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EAN : 9782490251834
240 pages
Editions du Canoë (05/01/2024)
4.5/5   6 notes
Résumé :
Qui est Ismène ? Fille de Jocaste et de Œdipe, sœur d’Antigone, que savons-nous d’elle en dehors des illustres membres de sa famille ? Rien, sinon qu’elle n’existe que comme reflet du destin tragique de sa sœur.

Michel Serfati lui invente une vie après la mort d’Antigone, l’imagine quittant Thèbes avec sa servante Philarète, découvrant Athènes, rencontrant Sophocle à qui elle raconte le drame de sa famille les Labdacides, revenant à Thèbes pour assis... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Ismène la soeur oubliée, effacée
La soeur de
Antigone l'héroïne vénérée
Pas facile d'être la soeur de, la fille de, la femme de ...

Dans la mythologie grecque Ismène et Antigone nées de la relation incestueuse d'Oedipe et de Jocaste ont deux frères Etéocle et Polynice.
Cette famille, les Labdacides, est marquée par la malédiction des Dieux.
Dans cette Thèbes antique s'entre-tuent les frères.
Antigone victime d'une malédiction familiale incarne la révolte, transgresse la loi du roi Créon. Elle dit non à la loi de la cité, à la voix tendre de sa soeur.
Elle dit oui à sa morale, sa conscience, elle dit oui à la mort.

Ismène figure secondaire peu glorieuse, femme invisibilisée par l'histoire, jugée futile, lâche, égoïste et légère... Pourquoi ?
Parce qu'elle est belle, blonde, lumineuse, féminine ?
Parce qu'elle aime la vie et veut en jouir ?
Parce qu'elle est réceptive aux plaisirs les plus subtils, les sens en éveil ?
Parce qu'elle refuse de se sacrifier, de lier sa vie à un seul homme ?
Parce qu'elle préfère le chant, la danse à la violence ?

Antigone un caractère buté, symbolise l'héroïsme mortifère, le courage, la force morale ce qui contraste avec son physique faible "petite maigre" peu féminine, "androgyne".
Quand Ismène choisit la vie, Antigone ne veut que l'éternité dans la mort et ainsi laisser une trace.
L'une a peur de mourir, l'autre de vivre !
Qui est la plus lâche ?

Et bien moi j'ai aimé "la lâcheté" d'Ismène qui préfère convaincre plutôt que vaincre, qui ne place pas sa dignité dans le fait de mourir.
Elle aime la compagnie des hommes, leurs regards mais elle ne veut pas leur ressembler, réfute leur "soi-disant" courage placé dans leur virilité.
J'ai aimé cette nouvelle version d'Ismène, attentive aux autres.
Elle est la femme qui choisit son destin, refuse la soumission, le destin des Dieux :
Elle est d'un autre temps que le sien !
Elle perd son statut de princesse, découvre l'exil mais toujours se relève, ne renonce jamais et part vers de nouvelles promesses d'inconnu !
Elle est celle qui remet en cause les héroïnes sacrifiées pour l'honneur et la patrie. Elle parle de l'horreur des femmes violées, des enfants abandonnés, de la couleur de la peau, du sort des servantes ....
Elle préfère à toutes les déesses, Irène la fille de Zeus, déesse de la paix.
Car elle sait que la vie mérite d'être vécue !

J'ai aimé ce roman qui s'inscrit dans une philosophie féministe.
Michel Serfati en mettant Ismène dans la lumière, nous offre un magnifique portrait de femme libre et humaine qui chante quand les hommes crient !
Une lecture fluide sublimée par une écriture tout en poésie et douceur.
C'est l'histoire de celle qui a refusé d'être une héroïne.

Merci à Judith pour sa très belle critique : une découverte pour moi.


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Ismène, la véritable révoltée de l'histoire ?
Ismène, c'est la grande soeur de "la petite maigre qui est assise là-bas", c'est "la blonde, la belle, l'heureuse Ismène", telle que décrite par Jean Anouilh dans "Antigone". Ismène c'est la soeur d'Antigone, donc, celle qui aime danser, séduire, porter de belles robes, et qui refuse de suivre sa cadette dans sa détermination à ensevelir leur frère contre la volonté de leur oncle Créon. Celle qui, "lâchement", préfère la vie à la mort, et dont le rôle de potiche frivole et peureuse met en exergue le courage et la noblesse d'âme d'Antigone. Pas facile d'être une Ismène dans l'univers de la tragédie grecque.

