Ismène la soeur oubliée, effacée
La soeur de
Antigone l'héroïne vénérée
Pas facile d'être la soeur de, la fille de, la femme de ...
Dans la mythologie grecque Ismène et Antigone nées de la relation incestueuse d'Oedipe et de Jocaste ont deux frères Etéocle et Polynice.
Cette famille, les Labdacides, est marquée par la malédiction des Dieux.
Dans cette Thèbes antique s'entre-tuent les frères.
Antigone victime d'une malédiction familiale incarne la révolte, transgresse la loi du roi Créon. Elle dit non à la loi de la cité, à la voix tendre de sa soeur.
Elle dit oui à sa morale, sa conscience, elle dit oui à la mort.
Ismène figure secondaire peu glorieuse, femme invisibilisée par l'histoire, jugée futile, lâche, égoïste et légère... Pourquoi ?
Parce qu'elle est belle, blonde, lumineuse, féminine ?
Parce qu'elle aime la vie et veut en jouir ?
Parce qu'elle est réceptive aux plaisirs les plus subtils, les sens en éveil ?
Parce qu'elle refuse de se sacrifier, de lier sa vie à un seul homme ?
Parce qu'elle préfère le chant, la danse à la violence ?
Antigone un caractère buté, symbolise l'héroïsme mortifère, le courage, la force morale ce qui contraste avec son physique faible "petite maigre" peu féminine, "androgyne".
Quand Ismène choisit la vie, Antigone ne veut que l'éternité dans la mort et ainsi laisser une trace.
L'une a peur de mourir, l'autre de vivre !
Qui est la plus lâche ?
Et bien moi j'ai aimé "la lâcheté" d'Ismène qui préfère convaincre plutôt que vaincre, qui ne place pas sa dignité dans le fait de mourir.
Elle aime la compagnie des hommes, leurs regards mais elle ne veut pas leur ressembler, réfute leur "soi-disant" courage placé dans leur virilité.
J'ai aimé cette nouvelle version d'Ismène, attentive aux autres.
Elle est la femme qui choisit son destin, refuse la soumission, le destin des Dieux :
Elle est d'un autre temps que le sien !
Elle perd son statut de princesse, découvre l'exil mais toujours se relève, ne renonce jamais et part vers de nouvelles promesses d'inconnu !
Elle est celle qui remet en cause les héroïnes sacrifiées pour l'honneur et la patrie. Elle parle de l'horreur des femmes violées, des enfants abandonnés, de la couleur de la peau, du sort des servantes ....
Elle préfère à toutes les déesses, Irène la fille de Zeus, déesse de la paix.
Car elle sait que la vie mérite d'être vécue !
J'ai aimé ce roman qui s'inscrit dans une philosophie féministe.
Michel Serfati en mettant Ismène dans la lumière, nous offre un magnifique portrait de femme libre et humaine qui chante quand les hommes crient !
Une lecture fluide sublimée par une écriture tout en poésie et douceur.
C'est l'histoire de celle qui a refusé d'être une héroïne.
Merci à Judith pour sa très belle critique : une découverte pour moi.