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Sophie Benech (Traducteur)
EAN : 9782072927409
144 pages
Gallimard (29/04/2021)
3.6/5   182 notes
Résumé :
Moscou, 1939. Le biologiste Rudolf Mayer a parcouru plus de huit cents kilomètres pour présenter aux autorités ses recherches sur une souche hautement virulente de la peste. Ce n'est qu'après cette réunion qu'il comprend qu'il a été contaminé, et que toutes les personnes qu'il a croisées peuvent l'être également. La police soviétique déploie alors un très efficace plan de mise en quarantaine. Mais en ces années de Grandes Purges, une mise à l'isolement ressemble à u... >Voir plus
Que lire après Ce n'était que la pesteVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (56) Voir plus Ajouter une critique
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1939, en Russie.
À l'écart du reste du monde, un long bâtiment de plain-pied est enseveli sous la neige.

La gardienne, une vieille Tatare, est assise près d'un poêle en fer et mâchonne de sa bouche édentée, des tranches de viande séchée.

Plus loin, dans un local confiné, vêtu d'une combinaison de protection et doté d'un masque, un biologiste du nom de Rudolf Ivanovitch Mayer répartit une culture bactérienne dans des boîtes de Petri à l'aide d'une longue aiguille.

Dans la loge, le téléphone sonne avec insistance.
Ce passage m'a rappelé la virulence de l'appareil de Donald quand c'est Picsou qui appelle.
Mais je m'égare.

Suite aux hurlements de la gardienne qui l'enjoint de répondre,, Mayer se précipite, et ce faisant, son masque glisse, le joint d'étanchéité de la mentonnière s'est détaché.

C'est Moscou, en la personne de Vsévolod Alexandrovitch, Président de la commission, qui exige de Rudolf qu'il fasse le voyage pour faire un exposé sur son travail, bien que celui-ci demande encore deux mois pour le finaliser.

L'éminent biologiste travaille sur la peste pulmonaire, en pleine recherche d'un vaccin supposé lutter contre toutes ses variantes.

Pas de mystère, suite à la détérioration de son masque, Rudolf est contaminé mais prend le train jusqu'à Moscou, s'installe à l'hôtel, se fait même raser, fait son exposé à la Commission... et tombe malade.
Le médecin vient, le fait hospitaliser.

La Russie connaît un embryon d'épidémie, mais absolument toutes les personnes ayant été en contact avec le patient zéro sont identifiées et débusquées de l'hôtel, de chez eux en pleine nuit.

Quand des hommes du NKVD vont les chercher, les citoyens pensent de suite à une arrestation, forcément, et leurs réactions varient d'une personne à l'autre.

*******

Le livre est très court, mais plutôt détaillé concernant les personnages.
Un style très brut, il ne faut pas y rechercher d'envolées lyriques.

Accrochez-vous pour suivre au fil des noms et prénoms, mais une récap est fournie en entrée de livre.
J'aurais aimé que certains passages soient davantage creusés, ce qui aurait donné plus une profondeur émotionnelle au récit.

Au final, un grand soulagement, ce n'était que la peste !

.
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Un à un ils sont tous retrouvés puis isolés manu militari, sans explication. Ils s'imaginent le pire, car sous le camarade Staline, même coupable de rien cette mise à l'écart n'augure rien de bon. Pourtant quelque temps après ils sont relâchés. Enfin ceux qui ne sont pas morts. Morts de la peste.

