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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Le corpus des études lovecraftiennes en langue française est particulièrement riche, et ce bel ouvrage apporte à l'édifice une pierre digne de lui.

Il est possible de classer les ouvrages consacrés à Lovecraft selon trois catégories.
Les monographies, d'abord. Les deux plus connues sont celle de Maurice Lévy, qui fit oeuvre de pionnier en 1972, et celle de Michel Houellebecq, publiée près de 20 ans plus tard.
Les Cahiers d'études lovecraftiennes, ensuite. Beaux volumes reliés que les éditions Encrage ont fait paraître durant les années 90.
Les ouvrages collectifs, enfin. le premier, qui fit date, est bien entendu le Cahier de L'Herne, publié en 1969 sous la direction de François Truchaud. D'autres suivirent, citons parmi eux "Le Maître de Providence – H.P. Lovecraft" intéressante publication des éphémères éditions Naturellement, généreux volume de 474 pages, qui rassemble des articles signés par Jacques van Herp, Denis Labbé, Bruno Peeters, et d'autres spécialistes.

"Lovecraft, au coeur du cauchemar" s'inscrit dans la lignée de ces ouvrages collectifs. Et il est à bien des égards digne de figurer dans la bibliothèque idéale de tout lecteur lovecraftien.

Par la qualité de l'objet, d'abord. Beau volume de 460 pages, relié tissus, imprimé sur beau papier, entièrement illustré, en couleur. A tous égards, il s'agit d'un travail d'édition soigné, fait assez rare pour être relevé.

Le fond n'est pas moins intéressant que l'objet puisque tous les aspects de l'oeuvre de H.P.L. sont ici envisagés et commentés. Trois grandes parties divisent l'ouvrage, chacune compte une dizaine d'articles.
La première partie se penche sur la vie de Lovecraft et explore aussi bien des pistes connues et attendues – les liens entre l'auteur et sa ville natale, les données biographiques ici développées dans une interview de son biographe S.T. Joshi – que des aspects parfois peu évoqués et ici largement approfondis : les liens entre H.P.L. et Robert E. Howard ; ou les mythes et préjugés que Lovecraft a pu susciter autour de sa personne.
La deuxième partie est consacrée à l'oeuvre à proprement parler, et rares sont les aspects qui ne sont pas ici étudiés. Présentation de 25 titres essentiels, étude des textes poétiques, considérations précises et documentées sur les problèmes de la traduction, liens entre l'oeuvre et la science, le voyage, le mythe...
La troisième partie brosse un tableau assez complet de l'univers étendu de Lovecraft, autrement dit des influences de son oeuvre dans divers domaines: bande-dessinée, illustration, jeux vidéos, jeux de rôles, cinéma.

L'ensemble est passionnant à lire, pour le connaisseur comme pour le néophyte, et constitue à ce jour l'ouvrage idéal pour entrer dans l'oeuvre et l'imaginaire de Lovecraft.
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Lovecraft est l'un des auteurs qui m'a le plus marqué, pour diverses raisons. Tout d'abord je l'ai découvert à 13 ans en découvrant le jeu de rôle l'Appel de Cthulhu. Je me suis naturellement dirigé vers la lecture d'ouvrages de Lovecraft pour connaître un peu mieux l'ambiance des livres, de manière à proposer plus d'immersion dans les parties (j'étais et reste maître de jeu…). Problème : à la librairie, les livres de la collection présence du futur étaient bien cher pour mon budget de collégien, aussi je m'étais rabattu à l'époque sur les livres de Derleth et l'Horreur dans le Musée / cimetière. Ce n'est qu'après m'être fait offert les tomes de l'intégrale de chez Bouquins que j'ai réellement pu découvrir les véritables écrits de Lovecraft, et là ce fût la claque.

Depuis, j'ai lu et relu certaines choses, et il me reste encore à découvrir quelques textes (les Fungi, les écrits du Monde des rêves, et quelques rares pastiches). Aussi l'annonce d'une monographie de Lovecraft m'a particulièrement attiré dès le début. Ce livre a fait l'objet d'un financement participatif sur le site de Ulule en 2016, et a atteint 27.298 €. A ce moment nous n'avons pas pris de contreparties spéciales, vu que l'on avait déjà un peu tout ce qui était proposé…

Une fois le livre terminé j'avoue que j'en ressort avec une envie : relire un maximum de textes de Lovecraft, avec un certain nombre de nouveaux axes de lecture. Cet ouvrage apporte de nombreuses précisions tant sur les motivations que sur l'écriture de l'auteur. Il est divisé de manière logique en 3 parties : L'homme, l'oeuvre, et l'Univers étendu.

