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EAN : 9782070149438
416 pages
Gallimard (13/05/2015)
3.05/5   31 notes
Résumé :
Walenhammes est la plus grande ville industrielle du nord de la France, et on sait à peine qu’elle existe. Quand les terribles événements que l’on sait commencèrent à la détruire, Charles Avril y vint sur un coup de tête, pour écrire quelques articles qu’il pourrait vendre au site d’information où il est pigiste.
À Walenhammes, après la fermeture des mines et du haut-fourneau, il ne reste qu’un peuple abondant dont on ne sait pas quoi faire. Georges Fenycz, m... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
"MEDEF ! Couché Medef. Il n'obéit pas bien, sûr il n'obéit jamais, peut-être est-il sourd. Medef au pied, clame page 201, Jeanne."
La pique d'Alexis Jenni est cocasse, et en même temps, reflète le ton du livre qu'il a modestement appelé la nuit de Walenhammes, une ville qui se meurt après la perte de son tissu industriel.
Les propos sont caustiques, malgré un humour qui fait mouche, on a peine à rire franchement.

Le réalisme des descriptions, la justesse des propos échangés par les hommes politiques rencontrés, apportent une crédibilité aux propos d'Alexis Jenni, et donnent plutôt l'image de réflexions posées et réfléchies.


La promenade de Medef, "où il vaut mieux que le chien ne soit pas là pour parler humainement d'industrie" est un des chapitres de ce volumineux roman.
Alexis Jenni introduit à travers chaque chapitre ou presque des réflexions sur le monde industriel d'aujourd'hui, sur les villes qui constituaient le tissu industriel du nord de la France ?

C'est un philosophe imaginaire qui synthétise en une demie page ce que l'on peut tirer comme leçon des événements relatés, sous le titre d'éphéméride de Lârbi. de son faux nom Lârbi Mektoub, qui signifie, inchhallah c'est le destin, livre par exemple une première citation : "il n'y a plus de coupable seulement une assemblée de profiteurs dont la plupart ignorent même qu'ils le sont."

"Cette citation s'ajoute à celle de Philippe Sollers, le roman interroge ce que personne ne veut savoir concrètement."


Il suffit de parcourir quelques-unes des têtes de chapitres pour se convaincre qu'Alexis Jenni pointe du doigt des problèmes essentiels, sur des dysfonctionnements notables, sur des comportements douteux, sa plume délicate appuie là où ça fait mal.
Les hommes se rappellent que dans cet empire de la chaleur qu'est l'aciérie, "la fonte cassante ne peut devenir acier que par le travail humain. Sous la menace du patron, l'un osa quand même. Tenant solidement la lance à oxygène qu'il plonge dans le liquide une flamme crachée par la bouche du four entoura l'homme debout et le carbonisa aussitôt, page 137."

L'éphéméride de Lârbi livre alors des réflexions simples, "ce n'est pas un crime d'être riche. Et cela le devient de croire que l'on ne le doit qu'à soi. Il est cynique de faire croire que celui qui accumule une fortune en a seul le mérite, page 140."


C'est bien à cette rude épreuve que je vous convie sans regrets, malgré quelques longueurs.
D'ailleurs le livre commence par un incident d'une violence inouïe quand le feu se déclare à la piscine de Walenhammes transgressant toutes les lois, mêmes naturelles.


Trois chapitres méritent d'être rapidement évoqués.

La médiathèque qui tombe en désuétude sauf pour une petite Jeanne qui veut lire l'intégralité de Dostoïevski. Les livres ont besoin d'être aérés, c'est le gardien de nuit qui va s'attacher à cette tâche, lire tous les livres de la médiathèque, après avoir fait ses tours de rondes. Un acte essentiel à la vie de la communauté un acte non rémunéré.


Le deuxième événement que l'on pourrait citer, est celui de l'usine qui fabrique les fameuses glaces Froid du Nord. Entreprise de la ville qui réjouit les enfants depuis plusieurs générations ce froid du Nord avait introduit une certaine culture, et restait symbolique pour la ville, Wilenhammes aux hauts-fourneaux éteints et aux mines désertées.
Les Wilenois se revendiquaient désemployés.

Quatre Flamands ont acheté la marque Froid du Nord mais pas son emplacement. Pompeusement ils déclaraient : "elle sera mieux défendue dans nos mains et dans nos usines au Maroc". "Vous allez faire des glaçons au Maroc, cette chose qu'on appelle le grand Sud," demanda le maire ?


