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EAN : 9782283029589
184 pages
Buchet-Chastel (05/10/2017)
4.04/5   12 notes
Résumé :
Demetrio Rota est éboueur à Buenos Aires et, pour échapper à un quotidien morne et sans substance, il s’adonne la nuit à une passion dévorante : les puzzles.
Pièce après pièce, à la manière d’une Pénélope revenant chaque fois à l’ouvrage, Demetrio reconstruit son passé, pour mieux tisser une mémoire fragile, vitale, faisant revivre sous nos yeux le parcours d’un homme comme un autre, écrasé par un présent qui l’étouffe.
Les émois de l’adolescence, le p... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
Buenos Aires, Argentine,
Deux éboueurs , Demetrio et El Negro,
Demetrio vit seul, sa passion dévorante à ses heures de loisirs sont les puzzles de paysages,
Negro est marié avec enfants et a un second travail,
Or ces deux là à part le boulot partage autre chose, le premier le sait , l'autre non 😁!

Une première rencontre avec un auteur argentin dont ce premier livre a subjugué et hypnotisé Roberto Bolano grand nom de la littérature sud-américaine qui par ailleurs l'a préfacé. Reprenant les mots de Bolano , « Rien dans ses pages ne sonne faux : tout est réel, tout est illusoire, le rêve dans lequel évolue comme un somnambule l'éboueur de Buenos Aires Demetrio Rota est celui de la grande littérature que l'auteur scande à travers des scènes et des mots bien précis. »


On suit Demetrio tôt le matin au boulot avec son partenaire El Negro. Les deux déambulent à travers les rues alors que la ville dort encore, ne s'arrêtant que brièvement pour un petit déjeuner de café au lait et croissant. Ils vont tous les jours au même endroit, et tous les jours «Le bout d'homme », un vendeur de journaux à la retraite qui boit du vin rouge est assis à sa place habituelle. Ils leur arrivent aussi de ramasser un clochard et l'inviter à leur table.
Demetrio passe ses soirées seul, chaussé d'une paire de très vieilles bottes noires, s'évadant en s'acharnant sur des puzzles de 500 pièces qui le ramènent à travers leurs paysages de campagne idylliques à son enfance à Bariloche.

Neuman alterne avec brio, ces journées de travail à ramasser des déchets dans Buenos Aires, la grande ville qui respire la décadence avec ces puzzles aux paysages magnifiques chargés de poésie qui effacent la frontière entre présent et passé. Des pièces manquantes remontent les souvenirs de cette enfance à Bariloche, et particulièrement du dernier été que Demetrio adolescent passa avec la fille aux cheveux rouges sur les rives du lac Nahuel Huapi.
Ici les déchets non seulement remplissent une fonction narrative, mais révèlent aussi dans le cadre urbain du roman les interactions complexes entre le monde humain et non humain, où l'homme arrive même à se confondre avec le déchet. Parlant du clochard pour lequel Demetrio sent de la compassion, lui-même se demande , « le vieux mangeait dans les poubelles, jamais il n'avait été obligé d'en ramasser pour les mettre ailleurs. Comment serait-ce, de vivre au milieu des déchets, d'en être soi-même un ? », question clef du roman. Entre Bariloche et Buenos Aires, malgré son aigreur un déracinement raconté avec beaucoup de douceur.

Une histoire aux personnages loin de la perfection mais émouvants dans leur humanité , une prose délicate et poétique («S'échappant de la cheminée, immobile, une légère fumée salit l'exactitude du jour……. le feu était un oiseau de lumière qui battait des ailes sans réussir à s'envoler. »), qui même du ramassage des ordures, donnent de belles images délicates et légères,et une fin métaphorique surprenante. Un roman «  touché par la grâce » comme le qualifie Bolano, et quand on pense que Neuman avait à peine vingt ans quand il l'a écrit….
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Enthousiasmée par le billet de Bookycooky, j'ai immédiatement été à la recherche de ce roman. Merci Booky :-)
Bariloche, mérite d'être lu, c'est un roman peu ordinaire, empli de nostalgie, de mélancolie.
On passe d'un univers plutôt glauque où l'on est "englué" dans les déchets, la pauvreté, la misère à un univers enchanteresque, apaisant avec la nature, des paysages enneigés, des lacs .
Ce passage de l'un à l'autre se fait par les puzzles, l'imaginaire et un véritable passé. Que dire des personnages ? Demetrio "l'homme puzzle" et Negro, sont deux collègues de travail éboueurs , émouvants même s'ils ne sont pas exempts de faiblesses...
Plus je réfléchis à ce que je viens de vivre à travers ce roman plus j'en découvre des facettes, des points qui me font dire que j'ai beaucoup aimé.
Il faut dire que Andres Neuman est particulièrement habile et brillant. Il faut effectivement beaucoup de talent pour rendre poétique un univers de détritus. le passé ici aide à vivre le présent. C'est un roman que j'ai envie de qualifier d'intelligent car il regorge de subtilités, de nuances, il réclame peut-être aussi de la part du lecteur une passion ou tout au moins une envie de faire des puzzles car tout n'est pas donné, il nous faut reconstruie aussi le passé et le présent.

