"Les
pickpockets les moins inoccupés sont précisément ceux qui ont toujours les mains dans les poches".
(A. Allais)
Certes... mais croyez-vous que c'est facile de fourrer impunément la main dans une poche qui n'est pas la vôtre ?
Imaginez que vous êtes attablé sur la terrasse d'un café parisien en compagnie d'un ami. Vous parlez de tout et de rien, en regardant les gens passer. Votre ami est un grand observateur et l'analyste de l'âme humaine devant l'Eternel, et il vous étonne souvent par la justesse de ses propos. Vous éprouvez parfois une confusion de sentiments ? Il trouve toujours les mots qu'il faut pour expliquer ce que vous ressentez. Parfois ça fait presque peur...
Mais votre ami Stefan a l'habitude de réfléchir sur les états d'âme, car dans ses heures perdues, il est aussi un peu écrivain.
Et aujourd'hui, Stefan est de si bonne humeur que vous avez du mal à le reconnaître. Peut-être parce que l'orage est fini, et Paris devient resplendissant dans le soleil du printemps.
Il se penche vers vous, la moustache frétillante, et partage sotto voce ses observations sur un gus étrange au milieu de la foule. Avec tant d'ironie débonnaire et de pince-sans-rire que vous manquez vous étrangler avec votre café.
Il avance toutes sortes de possibilités quant à l'occupation de cet énergumène, mais après une analyse jouissive il arrive à la conclusion que le gars ne doit être rien d'autre qu'un
pickpocket.
Et vos cafés respectifs se mettent à refroidir, tellement vous vous concentrez pour voir s'il va enfin réussir à chaparder quelque chose et comment il va s'y prendre.
Vous devez rentrer, mais Stefan est tellement intrigué qu'il décide de suivre le bonhomme pour en savoir en peu plus. Ce qu'il vous racontera le lendemain sera troublant...
Vous retrouvez votre ami Stefan tel qu'il est d'habitude : fin analyste avec une pointe de tristesse envers les aléas du destin, qui font parfois de nous ce que nous sommes.
Un Zweig un peu atypique, donc, dans cette histoire à la fois drôle et tragique, comme la vie elle-même.
Et pour votre deuxième euro dans cette édition "à deux balles", vous avez une deuxième histoire : "La vieille dette", que je vous laisse découvrir.
Sachez seulement qu'une leçon de vie que vous avez peut-être donnée autrefois à quelqu'un peut se répercuter dans le futur d'une façon tout à fait providentielle.