Plus de vingt ans après la fin de la guerre entre Ceinturiens et Intérieurs, la chute d'Inaros et la mise en place de l'Union des Transports, la paix règne à peu près dans le système Sol. Avec à sa tête l'excellente Drummer (incarnée par la non moins excellente Cara Gee dans l'adaptation série, qu'on se le dise les copains-copines), l'Union assure la bonne utilisation des Portes. Jusqu'à là, ça va, c'est plan-plan, on est sur une jolie entité administrative de régulation et de contrôle, qui ne ressemble ni à un système politique comme pouvaient l'être l'APE, les Nations Unies ou le Congrès Martien, ni à une compagnie de commerce militarisée tel que la VOC au 17e. C'est après que ça dérouille.
Et alors que
L Univers promet de tomber dans un ennui monstrueux à coût de douane et d'interdiction de trafic, une ancienne menace fait son retour : le Martien Winston Duarte revient nous jouer un mauvais tour. Sur Laconia, où il s'était retiré avec une partie de l'armada martienne, il a développé un régime autoritaire et militaire. Il a surtout utilisé la protomolécule et après des années d'études a mis sur pieds des armements et des technologies mi-protomoléculaires mi-humaines. Quand il toque à la Porte de la Station Medina pour annoncer que Laconia va prendre le contrôle de la situation et pacifier la situation (c'est ce que disent souvent les dictateurs), ni Drummer, ni la CTM, ne comprennent le danger.
En tant que lecteurs, on découvre cette menace à travers les yeux de nos héros du Rossinante. Mais au contraire de Don Quichotte, Holden et Naomi en ont marre de l'aventure et prennent leur retraite, laissant le reste de l'équipage sous la direction de Bobbie. Clarissa et elle sont désormais des membres à part entière de l'équipage. Clarissa Mao est toujours plus malade, semant l'inquiétude dans l'esprit des autres, notamment le sensible insensible Amos. Et alors que Holden et Naomi débarquent sur Medina, on assiste à travers eux à l'arrivée de l'Invincible Armada (vraiment invincible pour le coup) de Laconia. Et là, c'est parti pour la pire fessée jamais reçue par n'importe laquelle des flottes du système Sol.
Ce tome met en avant un nombre relativement réduit de POV, les plus intéressants et développés, pour moi, sont ceux de Singh, l'administrateur laconien de la station Medina et de Drummer, qui essaie de faire la gestion de crise interplanétaire. Les chapitres de Singh nous permettent de voir l'envers du décor et la mise en place d'un système répressif, propagandiste et dictatorial que ce soit à travers l'utilisation des institutions existantes (l'Union des transports ou l'Assemblée des mondes) pour contrôler le système ou l'intégration des populations au nouveau régime (le bâton et la carotte). le POV de Singh est aussi un bon angle pour comprendre à quel point les Laconiens sont devenus puissants avec la technologie de la protomolécule. Les autres points de vue m'ont peut-être un peu moins touché, même si intéressants car montrant l'émergence et la mise en place d'une guérilla résistante ou au contraire la collaboration de certains avec le nouveau régime.
C'est un bon pageturner, on est, ou replonge, vite dans l'ambiance de The Expense. L'ellipse temporelle de 20 ans ne porte pas de préjudice à l'atmosphère et à l'évolution des personnages. le roman n'est pas sans défaut, cela étant dit, on a l'impression de tourner en rond avec certains des personnages, d'autres quittent le navire sans laisser grande émotion. Les batailles vues à travers les écrans de Drummer sont un peu frustrantes. Y'a parfois un peu de plat. Reste que c'est une suite ambitieuse, j'ai hâte de voir ce qu'elle peut promettre dans le tome suivant en terme de progression de scénario puisque le paradigme politique est totalement bouleversé (les méchants chez les gentils et les gentils chez les méchants) et en terme de lore avec la mythologie des constructeurs de porteurs et des destructeurs de cette même civilisation.
Je lance un questionnaire au hasard : préférez-vous être en terrasse alors qu'un faisceau de projecteur magnétique passe par là ou vous faire injecter de la protomolécule directement par intra ? Y'a intérêt que les instituts de sondage nous donnent des bons résultats, hein, oh !