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EAN : SIE361656_505
Le Livre de Poche (09/07/1971)
3.68/5   22 notes
Résumé :
En quoi consiste le bonheur ? Est-il à notre portée ? Dans Oncle Vania (1897), les personnages s'interrogent. Aux élans d'espoir et de joie succèdent l'abattement et la détresse. Le dégoût d'être laid, vieux, malade. L'ennui d'habiter en province, où jamais rien ne se passe ; de travailler comme un forcené, sans reconnaissance aucune. La douleur d'aimer sans retour. La fadeur de ne pas aimer. Ailleurs, à une autre époque, dans d'autres circonstances, peut-être, ils ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Ceux qui me connaissent un petit peu savent que j'aime, de temps à autres, me faire l'avocate soit du diable, soit des causes perdues. Et bien que j'aie déjà proposé un commentaire pour chacune des deux pièces qui composent cet ouvrage, j'aimerais amener votre attention sur cette édition en particulier.

Nous savons tous que les très vieilles éditions du « Livre de Poche » ont auprès de beaucoup une réputation de ringardise absolue, esthétiquement, surtout, mais aussi pour la piètre qualité du papier ou de la reliure, ou encore pour l'appareil critique inexistant, et cætera, et cætera, j'en passe comme vous pouvez vous le figurer. En somme, à l'heure du tout numérique, du high-tech, du flashy, du supersonique, ces vieux livres jaunis ne valent même pas le coup de talon qu'ils suscitent dans l'esprit de certaines et certains.

Nonobstant, au risque d'en surprendre quelques uns, j'ai une affection toute particulière pour ces mal-aimées chez les classiques de poche.

Premièrement, elles conservent totalement ce qui fit leur succès en leur temps, à savoir une extrême modicité de coût quasi imbattable sur le marché de l'occasion.

Deuxièmement, et on ne le souligne jamais (ou jamais assez), je constate que ces vieilles reliques du Livre de Poche n'ont à rougir devant personne quant au nombre des coquilles, surtout pas devant Folio ni même la pourtant fort prestigieuse Pléiade.

Troisièmement, et là encore on n'en fait guère de cas, je veux parler de la pertinence des choix éditoriaux, souvent copiés par la concurrence, mais dont tout le mérite devrait revenir en premier lieu à cette collection.

Ceci nous ramène à ces deux pièces de Tchékhov. En effet, quelle bonne idée de les proposer ensemble, ces deux-là, et non deux autres. Certes, on peut toujours plaider en faveur du hasard qui, pour le coup, aurait été heureux. On ne peut l'exclure, mais je n'en crois pas une lettre. Ces deux pièces ont évidemment des rapports multiples qu'il est très intéressant de mettre en miroir.

L'une comme l'autre ont pour cadre une grosse maison à la campagne où les personnes qui y résident se sentent perdus loin de la vie de la ville. Les deux ont comme dénominateur commun d'avoir pour héros des êtres ratés, frustrés, dont le potentiel se délite et n'aura jamais été reconnu à sa vraie valeur. Dans les deux, l'auteur témoigne de l'aspect fugace, fragile et dérisoire d'une seule existence humaine à l'échelle des temps.

Ces pièces sont aussi radicalement symétriques ou de forme inverse. Dans l'une, le personnage du médecin, cher à Tchékhov, est le seul à sembler être lucide, dans l'autre, c'est le plus égaré et le plus profondément altéré de tous.

Dans l'une, la femme qui est la pièce rapportée de la famille provoque l'explosion de l'assemblée, dans l'autre, cette même femme joue l'implosion par un travail de sape souterrain et maintenu pendant plusieurs années. Dans une pièce, le scientifique raté qui a épousé la femme-piège quitte le noyau familial avec son épouse, dans l'autre, c'est le noyau familial qui finalement quitte le couple du scientifique raté et de la femme-piège.

On pourrait multiplier de la sorte et pendant un bon moment les analogies et les dissemblances symétriques rigoureusement opposées, mais je pense que le constat est clair. C'était rudement bien vu, mesdames et messieurs les éditeurs de cette époque du « Livre de Poche », d'avoir choisi ce rapprochement-là, et je vous tire mon chapeau.

Mais ce chapeau, vous le savez, n'a sans doute pas beaucoup d'allure, il ne taille pas bien grand, car il n'épouse que mon avis, c'est-à-dire bien peu de chose…
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J'ai apprécié cette pièce dans laquelle, si on y retrouve l'oisiveté des personnages, cette oisiveté devient un motif existentiel, et même social. C'était du reste une pièce appréciée par Lénine...

J'ai bel et bien constaté une forte coloration sociale, car l'oisiveté et le comportement égotiste, aussi bien du savant Alexandre Serebriakov que de sa jeune et seconde épouse Elena, très belle mais très oisive, sont contrebalancés par l'activité et le sens du sacrifice d'Ivan Voinitzky (l'oncle Vania, beau-frère du professeur Serebriakov - frère de sa première épouse) et de sa nièce Sophia - ou Sonia - pour faire fructifier la grosse ferme et envoyer l'argent à Serebriakov, en en gardant bien peu pour eux.

