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Ce roman est resté si longtemps dans ma PAL qu'il avait fini par s'intégrer à ses fondations. C'est le confinement seul qui m'a décidé à l'en extraire. Non que ma PAL se soit réduite à peau de chagrin au terme de ces semaines si étranges (j'ai de plus en plus l'angoissante certitude que ma PAL me survivra), mais je nourrissais un a priori négatif sur ce livre depuis que j'avais lu en quatrième de couverture qu'il avait autrefois inspiré un film de Michael Curtiz avec Errol Flynn dans le rôle-titre. Certes, j'ai été biberonné au cinéma hollywoodien de la grande époque, et la Dernière séance de M. Eddy restera pour toujours dans mon panthéon des rendez-vous immanquables à la télévision. Mais curieusement, il y avait à Hollywood des cinéastes que je supportais mal (Raoul Walsh, par exemple) et des acteurs qui prenaient un malin plaisir à m'agacer prodigieusement, Errol Flynn entre autres. Qu'est-ce que ça peut être bête, un a priori, tout de même. Car emporté par mon envie de grand air et d'aventures trépidantes, j'ai enfin ouvert ce roman dont je n'attendais pas grand chose, et j'y ai découvert une petite merveille de fraîcheur. C'est un récit de pirate à l'ancienne, flamboyant et plein de fougue. Ça bondit et ça virevolte sans temps morts, simplement avec ce qu'il faut d'exposition et d'épaisseur pour que les personnages soient réussis. La langue est classique, belle, généreuse, elle aurait même pu tolérer quelques imparfaits du subjonctif supplémentaires mais ne nous plaignons pas. Il y a bien une petite rupture de rythme vers le milieu, quand l'auteur a soudain l'idée de prouver la véracité de son histoire à son lecteur (qui ne lui demandait pourtant rien). On sent alors une légère hésitation dans la conduite du récit, comme un passage de braquet hasardeux à l'amorce d'une côte un peu raide. Mais la mécanique de l'aventure reprend bien vite le dessus et elle ne faiblira plus. L'histoire est éminemment prévisible, bien sûr, et on devine dès le début où veut nous emmener Sabatini. Et alors ? On a toujours su dès le début comment se terminaient les films hollywoodiens, et cela n'a jamais empêché personne de les savourer. le même charme opère ici. Les pages se tournent toutes seules, le temps s'évanouit, on n'est plus là. L'expérience m'a rappelé ma découverte enthousiaste des aventures du capitaine Hornblower, il y a bien longtemps. C'est en un mot un livre qui a la magie des souvenirs de gosse. Comment ne pas saluer en conclusion le travail de salubrité publique qu'ont toujours accompli les éditions Phébus en ressuscitant de tels textes ? Cette maison m'a apporté tant de bonnes surprises dans ma vie de lecteur que la simple vue d'une de leurs magnifiques couvertures dans une librairie me fait frétiller par anticipation. Et puis bien sûr, dernier point, je vais maintenant me mettre en quête du Scaramouche de Sabatini. Lui aussi fut adapté à Hollywood, avec Stewart Granger cette fois. Et voilà qui tombe très bien : Stewart Granger n'a jamais réussi à m'agacer. + Lire la suite |