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Critiques de Will Eisner (194)
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Le Rêveur

C'est toujours un plaisir pour moi de poster une série émanant du célèbre Will Eisner, l'un de mes auteurs préférés. Ici, il est question d'évoquer sa vie lorsqu'il a débuté dans le monde de l'industrie du comics des années 30. Il va faire de nombreuses rencontres tout au long de son parcours et pas des moindres comme Bob Kane, le créateur de Batman. Il le connaissait déjà car ils étaient au lycée ensemble. Il y aura également Jack Kirby (X-men, les 4 Fantastiques) et bien d'autres...



C'est intéressant également de voir comment évoluait la bande dessinée américaine avec un rapport évident à l'argent et quelques fois à la facilité. J'ai bien aimé le passage où Will (qui se fait appeler Billy dans ce récit) refuse de dessiner des versions pornographiques des comics strip connus (du genre Popeye au lit !) qui étaient vendus clandestinement par la Mafia durant l'époque de la prohibition. En effet, ce type d'oeuvre violaient les lois du copyright et de la marque déposée. Résultat des courses: il se fait virer. Bref, il n'a jamais renoncé en vendant son âme de rêveur. On apprend qu'il a dû se battre durement avant de réaliser son rêve.



Cet ouvrage, c'est l'âme même du comics par l'un des plus grands créateurs de la bande dessinée moderne. Inloupable pour les amateurs et les amoureux du genre.
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La Valse des alliances

C'est la première fois que je lis une oeuvre de Will Eisner, inculte que je suis! Je suis très agréablement surpris par le style de l'auteur ainsi que par le dessin dans sa représentation des différents personnages. Cela me plaît bien et me donne envie de découvrir d'autres histoires.



En outre, j'ai aimé le sujet: les mariages arrangés dans les familles juives outre-atlantique. C'est une véritable saga que l'on suit et qui décortique les mécanismes de l'ascension ou de la régression sociale.



Mais je n'aime pas les erreurs aussi minime soit 'elle : Baden Baden est une jolie station balnéaire située en Allemagne non loin de chez moi et non en Suisse !



Parce que c'est une agréable découverte, 4 étoiles !



Note Dessin: 4/5 - Note Scénario: 4/5 - Note Globale: 4/5
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New York Trilogie, Tome 1 : La Ville

Je n'arrête pas de découvrir un peu plus l'oeuvre de Will Eisner. C'est fascinant tout ce qu'il a pu faire dans sa vie cet auteur prolifique!



Ici, je découvre de petites histoires urbaines sur le quotidien des habitants de New-York City particulièrement de la population juive. On pénètre dans un microcosme particulier illustré de manière si singulière. La morale est toujours là pour illustrer le propos.



C'est toujours aussi bien dessiné mais je dois avouer que je préfère légèrement La Valse des Alliances ou encore Fagin le Juif.



Le dessin d'Eisner est dynamique et bavard, volontiers caricatural, théâtral, chorégraphique, plus que chez aucun autre. On peut parler de mise-en-scène et non de « plans » et autres « cadrages ».



Cette série vaut quand même la peine d'être découverte. Mais attention : ce sont des histoires bien tristes...



Note Dessin: 4/5 - Note Scénario: 4/5 - Note Globale: 4/5
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Jacob le cafard

Jacob le cafard est le second volet de la trilogie du "Pacte avec Dieu". Il constitue à lui seul un récit complet. Un vrai conte urbain assez poignant!



Nous suivons la chronique de différents personnages dans le quartier du Bronx à New-York au moment de la grande dépression de 1929 notamment celui de Jacob Shtarakash, un homme simple, qui lutte chaque jour pour mettre sa famille à l'abri du besoin. Mais il va être rattrapé par la Grande Dépression puis la Seconde Guerre mondiale. Il va faire la difficile expérience d'une vie d'émigré aux Etats-Unis. En effet, il assiste à l'émergence de l'antisémitisme et doit dès lors faire face à des évènnements qui le dépassent.



Tout y est d'un point de vue historique. On suit la vie de ces personnages et en même temps l'Histoire de l'Amérique en proie avec le communisme et la misère. On perçoit également des échos d'une Allemagne nazie qui a commencé la chasse à l'homme...



Cette BD reste avant tout un combat existentiel, le Bronx n'occupant le statut que de simples décors.



Will Eisner semble être au sommet de son art avec cette oeuvre véritablement mâture. Ce portrait bouleversant du quotidien des habitants du quartier du Bronx mérite toute votre attention.



Note Dessin: 4/5 - Note Scénario: 4/5 - Note Globale: 4/5
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Fagin le juif

Encore une fois, Will Eisner me surprend véritablement. C'était une tâche bien audacieuse que de réécrire sa version d'une oeuvre de la littérature anglaise aussi connue qu'Oliver Twist.



Personnellement, je ne savais pas que Fagin était d'origine juive et que cette oeuvre avait galvanisé un sentiment stigmatisant cette population déjà bien martyrisée par l'Histoire: Will Eisner apporte toujours un éclairage très instructif. C'est comme si l'auteur avait voulu réhabiliter ce personnage bien méchant dans la version d'origine.



L'exercice de style était difficile et c'est pourtant un pari réussi. L'auteur parvient à nous surprendre. Il va plus loin que le stéréotype classique en expliquant le pourquoi des choses et comment le destin d'un homme peut basculer pour presque rien.



Oeuvre qui prouve qu'en BD, on peut mêler à la fois la rigueur, l'exigence et l'imagination. Une incontestable réussite !



Note Dessin: 4/5 - Note Scénario: 4/5 - Note Globale: 4/5
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The Best of the Spirit

Ce tome est une anthologie regroupant 22 épisodes de 7 pages du Spirit en couleur, écrits et dessinés par Will Eisner (1917-2005). Il commence par une introduction de 3 pages, rédigées par Neil Gaiman, évoquant brièvement la carrière de Wil Eisner, ainsi que l'importance des aventures du Spirit dans ladite carrière, mais aussi pour les comics en général. Les 22 histoires courtes sont ensuite publiées dans l'ordre chronologique : du 02 juin 1940 pour la première au 05 janvier 1950 pour la dernière. Le tome se termine avec une très courte biographie de l'auteur.