D'un point de vue existentiel, il est un peu terrible de constater que les personnes bonnes, qui ont une certaine dose d'altruisme, sont en quelque sorte "perdues pour leur vie" : Vania est aigri par la conscience qu'il a acquise de la nullité de son beau-frère, et choqué par le peu de cas que celui-ci fait de leur vie à tous, en proposant de vendre la propriété. Il est, de plus, amoureux d'Elena, qui n'a guère de considération pour lui. Sonia est une jeune femme accomplie, intelligente, sensible et travailleuse, qui ferait une très bonne épouse pour celui qu'elle aime, Mikhaïl Astrov, qui a la quarantaine mais reste séduisant, et dont elle partage les valeurs et le bon sens - seulement ce dernier ne la voit pas, attiré qu'il est par la beauté d'Elena comme un papillon par la lumière.

Quant aux autres personnages, la mère de Vania, Maria Voinitzkaïa, ou encore Ilia Teleguine, il me semble qu'ils sont là pour fournir un contrepoint un peu comique, comme le feraient des valets de comédie, et leur attitude admirative envers Serebriakov fait ressortir par leur naïveté la lucidité grandissante de Vania. La vieille nourrice Marina représente plutôt la sagesse populaire, et intervient plus à point nommé, mais elle reste relativement effacée.

Bref, la vie n'est pas tendre pour les personnages de Tchekhov, et, d'un point de vue dramatique, la tension monte à mesure que Vania prend conscience du caractère mesquin et futile de ceux qu'il croyait ses bienfaiteurs. Il est vrai que, depuis qu'ils sont là, plus rien ne marche droit, les horaires sont décalés, et tout le monde par contagion devient paresseux...
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Sans être un expert de l'art dramatique et encore mois de théâtre classique (dont je ne suis pas particulièrement fan - d'où les 3 étoiles) je sais apprécier une oeuvre qui a marqué son temps et dont le sujet traité peut toujours être cité en exemple pour expliquer les relations humaines.
Que ce soit dans « Les trois soeurs » ou « Oncle Vania », ces 2 pièces de Anton Tchekhov mettent en scène un mal de vivre, porté par des personnages d'une couche sociale plutôt élevée, issues de la société russe (civile et militaire – pour « Les trois soeurs ») de la fin du 19ème siècle. Un mal de vivre attribué à la banalité du quotidien, selon Anton Tchekov et à la constellation des solitudes des êtres humains.

Il évoque la morosité ambiante dans « Oncle Vania » et le fragile équilibre des relations entre les protagonistes. La décision, par le patriarche, mélancolique de sa vie passée, de vendre potentiellement le domaine familial, tenu alors par Sonia et son oncle Vania, risque de briser les noeuds des relations humaines entre les personnages mis en scène.
Dans l'autre pièce « Les 3 soeurs », la fragile union fraternelle entre les 3 soeurs et leur frère, en désaccord sur le mariage et la gestion de la maison familiale (là encore) pèse sur leur quotidien. Entre mariage raté, ennui de la vie quotidienne, désespoirs amoureux (qui peuvent aller jusqu'au conflit meurtrier), « les 3 soeurs » traite aussi de ce mal de vivre.

Dans une critique de théâtre de la pièce « Vania d'après Oncle Vania » (sur www.aubalcon.fr) j'ai trouvé cette référence à une lettre de Gorki à Tchekhov que j'ai trouvée très juste et qui peut s'appliquer aux 2 oeuvres évoquées dans cette critique : « Je me suis mis à trembler devant votre talent, et à trembler de peur pour les gens, pour notre vie, misérable, incolore. Quel drôle de coup – et comme il est précis – vous avez frappé là ».

