On the road avec Kerouac, c'est comme partir pour un périple déjanté, halluciné. Avec le livre des esquisses Kerouac se veut photographe sur papier.
Griffonnant les instantanés qui s'offrent à son regard, notant tout et rien, de l'insignifiant jusqu'au tragique, du burlesque au mélancolique, du beau à la laideur la plus indicible. Avec sa désinvolture légendaire, il caricature, enjolive, imagine des scènes souvent absurdes, mais aussi tendres, tranches de vie fleurant un réalisme parfois dure, adoucies par les jolies notes de la nostalgie.
Clichés après clichés, Kerouac noirci son petit carnet du visage de cette Amérique qu'il déteste en tant que société organisée, mais qu'il magnifie lorsqu'il retrouve les chemins mystiques des origines, ceux de la liberté et des peuples primitifs qui pour lui sont le symbole absolu de l'âme humaine et du sens profond de l'existence.
Car Kerouac qui abhorre la société capitaliste de consommation enchaînant les êtres avec les produits, le travail, le crédit, les dettes et le statut social se veut le chantre des peuples primaires avec leur liberté, leur simplicité, leur harmonie avec la nature et leur mystique insondable mais vraie.
Ce livre oscillant entre carnets de route, poésies de voyages et délire automatique nous plonge dans les tréfonds complexes de la pensée de Kerouac, philosophie zen aux rivages parsemés de turpitudes hallucinogènes, ou le Jam d'un jazz arrosé provoque un beat d'anthologie dans les corps offert à une bissexualité de circonstances au milieu des volutes de la weed s'égrenant dans les limbes d'une Amérique sauvage que le grand poète
Whitman aurait adoré.