Écrit en 1988, ce court texte a été inspiré à Ludmila Oulitskaïa par une épidémie de peste pulmonaire à Moscou en 1939, tuée dans l'oeuf par les autorités soviétiques (le NKVD) qui n'ont pas hésité à utiliser les méthodes fortes dont elles étaient coutumières en ces temps de purges staliniennes. Et ça a marché puisque en quelques jours (ou semaines) l'épidémie débutante a été circonscrite. Évidemment en cette période de pandémie de covid un texte qui interroge sur la nature des moyens employés pour tenter d'endiguer le mal, leur justification et leurs conséquences sur les libertés des individus...
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Écrit en 1988, publié au printemps 2021, ce texte (document romancé ou roman documentaire) relate l'histoire d'une épidémie de peste pulmonaire (« taux de létalité : 100% ») qui s'est déclarée en URSS en 1939.
Déclenchée accidentellement dans un laboratoire à 800km de Moscou, elle est propagée par Mayer, le biologiste responsable dudit labo, à son insu puisqu'il est encore asymptomatique, alors qu'il se rend en train à la capitale pour y présenter un compte-rendu de ses recherches devant une quelconque commission médicale.
Lorsque les symptômes apparaissent et que le diagnostic ne fait plus de doute, il est hospitalisé et placé à l'isolement. Et la machine sanitaro-sécuritaire soviétique de se mettre en marche avec une redoutable efficacité : identification et mise en quarantaine des personnes qui ont été en contact avec Mayer sur tout son itinéraire; en 48 heures, 83 personnes sont extraites manu militari de chez elles, sans qu'on leur dise de quoi il retourne, et isolées de force à l'hôpital pendant plusieurs jours. Vu le contexte de l'époque, certaines de ces personnes ont cru être arrêtées dans le cadre d'une énième purge stalinienne. Mais au final, il s'avérera que « ce n'était que la peste »...

L'écriture est sèche, clinique, mais pas dénuée d'ironie pour autant, comme l'illustre le titre. Évidemment le texte a une résonance saisissante en ces temps de coronavirus, et il ne manque pas de susciter la question : l'actuelle pandémie aurait-elle été mieux endiguée sous un régime totalitaire ?
Comme le souligne Ludmila Oulitskaïa dans sa postface, la peste pulmonaire de 1939 s'est greffée sur une autre peste, celle du totalitarisme et de la terreur d'État. Il est interpellant de constater que l'épidémie a été jugulée grâce au NKVD, et qu'il « s'agit sans doute du seul et unique cas dans toute son histoire où cette institution féroce et impitoyable a travaillé pour le bien de son peuple, et non dans le but de le terroriser et de l'anéantir ». Elle s'interroge encore « avec une acuité nouvelle : quel mal est le plus terrible – celui des cataclysmes naturels et des épidémies, ou celui qui est généré par l'homme ? »
L'auteure, biologiste de formation, conclut entre optimisme (« l'actuelle épidémie sera vaincue, d'abord parce que, en vertu de toutes les lois, la souche du virus doit perdre de sa force et la maladie va devenir moins dangereuse. Ensuite, parce que jamais encore aucune infection ne s'était heurtée à une science aussi puissante et réactive »), et espoir prudent : « Le monde change de façon imprévisible, et on voudrait espérer que cette nouvelle épreuve à laquelle est confrontée l'humanité ne va pas nous rendre plus fermés et plus égoïstes mais, au contraire, va nous faire prendre conscience que, dans ce monde qui ne fait désormais plus qu'un, s'il y a beaucoup trop d'agressivité, de haine et de cruauté, il n'y a en revanche pas assez de compassion et d'amour. Et cela dépend de nous ».

Un texte captivant et très intéressant. A lire et à réfléchir.
Lien : https://voyagesaufildespages..
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Ludmila Oulitskïa raconte dans ce petit livre l'histoire d'une épidémie de peste pulmonaire qui s'est déclarée à Moscou en 1939 et qui a été stoppée grâce aux organes de la sécurité d'état de l'URSS, soit le NKVD.
Elle précise que c'est sans doute le seul et unique cas où cette institution féroce et impitoyable à travaillé pour le bien de son peuple et non dans le but de le terroriser et de l'anéantir.
Ce livre nous procure d'intenses interrogations comme par exemple si l'on se réfère à l'épidémie du coronavirus de savoir si elle aurait être pu endiguée beaucoup plus vite ?
Ludmila Oulitskïa ne fait pas l'apologie du NKVD, elle dit notamment dans sa postface que" les organes de la sécurité d'état se sont avérés plus forts que les forces maléfiques de la nature"
Précisant que la peste n'est pas le pire des fléaux pour l'humanité mais bien les épidémies de terreur qui sont des créations de l'homme.
Un petit opus à lire très intéressant qui permet des angles de vues inédits.
À lire assurément.
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Au plus fort de la pandémie de Covid 19 est ressorti ce texte de Ludmilla Oulitskaïa écrit en 1988.