Alexis Jenni s'est livré en 2014 à une enquête qui éclaire l'état de l'Angleterre avant le Brexit. Alexis Jenni fait ce constat : l' Angleterre est peuplée de fantômes, qui travaillent..

Les ouvriers à bas coûts ne sont pas comptabilisés, leur importance est inconnue, sauf qu'ils demandent des salaires dérisoires.
Des fantômes qui travaillent, et tous les étrangers rêvent de devenir fantômes, ils n'ont pas de papiers, ou des imitations. "En Angleterre on peut entrer discrètement travailler, facilement sans presque être payé, travailler chaque matin que cela convient, jusqu'à ne plus travailler un matin. Quelqu'un est arrivé dans la nuit, qui veut bien travailler pour moins et il a pris la place. On disparaît alors à nouveau."


Par la diversité des exemples mis en valeur, ceux de cette ville qui se meurt aujourd'hui, Alexis Jenni tente de nous expliquer que " l'utopie du laisser-faire est un monde peuplée de fauves, d'esclaves, de sicaires qui s'entre-tuent." Est-ce cela le monde que nous voulons ? Peut-être que l'on peut ainsi résumer sa grande interrogation.


Et vous ? Si vous ne souhaitez lire qu'une page attardez vous ici.
Lârbi page 366 explicite ceci.
Nous savons l'effondrement à venir, mais il y a tant d'argent à faire.
On espère que cela tienne juste un peu.
On espère être le dernier à s'enrichir juste avant que tout s'effondre.
Pourquoi arrêter ?
Pourquoi obéir aux signaux alors qu'il y a tant à gagner.
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La nuit de Walenhammes a des airs de jeu de piste avec un cadre _ une ville du Nord déliquescente ravagée par la désindustrialisation, les germes d'une intrigue _ une succession de violences étranges en présence d'une "mafia", et un personnage témoin _ un journaliste en situation précaire qui se met en tête d'écrire des articles sur cette ville qui sombre.
Ce n'est qu'une simple illusion. Au lieu d'opérer un dénouement, Alexis Jenni, par la trouble densité de son propos compose un roman qui piège les désastres du libéralisme économique. La fiction est traversée par une longue réflexion sur ce capitalisme qui adopte dans le livre la forme d'une sauvagerie libérale qui manipule, trompe, rejette et parfois tue. Avec l'idée désenchantée d'une réalité impitoyable à laquelle il est impossible d'échapper en raison de l'impuissance voire de la connivence des pouvoirs publics et du consentement aveugle de ses victimes, une population dépouillée.
Ce n'est donc pas un roman classique, l'auteur s'attachant par l'intermédiaire de Charles le journaliste à décortiquer "la machine sociale, l'arrangement qui créé la pauvreté ; […] à Walenhammes on la voit à l'air libre".
Malheureusement les intentions de l'auteur ne suffisent pas à véritablement conquérir le lecteur. Etape improbable entre roman social et drame burlesque en lisière de la science-fiction, La nuit de Walenhammes est le genre de roman total qui veut tout dire tout expliquer, au risque de se répéter, au risque de s'enfermer dans le dogmatisme, au risque d'écraser la fiction.
Et au final on ne sait pas trop quoi dire de cette oeuvre. C'est bien dommage au regard des qualités évidentes de l'auteur.
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Mais où se trouve donc Walenhammes ? Dans son dernier roman « La nuit de Walenhammes », Alexis Jenni, qui nous avait conquis avec « L'art français de la guerre » situe cette ville, imaginaire ou non -peu importe, dans le nord de la France, cette France industrielle qui meurt depuis plusieurs décennies.

Charles Avril, jeune journaliste, que son patron oublie parfois de payer pour ses articles de pigiste, est envoyé par ce dernier pour enquêter, et restituer si possible quelques données de cette crise économique qui n'en finit pas de frapper et d'engendrer du dommage, de la précarité, de la pauvreté. Charles Avril est fragile, comme personne, comme journaliste .Il doute de son métier, de la pertinence d'internet comme support et source d'information .Il ressent ses écrits comme fugaces, prompts à passer dans la trappe de l'oubli médiatique, peu significatifs et encore moins susceptibles de marquer leur époque, journalistiquement parlant. Pourtant, son patron le convainc de partir, il sera payé cette fois …