D'où le pari audacieux de Michel Serfati de se saisir de ce personnage secondaire pour en faire une héroïne, en lui inventant une existence propre. L'auteur nous plonge alors dans l'histoire de cette fratrie maudite, issue de l'union incestueuse de Jocaste et Oedipe, et nous emporte dans la Grèce antique sur les traces d'une femme s'affranchissant des règles patriarcales.
Roman féministe -même si "féministe" devient un terme repoussoir- que cette vie imaginée d'un personnage mythologique (et ce faisant, l'auteur s'émancipe lui aussi des récits mythiques, et j'ai aimé cette double transgression). Ismène, la pleutre, la futile, prend ici son envol après la destruction de sa famille. Envers et contre toutes les figures exaltées de la tragédie grecque, elle refuse d'être une victime et ose choisir la vie, le désir, l'ouverture au monde ; elle veut aimer, être heureuse, vivre en paix selon ses aspirations et malgré les guerres incessantes, et ce qui fait d'elle un personnage méprisable dans l'Antiquité lui confère aujourd'hui un statut de modèle à suivre. J'ai aimé ce portrait de femme libre qui ne renonce jamais à être elle-même.
Cette surprenante histoire est portée par une écriture soignée, très classique ; j'avais l'impression de lire un roman intemporel, quoique très sensoriel. Et comme dans le précédent roman de Michel Serfati ("L'enfant de la colère"), j'ai encore été étonnée par l'habileté de l'auteur à s'immiscer avant tant de justesse dans la psychologie féminine (ou est-ce la démonstration que nous ne sommes finalement pas aussi compliquées que les hommes le prétendent ?). Enfin, j'ai aimé le caractère érudit de ce récit, et j'ai particulièrement apprécié la rencontre entre Ismène et Sophocle.

