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EAN : 9782226238368
208 pages
Albin Michel (04/01/2012)
3.4/5   46 notes
Résumé :
Dans une zone du Grand Nord ignorée des cartes, d'anciens ouvriers oubliés de tous se sont regroupés en communautés hostiles. Seuls Kolya, un sculpteur d'ivoire descendant des Lapons, et Lyouba, la seule jeune femme à y être née, savent écouter les saisons, les hivers terribles et les printemps flamboyants, passer les frontières, déjouer la vigilance de gardiens invisibles pour s'aventurer à leurs risques et périls hors de ce lieu interdit.
Dans un style tou... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (15) Voir plus Ajouter une critique
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Bienvenue dans la Zone, une région vitrifiée de pollutions et de fjords poubelles, un territoire fermé de friches industrielles qui pourrait être les bords de la Mer de Barentz post-soviétique. On y croise des bagnards d'un nouveau genre, reliquat de population salariée restée piégée quand ce bout de péninsule fut déclarée interdit car mortellement contaminé.

Dans ce grand goulag glacial à ciel ouvert, quelques reclus survivent, en communautés diverses ou en solitaire comme Kolya, le grand lapon sculpteur d'ivoire, ou Lyouba, l'orpheline, dernière-née de l'avant chaos.

Je découvre un auteur dont l'écriture m'a charmée par la capacité à peindre ces paysages de toundra. Une plume évocatrice et légère, sans artifice pour décrire les hommes dans la solitude, le silence, le froid, la peur. La nature est omniprésente entre beauté naturelle de la terre de Laponie et misères de civilisations anéanties.

Le monde de ruines industrielles imaginé par Franck Pavloff est d'un réalisme factuel, âpre, digne du cinéma soviétique aux ambiances laides et taiseuses. Cette fiction rejoint les univers littéraires de Makine ou Choplin, avec les mêmes mélancolie et poésie.

Dépaysement garanti et crédibilité effrayante pour qui connait la mentalité russe.
Belle découverte d'un auteur.
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Beau et fort comme la toundra, lorsque, lors du dégel, "tout explose en couleurs, les roues boréales aux baies oranges tapissent les revers des talus"".
Emouvant comme une étincelle de survie qui s'envole au delà de la débâcle de "l'utopie bolchévique", celle de l'industrie nordique fouillant les sous sols puis laissant derrière elle des déchets irradiés et des zones à haut risque.
C'est dans une prose poétique légère et imagée, sur fond de croyances lapones, de légendes et de superstitions, que Franck Pavlov (romancier dont Grands exils a reçu le prix littéraire des grands espaces 2010) fait bruisser sa plume, une plume aussi légère qu'un flocon de neige sur le silence de l'Arctique, aussi douce qu'une larme sur la solitude d'une femme mutique, mais une plume vive qui égratigne et assassine l'inconscience et l'abjection humaine.
Dans la "communauté de Vérodvinsk", ancienne zone de mine encerclée de barbelés les hommes vivent en reclus, tels des "déportés" enfermés dans un goulag. Une étrange épidémie sévit porteuse de mort, de stérilité et d'angoisse.
Lyouba, orpheline au regard vert, mais à la pelisse de loup, jeune parmi des faces ridées, sacrifiée sur l'autel des aberrations, des vénérations empreintes de turpitude et de la haine humaine, au départ soumise a des envies d'évasion.
Kolya, L'homme à la carrure d'ours au "visage buriné par le gel", sage Lapon initié à "la médecine des ancêtres", à "la force magique des mots", à la sculpture de l'ivoire offerte aux forces de la Terre, saura-t-il lui donner l'assurance pour franchir les cercles interdits, ceux de la fuite et du non retour, ceux de "l'étranger" rencontré, ceux qui mènent à la liberté?
Plus qu'un simple roman d'aventure,L'homme à la carrure d'ours, dénonce les désastres écologiques qui se propagent à bas bruit et leurs conséquences (comment ne pas penser à Tchernobyl ou Fukushima?) et propose un voyage de découverte. Ce livre m'a également touchée de par son allégorie.
Ne faut-il pas couper les chaines qui entravent et oser pour retrouver sa propre liberté intérieure? Que d'énergie et de courage à déployer !
Un grand bravo à Franck Pavlov auquel je souhaite un nouveau prix largement mérité !
