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EAN : 9782246814481
176 pages
Grasset (27/09/2023)
3.59/5   101 notes
Résumé :
Un écrivain est sauvagement poignardé. Son crime ? Avoir heurté les sensibilités.

Immédiatement, une salariée de Feel Good, maison d'édition à la pointe du progrès, décide de tout mettre en œuvre pour qu'une telle tragédie ne se reproduise jamais.
La méthode est simple et radicale : effacer certains mots des manuscrits, pour que plus personne ne soit heurté dans sa sensibilité. Corriger, couper, remplacer. Que chacun se sente heureux et calme. ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (17) Voir plus Ajouter une critique
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La notion de Feel Good n'a pas mes faveurs, aussi, lorsque j'ai entendu Tania de Montaigne parler de sa satire évoquant ce sujet contaminant notre époque, ma curiosité a été titillée.
J'ai cru rire, sourire , voyais d'avance mon air moqueur pointé et pourtant, il n'en a rien été.
Le Feel Good m'a affolée.
Étonnant pour une notion qui veut appeler au calme et au bien-être.
J'ai bondi, pesté face à la crédibilité de la fable qu'écrit l'auteure/ autrice/femme de lettres/écrivaine ( c'est Feel Good les brochettes de mots) , devant l'atterrante réalité d'une mouvance qui se veut déconstructive.
L'air m'a manqué enfermée dans le modèle pseudo inclusif de cette maison d'éditions qui dépece chaque ligne de chaque manuscrit afin de mieux restructurer les discours alors vidés de substance.
Wokisme, Cancel Culture à l'extrême, la notion du "bien" vise à museler tout ceux qui ne portent pas le même regard jusqu'à faire faire des tests ADN aux auteurs afin d'établir une légitimité quant à leurs écrits.
Peut-on encore lire un livre incluant le mot "noir" dans le titre , si, bien entendu, la minima des 38, 2% d'ADN requis pour avoir l'autorisation d'écrire sur le sujet de l'origine est atteint ?
Trop clivant.
D'ailleurs, je suis une mauvaise fille, j'écris "noir" en omettant la majuscule. Majuscule inexistante à "blanc" puis de toute façon on ne doit plus dire "noir".
"indien" non plus mais " première nation" ou "natif".
Impossible d'écrire sur une sexualité qu'on ne pratique pas, le sujet n'appartient qu'à une seule parole s'octroyant la légitimité unique, les mots d'anatomie sont relégués aux oubliettes, "corps" sera le mot unique.
Quant à l'art... Danger ! Il pourrait être mal interprété, contesté, il est donc préférable de censurer ce qui pourrait heurter le lecteur. L'humour ? Même tarif.
Finalement, c'est la littérature qu'il faut censurer, et la fiction ! trop d'imagination est un danger.
Essais et témoignages sont plus raisonnables, à condition que la vie privée des auteurs soit Feel Good !
Et être un vrai Feel Good, c'est détruire et abattre ceux qui ne portent pas la même parole, c'est être le nouvel oppresseur, celui qui vous dicte également ce que vous devez manger, lire, regarder, dire. Ce sont les nouveaux juges du monde, les nouvelles lois de la bien pensance réécrites par les gens "bien", les sans mémoire privilégiant le silence assourdissant.
Et pour cause, pendant ce temps là, le monde bouillonne et la violence se décuple, les crimes racistes et homophobes pullulent ... mais chut...
Ne parlons pas, n'écrivons pas, soyons Feel Good, effaçons ce qui peut être polémique, ce qui peut troubler le lecteur, n'écaillons pas le vernis, l'edulcoré est si doux, la bonne conscience si paisible, le déni si confortable. Après tout, cet auteur poignardé ne l'a t il pas cherché ? On pense bien évidemment à l'attaque de Salman rushdie...
Chute des réalités, le Feel Good poursuit sa route dans l'utopie crasse ,l'idéologie couarde si rassurante, la tranquillité d'esprit qui surtout rapporte tout en donnant la sensation d'être vertueux...
Telle est la direction proposée par les "progressistes", pour la plupart, blancs...
Culpabilité pour tous les maux, repentance extrême, dictature de la pensée.
Et alors une question se pose:
D'où vient le danger ?
Du silence Feel Good à l'opposé de la mémoire collective, de la déconstruction aux dépends de la reconstruction.
Pour autant, l'espoir est là, le bon sens toujours véhiculé , la pensée et l'histoire refusent d'être évincées et de disparaître, à nous de préserver la "Mémoire" avec une majuscule, elle dépend de chacun de nous.

