![]() |
Un tantinet décevant ce premier numéro du revival. Il y manque un peu de l'irrévérence et du foutraque qui étaient la marque de fabrique de son glorieux prédécesseur. Et de gros nénés, aussi, c'est important les gros nénés. La partie magazine est vaguement intéressante mais la maquette un peu trop classique. Pas grave, c'est pas pour ça qu'on l'achète. Côté BD, j'ai trouvé la plupart assez décevantes. Je promets que je l'ai pris sans l'a priori mentionné plus haut, avec l'idée de découvrir une nouvelle génération de talents. Et ben j'ai pas été époustouflé. C'est souvent rebelle gnangnan et pas super original. Parfois sympa (la domotique bien comprise de Matt Fraction et Afif Khaled, par exemple, ou l'app à faire parler les animaux de compagnie de Diego Agrimbau et Lucas Varela) mais guère plus. Je crois aussi que c'est une fausse bonne idée de faire un numéro thématique, la SF « near future » en l'occurrence : l'ennui naquit un jour de l'uniformité. Chère rédaction, si vous me lisez, laissez davantage de mou dans les rênes à vos auteurs. J'espère que cette idée ne sera pas systématique. Bon, et à l'heure du bilan, qu'est ce que ça donne ? La palme graphique à Anna Mill et Luke Jones pour une double page superbe. La palme de l'histoire qui scotche à Paul Lacolley et Pierre Colleu pour un grand délire mystico-futuriste auquel on ne capte pas tout du premier coup. Et la palme du bon esprit à Ugo Bienvenu pour son vieux richou en train de revenir de tout au moment où sa pulpeuse sort de la piscine. Une pulpeuse ? de la piscine ? Oui ! Y a des gros nénés ! Merci. + Lire la suite |
Il y a César et Alexandre, deux paumés de première classe, l'un
obsédé par son corps qui se détraque, l'autre hanté par les
apparitions du spectre d'Elvis. Il y a ce chien sans nom, pénible,
assez immonde, qui leur colle au train. D'où sort-il ? Que veut-il ?
Ce n'est pas clair. Pour tenter de s'en débarrasser, les deux losers
se lancent à la recherche de son propriétaire. Dans une Amérique
crépusculaire, périurbaine et préapocalyptique, entre Twin Peaks et
Bukowski, leur quête les mène à une impasse : le maître du chien se
serait pendu en mettant le feu à sa maison. Meurtre, suicide ou
accident ? Les clebs aboient et la caravane cale. Mais les tragédies,
comme les emmerdes, volent en escadrille. Il va encore y avoir mort
d'homme. Les armes parlent et le dieu Elvis continue à chanter :
« T'es rien qu'un chien de chasse/ Toujours à chialer/ T'as jamais
chopé de lapin/ Et t'es pas mon copain » (Hound Dog, 1956).
Pour son entrée dans le grand bain de la BD, Nicolas Pegon – qui a
publié en 2019 Les Os creux, la tête pleine à l'enseigne Réalistes,
créée par Ugo Bienvenu — réussit un récit comme peu d'auteurs
français sont capables d'en produire, précis, personnel, inattendu et
jamais démonstratif. Ses teintes de fin du monde et son humour
impavide contribuent à donner à cette tragicomédie le poids et
l'épaisseur d'un blues lent et irrésistible comme un glissement de
terrain. Rien de surprenant à cela, quand on sait que cette musique
est au coeur de ses préoccupations comme en atteste One After the
Other, docu-fiction en animation sur le bluesman américain Grant
Sabin qu'il a écrit et réalisé chez Miyu Productions.
Nicolas Pegon s'est formé au graphisme à Estienne, puis au cinéma
d'animation aux Gobelins. Il est réalisateur de courts-métrages, de
clips et de publicités au sein du collectif CRCR. La bande dessinée
est son jardin de moins en moins secret.