Denny Colt est un criminologue et un détective privé qui a l'habitude de travailler avec le commissaire de police Eustace. Dolan Un soir Dolan lui indique que le docteur Cobra est à nouveau actif. Colt sait où il se trouve et se rend dans son repère. Il est détecté, assommé et son corps inanimé baigne dans un liquide issu d'une expérience du docteur Cobra. Quand la police arrive enfin, elle trouve le cadavre de Denny Colt : il est mort. La même nuit, un mystérieux individu masqué se rend dans le bureau de commissaire Dolan déclarant s'appeler Spirit et indiquant qu'il va livrer le docteur Cobra pour toucher la récompense promise. Par la suite, Spirit déjoue un vol de bijoux mis sur pied par une équipe menée par Satin (une femme fatale). Il se trouve dans une rame de tramway où voyage un individu persuadé d'avoir tué le Spirit. Il essaye de détecter un message sur une feuille de papier vierge, avec l'intervention de Satin. Il intervient à Istanbul pour récupérer une formule de vie éternelle dans les mains de P'Gell. Il arrête un vétéran qui a assassiné sa femme. Il traque un repris de justice dans les égouts.



Parfois les récits se focalisent plus sur les criminels ou les personnages secondaires que sur le Spirit. Rice Wilder est une jeune femme qui se sent prisonnière de sa riche famille et qui s'acoquine avec un criminel pour s'enfuir. J. Rollo Dyce est un arnaqueur qui se met au vert chez une vieille dame en projetant de l'assassiner pour lui voler ses possessions. Gerhard Shnobble est un individu qui est capable de vol autonome. Carboy T. Gretch et Cranfranz Qwayle sont sosies, l'un en prison pour crimes, l'autre soumis à l'autorité de son épouse. Basher (une grosse brute) reçoit la visite du Père Noël en prison et ce dernier lui offre de prendre ses habits et de pouvoir ainsi s'évader de prison, sous réserve qu'il revienne avant la fin de la nuit. Madame Cosmek est une extraterrestre placée en observatrice sur Terre. Rat-Tat est une mitraillette jouet en plastique qui est offerte à un garçon utilisé par des voleurs pilleurs professionnels. Freddy est un jeune marié qui vit dans la pauvreté et qui décide de dérober l'argent dans la caisse enregistreuse de l'épicier. Reynard se livre à une expérience de sociologie : il a tué et s'est réfugié dans un appartement, tout en écrivant ce qu'il ressent comme un renard pris au piège.



À l'occasion de la sortie du film The Spirit (2008) de Frank Miller, l'éditeur DC Comics a décidé de publier 2 anthologies consacrées au personnage : celle-ci et The Spirit: Femmes Fatale. Le même éditeur avait déjà publié une intégrale des bandes dessinées du Spirit dans une collection Archives en 26 tomes, de 2000 à 2009, à commencer par Spirit, The - Achives VOL 01. En découvrant cette édition le lecteur est un peu décontenancé de voir qu'il s'agit de papier mat, et que régulièrement les traits encrés et les aplats de noir semblent manquer de finesse, comme si ces pages avaient été restaurées juste en augmentant le contraste et la luminosité. Les couleurs ont également été restaurées, en conservant des aplats (sans dégradés) mais avec des choix de teinte qui n'améliorent pas toujours la lisibilité. Par contre, le lecteur observe que les récits choisis correspondent à la période où ces histories étaient réalisées par Will Eisner lui-même, avant qu'il ne se limite à la supervision de la réalisation des bandes dessinées, confiée à d'autres créateurs comme Jules Feiffer (scénariste), Jack Cole et Wally Wood (artistes).



La première histoire raconte les origines du Spirit, un détective privé assassiné, prenant le nom de Spirit, toujours habillé de la même manière (costume bleu, chemise blanche, cravate rouge, chapeau, masque de type loup, et gants assortis à son costume), élisant domicile dans une sorte d'appartement en-dessous d'une pierre tombale dans le cimetière de Wildwood. Le lecteur fait également la connaissance du commissaire Eustace Dolan et dans l'épisode suivant il voit passer Ebony White le temps de cases. Mais jusque-là, il n'est pas très impressionné. Les choses changent du tout au tout avec la troisième histoire : le dernier trolley. Pour commencer, les lettres composant le mot Spirit sont des morceaux de papier volant au vent, au premier plan d'un dessin montrant le trolley passant devant une usine en vue du ciel. Il s'agit d'une caractéristique qui n'est pas systématique, mais qui est emblématique de la volonté d'Eisner de jouer avec les éléments graphiques, transformant le titre en une partie de l'image. Par la suite, le lecteur peut voir le titre écrit ans une police évoquant la graphie des lettres arabes, le mot Spirit apparaître sur un panneau publicitaire, devenir une construction dans les égouts, chaque lettre devenir un élément de décor comme autant d'obstacles sur le chemin du Spirit, être inscrit en lieu et place du mot police sur une boule lumineuse.



Son attention ainsi attiré sur les éléments visuels, le lecteur peut prêter une attention consciente aux particularités de la narration visuelle qui sortent de l'ordinaire. Bien sûr, le temps a passé depuis les années 1940, et plusieurs peuvent apparaître banales et évidentes. Dans la deuxième page de l'histoire avec le trolley, les bordures de cases ont disparu, et il court un texte sous les images qui sont dépourvues de dialogue, avec une police de caractère très personnelle. Effectivement, cette police de caractères participe énormément à l'identité de la narration. En termes de formes de case, par la suite Will Eisner en réalise encore sans bordure, ou avec une bordure découpée comme un bord de timbre postal, sous forme de petite vignette verticale avec un texte à côté, sous forme de pages d'illustrés, comme une collection de unes de journaux, etc. L'auteur joue également sur la mise ne page, avec une histoire dont les cases se lisent en colonne (Rat-Tat), et une autre avec une case verticale à gauche de la page de gauche, une autre à droite de la page de droite, et 4 cases carrées sur chaque page, dans une disposition symétrique. Dans la manière de représenter, le lecteur découvre également des idées visuelles variées comme des personnages sur fond blanc, une photographie en arrière-plan, des ombres portées exagérées aboutissant à une impression de noir & blanc, ou encore des représentations déformées pour évoquer une altération de la perception.



