Un polar, un vrai. Tout y est.
Des flics loin d'être parfaits, si ce n'est parfois l'inverse.
Des victimes qui ne sont jamais ce que l'on croit.
Une enquête chronophage mais passionnante.
Un policier, ancien junkie toujours sur la voie de la guérison, un homme solitaire. Seul mais accompagné de ses souvenirs, de ses démons, marqué par une enfance cauchemardesque et violente. Et pourtant, un homme drôle, bourré d'humour acerbe et d'ironie qui, avec sa vie pleine de désillusions, a si peu peur de mourir qu'il en provoque les méchants.
Une histoire, une enquête très addictive. Plusieurs tenants pour un seul aboutissant. Plusieurs fils à suivre, à ne pas lâcher pour éviter de se perdre en chemin.
C'est l'acharnement de cet enquêteur, son courage et sa ténacité ou plutôt sa folie et son inconscience, qui le mèneront au dénouement de son enquête et à la résolution de ses mauvais rêves..
J'ai apprécié les personnages qu'il fallait et détesté les autres. Notre héros a un tel passif qu'il est logique que si peu des protagonistes lui fassent confiance et donc se méfient de lui.
Une très bonne lecture, pas de temps mort, des explications quand il en faut et des personnages suffisamment travaillés pour réussir à s'attacher ou à les détester.
Ce livre est un deuxième tome mais cela ne gêne en rien la bonne compréhension de l'histoire.
Une sympathique surprise que la découverte de cet auteur.
L'avez-vous lu ? Qu'en avez-vous pensé ?
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Ils habitaient une bâtisse solide, de taille moyenne, style Tudor, conçue pour résister à tout, apparemment, sauf à la pluie. À travers l’imposte en verre fumé de la porte d’entrée, le garçon distingua deux ou trois seaux dans le vestibule, qui recueillaient les gouttes d’eau, ce qui expliquait peut-être qu’ils ne l’aient pas entendu la première fois. Il frappa encore, recula et jeta un coup d’œil à la maison. Elle semblait trop grande pour un couple âgé, mais elle avait quelque chose qui la distinguait des pièces exiguës, aux parois minces, qu’il avait toujours connues : de la personnalité.
Il fallait bien ça, au beau milieu de nulle part.
La vieille dame arriva à la porte en premier. Lorsqu’elle l’ouvrit, elle appela aussitôt son mari. Il avait l’air encore plus âgé qu’elle et donnait l’impression de se mouvoir avec difficulté. Quand, en passant la tête par-dessus l’épaule de sa femme, il aperçut le garçonnet qui frissonnait sur le seuil de leur maison, il rajusta ses lunettes, surpris. L’enfant avait la peau sur les os, le regard vitreux, le teint pâle. Seulement un T-shirt et un pantalon, détrempés par la pluie. Les deux vieux regardèrent autour de lui, mais il semblait seul.
La femme, sourcils froncés, s’accroupit.
« Tout va bien, mon petit ? »
Il resta planté là, tout tremblant.
Les yeux plissés, elle scruta de nouveau l’obscurité, puis le prit par le poignet, le tira doucement à l’intérieur et ferma la porte.
« Il est gelé », dit-elle à son mari en entraînant le garçon jusqu’au salon.
Le vieil homme referma la porte à clé, remit le verrou en place et les suivit, les yeux rivés sur les traces de pas humides sur le carrelage.
Le garçon était pieds nus.
« Je m’appelle Dot, annonça la vieille femme. Et lui, c’est Si. »
Comme le garçon ne disait toujours rien, Dot haussa les épaules. Elle dégotta une couverture et alla mettre de l’eau à chauffer. Si prit place sur le canapé, l’air inquiet. À vue de nez, le garçon devait avoir sept ou huit ans, mais à cause des cernes sombres qui encerclaient ses yeux, il faisait plus. Il ne prêtait pas attention à la pièce, ni même aux objets qui se trouvaient devant lui. Il regardait dans le vide. Quand Dot réapparut avec une bouillotte, Si posa affectueusement une main sur le bras de sa femme. Le regard du garçon fila soudain vers eux, comme si ce geste lui était étranger.
« Peux-tu nous dire comment tu t’appelles ? » interrogea Dot en soulevant la couverture pour déposer la bouillotte contre lui.
Il se mit à frissonner de plus belle, à tel point que ses dents s’entrechoquant produisaient le bruit d’un hochet. Il s’obligea à fermer les paupières et serra la mâchoire pour la maîtriser. Dot sonda son mari :
« On devrait peut-être appeler la police ? »
Il avait acquiescé en silence et se levait déjà, bien content d’avoir quelque chose à faire. Pendant qu’elle attendait, elle frotta la tête du garçon. On aurait dit que son sang bouillonnait.
« Dot… »
Si l’appela depuis le vestibule.
« Ne bouge pas », dit-elle.
Quand elle quitta la pièce, le garçon retira délicatement la couverture qui l’enveloppait et s’approcha de l’interrupteur à côté de la porte. Il l’alluma et l’éteignit, l’alluma et l’éteignit encore. Il passa la tête dans le couloir et les observa. Si et Dot, sourcils froncés, venaient de se rendre compte que le téléphone était hors service. Le garçon s’avança sur la plante des pieds jusqu’à la porte d’entrée, souleva le loquet, tira le verrou, et l’ouvrit.