De là à dire que ces pièces restent d'actualité, il y a un pas certain ; mais des metteurs en scène contemporains ont su adapter l'oeuvre de Tchekhov pour qu'elle reste vivante (comme Simon Stone avec « Les Trois soeurs d'après Tchekhov », 2017).
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Tchékhov reste pour moi, encore cette fois, plutôt une déception. Rien de très enlevé. Rien de fou. Rien qui me fasse tressaillir. Je suis resté et reste et suis à quelque pas de/à côté.
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Citations et extraits (24) Voir plus Ajouter une citation
Ah ! Où est-il, où est-il parti, tout mon passé, quand j'étais jeune, gai, intelligent, quand mes rêves et mes pensées touchaient à tout ce qui est beau et élevé, quand mon présent et mon avenir étaient éclairés d'espoir ? Pourquoi, à peine commence-t-on à vivre, est-on déjà ennuyeux, terne, inintéressant, paresseux, indifférent, bon à rien et malheureux, pourquoi... Cette ville existe depuis deux cents ans, il y a cent mille habitants, et pas un seul qui ne soit pareil aux autres, pas un enthousiaste, ni dans le passé, ni dans le présent, pas un savant, pas un artiste, personne qui se distingue un tant soit peu, un homme qui susciterait l'envie ou le désir passionné de l'imiter... Chacun ne fait que manger, boire, dormir et, pour ne pas s'abrutir d'ennui, ils agrémentent leur vie de ragots dégoûtants, de vodka, de cartes, de chicane et les femmes trompent leurs maris, et les maris font hypocritement semblant de ne rien voir, de ne rien entendre, et cette influence répugnante et irrésistible pèse sur les enfants, étouffe en eux l'étincelle divine et ils deviennent, à leur tour, des cadavres semblables les uns aux autres et aussi pitoyables que leurs pères et mères...
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Je crois qu'il n'existe pas et ne peut exister une ville assez grise et morne pour qu'un homme intelligent et cultivé n'y soit nécessaire. Admettons que parmi les cent mille habitants de cette ville, arriérée et grossière, bien sûr, il n'y ait que trois personnes comme vous. Il est évident que vous n'aurez jamais raison de cette masse obscure qui vous entoure. Tout au long de votre vie, vous serez obligés de céder petit à petit, vous allez vous perdre dans cette immense foule, la vie vous accablera, et pourtant vous ne disparaîtrez pas, vous ne resterez pas sans influence. Après vous, on en trouvera peut-être six de votre espèce, puis douze, et ainsi de suite, jusqu'au jour, où, à la fin, la majorité vous ressemblera.
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TOUZENBACH : Dans un million d'années la vie restera telle qu'elle a été. La vie ne change pas, elle est constante, suivant ses propres lois, desquelles nous ne pouvons pas nous mêler ou, du moins, que vous ne connaîtrez jamais. Les oiseaux migrateurs, les grues par exemple, volent, volent, et que les pensées qui les pensées qui les traversent soient élevées ou vulgaires, elles voleront toujours, sans jamais savoir pourquoi ni vers où. Elles volent et elles voleront, quels que soient les philosophes qui se seraient nichés parmi elles : qu'ils fassent de la philosophie à leur aise, pourvu qu'elles volent...
MACHA : Mais quel est le sens de tout ça ?
TOUZENBACH : Le sens... Voyez, la neige tombe. Quel sens cela a-t-il ?
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Je me suis assis... J'ai fermé les yeux - comme ça - et je pense : Ceux qui vivront cent, deux cents ans après nous — et pour qui nous déblayons maintenant le chemin — se souviendront-ils seulement de nous ?

(Oncle Vania)
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IRINA : Nous nous rencontrerons un jour.
FÉDOTIK : Dans dix ou quinze ans ? Alors, nous aurons même de la peine à nous reconnaître, on se dira bonjour froidement... (Il prend une photo.) Ne bougez pas... Une dernière encore.
(...)
TOUZENBACH : Si Dieu le veut, on se reverra. Mais écrivez-nous. Sans faute !
RODÉ : Adieu, les arbres ! (Il crie :) Ho-ho ! (Un temps.) Adieu, l'écho !
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Videos de Anton Tchekhov (48) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Anton Tchekhov
Benoît Jacquot avait réuni Isabelle Huppert et Fabrice Luchini pour un long métrage de fiction, Pas de scandale, en 1998. le cinéaste les a retrouvés au Festival d'Avignon, en juillet 2021, mais séparément cette fois, pour les besoins de son nouveau film, Par coeurs. Un documentaire passionnant sur le travail d'une comédienne et d'un comédien tous deux hors normes, suivis la veille et le jour de la première représentation de leur spectacle respectif : La Cerisaie, de Tchekhov, monté par Tiago Rodrigues dans la vaste cour d'honneur du palais des Papes, pour elle ; un seul-en-scène autour de Nietzsche dans le cadre plus intimiste de l'Hôtel Calvet, pour lui . Avec un scoop : Isabelle Huppert, la perfection faite actrice, est capable de « bugs » comme tout le monde - à savoir, buter inexorablement sur une longue réplique de sa pièce il est vrai assez complexe à mémoriser !
Par coeurs sortira en salles le 28 décembre 2022. En attendant, découvrez sa bande-annonce en exclusivité sur Telerama.fr. le film sera par ailleurs présenté en avant-première à Paris au cinéma L'Arlequin lors d'une séance spéciale le lundi 12 décembre à 20h15. La projection sera suivie d'une rencontre avec Isabelle Huppert, Fabrice Luchini et Benoît Jacquot animée par Fabienne Pascaud, directrice de la rédaction de Télérama - les places sont en vente ici : http://dulaccinemas.com/cinema/2625/l-arlequin/article/138713/avant-premiere-par-coeurs-en-presence-de-benoit-jacquot-isabelle-huppert-et-fabrice-luchini
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Le clafoutis de Tchekhov

Je m'appelle .............?..........." je suis un jeune homme de dix-sept ans, laid, maladif et timide", je passe mes étés dans la "maison de campagne des Choumikhine", et je m'y ennuie.

Nikita
Volôdia
Fiodor
Boris
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