Les auteurs des belles-lettres suivaient la hiérarchie des genres inspirée d'
Aristote ; ceux de la littérature s'inspirent de l'égalité des sources, des matériaux et des formes sous l'influence de la nouvelle forme politique qui se met en place à la fin du XVIIIème siècle, la démocratie. La notion de littérature ne peut donc se penser sans celle de démocratie. La littérature a choisi la démocratisation des sujets et des mots, non pour coller à la réalité, mais pour extraire la saveur de l'époque, écrire avec subtilité et distance le prosaïsme du quotidien - ce faisant, par son intérêt hétéroclite pour la réalité et non seulement axé sur la noblesse des sujets et des situations plébiscitée par les Belles Lettres, la littérature a engagé une nouvelle
poétique qui redéfinit la forme de la réalité. le paradoxe est que la littérature ne puisse rechigner à décrire le prosaïsme de la réalité sans sacrifier à ses exigences esthétiques supérieures, qu'elle utilise les matériaux existants, les schémas du passé pour engager des modalités d'écriture nouvelles. Faire du neuf avec du vieux. Là est tout l'enjeu de la littérature et ce qui l'anime : perpétuellement se réévaluer et retrouver son équilibre entre la banalité de ses matériaux et son ambition élitiste.