Will Eisner (et ses assistants) investit également du temps pour représenter les décors, en particulier les bâtiments dont les équipements des années 1940 donnent une impression nostalgique du fait d'une technologie d'un autre âge. Le lecteur se retrouve vite enthousiasmé par les personnages qu'il découvre dans chaque nouvelle histoire. Le Spirit est représenté de manière quasi immuable dans son costume, quasiment l'équivalent d'un costume de superhéros, et Dolan fume régulièrement la pipe. Quelques personnages sont représentés de manière caricaturale, comme Ebony White (le premier assistant enfant du Spirit), et Sammy son successeur. Les autres sont représentés de façon plus naturaliste et le lecteur voit passer aussi bien des beaux gosses, que des individus au physique ordinaire, voire ingrat, et des femmes fatales aussi bien que des matrones. Dans le cadre pourtant assez contraint de courts récits d'aventures, Will Eisner insuffle une vie incroyable dans ses personnages à la fois grâce à des traits de contour souples, à la fois par des expressions de visage nuancées et faisant apparaître l'état d'état d'esprit du personnage avec émotion. Ainsi les femmes auxquelles se heurtent le Spirit sont toutes différentes (et pas seulement par leur tenue vestimentaire) : la hautaine Satin, P'Gell la femme fatale incarnée avec des talents de manipulatrice séductrice, l'enfant gâtée Rice Wilder souffrant de se sentir prisonnière, la magnifique Lorelei Rox, ou encore la désabusée Sand Saref.



Même s'il relève de ci de là des passages ou des visuels qui lui semblent vieillots, le lecteur se rend compte qu'il est vite captivé par la comédie humaine qui se joue devant lui. Alors même que le Spirit est souvent cantonné au rôle de catalyseur, parfois même jusqu'à ce que son apparition soit limitée à quelques cases et pas sur toutes les pages (juste un prétexte), l'inventivité et l'humanité des récits emportent sa conviction. Il se rend compte qu'il est aussi déboussolé que le guichetier de banque malhonnête voyageant dans le trolley, qu'il sourit en voyant P'Gell séduire son nouveau mari, qu'il n'en croit pas ses yeux en découvrant une vierge de fer dans un placard d'une vieille dame, qu'il est ému par la poésie tragique du vol autonome de Gerhard Shnobble, qu'il croit en la rédemption de Basher devant un enfant aveugle, qu'il comprend le meurtre commis de sang-froid par un jeune homme sans espoir d'améliorer sa vie, qu'il s'interroge sur le ressenti de Reynard acculé comme un renard, etc. Will Eisner est un conteur formidable qui fait vivre des personnages avec une sensibilité extraordinaire. Le lecteur retient son souffle en voyant une histoire racontée du point de vue de Quadrant J. Stet (un comptable cinquantenaire à la vue qui baisse) les images perdant de leur netteté au fur et à mesure que sa vision décroît.



Il y a dans le patrimoine mondial de la bande dessinée, des ouvrages qu'il faut avoir lu du fait de leur importance dans le développement de ce média. La série du Spirit en fait partie, mais le lecteur sait bien qu'il risque de devoir faire un effort pour contextualiser en quoi cette BD était en avance sur son temps à l'époque, avec le risque d'une lecture qui relève plus du devoir que du plaisir, du fait d'une narration datée. Passées les 2 premières histoires, il découvre des récits datés, mais au plaisir de lecture intact, très éloignés de ce qu'il pouvait imaginer. Will Eisner conçoit le Spirit comme un genre, ou plutôt une ancre pour le lecteur lui permettant de raconter n'importe quel type d'histoire, et de s'amuser avec la mise en scène, a mise en page, la mise en images. Toutes ces décennies plus tard, le plaisir de lecture et de découverte est intact, et ces histoires constituent une bonne introduction à l'art de Will Eisner, son inventivité, l'élégance de son trait et son humanisme.
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Fagin le juif

Il était temps, je crois, de demander quelques comptes à Charles Dickens!

Will Eisner s' en occupe admirablement, avec un rappel historique sur la place des juifs en Grande Bretagne, au XIXe siècle.
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Petits Miracles

Sincèrement, je suis persuadé que Will Eisner ne jouit pas totalement de la célébrité qui lui revient. Bien entendu, son personnage fétiche, The Spirit, sorte de détective masqué, est bien connu des aficionados de la bande dessinée américaine. Mais au-delà de ces aventures-là, qu’en est-il de tous ces petits récits courts ayant New York pour toile de fond ? Et tout particulièrement, le Brooklyn des années 1920, les années de son enfance … Eisner nous parle d’un temps où la vie de quartier avait encore une importance, quelques rues où tout le monde se connaissait, quelques pâtés d’immeubles habités par des tailleurs, des commerçants, de petits diamantaires, des rabbins (et d’un curé pour la communauté italienne). Sans oublier les enfants vagabonds, les veuves éplorées, les voisins susceptibles, les couples au bord de l’implosion… car, bien sûr, dans ce quartier, tout se sait, pas moyen d’avoir une vie sans le regard des autres braqué sur soi.

Eisner nous présente quatre contes à portée plus ou moins philosophique, en tout cas, avec une réelle bienveillance pour les divers protagonistes. Il nous présente la vie de son Brooklyn natal, sans occulter les mesquineries, la tromperie, la violence, la folie qui s’y trouvent mais il parvient presque toujours à positiver : ces gens-là vivent en dépit de tout cela. L’histoire avec les deux petits garçons en butte aux tracasseries d’adultes m’a particulièrement touché et m’a bien fait rire par sa chute. L’intelligence n’est pas question d’âge ou de peuple.

Le graphisme de Will Eisner est sous influence cinématographique, avec ses cadrages et ses mises en pages si particulières. Ainsi les images en noir et blanc, sans véritable cadre, se succèdent sous l’éclairage si particulier des films expressionnistes européens, comme ceux de Fritz Lang ou de Friedrich Wilhelm Murnau. Cette esthétique est au service d’histoires (les petits miracles, du titre) où se rencontrent intrigue et merveilleux, morale et humour, mais surtout l’émotion.

