Paru en 2016, «
La cause du peuple » a défrayé les chroniques médiatiques du moment.
Patrick Buisson y dresse un bilan du quinquennat de
Nicolas Sarkozy depuis son poste de conseiller du président. Il répond à la polémique née après la révélation des enregistrements « clandestins » que l'auteur a réalisés à l'Elysée. le livre dépasse (et de loin) les commentaires médiatiques et les petites phrases assassines extraites de l'ouvrage.
Patrick Buisson présente un tableau, sans complaisance de la maison France. Il analyse les causes des faiblesses françaises et resitue les difficultés dans le temps. Son érudition et son écriture, travaillée et très littéraire, oeuvrent à aiguiser l'intérêt du lecteur. le livre se lit à plusieurs niveaux. La démonstration de
Patrick Buisson est organisée en plusieurs strates qui permettent les reprises et les approfondissements de l'argumentation.
L'auteur est monarchiste légitimiste, catholique (opposé à
Vatican II), connu pour ses positions antilibérales, antimondialistes, et antimodernistes.
Patrick Buisson dresse des portraits sans concession du président, des ministres… Il rapporte des propos, parfois sidérants, propres à renforcer le « doute » sur la qualité du personnel politique et ses capacités à diriger, à décider (à penser ?). Mais le livre n'est pas qu'une réponse à la polémique née de la défaite aux élections présidentielles, il dépasse le constat et la peinture d'un monde politique qui ne connaît pas le « peuple ». le livre est brillant, les références littéraires sont nombreuses de
Maurice Barrés,
Charles Maurras, Carl Schmitt… à
Jean Claude Michéa,
Marcel Gauchet, Gramsci… L'auteur est historien et sa démonstration puise dans un cadre historique élargi. Ce qui lui permet de dénoncer l'abandon des frontières, de l'identité nationale et des traditions. L'hostilité actuelle envers la mondialisation, le rejet du libéralisme, les réactions des conservateurs au mariage pour tous… sont, pour
Patrick Buisson, autant de signes favorables à un retour aux fondamentaux qui ont construit la France. … le déclassement du milieu rural et des régions périphérique, les difficultés européennes à contrôler les flux migratoires sont autant de sujets sensibles qui peuvent trouver écho dans l'actualité. Il voit juste quand il analyse le dévoiement de la démocratie sous la Vème République qui envoie à l'Assemblée Nationale une majorité écrasante qui repose sur une minorité d'électeurs votants (et très réduite quant au nombre d'inscrits).
Car là est la grande force du livre, si le lecteur est emporté par l'argumentation, le recul et la critique sont indispensables. le raisonnement fonctionne comme une machine bien huilée, une démarche qui ramène le lecteur à un passé prérévolutionnaire (celui de 1789). Mais la République est-elle hermétique à la démocratie ? Seul le monarque peut-il diriger pour le bien de tous en arbitrant du haut de son trône ?
Quelques questions demeurent cependant. L'auteur s'explique (assez rapidement) sur les enregistrements « clandestins ». Il ne s'étend pas sur les raisons et les circonstances qui ont amené
Nicolas Sarkozy à le nommer conseiller, ni sur les motivations qui l'ont poussé à demeurer conseiller à l'Elysée jusqu'à la défaite de 2012.
Au final, «
la cause du peuple » est un livre qui a du souffle. Ses arguments répondent à des thèmes d'actualité et une habile (et fine) présentation amène à des positions politiques qui restent controversées (pour le moins) aujourd'hui.
Mais il doit être bien difficile de rester optimiste dans une société et un pays si peu conformes aux principes et idéal développés dans le livre.