Texte très court, ce n'est ni un roman, ni une nouvelle mais un scénario et écrit comme tel : récapitulation des protagonistes en introduction, description sommaire des lieux et des personnages.

Mais quelle force se détache de ce scenario !

Il se base sur un événement peu connu et occulté par le pouvoir : en 1939, le NKVD, de sinistre mémoire, a empêché le déploiement d'une épidémie de peste, la maladie fut jugulée et seuls trois personnes en moururent.

Rudolf Ivanovitch Mayer est chercheur dans un laboratoire et travaille sur un vaccin contre la peste. Il doit présenter ses travaux à la commission de santé à Moscou sans réaliser qu'il transporte le bacille de cette maladie suite à un moment d'inattention. Il sera fait appel au NKVD pour rechercher et isoler toutes les personnes ayant été en contact avec lui.
Et nous volià plongés dans ces années de terreur stalinienne …

L'autrice fait vivre ce récit avec beaucoup de dialogues, accordant à chaque protagoniste une scène, y essaimant des touches d'humour tout en soulignant la peur engendrée par ces irruptions de nuit de la police politique.

Et ce livre nous montre ainsi la seule réussite de la NKVD, mais entre une épidémie mortelle et la terreur du pouvoir, n'est ce pas cette dernière que l'on craint le plus ?

On pourrait reprocher à ce texte un manque d'approfondissement mais je ne le ferai pas ! C'est un scénario et il se revendique comme tel.
ce scénario, malgré cette économie de moyens littéraires, est extrêmement percutant et arrive à me donner des frissons. Mon imagination a comblé ce que la sobriété du texte dissimulait.
Judicieusement publié à nouveau lors de la pandémie que nous avons connue, il parait très actuel …