Will Eisner était non seulement un excellent dessinateur, un parfait conteur, mais il était également un « être humain ». N’hésitez pas à découvrir son univers !
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New York Trilogie, Tome 1 : La Ville

Ce premier volume est l’oeuvre d’un fin observateur des habitants de New York et de la ville qui les entoure.



Les murs, les blocs, les égouts, le métro sont des acteurs à part entière de la ville. Les personnes semblent être dépendantes de leur état décrépit ou pas, de leur évolution ou de leur transformation.



Les courtes histoires sont rarement joyeuses, il y a quelques fois de l’humour mais cela vire souvent à l’humour noir et au cynisme. Le côté réaliste des récits fait que ce sont fréquemment de petits drames qui nous sont racontés, certains plus tragiques que d’autres : comme la mort d’une immigrée mexicaine qui meurt dans un incendie et dont la colocataire se jette avec son bébé du troisième étage pour échapper aux flammes ou comme la condamnation d’une bouche incendie qui était la seule source d’eau d’une femme noire.



Les dessins ont peut être vieillis mais la description des habitudes et des comportements reste toujous d’actualité et très pertinente.
Lien : http://lecturesdechiwi.wordp..
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New York - Intégrale

Plusieurs personnes dans mon entourage sont fascinées par les Etats-Unis et notamment par la ville de New York… ce qui n’est absolument pas mon cas. Trop de monde, trop de bruit, trop de pollution, trop de stress, trop de trop. Alors pourquoi avoir emprunté cette trilogie ? Ce sont les illustrations des trois couvertures qui m’ont intriguée et séduite. Et j’ai bien fait de sauter le pas car j’envisage maintenant d’acquérir l’intégrale pour l’ajouter à ma propre collection.

Will Eisner revient sur le quotidien de cette grande ville, véritable fourmilière sans cesse en activité. Il choisit quelques personnages et dépeint tantôt rapidement un mini-épisode du quotidien, tantôt l’aventure d’une vie résumée sur une poignée de planches. Qu’elles m’aient fait sourire ou m’aient émue, chacune de ces – plus ou moins longues – aventures a su me toucher. Pendant quelques (dizaines) de minutes, chaque individu sort de la masse pour devenir un personnage unique. J’ai franchement ri aux mésaventures subies dans le métro bondé (même si Lyon ne peut être comparé à New York, les métros bondés et toute la faune qui y évolue, on connait !), j’ai aimé découvrir les quatre vies qui ont gravité autour d’un vieil immeuble avant (et après) sa démolition, j’ai été touchée par le devenir de ces deux jeunes couturières prisonnières du feu… Autant d’histoires, de peintures, de souvenirs… que de personnages.

J’ai cru lire à plusieurs reprises que les critiques reprochaient à Will Eisner un aspect trop larmoyant. Ce n’est évidemment pas joyeux mais plus que larmoyant, j’ai trouvé l’ensemble très juste, authentique. Et particulièrement marquant. Je serais vraiment très heureuse de pouvoir relire l’intégrale, à l’occasion (d’où mon envie de la faire entrer dans ma bibliothèque).

Encore une fois, l’auteur-illustrateur fait le choix du noir et blanc. Et vraiment, j’adhère. J’ai trouvé les illustrations magnifiques, qu’elles soient de taille réduite dans les vignettes ou que l’on puisse en profiter en pleine page. Les jeux d’ombre et les détails sont sublimes. Un trait de génie, à mon humble avis !
Lien : http://bazardelalitterature...
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New York Trilogie, Tome 3 : Les Gens

Après la Ville, l'Immeuble, au tour des Gens d'avoir la part belle dans ce dernier volet de la Trilogie de New York. Will Eisner prend le parti de raconter la ville des invisibles, de ceux qui passent dans les rues sans que l'on ne les remarque au milieu du bouillonnement de la vie des grandes métropoles, de ceux qui ont des existences de prime abord banales, auxquelles personne ne semble s'intéresser, le tout dans un style graphique toujours aussi riche, dans une narration toujours aussi sensible et tendre, non dénuée d'une petite pointe d'humour qui les dédramatise, sans en ôter le caractère parfois ironiquement tragique.



C'est le portrait de l'Humain, dans toute sa réalité, tout autant commune qu'exceptionnelle, faite de petits riens qui changent tout, pour le meilleur comme le pire, à travers les portraits de ces Gens, qui nous est dépeint, tout simplement.



Un dernier volet qui clôt avec réussite la trilogie, que je suis ravie d'avoir lu, et qui m'a permis de découvrir le travail de Will Eisner, que je vais continuer de découvrir par d'autres de ses œuvres désormais.
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L'appel de l'espace

C'est dense et ça file à 100 à l'heure.



Un cortège de personnages volontairement très clichés, parce qu'il ne faudrait pas gaspiller un temps précieux à faire des présentations quand on peut défiler des actions rocambolesques en vue de résoudre une histoire tout aussi abracadabrantesque.



C'est noir comme dans un bon polar, c'est sombre comme dans un bon roman d'espionnage, tous pourris et tous contre tous, mais ça sature par moment, aussi bien visuellement que textuellement.



Une BD à papa (ou du moins qu'on s'attend à trouver dans la bibliothèque de son père) avec un charme désuet de guerre froide, course à l'espace et fantasmes technologiques et idéologiques tout en bipolarité.



Plus divertissant qu'un James Bond, pour sûr.
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Au coeur de la tempête

Encore une grande oeuvre de Will Eisner que j'apprécie tout particulièrement. J'ai été tout d'abord abasourdi par la qualité de la préface de l'auteur. Il sait trouver les mots justes pour se raccrocher à un espoir d'un monde plus juste et fraternel.



"Au coeur de la tempête" nous fait découvrir l'Amérique profonde où le racisme et l'antisémitisme n'ont pas disparu comme par enchantement. Il n'est rien à côté de ce qui se passe en Europe à la même époque. La tempête, ce sont les deux guerres mondiales qu'il va falloir affronter. Et surtout le nazisme que l'auteur part combattre en 1942.