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Trois jours pour lire ce petit roman métaphorique, trois jours assez inégaux, le début m'a interloquée, je ne m'attendais pas à ce style très poétique, presque un peu lourd, mais je me suis accrochée et j'ai bien fait. Déjà c'est beau et puis le texte prend de la hauteur et les personnages s'affirment. On entre par la petite porte et on sort par la grande. On en voudrait presque encore un peu !
Pour l'histoire : en abandonnant l'exploitation minière d'un filon du grand Nord, les Russes ont enterré leurs déchets nucléaires et, accessoirement, qqls humains au fond des excavations. Ensuite," la zone" fut interdite. Ceux qui y vivaient, les travailleurs, les peuples lapons, les femmes sont devenus des reclus, irradiés et stériles, effrayés par le monde extérieur, surveillés (du moins le pensent-ils) par des gardiens invisibles et, surtout, enfermés dans leurs systèmes de pensée, leurs dogmes, leurs frayeurs, leurs doutes ... A tel point qu'ils n'hésitent pas à sacrifier ceux qui tentent de fuir, les dissidents, les courageux et la jeune Lyouba (unique femme en âge de procréer) pour l'avenir de leur sinistre communauté. Heureusement, Lyouba a un ami, Kolya, ancien lapon portant le deuil de son fils enfoui dans les mines. Kolya franchit régulièrement les limites de "la zone" pour fouiller la banquise, chasser ou respirer plus librement. Alors Lyouba va le suivre et se libérer de ses propres chaines.
Pour la métaphore : Pavlof est un spécialiste des histoires courtes qui agissent sur les esprits. Dixit Matin Brun. Ici, outre le scandale des goulags nucléaires, on se demande où se situent les barrières et les gardiens invisibles des reclus, de chacun... Oui on a peur de l'inconnu. "Comme tout le monde", ainsi l'affirme Vieras, mais la véritable barrière, le véritable gardien n'est peut-être rien d'autre que cette trouille.
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Dans une zone contaminée du Grand Nord survivent des êtres rongés par un mal étrange, des reclus contaminés par des radiations, Lapons, Ukrainiens, Russes, parqués sur un territoire hostile et stérile aux frontières surveillées par des gardiens armés.
Lyouba représente l'espoir, la seule jeunesse de ce camp, muette depuis le jour de ses dix-huit ans lorsque sa mère adoptive et le pope décidèrent de l'offrir aux hommes du territoire pour faire renaître la vie dans ces lieux maudits. Elle résiste et décide de garder sa liberté en franchissant chaque jour les limites interdites. Kolya, le colosse à la carrure d'ours qui a perdu son enfant dans l'explosion de la mine la protège. Ils sont les seuls êtres à défier les Autorités et à braver la peur qui emprisonne le coeur haineux des hommes. Un texte onirique qui rend hommage à ces contrées de givre, illuminées par les aurores boréales, ravagées par l'inconscience et la bêtise humaine.
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Dans une zone à la limite de la Laponie et de la Russie des gens sont piégés. Depuis plus de vingt ans cette zone est interdite irradiée. Loubya et Kolya font partie de ces gens qui s'observent, vivent en communauté, survivent et sont prisonniers. Loubya vit avec Misha qui, le jour de ses dix-huit ans l'a offerte aux hommes de la communauté pour la féconder. Mais rien ne vient, hormis une haine farouche. Seul Kolya qui lui apprend les traditions lapones pourra l'aider à s'en sortir. Un roman magnifique, un conte aussi, une histoire sur la terre et l'appartenance de l'homme à cette terre.
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critiques presse (2)
LeMonde
03 février 2012
L'Homme à la carrure d'ours est une ode à l'instinct de vie, un cantique habité dont le souffle balaie un monde stérilisé par la peur d'hommes au coeur racorni.
Lire la critique sur le site : LeMonde
LeSoir
23 janvier 2012
L'homme à la carrure d'ours est un roman prenant, plein d'émotions qui ne sont pas dites mais montrées, vécues. Il accompagne le lecteur et résonne longtemps en lui.
