Pour célébrer dignement le 3ème anniversaire de mon adhésion à Babelio, ce 17 mars, j'ai pensé à l'auteur le plus populaire de l'univers juste avant la dernière guerre mondiale et au moment de son suicide en 1942 au Brésil et qui dans de nombreux pays, comme la France notamment, jouit, 78 ans plus tard, encore d'un immense succès :
Stefan Zweig !
Un des rares écrivains de qui j'ai lu au fil des années tout ce qui était offert comme oeuvre dans les bibliothèques, les librairies, les foires aux livres, les antiquaires et le Net.
Sur notre site, j'ai présenté 2 critiques de ses livres : le 17-07-2017 "
Le monde d'hier : Souvenirs d'un Européen - relu sur la base de l'excellent ouvrage de
Laurent Seksik - et le 12-06-2018 "
Balzac : le roman de sa vie". Ainsi qu'un bref billet du livre de
Laurent Seksik "Les derniers jours de
Stefan Zweig", le 28-04-2017. Comme ils ont été grands amis, le nom du géant autrichien est mentionné dans mes critiques des livres de son compatriote, mort 3 ans avant lui :
Joseph Roth.
Et les 2 Juifs autrichiens sont les vedettes de l'ouvrage de
Volker Weidermann "Ostende 1936 - un été avec
Stefan Zweig" (voir ma critique du 21-04-2017).
Si je reviens à nouveau sur cet auteur fabuleux, c'est la "faute" au Français Jacques le Rider et l'Autrichien
Klemens Renoldner qui viennent de sortir un ouvrage monumental "
Stefan Zweig : L'esprit européen en exil - Essais, discours, entretiens 1933-1942". Un ouvrage essentiel pour tout fan, comme moi, de ce maître, puisqu'il contient plein de textes importants, dont certains pour la toute première fois disponibles en langue française. Je félicite de tout coeur les 2 experts pour l'ampleur, la qualité et la signification de leur travail considérable : 415 pages, dont une mémorable introduction par le professeur le Rider, directeur d'études à l'École pratique des hautes études et qui est également l'auteur de nombreux ouvrages sur les écrivains viennois tels
Hugo von Hofmannsthal,
Arthur Schnitzler,
Karl Kraus etc. Bref, ce qu'on appelle une autorité en la matière. Son homologue, le professeur Renoldner, est absolument du même haut niveau et a dirigé le Centre
Stefan Zweig de Salzbourg et est auteur d'une longue liste de livres et contributions sur son héros littéraire.
Très habilement et avec, bien entendu, une connaissance approfondie de tout ce que
Stefan Zweig ait pu dire et écrire sur le fait que la chose politique n'était pas de son ressort, il va de soi qu'avec l'avènement du charlatan catastrophique en Allemagne en 1933, la politique a aussi lourdement pesé sur son existence.
Le fait qu'il ne se soit pas prononcé officiellement et radicalement contre Hitler et le nazisme, lui a été parfois reproché. de sa correspondance avec entre autres
Romain Rolland (1866-1944), Nobel en 1915, et surtout celle avec
Joseph Roth, il apparaît clairement que ces 2 écrivains étaient en désaccord avec lui. de même que l'influente
Hannah Arendt qui a noté dans son "Les Juifs et le monde d'hier : "Au lieu de lutter, il se taisait" (page 78). Jugement péremptoire comme l'explique le duo d'auteurs.
C'est restée une question délicate et je donne mon opinion comme simple lecteur. L'attitude de Zweig est, à mon humble avis, liée à sa personnalité de grand seigneur (pas dans le sens péjoratif du terme, évidemment) et humaniste et à son choix de sauvegarder une autorité morale en se distanciant de toute polémique. Il est incontestable que, vu son énorme popularité d'auteur et de gentleman, sa voix aurait eu un large écho, mais personnellement je ne crois pas qu'elle aurait influencé le cours des événements. On n'arrête pas un fou furieux de la sorte avec des mots.
Le suicide de Zweig prouve que l'homme est allé jusqu'à l'ultime conséquence de son choix.
Fait étrange,
Stefan Zweig a été le dernier auteur juif connu à être formellement interdit d'écrire et de publier, en mars 1936, comme si Adolf craignait les remarques de son compatriote. Pour
Joseph Roth et les autres auteurs juifs
l'interdiction les a frappé peu après l'horrible spectacle de l'autodafé devant l'opéra de Berlin du 10 mai 1933.
À tous les grands amateurs de
Stefan Zweig je recommande avec conviction cet ouvrage des professeurs le Rider et Renolder comme instrument de référence indispensable ét sur la vie riche et complexe de l'artiste lui-même ét sur la vaste et autant riche oeuvre. C'est à ce titre qu'il occupe désormais une place de choix dans ma bibliothèque, juste à la hauteur des yeux.