Dans son enfance, les villageois oubliaient vite la couleur de la peau des gens pour y voir les gens, leur essence, leur existence, leur être. le petit est Martiniquais de par sa famille maternelle, s'étant installée en Picardie depuis des générations, et faisant partie des notables. La couverture du livre « Papiers d'identité » montre une ingénue incroyablement belle, avec des rouleaux de cheveux laissant deviner un gros noeud de velours noir : sa grand mère.
Son père est corse, ce qui explique les deux noms corse qu'il s'est choisi, en souvenir de ses vacances à Vico et à Calcatoggio , villages pourtant très différents de ses deux familles :
Jean Pierre Versini-Campinchi .
Son grand père, qui a grandi en Picardie, devenu grand avocat part à Dakar, se remarie avec une Chinoise de la Martinique, qui élève le petit lorsque sa mère part en Argentine avec son père dont l'enfant n'a pas encore fait la connaissance ( j'avoue, on peut être perdus): Mariages recomposés et colorés, de toutes les couleurs et dans l'amour pour ce petit.
Qui devient lui aussi grand avocat.
J'avoue que je n'ai pas lu la deuxième partie dédiée aux plaidoiries, dont je ne connais rien, soit la moitié du livre. Ce sont ses procès perdus, nous dit on dans la préface : Versini ne fait jamais rien comme tout le monde.
Revenons à l'enfance de
Jean Pierre qui se demande : qu'est ce qu'être corse ? le fils d'une Vietnamienne et d'un Corse est complètement corse. Etre Corse, c'est voter, y prendre sa retraite, y être né, y être enterré ?
Réponse : Ce n'est ni tout à fait le sang, ni la terre, ni le patronyme qui fait le Corse, mais l'Idée, c'est à dire la conviction de l'être. Est Corse comme est français d'abord celui qui se considère comme tel et qui comme tel a fait siens les mythes qui en sont le ciment.
Le contraire du système raciste américain « the one drop rule, »une seule goutte de sang noir et vous êtes catalogué, s'applique en Corse. Une seule goutte de sang corse suffit pour être considéré comme corse.
le racisme, cependant, est présent dans sa famille du côté martiniquais : l'interdiction pour une jeune fille d'épouser un centralien , ingénieur du génie civil, et plus noir que
Lilian Thuram … « le poids de l'aliénation de l'esclavage » !.
Il a plusieurs mères, ce petit, d'où sûrement son ouverture au monde : la mère biologique a dû partir avec le père, 3 mères la remplacent avec bonheur : Vivi, la seconde épouse du grand père, Agnès et Louisette, puis ce sera Marcelle, sa mère biologique, intellectuelle, poète, conteuse.
Lorsqu'elle raconte ses histoires à son fils, tout le monde dans le train l'écoute : « je suis absolument certain que jamais aucun de ces voyageurs inconnus qui tous souriaient, ravis, quand nous arrivions en gare, ne s'est rendu compte que ma mère était noire. »
Voilà, on a besoin de lire ça, c'est essentiel, pour sortir des accusations de racisme, qui, même s'il existe, surtout s'il existe, et il existe, dévalue encore plus celui qui s'en dit atteint et lui donne en quelque sorte une existence qu'il ne doit pas avoir.