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EAN : 9782234093010
180 pages
Stock (04/10/2023)
4.19/5   13 notes
Résumé :
Le XXIe siècle commençait, elle sortait de l’adolescence, une tresse savante posée sur l’épaule gauche. Je rencontrai Yana dans une rue en chantier du sud de la Russie. Nous devînmes alliés séance tenante ; quelque chose que je ne saurais nommer l’exigeait. Nos chemins se séparèrent puis se croisèrent de nouveau des années plus tard, dans une prison sibérienne.

Ensemble, nous partîmes en cavale.

Ne lui dites pas qu’elle est romanesque.... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
MAGNIFIQUE,
tel est le mot – ou plutôt l'exclamation– qui m'est immédiatement venu à l'esprit au terme de la lecture que j'ai faite de ce deuxième livre de Yoann Barbereau.
Personne n'a oublié, paru en 2020, ce remarquable Dans les geôles de Sibérie où il faisait le récit de la manière dont il était parvenu à échapper, à Irkoutsk, en Russie, à la veille d'un procès jugé d'avance, aux griffes du FSB. Une cavale sans autres moyens que son courage et l'aide de quelques amis, dont surtout cette Yana qui donne son nom au titre de ce deuxième livre. Une figure hors du commun dont on ne découvre la personnalité qu'avec ce nouveau récit.
Pour un écrivain, dit-on souvent, le plus difficile est d'écrire un deuxième ouvrage qui puisse passer la rampe : l'auteur n'a-t-il pas épuisé déjà toutes ses cartouches ? Défi renforcé pour Yoann Barbereau, dans la mesure où dans son premier livre pesait évidemment très lourd, en termes d'aliment narratif, l'expérience de sa peu banale cavale. Comment parvenir à écrire un livre de même intensité, un livre « aux allures de cavale éternelle » ?
Trois événements sous-tendent la trame narrative de ce nouveau livre (bien qu'ils soient d'inégale ampleur, aucun d'entre eux n'aura échappé à ceux qui sont attentifs à ce qui advient à l'Est) : l'échappée belle de l'auteur (en deux étapes, depuis Irkoutsk en 2016 puis depuis Moscou en 2018), l'exposition d'Ilya Répine au Petit-Palais, à Paris (du 5 octobre 2021 au 23 janvier 2022) et l'invasion russe en Ukraine à compter du 24 février 2022). Ces trois événements apparemment sans grand rapport viennent se coaguler dans le récit de Yoann Barbereau, lui donnant profondeur et relief, tant au plan historique qu'esthétique. Car, au-delà du récit (ou plutôt par la grâce du récit), c'est assurément un livre riche en pensée.
Par exemple sur la question du réalisme pictural : celui de Répine ne s'attarde pas à produire un reflet naturaliste. Il cherche à faire passer le souffle d'une vision. Sa touche agit comme autant de « phrases chamanes », produisant sur le spectateur l'effet le plus puissant, le plus magique. Répine, on le sait, était un maître du portrait – un maître shakespearien aurait-on envie de dire, au regard de son fameux tableau Ivan le Terrible et son fils Ivan. le portrait de Yana, obtenu par touches successives, au fil des chapitres, parvient à restituer toute la complexité d'un personnage-personne, une jeune femme au singulier destin, à la fois passionnée d'archéologie et mère inquiète pour son fils (l'« axolotl »), un tout jeune homme parti au front (côté russe), alors qu'elle est elle-même résolument hostile au « montagnard du Kremlin » dénommé Poutine (elle « aimerait que l'humanité cesse de construire ces fables imbéciles, les empires, la gloriole militaire »).
Dans le droit fil de la ligne de conduite adoptée pour son premier livre, Yoann Barbereau maintient : « Je ne romance jamais ». Témoignage ou littérature ? « Témoignage et littérature, indécidablement – expérience vécue (attestée par Yana à qui l'auteur a soumis son manuscrit) et invention « belletriste » (l'auteur reprend le mot du russe, le dépouillant de toute nuance péjorative). Et en effet, il y a bien littérature, c'est-à-dire art de la phrase : rapidité, ellipse, acuité. Il s'agit, nous dit l'auteur, « d'écrire comme un Scythe ». Formule qui me rappelle une phrase de Thoreau disant que le poète est un archer parthe qui décoche des flèches, là où le romancier est un Romain qui construit des édifices. Mais ici l'archer et le bâtisseur se rejoignent (la construction par chapitres tout en ellipses en témoigne). Toute la dernière partie du livre, à propos de l'Ukraine, est remarquable (et nullement comme tribut qui serait payé à l'actualité). On y trouve notamment un portrait d'une grande justesse de Poutine, « le voyou à la carrure incertaine » et « aux doigts courtauds gras comme des vers ». Tirée d'une épigramme fameuse de Mandelstam contre Staline, la citation pose parfaitement la juste équation qu'il convient d'établir entre le tyran Poutine et son prédécesseur de sinistre mémoire.
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Yoann Barbereau, ce nom vous dit peut-être quelque chose. C'est cet ancien directeur de l'Alliance française basée à Irkoutsk, qui a été victime d'un Kompromat des autorités russes il y a neuf ans de cela (Selon la définition de Wikipédia, il s'agit terme russe désignant des documents compromettants, authentiques ou fabriqués (c'est le cas le plus courant) qui sont utilisés pour nuire à une personnalité politique, un journaliste, un homme d'affaires ou toute autre figure publique et qui s'est retrouvé en prison.) Vous avez peut-être lu Dans les geôles de Sibérie (Stock,2020) , le livre dans lequel il revient sur les rocambolesques et incroyables circonstances de sa fuite hors de la fédération de Russie, ce qui n'est pas vraiment une mince affaire. Un film éponyme a d'ailleurs été tourné relatant son histoire, Kompromat, avec Gilles Lellouche qui endosse sa vie sous le nom de Mathieu Roussel, et que j'ai pu voir à Morges en septembre dernier. En passant, je n'ai pas d'affinité particulière avec l'acteur, bien au contraire, pourtant, il incarne parfaitement le rôle, il faut le reconnaître. On y apprend le rôle qu'a joué cette anonyme russe, sa complice de fuite, qui l'a aidé à fuir vers la frontière estonienne, celle qui a eu l'audace de prendre les risques que l'ambassade française s'est courageusement refusée à prendre. Celle dont il protège résolument l'identité et qui se prénomme ici Yana dans ce récit-hommage qu'il lui rend et publié chez Stock.