Une forme se détacha de l’obscurité pour se glisser lentement vers lui. Comme il ne pleuvait plus, on distinguait des étoiles que le garçon n’avait encore jamais vues en ville. En se rapprochant, la forme finit par se découper contre le ciel, comme si elle était plus sombre encore que la nuit.
« Brave garçon », dit la forme, l’homme, avec un hochement de tête.
Son visage était plat et anguleux comme une lame, et il arborait une inexpression étudiée. C’était son corps qui disait tout, dans le jaillissement chaotique d’un réseau de muscles et de veines enchevêtrés ; on aurait dit un appareil à stocker toute la haine du monde. Dans sa main droite gantée, il tenait un marteau arrache-clou et de la gauche il lui ébouriffa les cheveux.
Il interrompit son geste, retira sa main, ébahi.
Il avait sorti une pièce de monnaie de derrière l’oreille du garçon et la lui tendit.
« Qu’est-ce qu’on dit, Wally ?
— Merci, Bateman », récita-t-il en prenant la pièce d’un air solennel.
Il s’assit sur le perron tandis que Bateman passait devant lui, dans la maison.
« Hé… »
C’était le vieil homme.
« Qu’est-ce que vous… »
Il y eut un bruit humide et sourd et quelque chose heurta lourdement le sol.
La vieille femme se mit à crier.
« Non, hurla-t-elle. Non… »
Un autre bruit humide et sourd, quelque chose d’autre heurtant lourdement le sol. L’oreille tendue, le garçon perçut un gémissement étouffé qui venait de l’intérieur. Un gargouillis obstiné et un autre mot, peut-être. Peut-être le prénom de son mari. Puis deux claquements de pas, le coup de grâce et le silence total.
Le garçon replia le poing autour de la pièce de monnaie que lui avait donnée Bateman et plongea les yeux dans l’obscurité. La salive lui vint à la bouche et des taches solaires se mirent à défiler devant ses yeux. Au départ, elles scintillaient à peine, puis elles grossirent, accélérèrent, jusqu’à vrombir devant lui comme des rideaux de pluie. Comme s’il regardait fixement une lumière vive au lieu de la nuit noire.
« C’était comme si son cœur, à force de cogner, sortait de sa poitrine. L’odeur était suffocante, à présent. Au milieu de la pièce gisait l’impensable. Une jeune femme noire, aux traits pales. Elle était attachée à une chaise et sa gorge avait été presque à moitié tranchée, répandant son sang, sa vie, à travers toute la pièce. En un éclair, le garçon vit que sa mère avait dit vrai sur la vie après la mort. Il n’y avait pas de paradis, pas de Dieu ni rien de tout ça. Il reconnut l’odeur métallique comme étant celle de la mauvaise haleine de sa mère. Les jets de sang dégageaient les mêmes relents que les trous dans ses dents. Il éteignit la lumière, avec la sensation qu’elle venait de l’avaler tout cru. Tout devint noir. »
Je savais bien que tu n'étais pas totalement inutile. Malheureusement la légiste n'est pas de cet avis. ( ...)
- Elle veut me virer de l'affaire.
- Elle veut te virer de la planète, fiston.
- Je peux vous demander ce que vous lui avez dit, monsieur ?
- J'ai dit que je compatissais, sincèrement, mais que toi et Sutty étiez comme ces déguisements d'âne qui se portent à deux. Si je me débarrasse de toi, je vais me retrouver avec un gros cul qui tourne en rond sur scène. " - ça tenait du compliment-
Le garçon replia le poing autour de la pièce de monnaie que lui avait donnée Bateman et plongea les yeux dans l’obscurité. La salive lui vint à la bouche et des tâches solaires se mirent à défiler devant ses yeux. Au départ, elles scintillaient à peine, puis elles grossirent , accélérèrent, jusqu’à vrombir devant lui comme des rideaux de pluie. Comme s’il regardait fixement une lumière vive au lieu de la nuit noire.
Ses mensonges étaient imparables parce qu'il y croyait dur comme fer, de sorte que lorsqu'il était démasqué et qu'il voyait le vrai Zain Carver dans le regard de l'autre, il était tout aussi choqué que le reste du monde. A partir de là, sa solution n'était pas de se corriger, d'éprouver des regrets ou des remords, mais de corriger les gens qui avaient entrevu sa vraie nature. ( p 366 )
Dans ce nouvel épisode, nous continuons notre visite des coulisses du genre en compagnie de Fabienne Gondrand, traductrice littéraire, qui nous raconte ses débuts dans le métier et sa passion pour les éditions du Masque, héritage d'un grand-père italien fan des polars d'Agatha Christie et de Simenon. Au fil de la conversation, on évoque sa traduction "jubilatoire" de Meurtres à Kingfisher Hill de Sophie Hannah, l'héritière de la Reine du crime, ainsi que les romans noirs électriques de Joseph Knox, où la ville de Manchester se dresse comme un personnage. Pour finir, Fabienne nous parle en avant-première de la nouvelle aventure de l'inspecteur John Rebus, par l'immense Ian Rankin, auteur phare de la maison.
Bonne écoute !
CRÉDITS : Conversation dans le noir est un podcast des éditions du Masque.
Réalisation : Paul Sanfourche
Générique : Longing - Joachim Karud
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