En effet, je trouvais la musique de Mozart fort belle et fort nouvelle : le ton du premier acte me parut gai et vif ; il sut capter mon attention et me distraire de mes ennuis. Comme je vous en fis part alors, je pris plaisir à ce spectacle, même si les acclamations du public sans-culotte troublèrent continuellement les parties du Figaro. Vous ne l’ignorez pas, chère musicienne : plus que sa voix qu'il avait passable, c'était son personnage qui lui valait cet enthousiasme peu médiocre ! Et lorsqu'on arrêta la musique pour lui laisser dire sa fameuse tirade, je crus bien que les balcons allaient s'écrouler sous les piétinements exaltés du public. Je me surpris moi-même, il est vrai, à applaudir avec eux ; cette noblesse "qui s'était donné la peine de naître et rien de plus", avait si peu à voir avec la nôtre !
Pendant cette nuit de labeur, le brouillard s'installa et nous cacha les navires anglais et notre propre flotte, pendant presque deux jours, rendant impossible tout engagement. Cette circonstance favorisa nos travaux et permis à Nielly de nous rejoindre le lendemain en renfort, avec six autres vaisseaux. Le vent du sud, dans la journée du trente-et-un mai, dissipa enfin la brume, mais nous attendîmes Howe vainement. Ce n'est que le premier juin au matin qu'il engagea le combat.