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Marion Graf (Traducteur)José-Flore Tappy (Traducteur)
EAN : 9782940055654
230 pages
La Dogana (19/11/2010)
4.53/5   17 notes
Résumé :
Anna Akhmatova : L’églantier fleurit et autres poèmes traduits du russe par Marion Graf et José Flore Tappy, (La Dogana, Genève, oct. 2010, 230 p.) Édition bilingue.

Anna Akhmatova (1889-1966) est une poétesse russe, une des plus grandes artistes du XXème siècle, en Russie, avec Osip Mandelstam et Marina Tsvetaieva. Elle fut l'amie de Modigliani , de Mandelstam, de Isaiah Berlin, Joseph Brodsky, entre autres. Elle fut emprisonnée sous Staline après ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Qui a dit que la poésie n'était qu'un art contemplatif et romantique ? Dans ce recueil, on sent bien que la poésie pour Anna Akhmatova était une arme pour s'échapper de sa vie et des conditions de vie dans lesquelles elle suffoque.
Ses vers sont ici teintés d'amertume, de douleur, de fatalité.
En plus du contexte historique déjà difficile (la révolution, les purges stalineinnes) la poétesse a fait face à la censure et autres menaces du régime qui lui a en plus enlevé deux de ses maris (excécutés) et déporté son fils alors qu'il n'avait que 18 ans.
C'est toute cette souffrance et toutes ces épreuves que l'on sens dans les vers de cette poétesse. Même si le tout est exprimé avec de belles images et une langue très orale donc fluide, on entend les cris de douleur d'un peuple entier ... comme Anna Akhmatova l'avait d'ailleurs voulu.

Une oeuvre si forte que j'en perds mes mots...
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Un joli livre. Une couverture bleu nuit sobre et élégante, un papier agréable au toucher, une mise en page aérée : de petits détails qui, déjà, invitent à un délicieux moment de lecture. le titre, l'églantier fleurit, reprend celui d'un recueil d'Anna Akhmatova composé de poèmes écrits entre 1946 et 1961. Plus largement, cet ouvrage rassemble des recueils de la grande poétesse qui embrassent l'ensemble de sa vie. Ces recueils et les poèmes qu'ils recèlent sont plutôt courts, de très jolis petites pièces de mots.
Cette édition bilingue est aussi le résultat d'un nouveau travail de traduction assuré par Marion Graf et José-Flore Tappy. Chose souvent trop rare, quelques lignes sont données au lecteur pour expliquer les partis pris choisis pour cette nouvelle traduction qui n'essaie pas de reproduire la mesure du verbe russe très différente de celle du vers français. L'accent est mis sur la restitution de la cadence et du rythme des vers d'Akhmatova. L'objectif était de faire jaillir la concision des images de la poétesse. L'objectif est réussi, ces vers dégagent une étonnante précision et une très belle sonorité. Pas ou peu de rimes et c'est tant mieux car ces vers y auraient alors certainement perdu de leur âme. On a l'impression que chaque mot, chaque signe de ponctuation est à sa place et forment des mélodies aux accents tantôt amoureux, tantôt mélancoliques voire sombres. Il faut prendre le temps de lire quelques uns de ces vers à voix haute pour se rendre compte de leur sonorité magnifique.
Les premiers recueils sont bercés par le chant de l'amour, un chant à l'être aimé où les accents du bonheur côtoient très vite ceux de la douleur de la perte de l'être cher. Les recueils suivants versent moins dans la romance (ne pas voir de sens négatif à cette expression) mais conservent cette sensibilité tout en gagnant en maturité, en assurance. Akhmatova dit aussi à travers ses vers tout l'amour de son pays et sa ville de coeur : Saint Petersburg dont elle évoque nombre de lieux. Comme souvent dans la poésie russe, une petite place est faite aux « pères ». Beaucoup de petites références à Pouchkine, probablement le véritable amour de sa vie. Un poème est aussi dédié à son contemporain Ossip Mandelstam.
Toujours la souffrance n'est jamais tapie très loin...mais Akhmatova aura eu toute sa vie durant cette énergie incroyable à ne jamais céder aux malheurs colossaux qui la frapperont, elle et les siens : la séparation déchirante avec son premier mari, le poète Nicolaï Goumilev, la mort de celui-ci (exécuté par les bolchéviks en 1921), l'arrestation et la déportation de beaucoup de ses proches (dont son fils pendant dix-huit ans), la mort au goulag de son second époux (l'historien d'art Nicolaï Pounine), l'ostracisme, la haine dont elle a été la victime de la part du pouvoir soviétique (elle ne pourra rien publier pendant quarante années). Rien de tout cela ne fera tomber Akhmatova la battante. Toujours sa silhouette restera debout, les pieds dans la mêlée mais l'âme au dessus du bourbier, comme un défi lancé à la vie et aux tyrans du Kremlin. Les yeux dans les yeux. Sans haine.
Cette force, ces quelques vers nous la transmettent avec acuité. Nom de nom, quel personnage ! Une meneuse qui jamais ne perdra sa lucidité et transformera en vers magnifiques les épreuves et les petits bonheurs de la vie, toujours avec grâce et sobriété. Des accents amoureux des vers des années 1910 aux accents tragiques du terrible Requiem, ce recueil nous donne une très belle vue d'ensemble de l'oeuvre immense d'Anna Akhmatova, bel arbre fleuri , dressé pour l'éternité dans le verger de la poésie.
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Une trajectoire de poète qui commence en 1912 avec son premier livre à 1966 l'année de sa mort. Elle est l'ami de Mandelstam, de Joseph Brodsky.
Elle traverse deux guerres et une révolution, témoin et victime d'une histoire violente et cruelle, elle chante son pays de tilleuls et de bouleaux, son pays parfois rouge de sang. Elle chante son amour pour un absent le poète Goumiliov, son amour pour sa patrie et la liberté à jamais perdue.

