un thriller. L'auteur réussit à poser la question des limites de la liberté d'expression, de la décadence de notre société à travers des jeux pervers, de la folie de l'homme et du sens de la vie...
Tout change et pourtant...rien n'a changé. Donnez-leur des jeux et du pain : c'était il y a 2000 ans et le peuple ainsi que les manipulateurs sont toujours les mêmes. Le monde est un échiquier, nous en sommes les pions. Roman presque sociologique, « Le vide » m'a apporté un questionnement quasi philosophique et m'a profondément remuée.
Pour la plupart, nous traversons la vie de façon conventionnelle, mais sommes-nous pour autant condamnés à ne rien en faire d'extraordinaire, à ne rien laisser ne serait-ce qu'une trace infime ? Nos rêves fous ou illusoires sont-ils tous dérisoires ? Et que faire pour remplir mon propre vide ? Écrire...
Ceux qui me connaissent savent que j'ai tendance à digresser et à me relire, je le reconnais bien volontiers. Je réalise même que cette chronique n'en est pas vraiment une. Pourtant, un bon roman est justement là pour ouvrir d'autres perceptions, pour engendrer d'autres réflexions. Aussi éphémères soient elles...
Mais ce n'est qu'un roman...n'est-ce-pas ?
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