Un effarant portrait d'une partie de notre société. de la fable et de la satire ressort une bonne part de réalité et en cela " Sensibilités" devient bien plus qu'une suggestion de lecture.
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Roman (?) dystopique est-il dit mais dans le monde littéraire anglo-saxon, la présence cachée des « Sensitivity readers » est bien là.

Ce livre nous montre les dérives d'une « bien pensance » effaçant la réalité et les faits dramatiques ignorés au profit d'une bienséance de pacotille.

Une morale outrancière, des élans nocifs émanant des réseaux sociaux et hop la littérature ne peut plus dire ce qui est.

Quelques pages sont magistrales qui dénoncent parfois avec humour les dérives dues au refus de dire les choses comme elles sont. (Un exemple : le n de noir transformé en N majuscule amènera-t-il un quelconque changement dans le regard que certains portent sur l'autre, etc…).

Un livre qui alerte, qui éveille voire qui réveille.
Un livre qui oblige à réfléchir sur certaines dérives de notre société.

Plus blanc que blanc camoufle les réalités du monde.
La nécessité de dire et de dénoncer ne doit pas être censurée.

Livre intéressant qui, sous une certaine légèreté, met en exergue un aspect dangereux de notre société.

« Feel good » ??? Histoire d'une maison d'édition qu'on souhaite ne jamais voir.
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Il est écrit "roman" sur la couverture, comme ça les gens ne se tromperont pas. (on peut toujours rêver)
Ce livre, c'est l'histoire de notre époque : on ne peut rien dire, écrire qui pourrait froisser la sensibilité de quelqu'un. Et on ne voudrait pas que les gens se mettent à penser. Car notre société n'a besoin que d'une chose : des zombies consommateurs, heureux de ne pas devoir penser, heureux de ne pas devoir regarder notre monde tel qu'il est (parfois merveilleux, parfois d'une horreur indicible).
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Dans ce livre tout en férocité et en ironie, Tania de Montaigne s'attelle à dénoncer un phénomène qui prend de plus en plus d'ampleur dans le monde littéraire : celui des sensitive readers, c'est-à-dire des personnes payées pour relire les livres et « rayer » (ou modifier) ce qui pourrait être choquant pour un lectorat déterminé.

L'autrice (ou l'auteure) nous présente une entreprise appelée Feel Good qui se donne pour mission d'élaguer (ou de modifier) tout propos qui pourrait choquer l'un ou l'autre lectorat, au détriment de l'opinion de l'auteur. Cependant, malgré des intentions honorables, les méthodes plus que discutables de cette entreprise sont un excellent terreau pour dénoncer ce genre de procédé.
En effet, si les premiers élagages semblent entrer dans le domaine de l'acceptable, la « morale » de l'entreprise devient de plus en plus stricte, jusqu'à devenir une véritable police de la pensée, accentuée par les réseaux sociaux, amenant à l'accusation gratuite ou à l'exclusion de ceux qui s'y opposeraient, sous prétexte de « faire le BIEN ».

Ce qui est encore plus appréciable dans ce roman, c'est la mise en parallèle entre l'importance que l'on donne sur les réseaux sociaux à ces phénomènes littéraires et de véritables faits divers dans « le monde réel » qui, eux, ne se voient accorder qu'une importance très limitée, ce qui prouve que ce n'est pas en supprimant trois-quatre mots offensants dans un texte que la vraie violence sera abolie.

En bref, un roman ironique et féroce qui fait prendre conscience qu'on aura beau assainir la littérature, la rendre moins choquante, ce n'est pas ce qui rendra le vrai monde moins violent.
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Ce sont les propos tenus par l'autrice/écrivaine/femme de lettres lors de l'émission @lagrandelibrairie qui m'ont donné envie de lire ce livre.

Une jeune femme travaille pour une maison d'édition nommée Feel Good et sa mission est de lisser, polir, effacer toutes traces de mots, expressions ou passages qui pourraient heurter le lecteur.

Le sujet est passionnant car cela existe vraiment aujourd'hui. Aux États-Unis, le politiquement correct, la peur de blesser est très présente. Mais cela se passe aussi dans notre pays. Un exemple simple. Quand on était petit, ma grand mère nous ramenait des sucreries qu'on adorait, une boule de guimauve recouverte de chocolat noir. Cela s'appelait des têtes de nègre. Et je sais qu'aujourd'hui, ce nom a été effacé et que l'on n'en propose plus dans les boulangerie.

Alors oui, je valide qu'utiliser ce mot Nègre pour désigner une personne aujourd'hui est négligent voir raciste. Mais on ne peut pas effacer l'histoire parce qu'aujourd'hui des personnes se sentent blessées. Il faut éduquer, enseigner, parler de tout cela pour que chacun connaisse le poids des mots, leurs origines, l'histoire qui les accompagnent. Et c'est la que le livre à sa place.