Dans ce train qui l'emmène au combat, il se remémorre toute sa jeunesse ainsi que l'histoire de sa famille. C'est une véritable saga familiale non dénuée d'intérêt pour le lecteur tant l'auteur sait y faire.



C'est étonnant de découvrir la jeunesse de l'auteur dans un récit semi auto-biographique. On se rend compte que sa famille a dû véritablement galérer pour survivre. L'intégration ne s'est pas faite sans douleur.



Will Eisner avait déjà expérimenté le récit auto-biographique dans Le Rêveur. Cependant, en l'espèce, c'est beaucoup plus passionnant. On se rend compte que l'auteur se livre dans la dernière partie de sa vie comme pour nous laisser un héritage. Et les mots indiqués dans la préface résonnent encore comme un ultime message laissé aux générations futures.
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Petits Miracles

Je ne me lasse pas de lire ces petites chroniques des habitants du Bronx plus précisément du quartier juif dans les années 50. Encore du Will Eisner, me direz-vous ! Certainement. Cependant, on ne peut qu'admirer cette nouvelle oeuvre dans la précision d'un trait vif et dépouillé à la fois. ::



Il y a là 4 petites histoires indépendantes pour souligner que les miracles n'existent pas vraiment. C'est d'abord de la volonté humaine dont il s'agit puis des coups de hasard. Le destin d'un individu peut alors basculer pour le meilleur ou pour le pire.



J'ai beaucoup aimé le récit de ce petit garçon victime d'un rapt qui est totalement oublié et qui revient des années plus tard pour bouleverser la vie de tout un quartier.



L'auteur restitue ici une essence: celle du merveilleux. Will Eisner est véritablement le Dieu de la bd américaine. A découvrir au plus vite !



Note Dessin: 4/5 - Note Scénario: 4/5 - Note Globale: 4/5
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Peuple invisible

Ce tome contient trois histoires complètes et indépendantes de toute autre. Dans la bibliographie de son auteur, il est paru entre Au cœur de la tempête (1991) et Dropsie Avenue : Biographie d'une rue du Bronx (1995). La première édition date de 1993. Il a entièrement été réalisé par Will Eisner (1917-2005) : scénario et dessins, avec des nuances de gris. Cette histoire comporte 110 pages de bande dessinée.



Sanctuaire (32 pages) - Dès son plus jeune âge, Pincus Pleatnik avait appris à se cacher pour éviter d'être vu, d'être trouvé, pour vivre tranquillement. Il avait instinctivement compris qu'être invisible fait partie des compétences primordiales dans l'art de la survie en milieu urbain. En marchant sur le trottoir, il évitait de poser le pied sur les fissures. Il donnait toujours une petite pièce aux mendiants. Il était tellement dépourvu de tout trait remarquable que les filles à la fac n'arrivaient pas à se souvenir de son nom, que les caissiers des magasins ne le remarquent jamais. Il exerce un métier de repasseur blanchisseur dans l'arrière-boutique, n'ayant jamais de contact avec les clientes ou les clients. Mais un matin en lisant son journal, il constate que la rubrique nécrologique fait état de son décès.



Will Eisner n'en est pas à son coup d'essai pour raconter la vie d'individus banals. En plus il annonce dès le titre de l'ouvrage qu'il va s'intéresser à des gens en rien remarquable, qui n'existent pas aux yeux des autres. Pincus Pleatnik est un cas d'école : il fait tout pour ne pas être remarqué avec une efficacité telle que personne ne se soucie de lui. Il n'y a que son employeur qui connaisse son nom et qui le reconnaisse. Par la force des choses, le lecteur a sa vision sur sa propre existence, et a une conscience plus ou moins aiguë du nombre d'êtres humains ayant vécu avant lui, dont il n'a jamais entendu parler et dont il ne saura jamais rien, sans parler des milliards d'êtres humains vivant en simultanéité avec lui dont il ne connaîtra jamais qu'une poignée. Il est fort vraisemblable que lui-même ne laissera aucune trace dans l'Histoire ou à l'échelle de l'humanité. Il sourit en découvrant cet individu que personne ne remarque, qui peut aller à sa guise dans le monde urbain sans craindre son agressivité parce qu'il s'y est adapté au point de développer une banalité qui le rend invisible. Il suffit d'une erreur administrative le déclarant mort pour que cette sécurité vole en éclat et que sa vie bascule dans une suite de drames loufoques. Le lecteur peut penser à la folle nuit de Paul Hackett dans After Hours (1985) de Martin Scorcese.



Dès la première page, le lecteur est séduit par la personnalité narrative de l'auteur. Il lui conte une histoire qui relève à la fois du drame réaliste, à la fois de la fable. En 2 pages et 9 cases, le lecteur a l'impression d'avoir toujours connu Pincus Pleatnik, de le comprendre, de savoir comment il fonctionne, juste avec quelques remarques du narrateur omniscient et des dessins comme posés sur la page, sans bordure de case. Dans la première page, il (re)trouve la façon dont Eisner sait lier des dessins en les apposant sur un fond noir, comme des images apparaissant en blanc au travers du noir de la scène. Le lecteur se rend compte qu'il dévore chaque page, sans se soucier de la manière dont elles sont dessinées, et qu'il ressent une proximité extraordinaire avec chacun des personnages. Il lui suffit de regarder Pincus se raser, arroser sa plante, enfiler son pardessus, pour voir son absence de toute prétention, le plaisir qu'il prend dans son quotidien, sa banalité. Il faut prendre du recul pour comprendre comment Will Eisner insuffle une telle vie dans ses personnages. Le lecteur peut voir les vêtements tous confortables et un peu informes de Pincus Pleatnik, leurs plis qui montrent à la fois qu'ils sont un peu lâches, à la fois déjà portés de nombreuses fois. De la même manière, il peut regarder les petits gestes : les expressions de son visage, sa manière de tenir le journal sous son bras pendant qu'il suspend son manteau humide, la manière d'enfiler son pull, ses postures un peu résignées tout en conservant une énergie sous-jacente. Will Eisner ne représente pas n'importe qui : ses dessins donnent l'impression de regarder un individu qui existe vraiment. Il en va de même pour les autres personnages : la confiance en ses compétences professionnelles de la rédactrice des avis de décès, la capacité à prendre des décisions du propriétaire de son appartement pour qui ses locataires ne sont que des noms dans un exercice comptable, la contenance inquiète et séductrice à la fois du propriétaire du pressing, etc. Aucun d'entre eux n'est un stéréotype, chacun est un individu pleinement développé, unique.