L'Homme

Je connaissais déjà pas mal Lovecraft, mais les nombreux articles m'ont fait prendre conscience que je ne le connaissais que très superficiellement. Les nombreux chapitres permettent de prendre conscience des différentes facettes de la personnalité de l'auteur, finalement assez peu torturé, pas si solitaire que cela, et complètement fauché. J'ai énormément appris dans les chapitres sur Joshi et sur la correspondance avec Howard, et le chapitre sur les préjugés est aussi très synthétique. Quant au chapitre sur les révisions, il rend sa véritable place à Lovecraft et montre son influence si importante dans la littérature de l'époque.

L'oeuvre

Au travers d'une dizaine de chapitres est reconstitué l'ensemble des motivations, thématiques, et la façon d'écrire de Lovecraft. On y découvre la genèse de ses oeuvres, leur enchaînement finalement assez logique par rapport au déroulement de sa vie. J'ai notamment appris ses passions pour l'astronomie et la science en général. Et, alors que je le lisais comme un auteur d'horreur fantastique, j'ai réalisé que de nombreuses oeuvres tenaient en fait plus de la science-fiction. Cette partie m'a fortement invité à lire ses écrits « oniriques ». le chapitre sur les 25 oeuvres essentielles est un must have read, un guide de lecture indispensable. Cette partie justifie à elle seule l'achat du livre.

L'univers étendu

Cette partie est plus classique, puisqu'elle cherche à resituer les oeuvres inspirées de Lovecraft allant du cinéma au jeu de rôle, et à savoir comment représenter les créatures et ambiances lovecraftiennes. Sympathique, mais finalement pas grand chose de nouveaux pour cette partie.

Cthulhu goomi

En conclusion, ce livre est tout bonnement indispensable pour qui s'intéresse un tant soit peu à l'auteur ou à son oeuvre. le livre est de très bonne facture, beau, lisible, bien illustré, et à aucun moment trop touffu comme je le craignais dans certains chapitres. Certains chapitres sont moins intéressants (souvent parce qu'ils ne vont pas assez loin et le connaisseur moyen sait déjà la plupart des choses), mais leur mérite est de faire une bonne synthèse pour le cas où l'on recherche une information précise.

Quant à la dernière partie, sur l'influence de Lovecraft sur les auteurs de littérature de l'imaginaire actuel, je l'ai trouvée excellente, car de nombreux auteurs me sont familiers (ou bien connus de Célindanaé) et j'ai l'impression de les entendre parler avec leur verve habituelle en les lisant. de plus, je me rend compte que je partage de nombreux points de vue avec ces auteurs, par leur parcours (venant du jeu de rôle par exemple), ou de par leurs écrits préférés.

Indispensable !!
Lien : https://aupaysdescavetrolls...
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Lovecraft, au coeur du coeur du cauchemar, collectif, ActuSF 2017. Un recueil d'études sur Lovecraft, voilà qui est très original, et ce pratiquement 50 ans après la publication du légendaire « Cahier de l'Herne ». L'objet est volumineux (450 pages), de belle facture (format « Planète), joliment illustré et présenté sous couverture rigide. L'édition a été permise grâce à un financement participatif « Ulule » largement souscrit. le recueil est un mélange de présentations pour néophytes et d'études d'une belle érudition, ce qui rend sa lecture parfois déroutante. Mais cela reste au total un très bon travail, indispensable pour tout lovecraftien qui se respecte.

L'ouvrage s'ouvre sur une contribution de Bernard Bonnet, H.P. Lovecraft entre mythe et faits, fort bien écrite. En une première partie, l'auteur développe l'explosion post-mortem de l'oeuvre, en pointant les grandes dates du phénomène, le décès de Derleth en 1971 qui était le gardien de « son » orthodoxie et le démarrage, dans les années 80, des « Études lovecraftiennes » qui permirent de mieux cerner la personnalité de l'écrivain. Il ne cherche pas en revanche à répondre à la question fondamentale, pourquoi cet emballement actuel de la lovecraftomania ? Voir à ce sujet l'excellent ouvrage d'un collectif d'universitaires américains, The Age of Lovecraft (University of Minneapolis Press, 2016).
Dans une seconde partie, B. Bonnet trace une bio-bibliographie de Lovecraft, reprenant les grandes étapes de sa vie auxquelles il intègre sa production littéraire. Rien de bien neuf, mais l'ensemble est agréable à lire.

