Alors c'est fou car pour moi ce roman est la pépite de l'année.
L'écriture est fine et vive et à l'intersection de différents types de livres, de l étude ethnographique au carnet de voyage ou au roman familial.
J'y ai appris des choses sur la Nouvelle Calédonie et le Vietnam, j'ai vibré et même pleuré, preuve que les émotions et notamment ce qui touchent à la transmission paternelle sont universelles.
J'aimerais bcp avoir d'autres avis de lecteurs de ce livre pour savoir si je suis un cas isolé ou pas.
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Calédonie rime trop facilement avec colonie.
C'est en 1853 que la France grillait l'Empire britannique dans l'Océan Pacifique.(...)
La terre était grande, les terrains presque vierges : le plan parfait pour bâtir du bagne à la pelle. Débarquèrent des métropolitains déplacés, des communard condamnés, des Africains déportés. La nature propice,accompagna les mouvements de population pénitentiaires,l'exploitation du nickel attirant rapidement des voisins insoupçonnés : Polynésiens, Japonais, Javanais et Vietnamiens s'établirent sur le Caillou pour retourner le rouge de son sol.(p.18)
L'administration lui proposa de recommencer sa vie ici et lui légua des terres que personne ne voulait vraiment, pas même les Kanaks à qui on les avait prises.A l'époque, un droit de propriété était une idée impensable dans les tribus. La terre n'a jamais appartenu à personne : elle n'est que le prolongement de la persévérance, la conséquence du lien avec les anciens.Il faut juste savoir l'habiter pour conserver un peu de sa générosité. Vouloir la posséder était absurde.(p.37)
Patrick a le pas décidé de ceux qui savent comment ils ont atterri là où ils sont.Son arrière-grand-père était un transporté du Jura: condamné aux travaux forcés pendant cinq ans pour meurtre,puis marié à une fille du contingent d'orphelines envoyé par la métropole. Toufik s'inquiète à voix haute: c'était un mariage d'amour,quand même ?Patrick ne sait pas.Qui pourrait en savoir quelque chose ? A-t-on vraiment le choix quand on n'a pas le choix ? (p.46)
A Saint-Denis,personne n'a jamais planté un arbre.Les conséquences du geste nous dépassent. Le kauri est un seigneur,capable de traverser une dizaine de siècles. Il monte droit vers le ciel,irrigué par une gomme épaisse qui prend son temps.Il est là pour tenir.(p.49)
Fabien Truong présente son dernier roman « Routines » paru le 6 mars 2024.
Un roman percutant, au suspense haletant, fresque sociale qui interroge les faux semblants de notre temps.