Aucun titre ne saurait mieux résumer l'itinéraire exceptionnel de cette figure inclassable,
Jean Malaurie. La pierre, il s'agit de celle accumulée dans des éboulis que ce géomorphologue étudie avec passion dès la fin des années 1940. Mais aussi de celle qui constitue la matière de certains des outils fabriqués par le peuple qu'il a approché le plus, les Inuit, jusqu'à se fondre en lui. L'âme, c'est la sienne propre sans doute, mais aussi celle des êtres humains ou animaux que ce savant se découvrant animiste a côtoyés durant sa longue existence. le lecteur qui ne connaît pas
Jean Malaurie pourra être dérouté pas l'ouvrage foisonnant où se rencontrent progressivement ses différentes facettes: scientifique et intellectuel fondateur des Editions
Terre Humaine, résistant dans sa jeunesse, explorateur (encore qu'il récuserait probablement ce terme), écrivain, philosophe et mystique, précurseur de l'écologie, défenseur des peuples qu'on appelle aujourd'hui "premiers" dont il a su déchiffrer la valeur culturelle. On peut aussi, comme c'est mon cas, s'y engouffrer avec fascination. C'est que la construction du livre échappe aux schémas classiques, notamment chronologiques: il s'agirait plutôt du tableau d'un peintre, construit par touches successives et dont la cohérence d'ensemble se révèle progressivement. Pastelliste, l'auteur n'hésite pas à revenir sur son ouvrage, à redire, à rajouter un éclairage, créant des sortes de spirales. le bilan d'une grande aventure intellectuelle et humaine, non terminée, couvrant un quart de siècle.