" Comment serait-ce de vivre au milieu des déchets, d'en être soi-même un ?"
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Roman publié en 1999 alors que son auteur, Andrés Neuman écrivain hispano-argentin n'a que 22 ans, Bariloche narre le quotidien de deux éboueurs de Buenos Aires, Demetrio et Negro : une infinité de matinées grises dans les rues de Buenos Aires à ramasser les déchets, une liaison entre l'épouse d'un des deux éboueurs et son collègue et quelques souvenirs de jeunesse dans la ville de Bariloche qui donne son titre au roman.

S'il est une chose qui m'a frappé dans ce roman, c'est sans doute cet ordinaire, cette quotidienneté froide, désincarnée, sans horizon et sans grâce qui ressort de la vie des deux principaux personnages. Cette forte impression est renforcée par la quasi-absence de frontière entre le monde humain et celui de la ville : ses quartiers, ses bâtiments, ses objets, ses ordures. Marginalisés, Demetrio et Negro semblent, au mieux, être des rouages sinon des déchets de la ville. Même les relations amoureuses (matrimoniales ou extra-conjugales) paraissent utilitaires et dépassionnées.
Negro s'en contente quand Demetrio aspire à un ailleurs. Les souvenirs d'un monde plus humain dans la petite ville de Bariloche qu'il a connu enfant et adolescent remontent à la surface. Étouffé par la routine, les contraintes matérielles et par la déshumanisation qui s'opère peu à peu dans la ville tentaculaire, il essaiera de s'évader de la prison invisible qui enferme nos existences.