Bref. Dans ce livre, la maison Feel Good s'appuie sur quelques faits pour créer des campagne à son honneur, créant des effets boule de neige hallucinants (juste génial cette partie). Je me suis sentie comprimée, mal à l'aise, en manque de liberté.

Certes, ce livre est très vide de sentiment, "ce n'est pas le problème", qui peut donner du mal à vraiment accrocher mais cela vaut le coup d'aller jusqu'au bout car les dernières pages sont délivrantes, et que ce livre amène vraiment à réfléchir sur ce qu'on lit, ce qu'on pense, comment on voit les autres...

J'aime ces livres dont la fin nous fait changer d'avis sur le début. 😉

Cela me réconforte dans mon "addiction" aux livres et mon besoin de comprendre, de me divertir, de m'ouvrir l'esprit, de savoir, de me poser des questions... Et de partager tout ça avec les autres. 👐
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critiques presse (1)
OuestFrance
13 novembre 2023
Dans « Sensibilités », le monde de l’édition est devenu le temple du « feel good », et toute offense éradiquée… jusqu’à dépouiller les phrases de leur sens. Dystopie ou réalité ?
Lire la critique sur le site : OuestFrance
Citations et extraits (31) Voir plus Ajouter une citation
Six mois plus tard, Feel Good mit définitivement la clé sous la porte. Le label "sensibilité zéro" avait tenu toutes ses promesses et bien au-delà. Elle avait si bien travaillé que pas une ligne d'un livre Feel Good ne pouvait être soupçonnée de pousser les lecteurs dans une zone sensible. Tout était sous contrôle, nettoyé lisse, transparent. Il n'y avait plus aucun RISQUE, et plus aucun lecteur non plus. Ils avaient déserté. Elle fit ses cartons, rangeant les dernières affaires, jetant les vestiges d'un temps où l'on croyait que le meilleur était à venir. Dans le couloir, elle croisa des collègues sidérés et silencieux, comme elle. L'incompréhension était totale. Faire le BIEN n'était décidément pas une mince affaire.
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j'écris, ce sont des choses vraies, résolumen
vraies, des faits. J'écris des prénoms sur des gobelets. Les gens sont prêts à payer très cher pour ça. Alors je note leur nom sur des gobelets avec un marqueur et, ensuite, je les appelle quand leur café est prêt. Je dis « Sophia» et ils sont contents et ils payent cinquante fois le prix que leur coûterait un café s'ils le faisaient eux-mêmes ou s'il n'y avait pas de nom sur le gobelet. Au début, je demandais l'orthographe exacte, je tenais à ce que les choses soient inscrites le plus justement possible. Je voulais qu'ici, dans ce nom sur ce gobelet, il y ait une vérité. On est étonné du nombre de façons qu'il y a d'écrire un prénom.
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Nous ne promettons rien, c'est la différence avec le feel good. Nous voulons simplement savoir ce qui fut et nous voir tels que nous sommes. Nous acceptons de porter l'Histoire, sans choisir ce qui nous arrange. Nous acceptons d'être imparfaits. Savoir et voir. Se souvenir.
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Quand elle était étudiante, elle pensait les choses en grand. Elle se disait que l'existence était une traversée un voyage. Elle voyait chaque possibilité comme une aventure. Dans son esprit, tout était vaste. Puis l'horizon s'était refermé, comme si on lui avait posé des œillères épaisses qui réduisaient chaque jour un peu plus le champ des possibles. Elle avait l'impression d'avoir été prise dans un tourbillon qui avait tout réduit en miettes. Une explosion souterraine et silencieuse. Un jour, elle s'était rendue compte que, quand elle disait "ma vie", c'est de ces morceaux infimes dont elle parlait. Il n'y avait plus de grands desseins, plus de vastes perspectives. Elle se faisait l'effet d'être comme un oiseau qui picore, elle ramassait un bout ici, un autre là, et la somme de toutes ces miettes constituait le seul paysage qui, désormais, se déroulait sous ses yeux. Sa vie.
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- Est-ce que ces gens ont lu le livre ?
- Ça n'est pas le problème.
- Est que ces gens prévoient de lire le livre ?
- Ça n'est pas le problème.
- Est-ce que ces gens savent qu'il s'agit d'un roman et pas de la réalité?
- Ça n'est pas le problème.
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Videos de Tania de Montaigne (23) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Tania de Montaigne
Quelques questions à l'occasion d'une rencontre sur un événement littéraire.
Ici, Tania de Montaigne sur le festival itinérant Au Fil des Ailes, dans le Grand Est, porté par Interbibly.
Merci à Emma Andrews pour le montage
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