C'est donc un hommage qu'il rend et qu'il met en scène à travers l'histoire de cette amie et confidente, complice et compagne de fuite, Yana, dont il retrace la vie parallèlement avec l'existence et les oeuvres du peintre Ilya Répine, dont j'avais lu la correspondance avec Tolstoï, et donné mon avis ici. Nous voilà face à trente-neuf chapitres, simplement précédés d'une dédicace À toutes les Yanas, sans autre forme d'introduction, ni de remerciements divers comme il est de plus en plus usage de faire. le premier chapitre ou plutôt ce qu'il appelle Prélude, nous ramène au XIXe siècle, au beau milieu d'un dialogue entre les deux artistes russes, Ilya Répine et Léon Tolstoï. Et, puis, soudainement, le narrateur retrouve la focalisation du récit, on se retrouve au chapitre deux dans ce qui fut sa geôle sibérienne à ses côtés, en l'an 2015, puis, après son périlleux retour en France.

Ce passage sans distinction d'une temporalité à l'autre, de personnages historiques à une narration sous focalisation interne est assez déroutant : l'auteur présume de notre connaissance de ses aventures russes qu'il injecte dans l'histoire de ce narrateur double troublant de lui-même. C'est intéressant, car si je n'ai pas lu son récit Dans les geôles de Sibérie, je l'ai dit plus haut, j'en ai vu l'adaptation cinématographique et cela complète ce que j'y ai appris. Lire, ou relire si c'est votre cas, les lignes qui ressassent l'histoire de Yoann Barbereau donne le sentiment, justifié ou non, que l'auteur n'en a pas fini d'exorciser ses mois passés en prison, et les machinations qui ont été très près de le broyer définitivement, lui le Frantsous, Yoanntchik.

J'ai apprécié lire toutes les références à Ilia Répine qui a insipiré Yoann Barbereau pour écrire sur sa Yana, le fond reste tout de même quelquefois confus dans le manque de lien entre les anecdotes, et retours en arrière sur l'ère Répine et la narration sur sa Yana, qui semble avoir vécu mille vies, entre la Russie et Paris, donnant naissance à son garçon. le mélange du passé et présent est si déstabilisant que l'on ne sait plus trop dans quel monde imaginaire Yoann Barbereau nous a emporté, une sorte de monde intemporel où se rencontrent les artistes russes du XIXe siècle et la vie de cette jeune russe, amie de l'auteur. On se demande, bien sur, ce qui peut bien relier Yana à Ilya Répine dont l'oeuvre Ivan le Terrible et son fils Ivan orne son mur sous le format d'une carte postale. le fait, entre autre, que Yana s'identifie à ce tsar Ivan qui porte bien sa qualification de terrible, ou davantage qu'elle y identifie la mère tyrannique qui fut la sienne. Pour rendre compte de la personnalité d'une trempe hors du commun, doté d'un caractère tel qu'il est comparable aux oeuvres picturales de Répine, gravé dans le temps, les toiles, la mémoire et l'histoire russe. Cette reconnaissance pour celle qui l'a aidée, il la transcende en lui fabriquant sa propre mythologie à travers la vie et l'oeuvre d'Ilya Répine.