Une fois sur place, ce journaliste incertain rencontre de bien curieux personnages : le maire de la ville, Georges Fenycz, qui prétend avoir découvert un atout pour ses administrés : « le passé est une réclamation infinie, la demande de recouvrement d'une prétendue créance, une plainte .On ne devrait pas se plaindre .Il ne devrait pas y avoir de passé (….) Allons, Devain, c'est notre pauvreté qui est notre richesse. »
Dans cette acceptation, plus logique qu'il n'y paraît, ce sont les dérives du système économique actuel et de la l'idéologie libérale qui sont mises en accusation et révélées sous leur vrai jour par un certain Lârbi Mektoub, auteur d'éphémérides commentant chacun un aspect de cette vision du monde et tout ce qu'elle entraîne : l'acceptation de l'inégalité, de la baisse des revenus, de la lutte des salariés entre eux, de la compétition à outrance, vielles antiennes bien connues pour faire accepter des transformations inacceptables …
Au cours de son reportage, Charles Avril rencontre une maître-nageuse, qui tente, tant bien que mal, de subsister, de continuer à vivre .Il se prend d'affection pour une jeune fille qui s'efforce de mûrir par la lecture exhaustive des Démons, de Dostoïevski .La littérature, toujours cet antidote à la brutalité du réel…
Malgré quelques longueurs et digressions discutables, le roman d'Alexis Jenni atteint son but : il parcourt, par l'onirisme et le réalisme entremêlé étroitement, l'état du monde économique actuel. Il le dénonce avec habileté, ironie, humour, au point que la dernière page de l'ouvrage apporte un concours surprenant à la thèse du There is no alternative : « Répétez encore.
« On ne peut pas faire autrement !
Eh bien, vous voyez, quand vous voulez ! »
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Quatre ans après le remarquable succès de "L'art français de la guerre", premier roman décrochant le tant convoité Prix Goncourt, Alexis Jenni nous emmène dans le Nord de la France, près de la frontière belge, dans la ville fictive de Walenhammes.
Ce roman, très social, mêle plusieurs niveaux, allant du politique au fantastique, peut-être pour nous faire comprendre où nous mène l'évolution de notre société. Ainsi, nous suivons Charles Avril, journaliste vacataire, intellectuel précaire : « il enquêtait, il écrivait, il vendait. » Son métier est de plus en plus difficile à cause de la numérisation du monde qui « permet des copies parfaites, et étend sur toute la Terre l'empire de la trahison. »
Walenhammes est secouée par des événements de plus en plus étranges avec ces Brabançons qui transgressent toutes les lois, même les plus naturelles. Chaque chapitre possède son titre et son sous-titre précisant ce qui va se passer. S'ajoute aussi l'éphéméride de Lârbi apportant des commentaires très pertinents sur ce qui est en train de bouleverser notre monde comme cette course à la richesse : « le maître dit : Ce n'est pas un crime que d'être riche. Mais cela le devient de croire qu'on ne le doit qu'à soi… »
Réflexions très pertinentes, scènes tendres très réussies entre Marie et Charles, sous la douche, à la piscine, Alexis Jenni aurait dû éviter certains épisodes très mystérieux, complètement décalés, pas vraiment nécessaires si ce n'est pour accentuer le chaos dans lequel se trouve cette ville désindustrialisée.
Avec « Les héros de l'industrie lourde », l'auteur rend un vibrant hommage aux ouvriers de fonderies, hommage qui fait penser à l'admirable chanson de Bernard Lavilliers, Les mains d'or : « Nous faisions cela : ramollir la pierre, fondre le minerai, recueillir du métal liquide.» Cette fabrication de l'acier au mépris de la vie humaine est superbement rendue avec des scènes d'un véritable enfer.
D'autres scènes ont le mérite de faire réfléchir sur le totalitarisme exercé par la grande distribution dans la course au plus bas coût : « Dans l'hypermarché bas coût, c'est le prix de vente qui compte, pas le coût de production qui suivra bien.. » Il en est de même avec Spando, l'usine qui fabrique du minerai de… viande. Et Lârbi souligne que « L'utopie du laisser-faire est un monde peuplé de fauves, d'esclaves et de sicaires qui s'entretuent pour la répartition des parts de marché. »
N'oublions pas l'usine Froid du Nord, excellente fabrique de glaces, délocalisée au… Maroc et qui est remplacée par un cube destiné à stocker des données créant enfin des emplois de… ménage pour les femmes et de gardiennage pour les hommes ! le maire plastronne devant une telle réussite et Alexis Jenni note très justement : « C'est étrange que l'on veuille ce qui nous laissera seuls et dépouillés dans un monde dévasté. »
Heureusement, il y a Marie endormie dont « Charles sentait l'odeur douce de la sueur toute imbibée de plaisir. le corps de Marie sentait la gaufre tiède, les épices douces, la fleur entrouverte… et pourtant, certains se déodorent et ceux-là ont tout perdu… »


