AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9791030701234
Au Diable Vauvert (30/03/2017)
3.64/5   21 notes
Résumé :
Très tôt, Jehan-Rictus décide de transformer la langue comme le feront les rappeurs. Il transforme la langue de la rue en poésie. Son verbe gouailleur et argotique, réglé sur la parole de ceux qui n’ont pas la parole, ses poèmes au phrasé expressif clament et protestent les misères du peuple pauvre. Et la puissance de ses mots lui vaut de demeurer, encore aujourd’hui, le premier chantre des victimes, des exclus et des marginaux.
Cette œuvre sauvagement humai... >Voir plus
Que lire après Les soliloques du pauvreVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Les mots d'la rue ! La poésie d'la misère ! le tout emporté par la mélodie d'l'argot.
Des cris ! de rage, de rancune, de lassitude ! Des rêves ! de justice, d'envie et d'amitié !
Les soliloques se lisent à voix haute, se déclament, se hurlent et s'étranglent dans votre gorge tant ils sont beaux !
Je me souviens de mon père qui lisait ce livre et des larmes qui coulaient sur ses joues. Je lui demandais toujours pourquoi il pleurait, inquiétude enfantine d'une tristesse. Et je me souviens de sa reponse, toujours la même: Parce que c'est beau. Alors il me lisait des passages et sa voix s'étranglait tandis qu'il récitait des mots que je ne comprenais pas mais dont la musique m'amusait.
Plus grande, je suis tombée sur une réedition de cet ouvrage et c'était comme avoir trouvé un trésor, alors je m'en suis emparée. Et j'ai pleuré à mon tour. Parce que les mots de la rue sont puissants, bouleversants et d'un sincérité pure.
Il faut croire que le rappeur Vîrus a été tout autant bouleversé que ma famille puisqu'il a eu la merveilleuse idée de mettre en musique ces textes et qu'il la fait de façon magistrale. Vîrus est un artiste à part sur la scène musicale, commençons par là. Son amour des mots prend encore plus d'ampleur avec ceux de Jehan-Rictus. Sa colère et sa rage ne semblent faire plus qu'un avec celles du poète. Parce que oui, même si tout est violent il s'agit bien ici de poésie.
L'objet: livret CD pochette est un poème également. La voix de Jean-Claude Dreyfus est parfaitement posée et il ne nous reste plus qu'à nous, d'entendre et de faire ce qu'on peut avec la vie après cette découverte.
Commenter  J’apprécie          40
Vîrus, un rappeur surprenant aux textes nettement différents de la masse populaire du rap actuel, reprend la poésie de Rictus, la présentant grâce à deux supports : un livre et un CD.

Les mots arrachés, l'argot craché, ce sont des textes crus et sans détours qui chantent la solitude et le néant du pauvre. Originellement publié en 1897, le texte trouve aujourd'hui encore énormément de résonance. Vîrus surprend en adaptant ces « poëmes » de Rictus, affirmant son style et son penchant littéraire. Il donne écho aux Soliloques dans le rap, une musique originellement issues de la rue, qui semble ici la forme la plus convaincante.

Ce recueil n'est pas agréable à lire, oh non. Les thématiques et les termes employés restent violents et il ne s'agit pas d'une poésie de plaisir, mais de crasse, de cynisme, de solitude et de douleur. Comme je côtoie de nombreux SDFs, j'ai trouvé que ces poèmes avaient encore aujourd'hui une valeur importante, que Vîrus met au goût du jour. Bien que la forme diffère, il y a dans les propos, libre de tout code, une vulgaire légèreté - celle des marginaux.
Commenter  J’apprécie          40
Qui se souvient aujourd'hui de Jehan Rictus (1867-1933) ? pas grand monde, je crois, même si un rappeur nommé Virus a repris récemment les textes de cet auteur, poète de la rue, poète des pauvres et des opprimés, poète de la révolte. Il s'exprime comme les gens du peuple de son époque, dans une langue vigoureuse et surannée ("Les soliloques du pauvre" datent de 1897). Dans ces vers manifestement sincères, on sent bien la rage des oubliés de la société.
Commenter  J’apprécie          50

Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
Si qu’y r’viendrait ! Si qu’y r’viendrait,
L’Homm’ Bleu qui marchait su’ la mer
Et qu’était la Foi en balade :

Lui qui pour tous les malheureux
Avait putôt sous l’ téton gauche
En façon d’ cœur... un Douloureux.
(Preuv’ qui guérissait les malades
Rien qu’à les voir dans l’ blanc des yeux,
C’ qui rendait les méd’cins furieux.)

L’ gas qu’en a fait du joli
Et qui pour les muffs de son temps
N’tait pas toujours des pus polis !

Car y disait à ses Apôtres :
— Aimez-vous ben les uns les autres,
Faut tous êt’ copains su’ la Terre,
Faudrait voir à c’ qu’y gn’ait pus d’ guerres
Et voir à n’ pus s’ buter dans l’ nez,
Autrement vous s’rez tous damnés.

L’ mec qu’était gobé par les femmes
(Au point qu’ c’en était scandaleux),
L’Homme aux beaux yeux, l’Homme aux beaux rêves
Eul’ l’ charpentier toujours en grève,
L’artiss’, le meneur, l’anarcho,

Si qu’y r’viendrait ! Si qu’y r’viendrait,
Le revenant
Commenter  J’apprécie          142
« C’ qui va s’en évader des larmes !
C’ qui va en couler d’ la pitié !
Plaind’ les Pauvr’s c’est comm’ vendr’ ses charmes
C’est un vrai commerce, un méquier !