Puis Christophe Thill, sous forme d'interview, nous parle de Lovecraft et les préjugés. C'est un peu du « Lovecraft pour les nuls » qui reprend et critique les habituels poncifs (racisme, solitude, misogynie…).

Bien que très court, l'interview de S.T. Joshi Je n'avais jamais rencontré des écrits aussi poignants et puissants que ceux de Lovecraft apporte d'intéressants lumières sur le « Pape de la lovecraftologie ». D'abord par son parcours personnel où il nous explique se sentir sur bien des points proche de la personnalité de l'écrivain. Ensuite sur ses travaux, expliquant que sa nouvelle grande oeuvre est en cours, à savoir l'édition de l'intégralité de la correspondance de Lovecraft (25 tomes dont 9 sont déjà sortis chez Hippocampus Press).

Mathilde Manchon nous parle ensuite des Lieux et Lovecraft. Une compilation assez classique des éléments du « Massachusetts Imaginaire » et des « Contrées du Rêve ». La contributrice insiste, à juste titre, sur le rôle du rêve dans les créations géographiques. Elle n'hésite pas, de surcroît, à se demander, reprenant les thèses de l'occultiste Kenneth Grant et de l'ésotériste Donald Tyson, si Lovecraft ne maîtrisait pas le voyage astral ! Elle date de 1918 (Polaris) ses premières incursions dans l'Ailleurs (cf The Dream World of H.P. Lovecraft, Donald Tyson 1954, second printing 2011, Llewellyn Publications).

L'interview de François Bon, Sur les traces de Lovecraft à Providence apporte la fraîcheur de l'homme de terrain. Celui qui va fouiner à la bibliothèque John Hay pour dénicher le matériel nécessaire à ses traductions ; celui qui arpente les ruelles de la ville à la recherche de l'ombre du Maître.

Bertrand Bonnet reprend la plume et nous livre une très solide étude sur H.P. Lovecraft et R.E. Howard (en partie déjà publiée dans le no 84 de Bifrost). Une étonnante aventure épistolaire entre deux personnes qui ne se rencontrèrent jamais mais firent connaissance par Weird Tales interposé. Les deux écrivains s'appréciaient mutuellement, et le jeune Howard, cadet de 16 ans de Lovecraft, sera fortement marqué dans sa propre écriture par la fiction de son aîné. La Pierre Noire (WT 1931) en est un des plus beaux exemples. le plus étonnant sera cependant la correspondance qu'ils entretinrent de 1930 à 1936, totalement monstrueuse en volume. Et si comme le fait remarquer B. Bonnet la recension n'est que partielle, les deux tomes publiés par Joshi, Schultz & Burke, A Means to Freedom, The Letters of H.P. Lovecraft & Robert E. Howard (Hippocampus Press, deux volumes, 2017) n'en font pas moins plus de 1500 pages. Patrice Louinet en donnera quelques exemples à la suite de l'étude. Ces lettres sont à proprement parler des oeuvres à part entière dans les oeuvres respectives des deux auteurs. Et contrairement à ce que l'on pourrait penser, ces échanges ne portent que marginalement sur leurs fictions, mais prennent rapidement la dimension de dissertations philosophiques, historiques et politiques dont certaines pourraient véritablement faire penser à des travaux de « master » ! Les discussions tournent autour du celtisme (histoire, linguistique, anthropologie) avec chez Howard la lancinante question de l'origine du peuplement de la Grande-Bretagne. Elles accordent aussi une place importante au régionalisme : Lovecraft, pour qui la Nouvelle-Angleterre est le réceptacle de l'indicible, incite pourtant son correspondant à creuser le légendaire du Sud, ce qui donnera lieu à l'écriture d'une excellente fiction, Les Pigeons de l'Enfer (1934). L'horreur se terre ici dans le manoir abandonné d'une famille de planteurs mystérieusement disparus.
Mais sous prétexte d'anthropologie, le débat va devenir de plus en plus musclé, Lovecraft mettant au sommet de la civilisation l'Empire Romain alors que Howard défend farouchement le camp des barbares. Tout cela débouche sur des débats philosophiques infinis sur barbarie/progrès – barbarie/intelligence, et si les deux auteurs s'accordent sur l'absurdité de notre monde, Howard est partisan d'une lutte farouche pour le progrès qu'il n'estime pas contradictoire avec la barbarie alors que l'écrivain de Providence s'accroche à l'insignifiance de l'homme et à son impuissance corollaire à modifier le cours des choses. Les plus belles pages de Howard sont celles sur la liberté dans lesquelles il brocarde violemment Lovecraft qui s'était fait le chantre du fascisme italien. Les noms d'oiseaux ne sont pas rares sous la plume de Howard, souvent excédé par le ton professoral de Lovecraft et sur son art perfide de lui faire dire le contraire de ce qu'il a écrit. Il n'empêche que les deux hommes s'estimaient profondément et que Lovecraft sera bouleversé par le suicide de son ami texan.
Le dossier de Patrice Louinet donne un bel échantillon de ces échanges avec quelques curiosités d'ordre gastronomique ! Lovecraft liste ce qu'il aime, et surtout ce qu'il n'aime pas (et la liste est longue !). Howard défend à l'opposé son régime de cow boy carnassier buveur de grandes chopes de bière !!

