Ce superbe titre résume bien la vie de cette femme, une adulte de 30 ans qui a gardé les pieds dans son enfance passée en Afrique, et qui se laisse submerger par une nostalgie issue de souvenirs idéalisés qui l'empêche d'avancer, prisonnière d'un "va et vient incessant entre la France et Djibouti, entre la vie d'adulte et l'enfance." (source)
J'ai déserté le pays de l'enfance est le récit d'une jeune avocate au barreau de Paris, spécialisée dans le droit du travail. À elle de défendre aux Prud'hommes les entreprises qui licencient à tort.
Une "mission" d'adulte à mille lieux de ses idéaux et rêves d'enfant en Afrique. Ce pays de l'enfance qu'elle a déserté, au propre comme au figuré.
Précisons de suite que ce roman ne se réclame pas autobiographique.
Sigolène Vinson emploie le terme d'"autofiction". La différence, qui doit tenir à quelques libertés romanesques, est subtile, puisqu'elle dit "je" et que ce "je" porte les mêmes initiales qu'elle.
Sigolène a grandi à Djibouti, un petit pays de la corne de l'Afrique. À l'âge de 12 ans, en 1987, elle est rentrée en France avec sa famille, quittant un pays de liberté, aux couleurs et senteurs puissantes.
Bercée d'idéologies socialistes (un grand-père collaborateur de Mendès-France, un père également proche du PS, qui a été beaucoup déçu), elle rêvait de défendre la veuve, l'orphelin, et l'opprimé, de changer le monde.
Alors faute plaider du mauvais côté de la barrière, pour compenser, elle se fait aussi avocat gratuit pour les petits.
Un jour, alors qu'elle se rend à une audience au Prud'hommes qu'elle redoute, elle est prise d'une très forte crise d'angoisse, une de celles, mais en plus fortes, dont elle nous dit avoir tous les jours, quand elle doit prendre le métro et qu'elle a l'impression de mourir un petit peu à chaque fois.
Elle croit vraiment mourir et devant ses incohérences, elle est dirigée vers un CAP, un centre d'accueil permanent, celui du 10ème arrondissement. Ce n'est ni plus ni moins qu'un hôpital psychiatrique.
Sa mère n'est qu'à moitié étonnée, elle qui passe son temps à lui répéter en lettres majuscules (dans le texte) qu'elle travaille trop.
Pour son père, c'est la honte, la désillusion, l'échec flagrant. Sa fille ne rêve plus.
"Tu ne rêves plus. Si tu donnais encore une chance à l'imaginaire, tu ne serais pas là. Tu me déçois." (p. 52)
Elle va passer 4 jours dans ce centre, en compagnie d'autres patients, atteints de pathologie vraisemblablement plus "sérieuses", qui ne la considèrent d'ailleurs pas comme une vraie malade puisqu'on ne lui a prescrit aucun traitement, si ce n'est de manger et de dormir. 4 jours d'échanges avec eux, et avec un psy, quand même, dont une discussion avec un certain Damien, dont le bon sens et le réalisme contribueront à lui ouvrir les yeux et à, enfin, laisser mourir l'enfant qu'elle a été.
critique complète sur mon blog, merci
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