Lu sur les conseils de ma mère (nous sommes une dynastie de grandes lectrices !), elle l'a trouvé dans une boîte à livres, une édition de 1982 toute amochée. Comme quoi il ne faut pas s'arrêter aux apparences... Comme elle, j'ai été séduite par ce "policier de terroir" (j'emprunte la formule à une autre critique, elle s'applique exactement), ses personnages bruts de décoffrage et son histoire tragique.
Début des années 80. Après 15 ans de prison pour un meurtre qu'il n'a pas commis,
Noël Roux, que tout le monde appelle le Petit, revient au village de Malaveil, bien décidé à comprendre qui lui a fait porter le chapeau pour l'assassinat d'un touriste de passage. C'est forcément quelqu'un du coin, et sans doute quelqu'un qui vit au Mas, ce petit groupe de quelques maisons où il habite, mais pourquoi l'avoir piégé, lui qui n'avait jamais fait de mal à personne, lui qui avait 20 ans et toute sa vie devant lui ? Les options sont restreintes, mais son enquête s'avère très difficile. Il faut dire que les gens sont plutôt taiseux dans le coin, et que l'origine de l'affaire pourrait bien remonter à une sale histoire qui s'est passée à la Libération. le parrain du Petit, Coco, tient un café dans le village. Lui aussi cherche à comprendre et à faire parler ceux qui savent. Et comme sous ses dehors de rustaud il a oublié d'être bête, peu à peu il va démêler presque tout l'écheveau qui a conduit à ce gros gâchis...
Les personnages nous livrent chacun quelques clés, narrateurs successifs, mais c'est Coco qui conduit le fil de l'histoire avec son langage fleuri. Il y a aussi La Noire, la mère du Petit, dont le rôle va se révéler décisif. Et puis GMC, cette femme rescapée d'Indochine et d'Algérie, au visage reconstruit après des blessures de guerre et qui s'est réfugiée au Mas pour y trouver...la paix ? Et le Petit lui-même, qui mène son enquête tout en essayant de se faire une vie "normale" pour rassurer les villageois inquiets de voir remuer le passé.
J'ai trouvé ce roman particulièrement réussi, pour son ambiance si bien rendue d'un village cévenol englué dans son jus (sauf pendant l'été, où les touristes viennent bousculer les habitudes), ses personnages un peu caricaturaux pour certains mais qui semblent tellement réels, et son intrigue dont je n'ai eu de cesse de connaître le fin mot. On est bien loin des thrillers ou des polars classiques, pas d'enquêteur fin limier ou de tueur en série, mais des gens simples et attachants, surtout Coco dont j'ai particulièrement aimé la finesse sous des dehors bien rustiques.
Si vous avez envie d'une lecture originale et prenante, tentez "
Retour à Malaveil", je pense que vous ne serez pas déçus.