Regret personnel : dommage que ce gros bouquin n'ait pas consacré une étude parallèle et de même qualité à la correspondance avec C.A. Smith.

Todd Spaulding analyse ensuite Lovecraft et les révisions. Une analyse succincte pour nous dire que cette partie « révisions » de l'oeuvre est importante (certes), sans pour autant citer ce véritable chef-d'oeuvre qu'est le Tertre .

Christophe Thill reprend la plume pour étudier Lovecraft sous presse, brève histoire (et préhistoire) éditoriale des écrits de Lovecraft. Une bonne synthèse d'éléments connus.

Originale en revanche est l'étude d'Emmanuel Mamosa, Cthulhu, l'envergure d'un Mythe. Il montre bien que la création de Lovecraft était tout sauf structurée et que c'est August Derleth qui lui a donné une structure se voulant cohérente, au risque de déformer la démarche de l'auteur. Il n'y a rien, dans la philosophie de Lovecraft, qui puisse faire penser à un combat entre le bien et le mal dans le cadre d'une théologie qui se voudrait chrétienne. Il faut, pour bien comprendre le soi-disant Mythe, revenir à l'approche fondamentale de l'auteur : l'homme n'est qu'une poussière cosmique, une sorte de jouet des Grands Anciens, un parasite dans un monde qu'il croyait sien. Et c'est la prise de conscience de cette situation qui suscite « la terreur cosmique ». Dès lors, la religion moderne n'est-elle qu'une tentative pathétique de la part des humains de se voiler la face et de ne pas se retrouver confrontés à l'atroce vérité de leur propre insignifiance. A l'instar de Burleson, Price, Joshi, Murray et Schultz, Marmosa insiste sur le fait que le Mythe n'est dès lors rien d'autre que l'expression de la vision du monde de Lovecraft, habillée aux couleurs de la fiction.
L'étude se poursuit par un examen de l'actualité du Mythe qui résonne étrangement à nos oreilles : l'astronomie nous montre le gigantisme de l'univers au sein duquel nous ne sommes qu'une infime forme de vie ; le capitalisme a développé d'énormes structures dans lesquelles nous ne sommes plus qu'un jouet ; l'histoire des Anciens est cyclique et nous annonce une fin proche, alors que nous sommes dans un contexte de dérèglement de l'environnement, de réchauffement climatique et de barbarie terroriste ; quant à l'Intelligence Artificielle, n'est-elle pas prête à se substituer à nos faibles capacités ? Il ressort de cette analyse un malaise social évident, semblable à celui éprouvé par Lovecraft face au progrès mettant à mal sa culture traditionnelle.
L'article se termine par un survol rapide de la façon dont le « Mythe » a infiltré « la pop culture » (BD, cinéma, jeu de rôle, musique) sans pourtant évoquer son incursion étonnante dans certains milieux occultistes. On se référera sur ce sujet à l'étude fort bien faite de John Steadman, H. P. Lovecraft & The Black Magickal Tradition : The Master of Horror's Influence on Modern Occultism (Weel/Weiser, 2015).

Petite pause avec l'interview de Raphaël Granier de Cassagac, jeune auteur de fiction, qui nous explique comment il a découvert Lovecraft. Par le jeu de rôle, bien sûr ! Cet auteur a collaboré à l'album Kadath chez Mnémos.

Bertrand Bonnet poursuit avec un gros dossier, Lovecraft en 25 oeuvres essentielles. Tout choix est évidemment subjectif, mais l'approche est intéressante, car les textes sont présentés par ordre chronologique, illustrant de façon pertinente la formation de l'imaginaire de l'auteur. Je travaille personnellement de la sorte, classant dans mon « scrap book d'étude » tous les textes, y compris les poésies et les autres contributions marquantes (lettres, articles..). le résultat en vaut vraiment la peine ! Quant au fond, les notes de Bonnet sont très Nébalia (du nom de son blog) à savoir longues et pleins d'allers-retours (oui, mais non, encore que, alors peut-être). Mais l'ensemble est agréable à lire.

