Arezou la quarantaine, divorcée élève sa fille adolescente. Vivant à Téhéran, elle fait partie de ces femmes qui assument leur vie, elle a repris l'agence immobilière familiale, à la mort de son père.
Sa mère est une femme exigeante, vivant dans un monde où tous les caprices peuvent être satisfaits. Et elle comble sa petite-fille comme si l'argent tombait du ciel.
Ecartelée entre ces deux femmes, Arezou jongle avec un emploi du temps chargé où il y a peu de place pour elle. Heureusement elle peut compter sur sa meilleure amie, Shirine qui n'est pas avare de conseils.
« —Tu es comme une pile sur laquelle on tire tout le temps sans jamais la recharger. Tu dois penser un peu à toi. »
Elle va rencontrer Arezou sera-t-il le chargeur ?
Zoyâ Pirzâd, sans grandiloquence mais avec poésie et humour met en scène le quotidien. Elle fait réfléchir sans développer de théorie sur les choix que les femmes sont amenées à faire.
Une vie sous différents angles de prise de vues qui bout à bout révèle la vie d'une femme qui va de l‘avant avec détermination dans cette société iranienne.
Sans effets spéciaux avec des fondus qui laissent au lecteur le loisir d'imaginer.
Une plongée dans une civilisation en mouvement sous le prisme de trois générations de femmes.
La mère vit dans un monde doré, a-t-elle conscience que son mari est mort couvert de dettes et que sans sa fille Arezou qui a laissé sa vie pour reprendre l'agence familière et travailler à redresser la situation, elle serait en difficultés. Elle n'a de cesse de rabaisser sa fille avec une astuce assez particulière, lorsqu'elles parlent ensemble la mère met sa fille au même palier d'âge, coupant ainsi toutes velléités de lui accorder une vie de femme indépendante, la quarantaine séduisante.
Arezou est attentionnée, très active, et patiente. La fille se comporte en adolescente gâtée pourrie, mais finalement cela cache une angoisse.
Cette femme va en permanence essayer de combler les deux.
Elle a le sens des réalités mais encore plus avec sa rencontre avec Zardjou, qui lui a abandonné une vie qui aurait pu être plus facile, pour vivre dans un quartier assez populaire. Lui aussi est attentionné et à l'écoute des autres.
Les dialogues nombreux sont savoureux, justes et impriment un rythme particulier à l'histoire, celui du quotidien, celui des petits riens qui constituent la vie.
En arrière-plan la société est là, on y rencontre dans les lieux publics la police des moeurs qui veilles aux bons usages. Les transports en commun qui a sa section des femmes…
L'auteur nous montre par le quotidien la confrontation entre la tradition et la modernité en dressant de beaux portraits de femmes.
C'est un ressenti que peut éprouver le lecteur en suivant les protagonistes, il les voit, les écoutes, marchent avec eux dans les rues, assistent aux réunions de famille, aux fêtes comme s'il était lui aussi avec eux.
C'est une façon très agréable d'appréhender un pays.
Les livres de
Zoyâ Pirzâd sont nourris de ce qu'elle voit, elle n'impose aucun jugement, elle montre. C'est peut-être ce qui déroute certains lecteurs.
L'écriture est fine, les dialogues justes, le texte est maîtrisé aucune envie de faire divaguer le lecteur, au contraire elle va à l'essentiel, en montrant comment ces petits riens sont importants, comme les fondations d'une vie, d'un bonheur.
©Chantal Lafon-Litteratum Amor 3 mai 2020.