(…)

Et faut ben qu’ ceux d’ la Politique
Y s’ gagn’nt eun’ popularité !
Or, pour ça, l’ moyen l’ pus pratique
C’est d’ chialer su’ la Pauvreté. »
Commenter  J’apprécie          260
L’Hiver

Merd’ ! V’là l’Hiver et ses dur’tés,
V’là l’ moment de n’ pus s’ mettre à poils :
V’là qu’ ceuss’ qui tienn’nt la queue d’ la poêle
Dans l’ Midi vont s’ carapater !

V’là l’ temps ousque jusqu’en Hanovre
Et d’ Gibraltar au cap Gris-Nez,
Les Borgeois, l’ soir, vont plaind’ les Pauvres
Au coin du feu... après dîner !

Et v’là l’ temps ousque dans la Presse,
Entre un ou deux lanc’ments d’ putains,
On va r’découvrir la Détresse,
La Purée et les Purotains !

Les jornaux, mêm’ ceuss’ qu’a d’ la guigne,
À côté d’artiqu’s festoyants
Vont êt’ pleins d’appels larmoyants,
Pleins d’ sanglots... à trois sous la ligne !

Merd’, v’là l’Hiver, l’Emp’reur de Chine
S’ fait flauper par les Japonais !
Merd’ ! v’là l’Hiver ! Maam’ Sév’rine
Va rouvrir tous ses robinets !

C’ qui va s’en évader des larmes !
C’ qui va en couler d’ la piquié !
Plaind’ les Pauvr’s c’est comm’ vendr’ ses charmes
C’est un vrai commerce, un méquier !

Ah ! c’est qu’on est pas muff en France,
On n’ s’occupe que des malheureux ;
Et dzimm et boum ! la Bienfaisance
Bat l’ tambour su’ les Ventres creux !

L’Hiver, les murs sont pleins d’affiches
Pour Fêt’s et Bals de charité,
Car pour nous s’courir, eul’ mond’ riche
Faut qu’y gambille à not’ santé !

Sûr que c’est grâce à la Misère
Qu’on rigol’ pendant la saison ;
Dam’ ! Faut qu’y viv’nt les rastaqoères
Et faut ben qu’y r’dor’nt leurs blasons !

Et faut ben qu’ ceux d’ la Politique
Y s’ gagn’nt eun’ popularité !
Or, pour ça, l’ moyen l’ pus pratique
C’est d’ chialer su’ la Pauvreté.

(...)
Commenter  J’apprécie          30
Le revenant


XVI

Notre dab qu’on dit aux cieux,

(C’est y qu’on n’pourrait pas s’entendre !)

Notre daron qui êt’s si loin
Si aveug’, si sourd et si vieux,
(C’est y qu’on n’pourrait pas s’entendre !)

Que Notre effort soit sanctifié,
Que Notre Règne arrive
À Nous les Pauvr’s d’pis si longtemps,

(C’est y qu’on n’pourrait pas s’entendre !)

Su’ la Terre où nous souffrons
Où l’on nous a crucifiés
Ben pus longtemps que vot’ pauv’ fieu
Qu’a d’jà voulu nous dessaler.

(C’est y qu’on n’pourrait pas s’entendre !)

Que Notre volonté soit faite
Car on vourait le Monde en fête,
D’ la vraie Justice et d’ la Bonté,

(C’est y qu’on n’pourrait pas s’entendre !)

Donnez-nous tous les jours l’ brich’ton régulier
(Autrement nous tâch’rons d’ le prendre) ;
Fait’s qu’un gas qui meurt de misère
Soye pus qu’un cas très singulier.

(C’est y qu’on n’pourrait pas s’entendre !)

Donnez-nous l’poil et la fierté
Et l’estomac de nous défendre,

(Des fois qu’on pourrait pas s’entendre !)

Pardonnez-nous les offenses
Que l’on nous fait et qu’on laiss’ faire
Et ne nous laissez pas succomber à la tentation
De nous endormir dans la misère
Et délivrez-nous de la douleur
(Ainsi soit-il !)
Commenter  J’apprécie          30
"- Avez-vous vu ce misérable,
Cet individu équivoque ?
Ce pouilleux, ce voleur en loques
Qui nous r'gardait manger à table?

Ma parole on n'est plus chez soi,
On n'peut pus digèrer tranquille...
Nous payons l'impôt, gn'a des lois!
Qu'est- c' qu'y font donc les sergents d'ville?"
Commenter  J’apprécie          100

Video de Jehan Rictus (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Jehan Rictus
L’émission « Histoires possibles et impossible », par Robert Arnaut, diffusée le 16 juin 2002. Invité : Philippe Oriol, biographe du poète.
autres livres classés : poésieVoir plus
Les plus populaires : Littérature française Voir plus


Lecteurs (45) Voir plus



Quiz Voir plus

Testez vos connaissances en poésie ! (niveau difficile)

Dans quelle ville Verlaine tira-t-il sur Rimbaud, le blessant légèrement au poignet ?

Paris
Marseille
Bruxelles
Londres

10 questions
1220 lecteurs ont répondu
Thèmes : poésie , poèmes , poètesCréer un quiz sur ce livre

{* *}