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critiques presse (1)
LeMonde
03 mai 2021
Histoire d’un livre. Un récit ironique d’une épidémie jugulée à Moscou, en 1939, par la police de Staline, a valu des attaques des « patriotes » russes à son autrice.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Citations et extraits (36) Voir plus Ajouter une citation
Éclairant de ses phares un tourbillon de neige frémissant, un train de marchandises roule à travers une immense étendue désertique balayée par le blizzard. Il roule lentement, pendant longtemps. Il laisse derrière lui une ville à peine visible sous des monceaux de neige et se fond dans le brouillard.
À l’écart du monde entier, un long bâtiment de plain-pied est enseveli sous la neige. Quelques fenêtres brillent d’une lumière trouble. Sur une plaque recouverte d’une fine couche de neige, un nom que l’on n’arrive pas à lire.
Dans la loge du gardien, une vieille Tatare est assise près d’un poêle en fer, elle est coiffée d’un fichu en mainte tricotée qui lui descend sur le front et emmitouflée dans un châle. Elle découpe avec un petit couteau des tranches de viande séchée qu’elle mâchonne de sa bouche édentée. Son regard est concentré et absent.
Rudolf Ivanovitch Mayer se trouve dans un local confiné. Il est vêtu d’une combinaison de protection et porte un masque. On ne voit pas son visage. Il a des gants. À l’aide d’une longue aiguille, il répartit une culture bactérienne dans des boîtes de Petri. La flamme d’un petit réchaud à alcool frémit à chacun de ses gestes. Des gestes harmonieux, magiques.
Sur la table, devant la gardienne, le téléphone sonne longuement, avec insistance. Elle ne décroche pas tout de suite.
– Ce shaïtan, et ça crie, et ça braille…, bougonne la vieille.
Le téléphone ne se calme pas. Elle décroche.
– Labratoire ! On est en pleine nuit ! Qu’est-ce que t’as à gueuler comme ça ? Y a personne… Non, je peux pas écrire… Oui, Mayer est là ! Attends. Attends, je te dis !
La vieille femme va au bout du couloir, elle frappe à la porte du fond et crie :
– Mayer ! Téléphone ! On t’appelle de Moscou ! Faut que tu viennes !
Elle tire sur la porte, mais c’est fermé à clé. Elle recommence à frapper et à crier.
– Mayer ! Viens répondre ! Y a un chef furieux qui te demande !
Dans le local, Mayer a reposé l’aiguille, il reste immobile. Les coups frappés à la porte l’agacent.
– J’arrive, j’arrive !
Sa voix est assourdie par le masque. Celui-ci a légèrement plissé, le joint d’étanchéité de la mentonnière s’est détaché.
La vieille femme l’a entendu, elle retourne au téléphone et hurle dans l’écouteur :
– Attends un peu, je t’ai dit… !
Dans le sas de décontamination, Mayer enlève ses gants, son masque, sa combinaison, il essuie quelque chose et court enfin vers le téléphone.
– Excusez-moi, j’étais dans un local confiné… Oui, je fais des expériences la nuit… Je ne suis pas prêt, Vsévolod Alexandrovitch… Oui, oui, en principe… Parfaitement sûr. Mais j’ai encore besoin d’un mois et demi, deux mois. Oui, un mois et demi… Je ne suis pas prêt à faire un exposé… Bon, si vous présentez les choses comme ça… Mais j’estime qu’il est encore trop tôt pour un exposé. Je décline toute responsabilité… Oui, oui. Au revoir.
Il raccroche, furieux. La vieille le regarde avec attention.
– Il me crie dessus, il te crie dessus ! C’est un vrai shaïtan, ce chef fâché. Tiens, mange !
Elle lui tend un morceau de viande séchée au bout de son couteau. Mayer secoue la tête en signe de refus.
– Non, merci, Galia, dit-il en prenant machinalement le morceau.
Il mâche.
– Va dormir ! Rentre chez toi ! Pourquoi tu restes là ?
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Je voulais souligner l’idée que la peste n’est pas le pire des fléaux pour l’humanité, car les épidémies sont des processus naturels qui ne touchent pas seulement les êtres humains, mais également les animaux. Tandis que les épidémies de terreur que l’on observe de temps à autre dans les communautés humaines, elles, sont des créations de l’homme, et la nature ne prend aucune part à ces calamités.
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Cher camarade Staline !
Quand cette lettre vous parviendra, je ne serai plus de ce monde - je vais mourir de la peste, comme est mort il y a un instant un médecin de Saratov que j'ai isolé et dont je me suis occupé jusqu'au dernier moment. J'espère que cette épidémie sera stoppée et, si c'est le cas, je considérerai que j'ai donné ma vie pour le peuple soviétique . Ma position de condamné à mort me confère le droit, me semble-t-il, de vous adresser une demande personnelle. En juillet 1937, on a arrêté mon frère aîné, Sémyone Matveïevitch Sorine, directeur du chantier de construction d'une mine de charbon du bassin minier de Toula. Sa vie entière et son passé irréprochable de révolutionnaire sont tels qu'ils excluent les accusations qu'on a portées contre lui au moment de son arrestation. Je vous demande de vous pencher personnellement sur le dossier de mon frère.
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—- Vous savez, je suis microbiologiste, j’ai bien peur que l’objet de mes études ne soit soumis à d’autres lois.
—- Mais nous sommes tous soumis à la même loi, la loi marxiste-leniniste !
—- Cela ne fait pas le moindre doute ! acquiesce Rudolf avec sérieux. Seulement mes microbes, eux, ne sont pas au courant.
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Le monde change de façon imprévisible, et on voudrait espérer que cette nouvelle épreuve à laquelle est confrontée l'humanité ne va pas nous rendre plus fermés et plus égoïstes mais, au contraire, va nous faire prendre conscience que, dans ce monde qui ne fait désormais plus qu'un, s'il y a beaucoup trop d'agressivité, de haine et de cruauté, il n'y a en revanche pas assez de compassion et d'amour.
Et cela dépend de nous.
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Vidéo de Ludmila Oulitskaïa
Eurasieexpress Réflexion à haute voix : "La Lecture est un exploit", aux Journées du Livre russe à la Mairie du Vème arrondissement de Paris le 9 février 2020. Cette réflexion constitue une partie du prochain livre d'Oulitskaia, à paraître cette année.
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