AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782361661519
271 pages
Editions des Busclats (05/09/2019)
4/5   3 notes
Résumé :
22 octobre 1922, Marcel Proust n'a plus qu'un mois à vivre. A son chevet, Reynaldo Hahn, l'amour de ses vingt ans, l'ami d'une vie et Robert Proust son frère médecin. Marcel refuse d'être transporté dans une clinique comme le lui propose son frère à qui il ferme désormais sa porte. Le seul visiteur qu'il accepte ce dernier mois de sa vie, c'est Reynaldo Hanh.

C'est cet amour qui dura deux ans entre Reynaldo musicien vénézuelien, coqueluche des salons ... >Voir plus
Que lire après Plaisirs d'amour, jours d'amitiéVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Heureux « proustophages » qui peuvent en cette fin d'annee s'emparer d'un nombre conséquent de textes réédités ou d'essais intéressants – de et sur – l'asthmatique le plus célèbre de la littérature, pour satisfaire leur curiosité dévorante. Le regard amoureux d'une italienne sur Marcel a retenu mes faveurs. “J'avais vingt ans lorsque Proust est entré dans ma vie” confie Lorenza Foschini (on lui doit aussi « le manteau de Proust »), au tout début de ce nouveau livre qu'elle lui consacre en se focalisant cette fois sur l'histoire d'amour entre le couronné du Goncourt 1919 et Reynaldo Hahn, musicien compositeur talentueux, rencontré au trente et un rue de Monceau chez Madeleine Lemaire un certain mardi de mai 1894 ; à cette époque, Marcel ne s'est pas encore retranché pour écrire La Recherche et mène “une vie mondaine épuisante, comme un véritable professionnel” (Roland Barthes, cité p. 35), alors que le beau Reynaldo, jeune prodige né à Caracas en 1874 dont les parents se sont installés à Paris, élève de Massenet, connaît déjà la célébrité sur la scène musicale. Deux mois s'écouleront après leur première rencontre avant que Marcel ne trouve prétexte à écrire à Reynaldo... Leur passion partagée (la seule peut-être dans la vie de Marcel ?) se noue l'été 1894 lors d'un sejour au château de Réveillon où Mme Lemaire leur a réservée une chambre très à l'écart du reste de ses invités. Relation intense et de courte durée (deux ans), tolérée dans le milieu mondain mais mal vue dans la société de la Belle Epoque ; Proust se révèle assez désinhibé, jaloux et possessif, abusif à souhait, Reynaldo mélancolique est sur le versant de la culpabilité. Une passion comme on en connaît vers vingt ans – cinq lettres de Marcel en signeront la fin –, qui dans leur cas dépasse infidélités et jalousies, survit aux pires ressentiments et résiste à l'oubli pour se muer dans le temps en un lien indéfectible, profond, documenté par leur relation épistolaire très nourrie jusqu'à la disparition de l'écrivain (hormis une parenthèse, entre leur séparation et l'année 1904, pour laquelle quelques rares lettres nous sont parvenues).

Si le mois qui a précédé la mort de Marcel à son domicile parisien et le jour même de celle-ci, le 22 octobre 1922, Robert son frère cadet (dont les conseils médicaux ne seront malheureusement pas suivis) est présent, le seul autorisé par Proust à son chevet durant ces moments sera Reynaldo. Deux très courts chapitres évoquant les derniers jours de l'écrivain au quarante-quatre de la rue Hamelin amorcent la délicate narration, au style fluide et retenu, de l'amour que se portèrent les deux jeunes hommes au tournant des XIXe et XXe siècles. La condamnation récente d'Oscar Wilde probablement présente à leur esprit, comme le suggère l'auteure, ne pouvant que faire frémir sinistrement leurs âmes. Cette biographie d'une passion fait revivre pas à pas, à travers leurs écrits et au fil des adresses successives connues ou fréquentées par les deux artistes, leurs désirs et leurs souvenirs. C'est au trente et un rue de Bellechasse par exemple que Reynaldo introduit Marcel, qui s'entiche aussi de Lucien, dans la famille Daudet. Leur attirance mutuelle, la naissance, l'épanouissement et le dépérissement de leurs sentiments mais aussi la métamorphose de leur relation servent de toile de fonds à l'univers des salons que Proust immortalisera plus tard, contemporain de celui où avec Reynaldo ils inscrivirent leurs trajectoires artistiques, littéraire et musicale, singulières et divergentes. Ce livre m'a infiniment plu, il oscille entre gravité et légèreté, menant de salons en concerts à la genèse de la petite phrase de Vinteuil chère à Swann (Reynaldo n'a pas son personnage dans La Recherche mais la musique et le souvenir de Reynaldo imprègne sans aucun doute toute l'oeuvre). Texte sensible qui vibre étonnement sous la plume de Lorenza Foschini grâce à la reprise de larges fragments de correspondances échangées entre Proust et Reynaldo Hahn (dont on découvre la personnalité complexe et attachante). Les commentaires très à propos et discrètement érudits ne compromettant jamais le charme de cette lecture et la découverte des mots d'amour, de tendresse, jusqu'au langage le plus secret inventé par les protagonistes dans le secret de leur intimité épistolaire procurant une certaine émotion.
Commenter  J’apprécie          180
Lorenza Foschini nous offre un très bel essai sur les liens puissants qui ont uni Marcel Proust et Reynaldo Hahn de 1894, année de leur rencontre dans un salon littéraire jusqu'au décès de l'écrivain.