C'est au tour de Christophe Thill de passer au grill de l'interview sur le thème de L'oeuvre de Lovecraft. Un papier comme sait bien le faire notre ami, essentiellement destiné à un public de néophyte.

L'universitaire Florent Montaclair, avec Lovecraft et le Génération Perdue, nous donne un cours de littérature comparée, nous montrant que Lovecraft est un parfait représentant de la jeune génération américaine qui s'exprime dans les années 20. Son analyse s'appuie sur une comparaison entre plusieurs oeuvres de Lovecraft et Manhattan Transfer de John Dos Passos.

Elisa Gorusuk livre, avec Lovecraft et la science, une contribution très solide. Elle passe rapidement sur le chimiste et l'astronome en herbe pour nous montrer comment Lovecraft était à la fois passionné et terrifié par le progrès scientifique. Un progrès qu'il suivait de près et qui lui donnera l'occasion de créer d'invraisemblables machines.
On trouvera le capteur psychique pour prendre connaissance des visions du patient (Par-delà le mur du sommeil, 1919), la technique pour élargir ses capacités sensorielles (De l'Au-Delà, 1920), la « potion » pour ressusciter les cadavres « relativement frais (Herbert West, réanimateur, 1921), l'appareil de réfrigération pour maintenir les morts « en vie » (Cool Air, 1926), le traitement de la fièvre noire ou fièvre récurrente (Le Dernier Examen, 1927 et La Mort Ailée, 1932), la refonte de la technique de la chaise électrique (L'Exécuteur des Hautes Oeuvres, 1929), la technologie pour conserver « en vie » les cerveaux issus du corps (Celui qui chuchotait dans les ténèbres, 1930), ou encore la découverte de la fibrodysplasie ou maladie de la pierre (L'Homme de Pierre, 1932) etc….Dans le Défi d'Outre-Espace et Dans l'Abîme du temps (1935) Lovecraft ira jusqu'à imaginer » l'échange d'esprit entre un humain et un représentant de la Grande Race, l'un prenant le corps de l'autre et vice-versa.
Mais ce progrès a quelque chose de terrifiant, et surtout parce qu'à la suite des travaux d'Einstein et de Planck, il ouvre de nouvelles perspectives métaphysiques qui confirment sa propre approche cosmique. L'homme n'est que poussière insignifiante dans l'univers, balloté par des forces obscures qui l'ignorent. L'anthropocentrisme est mort et le mystère des origines prend une dimension nouvelle, celle de la pré humanité avec ses géométries impossibles et ses créatures innommables. le Pr Upham goûta particulièrement sa démonstration de la parenté des mathématiques supérieures avec certains moments du savoir magique transmis à travers les âges depuis une indicible antiquité humaine ou préhumaine où la connaissance du cosmos et de ses lois était plus vaste que la nôtre. (La Maison de la Sorcière).
Cette contribution se termine par une petite note amusante relatant la découverte par une équipe de biologistes canadiens d'un microbe qu'ils ont baptisés Cthulhu en raison de son comportement similaire à celui d'une pieuvre !

Christophe Thill continue de remplir le bouquin, cette fois avec une étude sur L'anti heroic fantasy de H.P. Lovecraft. Une synthèse sympathique, mais qui appelle un certain nombre de remarques :
° Pourquoi anti HF ? Parce ce que selon le contributeur, la vraie HF, c'est celle de Howard, avec des héros musclés qui se battent férocement pour le bien. Chez Lovecraft, ce sont des anti-héros qui courent à leur perte ou, comme Randolph Carter, qui aspirent au retour à leur pays d'origine. Bon, c'est un point de vue !
° le cycle du rêve, pour Christophe Thill, n'est pas très onirique. Ah bon !
° Il est convenu de faire dater le début de ce cycle par la nouvelle Polaris (1918), de veine typiquement dunsanienne alors que Lovecraft n'avait pas encore découvert l'oeuvre du baron anglais. Mais cela s'explique très bien : c'est tout simplement un type de visions similaires face à l'inconnu avec des stocks similaires de connaissances en matière de folklore et d'histoire. On flirte ici avec les théories jungiennes de l'inconscient collectif et des archétypes. Pourquoi pas ! Lovecraftlui-même dans Par-delà le mur du sommeil (1919) écrivait : Je me
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Indispensable pour toute personne qui s'intéresse à Lovecraft. Ce livre est un must !
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