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On comprend assez vite où l'auteur nous emmène, le problème est qu'il nous perd en route. La critique acerbe du système capitaliste qui broie les individus ne pouvait trouver meilleur lieu que cette ville imaginaire du Nord de la France, cimetière des illusions d'un monde meilleur. La mondialisation défraie la chronique d'une ville qui cultive la nostalgie d'un passé glorieux. L'irruption de malfaisants est censée symboliser cette impuissance face à des évènements venus d'ailleurs. le mystère qui entoure ces créatures s'épaissit et le propos du livre avec. Il ne reste comme seul arme que le verbe, véhiculé sur Internet, ultime sauveur. La peinture sociale et la nostalgie qui imprègnent ce roman sonnent juste, le fantastique par contre tombe à plat et noie le propos sous des paraboles inutiles.
Il reste au final un ouvrage riche (trop) qui aurait gagné à plus de simplicité dans la forme.
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critiques presse (2)
Bibliobs
01 juillet 2015
Les grands sujets saignants ne font pas peur à Alexis Jenni. Les gros romans non plus. C’est un écrivain qui aime appuyer là où l’époque fait mal.
Lire la critique sur le site : Bibliobs
LeSoir
26 juin 2015
«La nuit de Walenhammes» regorge de menaces.
Lire la critique sur le site : LeSoir
Citations et extraits (74) Voir plus Ajouter une citation
Il faudrait 30 mots pour dire la rouille,
mais ils n'existent pas,
il faudrait les créer et surtout les employer,
alors on apprivoiserait l'oxydation du fer
et on lui trouverait de la beauté du confort,
on la trouverait accueillante et vivante cette rouille qui érode ce qui a été droit,
ce qui était bien huilé au moment du travail,
et qui maintenant parce que ça ne bouge plus
parce que ça ne sert plus à rien,
se dissout au contact de l'air
en prenant un aspect de velours,
d'une belle couleur de feuilles mortes.
p 125
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Quand on a les pieds posés sur les épaules de ceux qui vous soutiennent, la différence entre être porté et piétiner tient à une tournure d’esprit.
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On lit en permanence, mais on ne sait pas qui écrit. On oublie que c’est du verbe humain, qu’il faut quelqu’un pour le produire, même les modes d’emploi, les légendes des photos, les indications routières, même les étiquettes de produits alimentaires, et aussi les prévisions météo, les résultats sportifs, les considérations sur les fluctuations boursières, les tendances de mode, les conseils culinaires et leurs recettes de cuisine, les notices astrologiques : le flux écrit serait hors de prix si on payait des gens pour le produire. Pour que le flux reste fluide, il faut des gens qui écrivent pour rien ; peu importe qui, peu importe où, peu importe même que ce soient des gens : la seule règle est que le flux ne s’interrompe pas car il y a hypnose : il ne faudrait pas réveiller les lecteurs qui lisent sans penser qu’ils lisent.
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[Dans l'usine de "minerai de viande"]
...le concept d'animal n'a plus cours. On assemble du haché comme on assemble des voitures, à partir de pièces, de matières premières, d'énergie, en suivant les process [italique] de fabrication. La matière première des produits farcis est le minerai, et qu'il ait été vivant n'est que l'un de ses aspects, une simple donnée à prendre en compte dans cette branche de l'industrie. Que cette matière soit capable de reproduction est un atout ; qu'elle soit corruptible est un défaut ; qu'elle soit souffrante est indifférent, cela n'a pas de conséquence sur la chaîne de fabrication. Le concept de souffrance n'a plus cours ; le concept de corps n'a plus cours ; le concept de gens n'a plus cours non plus.
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Quand on a les pieds posés sur les épaules de ceux qui vous soutiennent, la différence entre être porté et piétiner tient à une tournure d’esprit. Dans le premier cas, la pyramide pourra grandir et porter plus de fruits encore ; dans le second, elle s’effondrera une fois les plus beaux fruits dévorés. La sélection naturelle se moque absolument de l’humanité, elle ne regarde jamais au nombre de morts, elle peut choisir l’une ou l’autre stratégie, peu importe, tout fonctionne ; même mal.
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