S'il essaye de regarder les techniques d'enchaînement de cases, le lecteur a du mal à croire à ce qu'il observe. À la lecture, il éprouve la sensation d'être aux côtés de chaque personnage, à chaque fois dans la même pièce qu'eux. En relisant, il s'aperçoit que Will Eisner gère les arrière-plans avec une dextérité quasi surnaturelle, ne les représentant qu'en cas de besoin. Or le lecteur serait près à jurer qu'il y en a dans plus de 80% des cases, ce qui est loin du compte. Pourtant chaque endroit présente une ambiance unique, plausible au point d'en être plus réaliste qu'une photographie. En parcourant à nouveau les pages, le lecteur remarque également une forme discrète d'humour sans pitié : la silhouette de Pincus dans la vapeur du pressing le rendant effectivement invisible, le fait qu'il renverse sa tasse de café en découvrant l'annonce de sa mort dans la rubrique nécrologique, la façon dont Pincus embrasse un poteau, les mimiques du propriétaire du pressing en train de se lamenter sur son sort, etc. Effectivement en arrière-plan, se dessine également le portrait d'une partie de la société : les petits boulots, les personnes à la rue, l'administration inflexible, la cupidité des uns et des autres, les sans-abris, les manœuvres d'intimidation musclées. Sous des dehors de récit léger et rapide, Will Eisner réalise un drame à l'humour noir, brossant le portrait d'une partie de la société, avec un épilogue aussi joyeux qu'horriblement noir.



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Le pouvoir (40 pages) - De manière inexpliquée, Morris dispose d'un don. Il se manifestait occasionnellement quand il était enfant. Il suffisait qu'il serre sont chat contre lui pour que celui-ci guérisse, ou qu'il se tienne proche de son père alité, pour que celui-ci guérisse aussi. Mais ces occurrences étaient peu nombreuses, et Morris finit par oublier son don. Après la mort de ses parents, devenu adulte, il se mit à la recherche d'un boulot qui le satisfasse. Il est embauché comme aide-soignant, mais il gêne les médecins. Il occupe ensuite un emploi d'aide à la ferme, mais finit par être attiré par un cirque et vouloir devenir un magicien. Comprenant que tout n'est que truc et artifice, il devient l'assistant de Lil, la diseuse de bonne aventure.



Au départ, le lecteur est décontenancé par le don de Morris, se disant que ce n'et pas compatible avec une forme d'invisibilité dans la société. Mais en fait ce don est montré de manière prosaïque sans effet surnaturel, sans explication religieuse ou scientifique. Ce don ne transforme pas Morris en un messie ou un individu extraordinaire. Le lecteur retrouve des individus tout aussi ordinaires que dans la première histoire, tout aussi remarquables par leur unicité, leur humanité, en tout point différents de ceux de la première histoire, et tout aussi banals, plausibles et palpables. Il remarque que cette histoire comprend 6 pages muettes d'une incroyable expressivité. Il reste ébloui par la manière dont Eisner compose ses pages : des cases sans bordure qui s'entremêlent naturellement alors qu'elles montrent des choses très disparates, la façon dont la pluie trempe les vêtements et les individus jusqu'à l'os, la descente d'un escalier par 2 personnages qui acquiert une dimension métaphorique, etc. Plus encore que dans le premier récit, le lecteur voit comment le créateur parvient à combiner des techniques de mise en scène cinématographiques avec des techniques théâtrales pour un amalgame uniquement réalisable en bande dessinée. Les personnages de papier se révèlent être d'incroyables comédiens au jeu de scène un peu appuyé, mais totalement réaliste. Le lecteur s'attache tout autant à Morris qu'à Pincus et comprend ses choix, partage ses valeurs, ressent ses déceptions, se résout à son anonymat avec lui.



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Combat Mortel (31 pages) - Toute sa vie d'adulte, Hilda s'est occupée de son père alité et cacochyme, sans relation amoureuse, aux dépens de sa vie professionnelle. Elle a maintenant 40 ans, et son père rend l'âme dans un dernier râle. Il est temps pour elle de se construire une vie. À la bibliothèque municipale où elle travaille, elle remarque Herman, un célibataire d'une cinquantaine d'années. Elle se renseigne : il vit seul avec sa mère dont il s'occupe.



Avec cette troisième histoire, Will Eisner commence par un drame, mais ajoute bien vite une pincée de gentille moquerie qui inscrit le récit dans le registre de la comédie dramatique. À nouveau le lecteur prend partie pour Hilda dès la première page, sensible à ses valeurs morales qui l'ont menée à se sacrifier pour prendre soin de son père. Il sourit à sa réaction quand son père exhale son dernier soupir, et à sa détermination pour mettre la main sur un mari, un individu quelconque sans rien de remarquable, mais avec une histoire personnelle particulière et unique. Il sourit franchement quand le combat (mortel) s'engage entre Hilda et la mère d'Herman pour capter ses attentions matérielles et affectives. Bien sûr, le lecteur peut trouver qu'Hilda est un peu manipulatrice, que la mère d'Herman est très possessive, et qu'Harry aurait bien besoin d'une colonne vertébrale. Dans le même temps, il comprend aussi que ces personnages aient adopté cette façon de vivre, et il ressent de l'empathie pour cette femme qui ne souhaite pas gâcher les années qui lui reste, pour cet homme qui a accepté sa condition, et pour sa mère qui continue de veiller sur son poussin.