Il est vrai que l'on ne peut pas se contenter de lire une grande oeuvre sans s'intéresser à la vie de l'auteur. Car il met beaucoup de lui-même, de ses rencontres, des circonstances diverses et variées de sa vie dans son oeuvre.

C'est en tout cas, ce que révèle Lorenza F., tout comme d'autres biographes de Proust avant elle. La Recherche ne fait que décrire et approfondir les affres de la jalousie de Proust, qui a marqué et anéanti la relation amoureuse entre lui et le beau Reynaldo qui n'en pouvait mais.

La Recherche, c'est aussi, une descente dans le milieu interlope des invertis que fréquentait assidûment M. Proust et qu'il nous donne à voir avec la vie du baron Charlus.

La Recherche, c'est encore, cet objet psychanalytique par excellence, que l'on saisit mieux lorsque l'on connaît les liens qui unissaient Proust à sa mère, et dont la photo l'accompagnait partout, jusque dans le "bordel" du tenancier le Cuziat et qu'il ne se faisait pas faute d'exhiber.

La Recherche, c'est enfin, un aperçu d'un certain degré de perversité de notre ami Marcel, dont la vie sexuelle ne présente pas de riches accomplissements, mais plutôt de l'onanisme, de la frustration, de l'insatisfaction, des rats martyrisés, et... beaucoup d'inquisition jalouse à caractère pathologique.

Ce sont mes digressions, le livre de Lorenza F. est plus délicat sur une passion contrariée qui, au fil du temps, a évolué en amitié amoureuse. Très bel essai.

Pat
Commenter  J’apprécie          10

Citations et extraits (3) Ajouter une citation
J'avais vingt ans lorsque Proust est entré dans ma vie. Je séjournais à Naples dans une grande maison du quartier Monte di Dio, aux occupants aimables mais peu habitués à lire. Je couchais à l'étage supérieur, dans une chambre qui donnait sur une terrasse avec vue sur la mer.
C'était l'été je n'arrivais pas à m'endormir. Soudain parmi les objets qui se trouvaient sur une étagère proche du lit, j'ai aperçu un livre de poche qu'un invité précédent avait dû oublier. Son titre était engageant : "Un amour de Swann".
Je me suis assise dans un fauteuil, à côté de la fenêtre grande ouverte, et je me suis plongée dans cette lecture. Quand je l'ai achevée, le jour s'était levé. Malgré le manque de sommeil, j'étais en proie à l'excitation qu'on éprouve lors d'une grande découverte, ainsi qu'au besoin pressant d'acheter "Du côté de chez Swann" dès l'ouverture des librairies, puis de reprendre le roman depuis le début.
Jean Genet a bien décrit ce genre d'expérience, ou plutôt de révélation. Proust vint à lui, non dans une merveilleuse maison au bord de la mer, mais au cours de ses innombrables séjours à la prison de la Santé, en 1940 : " On était dans la cour de la prison et on échangeait des livres en douce. C'était pendant la guerre et comme je n'étais pas tellement préoccupé par les livres, je suis un des derniers et on me dit : "Tiens, toi, tu prends ça." Et je vois Marcel Proust. Et je me dis :"Mais ça doit être emmerdant." [...] J'ai lu la première phrase d' A l'ombre des jeunes filles en fleurs [...] Et quand j'ai fini la phrase, j'ai fermé le livre et je me suis dit :"Maintenant je suis tranquille, je sais que vais aller de merveille en merveille."* (p. 9)

(* Jean Genet, L'ennemi déclaré, Paris, Gallimard, 1991, p. 166)

Avant-Propos - 1, Monte di Dio, Naples été 1970
Commenter  J’apprécie          110
Deux garçons se regardent, se scrutent dans la serre de Madeleine Lemaire ; l'un, beau, vigoureux, issu d'un monde lointain, qui a voyagé dans l'Europe entière, qui connaît et parle parfaitement quatre langues, qui a déjà goûté à la satisfaction et au poids du succès ; l'autre, marqué par une santé fragile, rarement sorti de son pays, qui ne parle que le français et qui est encore à la recherche de son avenir. Tous deux sont juifs, du côté maternel dans le cas de Marcel, du côté paternel pour Reynaldo. Tous deux sont homosexuels. Deux aspects fondamentaux de leur formation, indissolubles et déterminants pour leurs existences, comme pour leurs arts : dans la société de l'époque, on les ressent déjà comme une double condamnation.
Deux garçons de vingt ans qui n'imaginent pas qu'en ce soir de printemps vient de naître quelque chose qui remplira pour toujours leurs vies (p. 42 - 43).

Chapitre 6
31, rue de Monceau
Dans la serre
Commenter  J’apprécie          80
... A quelques pas de l'éclatante sépulture en marbre de Marcel, Reynaldo gît ainsi qu'il a toujours vécu, dans une atmosphère d'un autre temps, désuète et poignante.
Commenter  J’apprécie          00

Lire un extrait
Videos de Lorenza Foschini (2) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Lorenza Foschini
Lorenza Foschini - La Princesse de Bakounine
autres livres classés : FidélitéVoir plus
Les plus populaires : Littérature française Voir plus


Lecteurs (9) Voir plus



Quiz Voir plus

Les Amants de la Littérature

Grâce à Shakespeare, ils sont certainement les plus célèbres, les plus appréciés et les plus ancrés dans les mémoires depuis des siècles...

Hercule Poirot & Miss Marple
Pyrame & Thisbé
Roméo & Juliette
Sherlock Holmes & John Watson

10 questions
5274 lecteurs ont répondu
Thèmes : amants , amour , littératureCréer un quiz sur ce livre

{* *}