Les tonalités de ses poèmes sont très variées

De l'espoir :

Bien du bonheur est dévolu
A qui suit librement sa route

A l'amour de la vie ;

Je fais des vers joyeux
Sur la vie éphémère, éphémère et superbe

A l'amour de son pays ;

C'est le mélilot et l'abeille
Poussière, ombre et canicule.

Les rivières bleues

Les saules d'argent

La merveille des tilleuls


A son bien aimé. Son amour perdu avec qui elle ne pourra plus rien partager
Un amour toujours présent, amour jusqu'à la douleur, même quand vient la peur, l'horreur « dans un sanglot sans fin »

Il aimait trois choses au monde :
Le chant des vêpres, les paons blancs
Et les vieilles cartes d'Amérique.

Mais nous vivrons d'un seul amour

Elle est intolérable
La douleur du silence amoureux

Tout est fini ...Et ma chanson résonne
Dans la nuit vide où tu n'es plus.

Automne triste comme une veuve
Vêtue de noir, embrume tous les coeurs

La plainte parfois s'élève, cri de souffrance d'une femme et de tout un peuple :

Trois ans sans fermer l'oeil
Et chaque matin s'enquérir
De ceux qui sont morts dans la nuit

A l'heure où s'écroulent les mondes

... ma bouche suppliciée
Par laquelle crie un peuple de cent millions d'âmes.

J'étais alors avec mon peuple
Là où mon peuple était pour son malheur


Et continuer d'écrire, continuer de vivre ;

Il faut changer mon âme en pierre,
Il faut réapprendre à vivre


Une édition bilingue de neuf courts recueils, du très connu « Requiem » à celui qui donne son titre à l'ensemble « L'églantier refleurit ».
Un livre qui rend un bel hommage à Anna Akhmatova, une très belle traduction et une élégante présentation.

Lien : http://asautsetagambades.hau..
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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
IV
Première chanson

Du rendez-vous manqué
Tous les feux sont éteins,
Les paroles non dites
Les mots sans voix
Les regards non croisés
Ne savent où se poser.
Seules les larmes peuvent jouir
De couler longuement.
L'églantier de Moscou
Hélas y est pour quelque chose...
Et tout cela on l'appelle
Amour éternel.

5 décembre 1956
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À propos des poèmes



Ce sont les picotements de l’insomnie,
C’est la mèche des cierges tordus,
C’est le premier coup, le matin,
De cent blancs campaniles…
C’est l’appui tiède de la fenêtre
Au clair de lune à Tchernigov
C’est le mélilot et l’abeille,
Poussière, ombre et canicule.


/Traduction Marion Graf et José-Flore Tappy
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Le Lecteur

Il ne faut pas qu’il soit trop malheureux
Ni surtout trop réservé. Oh, non !
Pour être compris de ses contemporains,
Le poète est toujours ouvert à tous les vents.

Les projecteurs se bousculent à ses pieds,
Tout est blafard, et vide, et clair,
Les feux déshonorants de la rampe
Ont à jamais marqué son front.

Et chaque lecteur est un mystère,
Un trésor enfoui dans la terre,
Même le dernier et le plus improbable,
Celui qui s’est tu tout au long de sa vie,

Il y a là tout ce que la nature
Nous cache quand cela l’arrange.
Il y a là quelqu’un qui se désole et pleure
A une heure fixée d’avance.

Et que de ténèbres il y a là, que de nuit
Et d’ombre, que de fraîcheur,
Il y a là ces yeux inconnus
Qui me parlent jusqu’à l’aube.

Ils me reprochent quelque chose,
Parfois ils sont de mon avis…
Et s’écoule une confession muette,
L’ardente félicité d’une conversation.

Notre temps sur terre passe vite,
Etroit est le cercle qui nous est dévolu.
Mais lui il est immuable, éternel,
Du poète il est l’ami inconnu et secret.

11 juillet 1959
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[...]

Et debout sur le seuil, regarder les coupoles bronzées
Du temple de Chersonèse
Sans savoir que la glore et le bonheur,
Sans remède, usent les coeurs.
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Je n’ai que faire des odes, de leurs armées,
Ni du charme capricieux des élégies,
Pour moi tout, dans le vers, doit mal tomber,
Rien ne doit être comme il faut.

Si vous saviez de quels débris se nourrit
Et pousse la poésie, sans la moindre honte,
Comme les pissenlits jaunes, comme l’arroche
Ou la bardane au pied des palissades.

Un cri de colère, l’odeur du goudron frais,
Le mystère d’une tache de moisi sur un mur…
Et voilà qu’un vers tinte, malicieux et tendre,
Pour votre joie et mon tourment.*

*(variante : Pour votre joie et la mienne)
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Vidéo de Anna Akhmatova
Rencontre autour des poétesses avec Diglee pour Je serai le feu : "une anthologie sensible et subjective, dans laquelle Diglee réunit cinquante poétesses et propose pour chacune d'entre elles, un portrait, une biographie, et une sélection de ses poèmes préférés" qui paraît le 8 octobre aux éditions La ville brûle.  On a parlé de désir, d'écriture, de Joumana Haddad, Audre Lorde, Natalie Clifford Barney, Ingeborg Bachmann, Joyce Mansour, Anna Akhmatova...
Les livres de cette anthologie sont réunis dans une sélection spéciale poétesses sur notre site Librest (https://www.librest.com/livres/selection-thematique-poetesses,1303.html?ctx=81551c627cc90eb2e85d6f7d5f4bcdfb) : https://www.librest.com/livres/selection-thematiq ue-poetesses,1303.html?ctx=81551c627cc90eb2e85d6f7d5f4bcdfb
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