Comme dans les 2 histoires précédentes, le lecteur voit que Will Eisner continue d'utiliser les mêmes outils pour construire ses pages (case sans bordure, dessin sur fond noir, mise en scène de théâtre) et qu'il aboutit à des pages qui n'ont rien de semblables à celles des 2 autres récits. À nouveau, il suffit de voir évoluer Hilda, Herman et sa mère pour avoir une idée claire de leur personnalité respective, et que celle-ci n'est pas la même que celle des personnages précédents. À nouveau, l'artiste gère les arrière-plans avec une élégance sophistiquée, faisant de la clarté de sa narration la priorité, ce qui n'empêche pas le lecteur de pouvoir se projeter dans chaque lieu. À nouveau, il savoure des cases uniques : l'expression du chagrin d'Hilda à la mort de son père, la délicatesse avec laquelle Herman lave les pieds de sa mère, les simagrées de la mère d'Herman face à Hilda, la bougie qui se renverse, etc. Cette fois-ci encore, Will Eisner fait preuve d'un humour cruel et malicieux, maltraitant ses personnages avec autant de sadisme que d'affection.



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Ce recueil de trois histoires qui s'apparentent à autant de copieuses nouvelles est à savourer comme autant de perles de comédie humaine, d'une rare justesse et d'une rare finesse, permettant des côtoyer des personnages banals qui révèlent toute leur saveur, dans des drames très humains, faisant ressortir leurs qualités et leurs défauts, toute la richesse de la condition humaine, sans une once de méchanceté ou de mépris, avec un humanisme sans limite.
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Dropsie Avenue : Biographie d'une rue du Br..

L'histoire d'un quartier sur un siècle.

Un roman graphique sur un siècle ça donne une histoire en vitesse rapide. On survole l'Histoire et les gens à partir de 1870.

Du coup, ça met en évidence des choses différentes que si on avait une histoire sur une seule décennie. On ne s'attache pas vraiment aux personnages mais plutôt aux pierres. Intéressant.

Pour ma part, je retiens l'explosion démographique.

Je retiens les éternels conflits qui opposent les ethnies, le dernier arrivé étant toujours le plus récriminé.

Je retiens la fréquente envie de quitter ce quartier d'origine parce que ce n'est plus comme avant.

Je retiens l'Amérique raciste.

On croise dans l'ordre chronologique, Hollandais, Anglais, Irlandais, Allemands, Italiens, Juifs, Latinos, Afros.

Vous remarquerez que les premiers habitants sont déjà des immigrés, ça ne les empêche pas de détester la vague suivante d'immigrés d'origine différente. Et ainsi de suite...

Ce roman graphique ne laisse pas entrevoir le visage avenant des États-Unis. S'il existe...

Ce côté négatif est peut-être accentué par le noir & blanc exclusif de ce comics.

Le coup de crayon est, lui, précis et détaillé. J'aime ça.



Par contre une fois terminé cette biographie d'une rue du Bronx, j'ai découvert qu'il s'agit d'un troisième volume de la trilogie du Bronx ! Je n'ai aucune idée si la lecture dans l'ordre est conseillée ou pas !
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Mon dernier jour au Vietnam

Ce recueil est un ouvrage semi-autobiographique dans lequel Will Eisner parle de son expérience en tant que journaliste pour le gouvernement. Les six nouvelles de cet album ne sont qu’une transposition de témoignages entendus durant ses missions ou tirés de sa propre expérience.



En préambule, il explique comment il est devenu rédacteur en chef d’une revue militaire. Il a fait son service militaire en 1942 et durant son incorporation, il travaille au journal du camp qu’il décrit comme une sorte de planque qui lui garantissait de ne pas être réaffecté ailleurs, et notamment sur une zone de conflit. De plus, cela lui permet de recueillir différents propos et/ou d’être le témoin de certains événements. Profitant de son poste au journal du camp et de son affectation au « programme de maintenance préventive » du matériel, Eisner parvient à imposer la BD comme un vecteur pertinent à la communication, LE medium qui convient à cette passation de connaissance.



La bande dessinée était le meilleur moyen de publier des informations quant aux réparations sur le terrain et d’enseigner les réparations de fortune en situation de combat.



En 1950 (début de la Guerre de Corée) Will Eisner est recontacté par l’Armée pour reprendre ses BD et notamment relancer le magazine Army Motors qu’il avait créé à l’époque de son service militaire. Le magazine change rapidement de nom pour devenir P.S. Magazine (qui sera publié jusque 1972). Le contrat qu’Eisner signe implique qu’il se rende sur le terrain. C’est ainsi qu’en 1954, il couvre un reportage à Séoul et en 1967 il va à Saïgon.



Passée la préface explicative de l’auteur qui contextualise le contenu de ce recueil de 6 nouvelles, l’ouvrage en lui-même contient photos d’époque et illustrations. Il n’oublie pas de faire hommage à l’humour vaseux des militaires, certains se pavanant comme des petits coqs virils face à ce « civil » qu’ils vont accompagner.



Les illustrations s’étalent en pleine page et s’affranchissent totalement des découpages habituels (cases). Le jeu de trames habillent les visuels et guident le regard durant la lecture.



Quant aux témoignages en présence, « loin de vanter des exploits guerriers, les six récits proposés sont avant tout des histoires humaines, avec leur cortège de lâcheté, d’aveuglement, de bêtise, de désespoir, d’humour et de courage… » (extrait de la présentation officielle sur le site Delcourt).



Pour le premier reportage, l’auteur (jeune journaliste) est escorté par un G.I. qui vit son dernier jour au Vietnam. Sa mission touche enfin à son terme, s’il est encore là physiquement sur le terrain, ses pensées sont déjà reparties aux Etats-Unis. Il semble brillant, en bonne santé et est visiblement décontracté par cette mission d’accompagnement qu’il juge sans danger. Mais c’est oublier qu’il se trouve en zone de conflit… et le valeureux soldat devient l’ombre de lui-même. Vision rapide de combattants hagards et mutiques…



D’une richesse certaine quant au contenu des propos rapportés, la seconde nouvelle propose quant à elle un regard plus extérieur des journalistes qui – comme Eisner – se rendent en première ligne. Le cynisme affleure et leur manque d’objectivité sur cette guerre nous saute au visage. Un discours brut de la part de ces hommes censés respecter la neutralité de leur place d’observateur. Beau portrait des médias et de leur fichue hypocrisie. Cela vient-il écorner l’image que l’on pouvait avoir de ces hommes ? Pas sûre…



(Article complet à lire sur le blog)
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Le Complot : L'histoire secrète des Protocole..