C'est donc une curieuse expérience que cette lecture, qui propose un dépaysement total et une belle réflexion sur la liberté d'être et de vivre comme on l'entend, tout en se basant sur un texte vieux de 2 500 ans.
Une belle prouesse littéraire, intellectuelle et poétique, un truc qui détonne et qui questionne ; j'en redemande.
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Je remercie Babelio et les éditions du Canoë pour m'avoir envoyé ce livre dans le cadre de l'opération Masse critique.
J'avais un peu peur d'ouvrir ce roman, je trouvais le dessin de couverture un peu facile pour suggérer la sexualité et l'épanouissement féminins. J'avais surtout peur qu'il ne soit pas à la hauteur d'Antigone, surtout l'Antigone d'Anouilh que j'ai beaucoup lue. Antigone la noiraude, Antigone la petite, Antigone la résistante qui se lève pour voir les lumières de l'aube et pour dire non.
Face à ce personnage mythique, Ismène apparaît comme la jolie fille superficielle, la "soeur de" qui n'a pas voulu désobéir et déranger sa vie, qui a pensé à elle d'abord au lieu de penser à ses devoirs. L'égoïste en somme face à tous les membres de sa famille qui sont des héros et des mythes, dont toute la vie a été façonnée, déterminée même par les dieux.
Ismène veut vivre, tout simplement, par tous ses sens. Être une femme vivante, qui ressent et qui est libre, et non un jouet du destin et des dieux. Elle veut pouvoir chanter, faire l'amour, sentir le soleil sur sa peau ou apprécier une baignade dans un lac. Cela pourrait être un simple "portrait de femme libre" pour utiliser une expression convenue pour décrire une héroïne qui se veut indépendante en utilisant un féminisme new age ; mais non, Ismène ne cherche pas à se venger des hommes, malgré leurs rôles dans ses souffrances, elle ne cherche pas à explorer une sexualité débridée. Elle trouve son bonheur vient de la caresse de l'herbe ou dans l'épuisement physique d'une marche dans le désert.
Michel Serfati réussit à toujours garder une écriture subtile, délicate et poétique, un hymne à la beauté et à l'art. Son écriture est évocatrice, nous peignant la Grèce du Vème siècle avant Jésus-Christ, lorsque les pièces de théâtre étaient des cérémonies dignes des dieux. L'art est celui de la parole, du chant, de l'artisan aussi. Seule la fin est peut-être un peu facile et rapide.
Une très belle lecture grâce à une très belle écriture, pour qu'Ismène ne soit plus seulement la "soeur de", plus un personnage mais l'actrice et l'autrice de sa propre vie.
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O Ismène que ton chant fut beau! Tu n'as pas choisi la révolte et la mort, tu as choisi la vie. C'est pourtant la mort qui t'accompagnera longtemps, cette malédiction qui tua ta mère, ton père, tes frères, ta soeur mais surtout ta chère Europe. Ta fuite cessa le jour ou tu refusas cette malédiction. de toi, il ne resta rien et je pense que cela te va très bien.
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Ce fut une belle et agréable surprise que de découvrir cet ouvrage grâce à la masse critique.
A travers ces pages, j'ai pu redécouvrir le mythe grec d'Oedipe par un autre point de vue.
Le style est très fluide, l'histoire très rapide à lire. On s'attache très vite à Ismène et on la suit avec plaisir tout au long de sa vie.Une fois les pages refermées, je n'ai eu qu'un envie : relire les grands classiques grecs et latins.
Un très beau roman !
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Citations et extraits (8) Voir plus Ajouter une citation
Pourquoi une telle gloire se propageait-elle dans toutes les cités hellènes ? Car enfin Antigone s’était élevée contre la raison de l’État, de tout État. Elle en avait renié l’autorité, insulté les règles du gouvernement. Par le talent de Sophocle, sa voix d’outre-tombe criait qu’il fallait résister au pouvoir des hommes, au droit des cités, pour n’obéir qu’à ce qu’on juge être une loi suprême dont on ne serait finalement comptable que devant les seuls Dieux, même si un jugement de roi pouvait condamner ! Pourquoi la richesse d’Athènes, et celle d’autres capitales, finançait-elle à grands frais la représentation d’un personnage qui sapait ainsi leurs fondements ? Pourquoi la Grèce vouait-elle un tel culte à la désobéissance, à la révolte, à l’insoumission que personnifiait Antigone ? Jusqu’à Thèbes même, où les successeurs de Créon avaient fait ériger une stèle luxueuse sur sa tombe ?
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Ismène s'imaginait mal attaquer l'eau avec la vigueur parfois enragée de ses frères, elle regrettait juste qu'une fille n'ayant pas droit à cette instruction ne puisse laisser aller son corps en liberté dans un bain de légèreté si voluptueux.
Pourquoi n'apprend-on pas à nager aux femmes ?
Phénarète éclata de rire.
Parce que les femmes ne sont pas des poissons.
Et les hommes si ? Parfois, ils se prennent même pour des oiseaux, et se brûlent les ailes.
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Ce n'est pas être infidèle à Polynice que de lui survivre, il n'aurait pas voulu ta mort. Mais tu n'entends rien, tu ne veux rien entendre de ce que je dis, peut-être parce que, comme les hommes, tu cries quand moi je murmure. Tu ne fais pas honneur à la vie. Seule l'éternité de la mort t'intéresse. Tu rêves d'éternité, et tu n'as trouvé que cela pour y parvenir, un prétexte. Que m'importe moi, d'être éternelle ? L'éternité est illusion, vivre, ce n'est ni hier ni demain, c'est être aujourd'hui. Laisse-toi vivre, laisse-toi aimer, laisse s'entrouvrir cette porte que tu as toujours maintenue close.
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Avec le recul du temps, cette histoire s’était colorée d’une lumière plus intense, presque aveuglante. Ismène prenait maintenant pleinement conscience de la trace indélébile qui persistait en elle, aujourd’hui elle pouvait nommer ce lien, oser reconnaître le mot « passion ». Oui ç’avait été un amour, le seul véritable amour qu’elle ait connu, la lucidité d’une maturité chèrement acquise le lui rappelait si tardivement.
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[Créon] - Pas plus qu'aux esclaves, la puissance de dire oui ou non ne revient aux femmes. La guerre pour les hommes, le lit pour les femmes, telle est la règle. Pandora ne peut diriger un État, tu le sais.
[Ismène] - Pandora, Pandora, vous n'avez que son nom à la bouche, quand ça vous arrange ! Et Myrthis, la poétesse, si peu chantée ici alors qu'elle est née sur ces terres ? Et Errina, et Sappho, et Théano la philosophe ? Et Callirrohé qui laissa de si belles peintures à Sicyone ? Et tant d'autres que tu oublies ... Quant à moi, simple mortelle née d'on ne sait où, je ne veux certes pas diriger la cité, je vous laisse à vos ambitions si détestables. Je ne veux que diriger ma vie et non celle d'autrui, dans ce que je puis du moins.
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