Je suis tombé sur ce titre par hasard. Je ne savais pas que
Dominique Baudis avait écrit une biographie romancée de Raimond VI de Toulouse, encore moins qu'il en existait une adaptation BD.
Raimond VI est ce comte de Toulouse, seigneur d'une quantité considérable de terres du Midi, qui dut faire face à l'invasion des « croisés » du nord de la France venus s'emparer de ses terres avec la bénédiction de l'Église sous prétexte d'en arracher l'hérésie cathare.
Interprétation de ma part très partisane, voire midi-nationaliste des événements diriez-vous ? Certainement, mais c'est plus la vision que
Dominique Baudis veut partager que la mienne propre.
Ce n'est pas la première fois que les « nordistes » descendent s'emparer du royaume du midi. Déjà au VIème siècle, Clovis était venu renverser le royaume wisigoth d'Occitanie. Je me demande d'ailleurs dans quelle mesure le comte de Toulouse et ses vassaux possèdent du sang de ses précédents envahisseurs.
Quoi qu'il en soit, cela recommence.
Dominique Baudis laisse Raimond raconter ses mémoires, parle par la voix du comte. L'Église romaine apparaît assoiffée du sang de tous ceux qui ne lui obéissent pas au doigt et à l'oeil : les hérétiques, les juifs, les seigneurs qui défendent simplement leurs terres de l'invasion. Des hommes d'église comme Arnaud Amaury ou l'évêque Foulques invitent au carnage sans distinction. A Rome, le pape et les cardinaux sont à peine moins fanatiques. Ils sont surtout ravis de voir leurs caisses se renflouer des richesses prises aux « sudistes » par Simon de Monfort et consort. Simon de Monfort ne fait pas dans la dentelle non plus ; il est là pour acquérir des terres. du point de vue de Raimond, il est venu pour devenir comte à la place du comte. L'hérésie cathare n'est guère évoquée ici, sauf en tant que prétexte.
Raimond de Toulouse est donc présenté comme un résistant qui va louvoyer et ruser, se battre quand il n'y a plus d'autre choix. Parfois, souvent, il va s'aplatir devant l'Église qui l'excommunie plus d'une fois et les envahisseurs qu'il va même devoir accompagner à la croisade. Poussé à bout, il en viendra à défendre ses terres par l'épée en gardant porte ouverte à la négociation. Il refuse de livrer les hérétiques qu'il considère comme faisant partie entière de son peuple mais ne veut pas non plus rompre avec l'Église. le portrait n'est pas toujours flatteur. Raimond admet lui-même être un piètre guerrier et un tacticien médiocre. Mais la population du midi le considère comme un symbole incarnant la civilisation des pays d'Oc qui se défend comme le peut face aux Francs qui veulent l'annihiler.
L'adaptation BD est plutôt réussie. J'ai apprécié voir revivre Toulouse cachée derrière ses remparts, voir Béziers, Minerve et les châteaux inaccessibles plantés au sommet des montagnes. La qualité du dessin laisse cependant à désirer, surtout dans les scènes de bataille tenant plus souvent de l'esquisse.
Cette BD veut avant tout affirmer la différence du Midi moderne face aux « dictats » de la capitale. Il s'agit d'afficher un régionalisme culturel moderne, une fierté d'être du Sud, et de rappeler les souffrances que le Nord y a apporté il y a 800 ans.