Je remercie Bookycooky pour son billet d'aout 2023 qui m'a permis de découvrir ce livre et Andres Neuman. Je garde une impression d'une lecture fluide servie par un style simple : un roman sympathique qui s'il ne m'a pas paru mémorable me pousse à regarder de plus près les autres romans de l'auteur.
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Traduit avec perfectionnisme de l'espagnol (Argentine) par Alexandra Carrasco ce roman est une tasse de mathé gorgée de miel que l'on déguste doucement. « Bariloche », hommage à la Belle Argentine, à ses paysages grandioses d'une Patagonie haute de couleurs. « Les filaments lumineux s'entrelacent, complets sur le cristal du lac. Les rochers des montagnes aux plis enneigés endorment l'horizon. » L'écriture de maître de Andrés Neumam est poétique, souple, habitée par l'argentine. L'encre qui se love sur les mots respire d'une rare perfection. L'histoire émouvante, tragique, nostalgique, de Demetrio Rota est empreinte de ce respir patagonien où rien ne se passerait si le lien de l'enfance s'était brisé en plein vol dans son âge accompli. Demetrio fait des puzzles, pas n'importe lesquels. Il assemble les morceaux paraboliquement avec les images enfouies en lui de ce que la terre du sud argentin a risqué en lui de battements de vie. C'est un récit rare, beau et intense. Un livre qui respire à l'unisson de la vie trop tranquille de Demetrio. On s'attache à ce personnage qui se cherche dans les lignes et pourtant qui se noie symboliquement au fur et à mesure de la lecture. Foudroyé par l'impossible résurrection, Demetrio et son mal être, semble la brise qui souffle sur Bariloche. Un puzzle grandeur nature, riche d'une émotive sociologie renforce la perfection de ce récit d'une brume pure mais triste. Ce roman majeur, riche d'une intériorité est la voie qui ouvre l'espace pour un bovarysme de lumière. Les éditions Buchet Chastel viennent de mettre au monde un roman de haute qualité éditoriale, puissant et magnifié, digne, argentin jusqu'au frisson ; un roman de feu, de vent, de tendresse et d'espoir, d'une pure géographie, d'une cosmopolite rencontre entre le lecteur et Andrès Neuman. Ce roman à la belle première de couverture significative avec Demetrio en filigrane est bouleversant, littéraire au possible, c'est un roman qui imprime son sceau sur la mémoire vive des solitudes éprouvantes. Un livre qui ne s'oublie pas, un futur incontournable.
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C'est poétique, c'est mélancolique et c'est l'Argentine. Des paysages que j'ai tellement aimés, le Lac Nahuel Huapi, le Mont Tronador… et que l'auteur fait revivre le temps d'un roman…
C'est l'histoire d'un éboueur qui aime les puzzles, une sorte de anti-héros qui fait équipe avec un ami pour nettoyer les rues de Buenos-Aires dans un vieux camion poubelle tout pourri.
Et cet homme qui passe ses nuits à faire des puzzles est en fait un homme puzzle, un être en pièces, à la recherche des souvenirs de son passé pour se construire et s'intégrer dans sa vie présente. Et les images de son passé doivent se rassembler pour faire de cet être perdu un tout… Il faut dire que le décalage entre un éboueur de Buenos Aires et un enfant au bord du Lac Nahuel Huapi … c'est le jour et la nuit…
Son récit alterne passé et présent, il nous raconte sa vie amoureuse mais surtout l'amour pour la région de son enfance, ses premières amours, la manière dont il s'immergeait dans la nature de la région de Bariloche, comme il faisait un avec le lac Nahuel Hapi. Au travers de son récits on vit dans ses souvenirs. Certes il y a la vie actuelle, sa liaison avec la femme de son collègue et ami, mais au fond cela n'a pas une grande importance. Ce qui est important c'est la façon d'avancer de cet être déraciné qui se raccroche à son passé pour vivre son présent.
C'est beau, c'est émouvant, et c'est nostalgique … une vie à la recherche de l'espoir…
Et c'est une magnifique rencontre avec la nature des environs de Bariloche
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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
Le vieillard de la rue Tacuarí empruntait-il les transports en commun ? Demetrio tenta d’imaginer à quoi pouvait ressembler une vie toujours à pied, toujours sans chez-soi. Quoique, d’un autre côté, réfléchit-il, s’il est vrai que le vieux mangeait dans les poubelles, jamais il n’avait été obligé d’en ramasser pour les mettre ailleurs. Comment serait-ce, de vivre au milieu des déchets, d’en être soi-même un ?
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Autrefois, il y a bien longtemps, il avait vécu à Lanús, une ville où les voisins étaient des complices ou à défaut des ennemis ; un endroit où chaque chien pouvait être identifié, où les rues étaient un prétexte pour que les enfants s’éparpillent. À Lanús, quasiment personne n’avait les moyens de repeindre sa maison ni de partir en vacances au bord de la mer – c’est chouette, la mer –, ni même de s’acheter les vêtements adéquats pour partir à la conquête du monde. Il y a encore plus longtemps, il avait vécu dans un endroit bien plus reculé, beaucoup plus distant de la capitale et de ses turbulences : là où les choses poussaient dans l’allégresse et vieillissaient calmement. Demetrio avait connu l’allégresse. Appris à nager dans le lac Nahuel Huapi, appris à ne pas se geler dans le lac Nahuel Huapi, connu le silence du lac Nahuel Huapi, fréquenté une petite école en briques près de Llao Llao, joué au ballon n’importe où. Les forêts d’arrayanes y étaient uniques et le chocolat y avait le goût lointain de l’Europe enneigée.
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Un métier simple, mais exigeant : il fallait savoir se lever immanquablement avant l’aube, cinq minutes avant le réveil, pour l’éteindre une fois habillé afin de ne pas succomber à la tentation de se rendormir. Il fallait savoir déjeuner au moment où on pouvait et comme on pouvait. Être marchand de journaux, c’était apprendre à caresser le papier sans se noircir les doigts (comme une femme, mon petit, comme une femme, aurait-il dit à son fils quand il aurait eu l’âge d’avoir son propre sobriquet ou d’hériter à jamais celui de son père). Apprendre, surtout, à saisir le moment opportun pour glisser une suggestion au feuilleteur hésitant, ou à se taire pour ne pas le gêner, à distinguer les clients fiables de ceux à qui il ne fallait jamais faire crédit du moindre journal. Se méfier tout particulièrement des barbus : son père lui avait appris qu’un homme qui ne se rase pas ne peut pas être réglo.
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Je défiais ma peur et continuais d’avancer en imaginant des scènes de stupre mêlées à l’amour le plus naïf. Puis je tombais tout à coup sur elle, assise seule sur une souche, paf ! ma rouquine. Je lui faisais bonjour de la main ou j’agitais ma hache comme un couillon, comme si pour fendre du bois il y avait besoin d’aller au-delà du pré qui entourait ma maison. Je ne sais pas si elle s’en rendait compte ou si elle était vraiment tout le temps dans la lune, mais elle me saluait en retour et attendait que je la rejoigne de mon pas lourdaud.
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Demetrio reconstruit son passé. Il tisse une mémoire fragile, vitale, faisant revivre sous nos yeux le parcours d’un homme ordinaire, écrasé par un présent qui l’étouffe et dont il tente de s’affranchir.
Les émois de l’adolescence, le premier amour, les mécanismes aliénants de nos vies modernes, les évocations d’une nature sublime et les réalités des mégapoles dénuées d’humanité sont au cœur de cette fable contemporaine et poétique, qui interroge puissamment les limites et les écueils de nos existences sans horizon.
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