Cui cuit, il me chaut que le chant sonne. Crisse, Croasse à vos amarres, l’encre est jetée à vos plumiers. La rigueur étourdie et le palabre jacasse, je chausse Pierre pour botter Charles, sûr des galets lui damer le pion, le remettre en selle.
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Pour faire un beau sonnet...
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Allez chez votre cordonnier. Tanner le cuir, souffler l’alêne, à cent à l’heure sur cent sonnets, soufre de guerre et mise à pied. De l’aller vers à l’allant droit, la tête en l’air la tête en bas, chausse-trappe, anicroche et acrostiche, faut s’accrocher.
Rythmer le pied, peser le vers, siffler le trait, lever un geai, puis s’envoler. Faut libérer les sansonnets. Même si ...! Même si ...! Charlatan guère qu’on nous le dise, comment la pâte à Pierre crochète l’appât à Charles, je vous entonne du beau sonnet, le voilà le voici, le sansonnet de Pierre Thiry :
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Sonnet 95.
Croche-patte à Charles Soullier
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Pour faire un beau sonnet suffit-il de lier
Quatorze vers selon les conseils de Soullier ?
Charles Soullier est plus qu’un simple cordonnier,
Il est même exigeant sur le rythme des pieds,
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Sur l’harmonie des rimes, la couleur des vers.
A suivre ses préceptes, un peu trop sévères,
On finit par écrire un poème à l’envers,
Ou l’alexandrin se perd en multiples revers,
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Ceux d’un porteur de stylo, greffier sans style
Victime de la règle et de sa forme hostile,
Versifiant au carré muni de son équerre.
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Comment jouer le vagabond des cent sonnets,
Transcrivant l’errance du vol des sansonnets
Et l’étrange harmonie de leur hasard précaire ?
Pierre Thiry est un libérateur des mots. Toutes plumes en sa mare tracent un sillon, dans l’onde tremblotante du renouveau, pas de vilains petits canards que des grands cous majestueux.
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Ce qui provoque la joie de Pierre Thiry - et la nôtre (Acrostiche)
P eut-être avais-tu bu?
-I vresse de poète
E st déjà une fête-
R ien qu'un peu- mais du cru!
R enversé, tu as vu
E nvolées, les mouettes
T rès haut, sur la dunette:
H ors champ, l'eusses-tu cru?
I re, sourire ou rire?
R ien , sur l'eau, ne fait cygne...
Yeux ouverts, tu trépignes...
R iants au ciel riant
I ls viennent, guillerets,
T es joyeux sansonnets!
Le livre de Pierre Thiry est si joyeusement iconoclaste, si inventif et stimulant, que je ne pouvais que tenter de lui rendre, modestement, à ma façon pesante - un vol de ramier- mais en acrostiche, comme lui pour Flaubert et son pont,- un peu de la joie d'écrire qu'il partage, lui, si généreusement et éloquemment!
Voilà des oiseaux de passage qui gagnent à être longuement fréquentés, des cygnes peu mallarméens qui ne se drapent pas dans leur dignité offensée, mais se regardent à l'envers dans le miroir aux alouettes et se trouvent drôles, comme chez Laforgue ou Queneau, ou juste bizarres- le beau est toujours bizarre, n'est-ce pas , Charles ?,Et d'ailleurs ne dit-on pas "c'est un drôle d'oiseau?" quand on a rencontré une personnalité attachante et hors du commun...
Bref en deux mots, comme en cent (sonnets) je suis tombée sous le charme de ces oiseaux migrateurs et volages, pleins de références littéraires- parfois expliquées en notes pour enrichir notre Gay Sçavoir, parfois en clin d'oeil...mais jamais appuyé, le clin d'oeil, juste un petit cygne euh signe , en passant!
Une jolie préface en forme ...de sonnet, vous l'aurez deviné!- des jeux multiples -acrostiches, "rondeaux" de sonnets, sonnets en trinôme argumentatif -thèse, antithèse, saint Aise(!!!) - pastiches -La Fontaine, Verlaine, Baudelaire et j'en passe- avec virtuosité mais sans jamais se prendre au sérieux, Pierre Thiry nous entraîne dans son vol de passereaux , vole, vole, pigeon vole, et nous atterrissons soudain, tout étourdis, dans une postface érudite -tout, tout, tout, sur le sonnet et son histoire- mais toujours aussi amicale et partageuse.
Pierre Thiry nous y livre, avec le plus grand sérieux, une recette de roman.. A nous de jouer!
Ce vol d'oiseaux-là donne des ailes!
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J'étais au départ sceptique sur ce recueil de sonnets car je n'ai jamais été très attirée par la poésie. L'auteur ayant réussi à me convaincre, j'ai tenté l'expérience.
Dés le premier poème, j'ai su que cette lecture me ferait passer de très bons moments : bien loin des poésies classiques que l'on a pu étudier en cours, l'écriture de P. Thiry est accessible à tous et surtout, le contenu de chaque histoire est totalement compréhensible.
Jai beaucoup aimé lorsque l'auteur écrit plusieurs textes autour d'un même groupe de mots : avec les mêmes termes, on peut créer de nombreuses oeuvres très différentes les unes des autres.
Je tiens à souligner que ce n'est pas un livre que l'on dévore, je pense qu'il faut prendre le temps de savourer chaque page afin d'assimiler l'ensemble du message de l'auteur. Je n'ai pas l'habitude de lire page par page, en le laissant respirer entre deux mais finalement c'est très reposant.
Je ne peux que le conseiller à tous, amateurs comme novices, pour faire une pause dans son quotidien.
Le rat Tur et Arthur Lerat
Malade, l'alité rat Tur
En souillant ce sonnet d'ordures
Prétendit qu'y brillait l'or dur.
Départ
Un cygne et cent sonnets circulaient l'air hagard
Ils demandaient aux passants où étaient la gare
Ils parlaient par signes, vers et mots barbares
Un cygne est silencieux, cent sonnet sont bavards
Fleuve ét mots passants
Allô guide des mots lassants!
Le fleuve mugissant sonnait
L'homme dénommé Maupassant
Oh! Guy, où sont donc tes sonnets
....
"Tu me fais de l'ombre, dégage!"
(Le cygne se plaint du nuage...)
"T'as qu'à bouger avec tes palmes"
Répond le nuage très calme.
Le cygne digne fait trois pas.
Le nuage n'a pas de palmes
Rien ne souffle et le vent est calme,
Pourtant, l'ombre aussi fait trois pas...
Présentation de Sois danse au vent par Pierre Thiry