Lire la critique sur le site : LeSoir
Citations et extraits (15) Voir plus Ajouter une citation
Derrière leur posture agressive, leur air menaçant, elle devine trente années de renoncements, une éternité de douleur. Le plus âgé, Igor, boiseur qui n'a connu avant de s'engager au Trust que la banlieue de Leningrad, hausse son cou décharné comme s'il essayait d'échapper à l'enlisement progressif des marais. Mikhaïl ne se défait plus d'un rictus qui marque sa neurasthénie. Gry, le seul Norvégien de la communauté, ancien cadre dans les bureaux du Trust,reste à la regarder, front rayé de mille rides, bras ballants, désemparé par tant d'assurance. Lyouba voit la tristesse dans les yeux de Bogdan qui n'a qu'un lointain souvenir de sa femme et de ses enfants, et qui la nuit se redresse encore sur sa couchette en hurlant leurs noms, l'abattement de Viktor et de Yegor, lampistes qui s'apprêtaient à retourner dans leur ville de Tula, à l'Ouest de Moscou, et se sont retrouvés déportés dans un camp arctique dont les cartes ignorent l'existence, Sacha qui mieux que personne décelait l'odeur de grisou et se sait à présent atteint du mal. Ils ont endossé au fil des années les uniformes rayés des prisonniers d'un goulag dont les limites floues les ont piégés plus sûrement que s'ils avaient dû affronter l'épaisseur d'une muraille. D'hommes jeunes, ils sont devenus vieux reclus. Sans bruit, insidieusement. Rien de plus qu'un arrangement avec le quotidien, une once de renoncement après l'autre. Leur pas s'est alourdi, plombé, jusqu'à les empêcher de sauter par-dessus ne serait-ce qu'une simple frontière de craie rouge symbolique que l'on tracerait sur un sol de glace.
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Elle laisse dériver ses pensées, pourquoi ce changement radical ? Elles luttaient ensemble,se soutenaient, les hivers étaient si longs que parfois il ne leur restait que la laîche des matelas à brûler dans le poêle. Elle se rappelle que par un mois de février où le givre obturait l'intérieur des carreaux, elles se sont risquées jusqu'au Comptoir. Pendant que Misha négociait une croix de baptême en cuivre contre des bougies, elle avait volé trois briquettes de tourbe dans la réserve, et elles en avaient ri. La vie dure était ponctuée de moments de complicité, de tendresse parfois. Pour Noël, elles garnissaient de baies une tourte saupoudrée de baies de pavot qu'elles savouraient, bien installées l'une en face de l'autre, à toucher le poêle. pourquoi est-elle devenue une vieille femme lâche qui ne refuse rien au pope, même quand il exige qu'on ouvre sa couche aux hommes ? Une adulte doit protéger sa fille. Mais elle n'est pas sa fille.
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Il y a quelques semaines à peine, pour s'évader elle se créait des tremplins infimes - va-et-vient de la râpe de Kolya à l'établi, tache claire en forme d'oiseau sur la cloison de sa chambre, empreinte des bottes rouges dans la neige - et plongeait en secret au coeur d'un monde aux failles si ténues, qu'aucun homme ne pouvait l'atteindre. L'ailleurs était en elle. Mais depuis la nuit extrême où elle a franchi les frontières de la Zone, mit sa vie en jeu au jardin d'enfants, c'est l'ailleurs qui s'est avancé en elle. Ses pensées osent des mots nouveaux qui affleurent au bord de ses lèvres. Elle reprend : "Qu'y a-t-ilderrière l'horizon, une autre mer de glace, un désert de feu, des villes, des femmes, des enfants , Qui le sait ?
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Il faut avoir l'âme orgueilleuse ou blessée pour s'en aller retourner avec une pelle un lopin de terre aussi dur que du béton. Il faut croire à la vertu du geste simple face à la fureur du monde, être dépositaire de l'espérance de l'instant pour s'en aller jour après jour bêcher un ersatz de jardin où des lupins arctiques et des pavots annonceront le renouveau des saisons.
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L'énergie a changé de camp, elle ressent des vibrations qu'il ne capte plus. Il pourrait en profiter pour mettre ses pas fatigués dans les siens, l'accompagner dans son désir d'aller plus loin, mais comment envisager une vie ailleurs sans trahir celui qui l'attend à l'enclos ? Il ne peut renier les appels de son enfant. Ni le territoire de ses ancêtres. Il vit pour eux, il ne partira jamais.
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