L'auteur a ces mots dans l'un de ses derniers chapitres « Peindre un livre en parole. Quel livre ? » : celui d'une guerrière, telle qu'il la décrit au troisième chapitre, fille improvisée d'Ivan le Terrible maternel, essayiste sur l'ancien Premier ministre Piotr Stolypine, un bourreau au service du tsar Nicolas II, soeur d'âme d'Ilya Répine, ou d'un Garchine, de l'archéologue Gimbutas, fille du Dniepr et du Don, les portraits laissent à chaque fois découvrir une nouvelle facette de Yana, même si l'on ressent que cette Yana-là est, au fond, insaisissable. L'hommage est beau, de la dimension de la grandeur d'âme de celle qui a pris le risque de sa vie pour sauver son ami français, cette toute dernière chance pour Yoann Barbereau d'échapper à l'injustice russe.
Lien : https://tempsdelectureblog.w..
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Portraits de Yana, le deuxième opus de Yoann Barbereau, est pour le moins singulier. Une sorte de « livre-cérémonie » qu'il offre à cette jeune femme, Yanechka, complice de son évasion, avec qui il s'est lié d'une amitié extraordinaire qu'il nous raconte au pluriel. chaque chapitre est un nouveau portrait et dans le même temps une histoire se construit pas à pas. de ces multiples reflets de Yana, l'auteur tire un kaléidoscope d'une grande poésie (son écriture concentrée relève de la poésie en prose) où l'on perçoit ce qu'il veut bien nous donner des métamorphoses de son amie. Je n'ose employer le terme de roman, je ne sais d'ailleurs pas comment classer ce récit. Yana est romanesque à souhait, mais est-ce un roman ? Peu importe au fond. C'est comme le tableau fameux d'Ilya Répine représentant l'assassinat du tsarévitch par son père, Ivan le Terrible (tableau qui m'a fasciné depuis l'enfance et qu'on retrouve ici au coeur de l'histoire), avec son étonnante légende qui croise les vies de Yana : cette vision sort du cadre ordinaire de la peinture de genre. Mais pas question d'en dire plus, ni des tambours chamaniques qui arrivent à la fin... Ce récit a le pouvoir d'envoûter son lecteur... Yoann Barbereau, avec ce livre, nous donne un chef-d'oeuvre d'une rare beauté parmi toute la littérature française contemporaine. Il y a là quelque chose de nouveau.
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J'avais adoré le premier livre de Yoann Barbereau (Dans les geôles de Sibérie), celui-ci était attendu avec impatience. Je n'ai pas été déçue... Mais complètement bouleversée. On ressort du livre fascinée par la figure de Yana, comme envoûtée par les "phrases chamanes", c'est tout simplement magnifique... de la grande littérature.
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A travers les portraits de Répine, Yana se dessine une vie. Les époques sont différentes et l'imagination de Yana est en ébullition.
Soit je n'ai rien compris à ma lecture, soit ce n'est pas un livre pour moi, en tout cas même si la lecture a été complète , aucune appréciation du récit.
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Citations et extraits (13) Voir plus Ajouter une citation
Sur cette grande bande de terre qui va de la mer d’Iroise à la mer des Tchouktches, elle aimerait que l’humanité cesse de construire ces fables imbéciles, les empires, la gloriole militaire qui n’est qu’empilement de vies détruites au nom du chef ou du Saint‐Esprit, de l’or ou de l’honneur, c’est‐à‐dire rien, du vent ; elle imagine l’art, l’intelligence, les langues et l’amour se balader librement de la pointe du Raz à la Tchoukotka, effaçant les anciennes fictions, les anciens cultes, tous les anciens crétins terribles.
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La vérité : j’étais de la menue monnaie à usage tactique, rien de plus. Je fus un pion dans le jeu sans fin des civilisations qui s’entrelacent et se haïssent, s’applaudissent, se jalousent, bâtissent des mondes à coups de lames, des romans et des morales à coups de canons. Je devins un télégramme diplomatique de chair et d’os.
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Nos chairs, nos muscles et nos os s’animent des mouvements qui patiemment s’inscrivent en eux depuis l’aube des temps. Des sons archaïques sortent de nos bouches, souffles et raclements de gorge, quelque chose s’exprime de l’apprentissage de milliers de primates engendrés les uns après les autres avant nous. Nous parcourons nos couches d’ancestralité, c’est comme une archéologie physiologique.
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– On n’écrit donc plus rien de beau aujourd’hui ? Il n’y a plus de belletriste ?
– Belletriste ?
– Tu ne connais pas le mot ?
– Non.
– Non !?! Les Français ont les belles‐lettres, mais ne savent pas comment nommer celui qui les pratique ?
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Aucune existence ne se conte, aucun humain n’est capable d’embrasser une vie entière – aussi brève fût‐elle – avec des mots. On peut seulement donner des portraits, de soi‐même ou d’autres que soi, toujours provisoires, avec leurs couches et leurs glacis, leurs blancs et leurs repentirs.
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Vidéo de Yoann Barbereau
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Voici une histoire à peine croyable. Il y a tout pour faire un bon roman d'espionnage : l'amour, le sexe, les services secrets, la prison, l'hôpital psychiatrique et même une évasion spectaculaire… Tout pour faire un roman, sauf que c'est une histoire vraie !
« Dans les geôles de Sibérie » , de Yoann Barbereau, c'est un récit publié aux éditions Stock.
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