Je ne veux pas l'accabler, car un homme qui aime les chevaux n'est pas totalement mauvais...
Mais son livre est raté, et jusqu'au bout.
J'ai entendu un soir ( Le Masque et la Plume ) un critique dire que Ch.Donner n'était pas un écrivain.
C'est peut-être l'explication...
Dommage, je le trouvais sympathique !
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en réalité, ma tante ne soutenait pas du tout ma mère, elle pesait sur elle de tout son poids, oui, plutôt ça. j'étais derrière, je voyais tout, elle tirait ma mère vers le bas pour l'obliger à marcher le plus voûtée possible. bientôt la place de choix qu'elle avait fini par prendre au premier rang du cortège n'a plus suffi à ma tante, elle a continué d'être jalouse, et plus que jamais, parce qu'elle a regardé ma mère, tout le monde regardait ma mère, c'était un phénomène étrange au milieu de ce village, les gens étaient là au bord du trottoir, le chapeau à la main, et tous regardaient ma mère, simplement parce qu'elle était belle, presque aussi belle qu'une veuve, presque aussi tragique qu'une orpheline, et au bout d'un moment ma tante s'en est rendu compte, elle s'est rendue compte que malgré tout le noir qu'elle s'était mis sur le dos, car ils s'étaient tous habillés en noir, elle et son mari, et aussi ma cousine, toute la branche nivernaise en grand deuil, comme on dit, malgré tout ce noir elle n'avait aucune grâce, aucune vraie tristesse, elle n'avait même pas ce qu'on pourrait appeler une certaine noblesse, non aucune, dans ce cortège long d'une trentaine de personnes, seuls les vieilles dames du village avaient une certaine noblesse. On ne les connaissait pas, elles marchaient à petits pas, mais un noir usé, un noir qui avait servi déjà à d'autres chagrins, un noir vraiment terne, accablant et silencieux, pas ce noir éclatant qui, sur les épaules de ma tante, au lieu d'inspirer le respect, au lieu de lui conférer du prestige, ne faisait que poser sur ses épaules un soupçon terrible pourquoi tout ce noir, est-ce qu'elle veut se faire remarquer, se demandait on sur son passage. Ma tante avait beau s'accrocher à ma mère, le soupçon était sur elle, et elle l'a senti, elle a lu dans le regard des Badauds et c'est alors qu'elle s'est mise à pleurer. Quelle garce, ai je pensé aussitôt, mais pendant toute la procession elle a continué de pleurer à chaudes larmes entre le bras de ma mère, sans aucune dignité, à chaudes larmes, et sans le moindre chagrin.
en réalité je n'en avais rien à foutre de revoir mon père avachi, si j'avais fait l'effort de reprendre contact avec lui après 18 ans de séparation total, c'était à cause de son fils, j'avais cette envie de connaître mon frère, sans raison précise, ça me semblait naturel, mais au bout d'un certain nombre de rencontres avec mon père, il a parlé de ci et de ça, il en est arrivé à me demander pourquoi j'écrivais des livres, pourquoi ces livres là, et sans me laisser le temps de répondre il a commencé à dire ce qu'il avait sur le cœur, sa crainte que j'écrive encore des livres, et des livres sur lui, des livres qui dénoncent, j'ai compris qu'il craignait ça par-dessus tout et qu'il ne désirait qu'une chose c'est me tuer, me supprimer en tant qu'écrivain, qu'on m' efface, moi et mon histoire avec lui, que ça disparaisse à ses yeux, et surtout aux yeux de son jeune fils. cette vie ancienne qu'il voulait rayer. qui est-ce qui fait ça. qui sont les types qui disparaissent pour fonder une autre vie, rayer tout le reste, ne plus vouloir entendre les coups du passé. faut-il qu'ils aient commis contre l'humanité des crimes imprescriptibles.
mon père était snob, communiste et snob, il allait souvent boire des verres à la coupole, il révait de faire partie de ce milieu des artistes, d'être reconnu en tant qu'un intellectuel communiste non sectaire, et pourquoi pas en tant qu'artiste. mon père faisait des discours sur le renouveau de l'art il adherait au surréalisme, au lettrisme, à la musique stochastique, tous les mouvements susceptibles de révolutionner l'art le passionn aient. En vérité derrière tout ce fatras, mon père dissimulait sa haine de l'art, j'ai toujours su qu'il voulait accéder à l'art à seule fin de le détruire, et dans sa stratégie de destruction la moissonneuse-batteuse est une pièce maîtresse, une pièce de musée, disait-il, comme si ce tas de ferraille menaçait déjà d'entrer au Louvre et d'écraser tout sur son passage, écrasé cet art bourgeois qu'il ne pourrait jamais atteindre autrement.
Christophe Donner vous présente son ouvrage "La France goy" aux éditions Grasset. Rentrée littéraire automne 2021.
Retrouvez le livre : https://www.mollat.com/livres/2549013/christophe-donner-la-france-goy
Note de musique : © mollat
Sous-titres générés automatiquement en français par YouTube.
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