« Comment un texte inventé de toutes pièces peut-il circuler depuis cent ans et provoquer des revirements politiques fracassants ? Will Eisner retrace avec génie toute l’histoire de ce « complot juif » inventé au début du XXème siècle pour attiser l’antisémitisme régnant en Europe et en Russie : les Protocoles des Sages de Sion justifient les pires intentions, et leur diffusion connaît un succès retentissant avant et pendant la première Guerre mondiale. Un journaliste britannique du Times découvre la supercherie en 1921 : les Protocoles sont une copie presque conforme d’un obscur traité anti-bonapartiste, les Dialogues aux enfers entre Machiavel et Montesquieu, écrit par un dissident français en exil. Les « auteurs » des Protocoles n’ont eu qu’à remplacer les bonapartistes par les Juifs et le mot « France » par « le monde »…



On connaît donc la vérité mais rien n’y fait : les Protocoles sont utilisés par Hitler, le Ku Klux Klan et trouvent encore aujourd’hui des millions de lecteurs dans les pays arabes. Surpris par le destin insolite de ce plagiat, Eisner nous raconte son histoire avec un coup de crayon très expressif, drôle et noir, ironique et inquiétant. Par des cadrages audacieux et d’impressionnantes pages titres, Eisner provoque la curiosité du lecteur ; on lit avec plaisir une bande dessinée passionnante, sans oublier ce que dénonce Eisner : un mensonge qui sert la haine et l’antisémitisme » (synopsis éditeur).



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Cent trente-cinq pages, c’est ce qu’a consacré Will Eisner pour rendre compte de ses recherches concernant l’une des plus grandes escroqueries faites au peuple juif. Cent trente-cinq pages c’est à la fois beaucoup pour aborder tous les événements de cette malversation, c’est ambitieux de solliciter un lecteur et lui demander de se concentrer sur cet afflux de dates, de noms et d’éléments associés au complot des Protocoles de Sion. Mais centre-trente-cinq pages, c’est aussi bien maigre quand on voit les multiples rebondissements de cette histoire !



Tout commence en 1864 avec la publication du Dialogue aux enfers entre Machiavel et Montesquieu par Joly. A l’époque, qui aurait pensé que ce pamphlet destiné à dénoncer l’esprit manipulateur de Louis Napoléon III aurait une seconde vie ? Joly est parvenu à faire publier son ouvrage en Belgique et à le faire passer clandestinement en France, mais la Police a rapidement découvert ses activités. La majeure partie des exemplaires ont été saisis puis détruits, Joly a été incarcérés. Quarante ans plus tard, Mathieu Golovinski est secrètement missionné par un aristocrate russe qui lui demande de trouver un subterfuge pour faire croire au tsar que les juifs veulent provoquer une Révolution en Russie pour renverser le régime en place. Un exemplaire du Dialogue aux enfers entre Machiavel et Montesquieu est remis à ce moment-là à Golovinski qui va se contenter de quelques reformulations pour remettre l’écrit au goût du jour.



C’était en 1898…en 2005, on ne compte plus

le nombre d’éditions et de traductions dont ce faux a fait l’objet.



« J’ai passé ma vie à mettre le dessin au service de la narration. Avec l’acceptation généralisée de ce vecteur de la littérature populaire, l’occasion de présente d’attaquer de front cette propagande dans un langage plus accessible » écrit Will Eisner en préface. Le défi n’était pourtant pas évident à relever. L’auteur a consacré plus de 20 années de recherches à ce sujet qui le touche personnellement. Mais l’homme est habile et plonge rapidement son lecteur au cœur du récit. On traverse les époques à une facilité déconcertante, on accueille les nouveaux protagonistes avec autant d’aisance que l’on accueille les nouveaux rebondissements qu’ils provoquent.



De Napoléon III au Tsar Nicolas II, de Hitler à Henry Ford, le lecteur ne perd jamais de vue son sujet et passe d’un pays à l’autre de manière très fluide. Seul le passage qui met en parallèle le texte de Joly et le texte des Protocoles accroche demande une attention conséquente, mais le fait que ces écrits soient repris mots pour mots permet à chacun de mesurer la troublante ressemblance entre ces textes.



Le dessin de Will Eisner est réalise et descriptif. Exit les envolées graphiques que nous avions pu rencontrer dans Un Pacte avec Dieu, exit la poésie… car décidément, le sujet ne s’y prête pas. Pourtant, une fois encore, c’est avec beaucoup de plaisir que j’ai contemplé son travail.
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New York Trilogie, Tome 2 : L'Immeuble

Dans cette BD c’est un immeuble new-yorkais qui est au centre de l’histoire, un immeuble qui a fait partie de la vie d’un tas de personnes qui un jour fut démolit et remplacé par une superbe structure de verre.



Pourtant le vieil édifice était plus qu’une bâtisse sans « vie » c’était lien entre les différents personnages, et les quatre personnages en question sont maintenant des fantômes errants aux abords de l’immeuble, se remémorant leur passé. Un passé que l‘on va visiter comme l’on peut visiter un monument.

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L'appel de l'espace

Le ton de Will Eisner est toujours acide, ironique, tranché. Cette BD ne déroge pas à la règle. Elle s'appuie sur un scénario correspondant typiquement au polar américain. Avec quelques touches d'espionnage (CIA/KGB), d'anticipation, il parodie les genres traditionnels de la littérature américaine. Au passage il critique aussi quelques travers de sa société : un président au pouvoir quasi-mystique, mais avec des contre-pouvoirs plus puissants encore (firme multinationale), l'ultra-capitalisme, le patriotisme délirant.

Le dessin est toujours génial : toujours très accessible, au-dessus des canons de l'école américaine, il prolonge en les caricaturant les astuces de la littérature américaine.

Le seul côté décevant, c'est peut-être que Will Eisner ne va pas jusqu'au bout de sa logique moqueuse. Le message extra-terrestre capté au début de l'histoire reste un message extra-terrestre : on aurait pu s'attendre à ce qu'il s'agisse d'une bourde d'un agent de la Nasa, par exemple.
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